Assise dans le sable meuble de la plage, ses pieds nues se faisaient de temps à autres, au grès de la marée, léchés par l'eau glaciale et limpide de la mer Van Hallen. Le soleil venait à peine de se lever, et sa tribu dormait encore dans les dunes. Parfois, quand l'eau s’avançait assez, la jeune femme voyait pendant quelques secondes son reflet dans l'eau... Elle ne pouvait s'empêcher de se faire la réflexion... Elle avait grandit...
Le petit corps chétif d'autrefois s'était quelque peu métamorphosé, laissant place à quelques courbes féminines, sa coupe à la garçonne s'était changée en une longue chevelure rousse, flamboyante comme l'aube qui apparaît derrière ces montagnes qu'elle connaissait si bien. Et pourtant, certaines choses n'avaient pas changé chez elle, sa peau avait toujours la même clarté opaline qu'elle appréciait si peu, et son visage, semblait toujours être celui d'une enfant: d'une forme ovale, avec un petit nez parsemée de tâche de son, ses petites fossettes qui s'accentuaient lorsqu'elle riait aux éclats d'une voix cristalline, ses yeux d'un gris orageux, et ses sourcils fins, qui, de geste subtil, trahissaient la moindre de ses émotions.
Le seul aspect qu'elle appréciait était ses lèvres, qui avait prit quelques teintes de rouges rubis, et qu'elle mordit à la pensée, d'avoir si peu grandit.
De la main droite, à l'aide de ses doigts fins et agiles dont elle était si fière, elle traçait pensivement, d'obscures symboles dans le sable, et recommençait, à chaque fois que les vagues venaient effacer les obscures glyphes.
Un peu soucieuse de son apparence, elle fit une toilette de chat de matin, et avait enfilé sa tenue habituelle, un pajama noir, et une tunique rouge sombre, que le temps avait commençait à ternir, mais qui permettait de couvrir discrètement les quelques cicatrices qu'elle s'était faite au cours de sa jeune vie. Ce n'était pas ce qu'il y avait de plus raffiné, mais c'était idéal pour la course, et Celestia haïssait tout se qui ressemblait de prêt ou de loin à une robe.
Une fois ses pensées éclaircies, elle étira longuement ses muscles fins, courbaturés par le peu de confort que lui avait offert la nuit dernière, et, d'un saut de cabris, elle enfila ses bottes noir usées, qu'elle chérissait tant.
Alors qu'elle admirait une dernière fois cette étendue d'eau, la voix de sa préceptrice la fit sursauter:
-Tu es prête?
Après s'être remit de ses émotions, la fille acquiesça d'un imperceptible signe de tête. Oui, oui elle était prête.
-Izilis? Qu'est-ce que tu fais? Nous devons avancer! Clama d'un air mécontent le chef de la meute, Zör n'aimais pas quand la jeune thérianthrope s'éloignait de sa meute. La jeune renarde, d'une allure anthropomorphique, flairait le sol aride de sa truffe, troublée par une odeur étrange. Elle finit par dire doucement, presque pour elle-même:
-Je flaire quelque chose...
Elle s'éloigna de quelques mètres de la meute, pour écarter un bosquet sec d'un coup de patte, et rester là, quelques secondes, abasourdie... son chef finit par s'impatienter:
-Je te préviens, si c'est encore un fennec mort ou un...
-C'est un bébé... Humain je pense...
La tribu s'approcha très vite, alors que la jeune femme sortait d'un demi-tonneau, un nouveau-né inerte...
-Il est mort? Demanda un des plus jeune du groupe, curieux.
Izilis examina l'enfant avant de dire:
-Non, mais elle est très faible, j'entend à peine sa respiration, et le soleil ne l'a pas beaucoup épargné, donnez moi l'outre.
Alors qu'elle s'affairait à réhydrater la pauvre petite chose qui gigotait faiblement dans ses bras, Zor, levant les yeux aux ciel, s'approcha:
-On la déposera au premier village qui vient, remettez vous en route.
Quelques jours plus tard, le troupe marchait toujours, le désert avait laissé sa place aux montagnes rocheuse, la chasse fut fructueuse, et l'on songeait à poser le campement au premier lieu propice venu. Une des renardes du groupe s'approcha d'Izilis:
-Tu as remis l'enfant? J'ai vue que tu commençais à t'y attacher, tu veux en parler?
Pas de réponses, juste les bruit incessant de la marche de la meute.
-Je suis sûre qu'elle sera bien là bas, ce village avait l'air d'être fiable! Continua t-elle, se voulant rassurante.
Alors que la tribu s'installait sous un pan de la montagne, assez creux pour les abriter du vent, un cri aiguë retentit, suivie de pleurs, d'un enfant s’époumonant dans un caprice alimentaire.
Alors que chacun se retournait, Izilis se figea, espérant vainement qu'être immobile la rendrait invisible aux yeux de tous... Zör s'approcha, d'une démarche furieuse:
-Tu l'as gardé?!
Sortant l'enfant d'un air quelque peu honteux mais aussi déterminé, la renarde serra l'enfant contre elle:
-Je n'allait tout de même pas la remettre à ces ivrognes?!
Le mâle alpha souffla un bon coup, se frottant les yeux de lassitude:
-Je te préviens Izilis, je suis fatigué de tes caprices... Tu veux la garder? Très bien! Mais elle sera sous TA responsabilité, et tu la mordras, la nourrira, et l'éduquera?
Elle serra un peu plus l'enfant, qui pleurait toujours, contre son poitrail et dit:
-D'accord, mais pas maintenant! Elle ne survivrais pas à la transformation!
A 4 pattes, du haut de ses 6 ans, Celestia, grognait vainement, sur ses frères de tribus, bien décidée à en découdre. On empêchait rarement les jeunes thérianthropes à se battre, tant que cela restait amicales, cela forgeait leur comportement, et ça les apprenait à maîtriser leur transformations. Celestia n'avait ni leurs griffes, ni leur force, mais elle avait pour elle l'esquive, la ruse, et la rapidité! Lorsque Sthis se jeta sur elle, elle se baissa pour éviter de se le prendre plein fouet, avant de lui mordre l'oreille et une lutte acharnée s'engagea. Comme d'habitude, Celestia n'en sortit pas victorieuse, mais elle s'était bien défendue.
Izilis soigna les quelques éraflures superficielles avec un amour presque maternelle, avant d'ordonner à la jeune fille d'aller se coucher. Et alors que l'enfant se blottissait dans les fourrures d'ours pour laisser le sommeil l'envahir, Izilis sortit de la tente, Zör était là, il avait prit quelques rides, mais était toujours aussi viril et sûr de lui. Elle soupira:
-Tu viens encore me demander de la transformer...? Je veux qu'elle fasse ce choix lorsqu'elle sera en âge de prendre ce genre de décision toute seule.
Il ne dit rien, regardant la silhouette des montagnes qui se découpaient dans la nuit...
-Non, je voulais te parler de ses talents... Celestia est très douée pour voler les marchands de passage, j'ai vu qu'elle s'était fait un petit tas de babioles, tu lui as apprit...?
Izillis ne put s'empêcher d'afficher un petit sourire fier, le mâle reprit:
-Le peu de fois ou elle se fait prendre, il lui suffit de faire ses yeux rond et larmoyant pour que le marchand passe l'éponge...
-Oui, je pense qu'elle ira loin...
Celestia courrait comme une dératée en dévalant une dune, elle avait maintenant 14 ans et était en âge de chasser seule! Et justement, elle pourchassait un lapin du désert, mais l'animal commençait à gagner de la distance...
-Laisse-moi faire Celestia! Cria Sthis, la rattrapant très rapidement sous sa forme animal, Celestia n'en démordit pas:
-C'est ma proie Sthis! N'y touche pas!
-Désolé, tu es trop lente je ne t'entend pas!
Alors que le renard, maintenant adolescent, se jetait sur l'animal pour l'achever dans ses mâchoires, Celestia pesta:
-Ce lapin était à moi!
-Maintenant c'est le mien!
La jeune fille s'assit dans le sable d'un air boudeur, sa partie de chasse se retrouvait encore ruiné par ce crétin de première:
-Fait pas la tête, je suis sûr que tu saura te débrouiller seule bientôt!
Elle haussa les épaules, alors que son frère repartait fièrement.
Celestia, du haut de ses 16 ans, revint de la pêche, fière comme jamais! Elle n'avais pas l’instinct, mais elle avait la technique, avec quelques caillous pour créer un sentier sous-marin, et un peu de rapidité, elle avait réussit à pécher une demi-douzaine de truite, pareil pour ses collets, qu'elle renouvelait régulièrement, elle se sentait enfin utile à la tribu, et bizarrement, c'est à ce moment là que son besoin de découvrir le monde survint... Elle en avait assez de juste effleurer les civilisations, d'avoir à peine le temps de leur adresser la parole, avant que la tribu se remette en route...
Alors que sa mère grillait le poisson sur un feu de bois, Celestia, captivée par les flammes dansantes, finit par dire:
-Dit moi Iz... Tu n'as jamais eu... Envie de partir de la famille pour... Je sais pas... Explorer le monde...?
-Bien sur ma sauvageonne, c'est normale, cela vient à tout jeune renard lorsqu'il approche de l'âge adulte...
Bien que purement humaine, Celestia avait toujours été traitée comme un membre à part entière de la tribu, et de la race, part celle qui l'avait élevé. Bien sûr, ce n'était pas le cas pour tout le monde, Zör avait toujours du mal avec la jeune humaine.
-Tu sais, si tu veux voyager, au delà des terres de prédilections de notre tribus, je t'y encourage ma belle. Bien sûr, tu seras toujours le bienvenue chez toi...
La jeune fille, les yeux toujours rivée sur le feu, finit par murmurer:
-Pas maintenant... Mais un jour...
Tu es prête...? Demanda Izillis? Le vent soulevée doucement sa chevelure noisette. Après s'être remit de ses émotions, la fille acquiesça d'un imperceptible signe de tête. Oui, oui elle était prête.
Son sac sur les épaules, elle fit ses aux revoirs à ses frères, Sthis lui offrit une léchouille affectueuse sur la joue, elle dit au revoir à ceux qui l'avait éduqué, elle embrassa une dernière fois sa mère, puis vient Zör... Il la regardait pensivement... Il ne savait toujours pas quoi penser d'elle... Elle allait partir, mais sans crier gare, elle enlaça le mâle alpha, qui écarquilla les yeux de surprise, et qui posa maladroitement une main sur son épaule, et Celestia, partit, à la découverte du monde.