Ese plissa des paupières sous la lumière aveuglante d’un soleil matinal. Rares étaient les arbres sur la route, aussi devait-elle supporter les rayons sans espérer la moindre ombre salvatrice. Les choses auraient pu être plus supportables sous sa forme animale, mais là survenait le problème justement. Elle approchait une zone fréquentée –voire bondée à cette heure-ci- et un loup dans la foule risquait de causer un tantinet d’agitation. Aussi avançait-elle avec une mine bien peu réjouie, se trimballant fioles, bocaux et matériel de voyage dans sa besace.

La jeune femme revenait de Baldorheim où elle avait pu réunir un stock satisfaisant d’herbes. Elle pouvait ainsi espérer reprendre ses affaires d’herboriste mais auparavant, une visite familiale était de rigueur : donner de ses nouvelles s’imposait de plus en plus au fur que filait le temps. Elle ignorait où habitait sa famille, en fait : toutefois elle misait sur Ishtar où l’ambiance correspondait  aux préférences parentales. La chose n’était pas urgente. Elle mènerait son enquête d’ici quelques jours, le temps de s’installer pour deux semaines et qui sait, se rendre un peu utile.

Un bâillement lui échappa, tandis qu’elle marchait avec nonchalance.
Petit à petit, des sons lui parvinrent : bruyants, les marchands se disputaient la place comme des gamins, à qui passerait le premier les portes de la ville. Après, ce serait la ruée vers le port, avec évidemment un petit détour au marché. Les animaux ne se gênaient pas non plus pour se plaindre ou peut-être commenter les idioties de leur bourreau à coup de caquètement et de hennissements, et les cris des enfants ajoutaient à ce décor la touche finale : c’était un joyeux bordel.

Ese rejoignit le bout de la file. A vue d’œil, elle en aurait pour quatre heures d’attente –avec de la chance. Elle soupira. Puis tourna les talons. Tant pis ! Elle repasserait plus tard, quand le gros du troupeau sera rentré.
La lycanthrope prit donc un chemin annexe, la menant vers les étalages éphémères du marché improvisé. Il existait sur la route vers Ishtar maints petits marchés improvisés comme celui-ci : les marchands de tout genre espéraient alléger leurs biens pour une cargaison plus légère donc moins couteuse à transporter par voie maritime.

Son regard balayait les étalages d’un œil curieux, à l’affût de la bonne occasion. Elle s’arrêta soudainement. Pourquoi jouer les clientes quand elle pouvait mener ses affaires… ?
Un sourire sur les lèvres, la jeune femme choisit donc un coin ombragé où elle dressa sommairement son propre stand. Sur la table (trois caissons trouvés recouverts d’un pan de tissu propre), diverses herbes étaient laissées à vue dans des bocaux : thym, romarin, lavande, pissenlit, camomille, millepertuis… Ainsi qu’un nombre plus restreint de concoctions, faute de temps pour les faire, allant du baume cicatrisant à la tisane pour maux d’estomac.
Du stand se dégageait une bonne odeur florale, ne manquant d’attirer les premiers clients dans l’heure.

Ydyse se réveilla de bonne heure. Avant d'ouvrir les yeux, comme chaque matin, elle se répétait qui elle était, comment était elle arrivée ici, pourquoi et se posait milles questions d'où était les malfrats qui avaient tué son père. Bien sûr, la dernière question rester toujours en suspens.

Elle se leva, péniblement, mais un chahut lointain lui fit tendre l'oreille. Oh, ce n'est rien. fit-elle. En effet, cela faisait 2 semaines qu'elle avait fait escale dans cette ville, et ce jour-ci, c'est le jour du marché. Chaque matinée était très agitées, mais encore plus celle-ci. Les personnes tournoyaient, couraient ou bien même sautillaient de joie, à l’affût de bonnes affaires.

Ydyse enfila une chemise, un pantalon et des bottes, histoire d'être à l'aise pour faire du collé-serré. Elle prit un bout de pain sec et de l'eau en guise de déjeuner puis sortit, en pensant à bien verrouiller sa porte et en payant l'humble tavernier, qui la remercia, comme à chaque fois, d'un sourire fort aimable.

Sur le péron, Ydyse huma, l'air était saturée de fortes odeurs : viandes, savons, fleurs... Fleurs. Elle pensa tout de suite à la rose, accrochée à la boutonnière de son père. Sans plus attendre, elle suivit l'odeur de très prêt, bousculant les personnes sur son chemin, sans même y faire attention. Parfois même, renversant quelques produits posés sur les étalages. Son visage était fermé, presque froid. Aucune émotion ne n'était sur celui-ci, mis à part la tristesse.

La moitié du marché traversé, et le stand de fleur en vue, elle s'arrêta. Figée, elle regardait les roses. Si belle et si inaccessible à la fois. Elle s'approcha néanmoins de l'étalage. Mais son regard fût attiré par autre chose. L'odeur de fleur ne venait pas exactement d'où elle le pensait. Devant elle, se dressait un sommaire stand, tenu par une jeune femme.

Bien sûr, elle se dirigea vers lui, avec une certaine curiosité. Autour de lui, une masse de clients c'était formée, ils s'arrachaient les uns les autres, de nombreux produits mis à disposition.

Elle se hissa t'en bien que mal à travers la foule puis observa de près les objets et les bocaux remplis de plantes et autres racines inconnu d'Ydyse.

[HRP : on est en dehors de Ishtar ^^"]

Ese était ravie : son étal semblait attirer les clients malgré son apparent manque de sophistication. Elle avait depuis le matin gagné une somme rondelette, qui lui permettait de vivre tranquillement pour la semaine au moins. Sans doute pourrait-elle-même envisager de ne pas faire de commerce au sein d’Ishtar. Ce qui semblait attiser la curiosité de ses clients était l’exotisme : les herbes venues d’Endorial étaient presque toutes épuisées, également celles d’Aràn. Même celles obtenues dans la forêt de sapin semblaient avoir leur part de succès malgré la proximité d’Isthar avec cette région.
Ese en était quelque peu surprise.
Arrêtant un de ses clients, elle s’enquit sur la raison de ses achats. « La guerre arrive. Et en temps de guerre, les herbes deviennent rapidement indisponibles. » La lycan médita cette étrange réponse mais ne trouva nulle satisfaction. Une semaine lui sera nécessaire pour comprendre, quand Fragor remuera la terre…

Mais à l’heure actuelle, son attention se porta sur une femme. Gracieuse, jeune et apparemment du genre timide, elle semblait avoir suivi le mouvement de la foule plutôt que venue par volonté d’acheter des plantes. La lycanthrope l’accueillit d’un sourire.

« Bien le bonjour, mademoiselle. Vous laisserez-vous tenter par des épices venues depuis les lointaines terres elfiques ? Ou peut-être ce baume qui rendra vos belles mains aussi douces que la peau des nouveau-nés ? »

Pendant qu'elle regardait ces étranges mixtures, elle fût attirée par une voix douce et accueillante :

« Bien le bonjour, mademoiselle. Vous laisserez-vous tenter par des épices venues depuis les lointaines terres elfiques ? Ou peut-être ce baume qui rendra vos belles mains aussi douces que la peau des nouveau-nés ? »

Un peu surprise et curieuse à la fois, elle mit du temps à répondre.

"Hum... Pardonnez-moi, mais je connais peu les herbes et les épices que vous vendez." dit-elle, gênée.

Cependant, elle regarda de plus près ce fameux baumes dont la vendeuse parlait. Peu de temps avant, elle avait entendu un homme déclarer que les herbes allaient devenir rares par ce temps de guerre. Étrangement, elle se laissa tenter. Elle pris le pot, le montra à la vendeuse :

"Pouvez-vous m'expliquer comme cela est fait et qu'il y a t-il à l'intérieure ?"

Ese garda le sourire alors qu'elle accédait volontiers à la demande de sa cliente :

"Le baume que vous avez entre les mains est un mélange de miel, d'amande, de pervenche et de camomille. La camomille apaisera les blessures que vous pourriez avoir -coupures, plaies et autres- tandis que la pervenche aura un effet cicatrisant. Quant au miel et à l'amande, ces deux composants affermira votre peau tout en la nourrissant."

Elle leva une main à la hauteur des yeux de la jeune femme, paume vers le ciel, afin qu'elle puisse constater de son propos :

"Voyez. Je suis une bretteuse et pourtant, ma main ressemble tout au plus à celle d'un noble qui aurait pour passe-temps l'escrime. Peu de cals mais pas rugueuse pour un poil ! Si cela marche pour moi, cela aurait des effets spectaculaires pour vous, si je puis me permettre."

Elle lui décocha un sourire. Elle n'y pouvait rien, cela faisait partie de ses stratégies de vente, que de toujours afficher bonne humeur et un air avenant. Ese poursuivit donc en débouchant le pot qui laissa s'élever une douce odeur sucrée.

"Et au moins, ça sent quand même plus bon que les crèmes des apothicaires vous ne trouvez pas ? Avec un peu d'astuce, cela vous fera une pierre deux coups : un baume et un parfum !"

La bonne humeur de la vendeuse décrocha un sourire à la femme, enfin plus une grimace, puisque celle-ci n'avait pas sourit depuis longtemps.
Cette émotion lui mit du baume au cœur, étrangement elle se sentie apaisée et sereine.

Elle huma le pot, l'odeur, douce et sucré lui rappela son enfance. Elle prit donc la mixture.

"Combien pour cette mixture de bienfaisance ?", elle avait l'air joyeuse, en total contradiction avec sa nature. Ydyse avait retrouver une part d'elle-même dans la vendeuse, mais ainsi que dans les produits.

Heureuse d'avoir fait cette acquisition, elle entama la discussion avec l'herboriste :

"Dites-moi, vous aviez dit être une bretteuse, l'épée serait donc l'une de vos compétence ?"

"Dix pièces d'or. Merci mademoiselle !
- Dites-moi, vous aviez dit être une bretteuse, l'épée serait donc l'une de vos compétences ?"

Ese regarda sa cliente d'un air partagé, se demandant s'il étai très courtois de se fendre d'un rire (qu'elle réprimait à grande peine d'ailleurs). Elle ne savait si la femme avait tenté de se montrer ironique à sortir une évidence ainsi... Finalement, elle resta fidèle à elle-même et sourit avec franchise, d'un air un peu moqueur.

"Vous penseriez qu'en tant que bretteuse je me battrai avec mes plantes, peut-être ?"

Ydyse donna les 10 pièces d'or demandées par la bretteuse et répondit à la question :

- "Oh, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire ! Haha, quoi que, ce serai amusant de voir une jeune personne se battre avec des plantes ! Mais ce n'est pas le tempérament de quelqu'un qui vend des plantes et autre." Amusée, elle sourit encore.

Elle pris se qu'elle avait acheté, tendue par la vendeuse.

-"Pardonnez ma curiosité, mais quel nom vous a t'on donné ?"

Cette curiosité, Ydyse l'a tenait de son père. Sa soif de connaissances, plus ou moins futiles, lui donnait le pouvoir de poser tout un tas de questions plus ou moins indiscrètes...

Ese déploya maints efforts pour garder un air avenant mais il lui fallait reconnaitre que cet échange lui pesait ; voyant s'en venir une nouvelle cliente, elle saisit l'occasion et répondit aussi courtoisement qu'il lui était possible :

"Ese, du moins, c'est ainsi que l'on m'appelle. Ce serait avec plaisir que je m'entretiendrai plus longuement avec vous, mais pour le moment, je me dois de servir mes autres clients. Si vous voulez bien m'excuser."

Elle lui adressa un dernier sourire avant de se tourner vers une atre cliente et de l'aider à choisir ses achats.

HRP: