Après avoir vaincu ce qui leur avait semblé être une monstrueuse entité, Tamel n'avait pas fait le choix de rentrer directement, elle était allée à l'une des rares célébrations de fin de combat. Elle était, à n'en pas douter, légèrement perdue dans ce qu'elle avait vécu et qu'elle voyait à présent. Irma l'avait rejoint et lui avait conseillé de ne pas revenir tout de suite à la tour et de prendre le temps de rencontrer des gens. Pas qu'elle pensait qu'il avait plus à apporter qu'elle, bien évidemment que non, les Stryges Noirs étaient quand même, de son point, bien au dessus des autres. Mais la vielle femme pensait que cela ferait du bien à la jeune.

C'est ainsi que Tamel, aussi intimidé que curieuse, s'était installée à l'une des grandes tables du logis accueillant la fête. Elle ne s'était d'abord pas vraiment mêlé aux conversations mais les avaient suivit avec suffisamment d'intérêt pour qu'on l'y invite. Elle avait alors appris qu'il existait plus de faction, de groupe qu'elle ne savait. Il y avait la congrégation, évidemment et les kazhariens qu'elle connaissait déjà. Mais elle pu découvrir d'autres choses qui l'intéressaient d'avantage.  

Notamment la garde Zéphyr. Elle avait la sensation que pour pouvoir pleinement entrer en communication avec les âmes, il fallait être proche de la nature et qu'elle devait l'être suffisamment puisqu'elle y parvenait de mieux en mieux. De plus, elle appréciait beaucoup le calme de la forêt ou du lac près de chez elle... Elle ne voyait donc, aucune raison de ne pas s'y présenter. Peut-être même qu'elle allait découvrir de nouvelle chose, de nouvelle pratique pour respecter encore plus le monde, sa faune et sa flore.

C'est avec ce genre d'idée qu'elle avait prit le chemin en direction d'Endorial. Elle s'était joint à un convoi de marchand et avait payé sa place en donnant un coup de main quand les roulottes s'embourbaient ou qu'une roue se retrouvait coincée. Ils l'avaient accepté avec crainte au début, les Stryges Noirs n'étaient malheureusement pas toujours bien vue mais elle avait montré patte blanche et avait été plus agréable sur le trajet qu'un nain. Du moins, de l'avis de l'un des marchands.

Quand elle les avaient finalement quitter quelques longues journées plus tard, elle n'avait plus que Loptr comme compagnon. Elle ne savait pas du tout où aller pour rencontrer l'un des gardes Zéphyrien.

Tamel traverse la grande place, elle a la sensation d'être juger d'un regard par ceux qui ose la regarder. Très rapidement, trop peut-être, elle sent le plaisir d'être là se muer en gène et tout aussi vite, elle se sent mal à l'aise. Est ce qu'elle a bien fait de venir ? N'aurait-elle du pas faire comme la plupart de ses congénères ? Elle baisse les yeux pour ne plus croiser de regard. Est ce que c'était si important d'être ou ne pas être une Stryge ? Pourquoi tout le monde ne pouvait tout simplement pas laisser les gens se faire leur propre opinion ?

C'est presque en courant qu'elle quitte la grande place pour un coin plus vide de monde, ici, elle ne sent pas les regards qui la scrute, qui semble lui dire qu'elle est surveillée. Est ce que cela changerait une fois qu'elle serait dans la garde ? Est ce que... s'ils l'acceptaient elle ne serait plus considéré comme une Stryge Noir mais comme une Gardienne Zéphyrienne ? Sans l'importance de la race ?

Elle suit des yeux le chat noir qui avance avec prudence en direction d'une petite fontaine, devant celle-ci se tenait un type, un elfe sans doute, qui lisait... qui touchait un livre. Son regard était voilé de blanc et fixe, Tamel compris tout de suite qu'il était aveugle.

« Excusez moi ?
—  Oui ?
—   Je... je cherche quelqu'un... Enfin... une personne qui pourrait me... m'accepter dans la garde...
—  La garde Zéphyr ? Ce n'est pas compliqué, attends avec moi, il en passe régulièrement ici. Certains en portent les couleurs, il te sera facile de les aborder.  »

C'est facile de le dire, mais Tamel décide de prendre son mal en patience et d'attendre que l'un d'entre eux passe pour l'aborder. Ce qu'elle fera avec politesse, mais timidité. Elle n'était pas timide, mais alpaguer quelqu'un qu'elle ne connait dans une région tout aussi inconnu n'était pas simple du tout...

Tamel, assise à coté du vieil Elfe, regarde droit devant. Elle ne sait pas qui elle attend, mais elle attend. La description d'un garde est maigre, mais suffisante, surtout s'il porte un vêtement distinctif. Mais l'attente la rend de plus en plus anxieuse. Pas vraiment parce qu'elle a peur d'un garde, mais parce qu'elle saute dans l'inconnu tout en ne sachant pas exactement quand aura lieu ce saut.

Le silence n'est pas si pesant. A coté d'elle, l'elfe est calme et ne semble absolument pas déranger par le silence et sans s'en rendre compte, cela apaise un peu les tourments inutiles de la Stryge. Cependant, quand il prend soudainement la parole, elle sursaute. Elle n'avait rien vu venir, rien entendu. Elle allait faire une remarque mais sa surprise est plus grande encore quand elle voit le thérianthrope s'installer de l'autre coté de l'elfe.

Imposant de par sa nature et son physique, Tamel, qui pourtant n'est pas naine, se sent un peu petite. Elle regarde l'elfe puis le lion et ses yeux passent de l'un à l'autre pendant leur petite joute verbale. Elle sent bien que c'est amical entre eux, mais le... grognement du Lion ne lui donne pas l'impression qu'il rit. Au contraire, cela sonne presque comme une menace.

D'abord inquiète, elle comprend vite qu'il n'est en rien menaçant puisque l'elfe ne bouge pas d'une oreille et parle avec le même ton serein pour la présenter brièvement. Elle se lève pour se présenter un peu plus formellement mais le regard insistant du nouvel arrivant la met légèrement mal à l'aise et c'est avec cette sensation qu'elle prend enfin la parole.

« Heu... oui... Donc... oui... En fait, je suis là parce que je... j'aimerais faire partie de... de la garde de Zéphyr moi aussi... »

Loptr plus joueur et moins peureux, s'approche du Lion pour le renifler. Tout de même sur le qui-vive pour pouvoir bondir sur le coté au moindre mouvement suspect. Tamel, elle, ne savait pas trop quoi dire de plus, est ce qu'elle devait expliquer pourquoi ? ou attendre une éventuelle question dans ce sens ? Elle opte finalement pour un compromis en baissant les yeux sur le chat noir en soufflant un peu pour lui faire comprendre d'arrêter son exploration olfactive.

Le malaise ne semble pas disparaître quand enfin le chat noir se détourne du Lowen. La jeune Stryge tente de reporter son regard sur son interlocuteur mais le regard de celui-ci est lourd, comme s'il cherchait à la transpercer. Finalement, c'est lui qui rompt le silence en lui posant une simple question.

Elle s'était mainte fois retourner ce questionnement dans la tête, elle avait préparer tout un discours sur ses envies de découvrir de nouvelle chose, d'entrer en contact avec la nature et de protéger ceux qui en avaient besoin. Pour elle qui avait vécu une partie de son enfant dans une ferme puis dans une taverne à l'extérieur de la Tour, la nature était un atout dont il fallait épouser le rythme pour pouvoir la respecter. Et dans son esprit, peut-être un peu trop jeune pour faire la part des choses, entrer en contact avec des entités mortes faisaient partie de la nature.

Et, comme elle n'avait que pour modèle l'orc Chaman, elle ne voyait pas de grande différence avec un gardien qui aidait la Nature.

« Et bien... »

Elle baisse les yeux sur le chat qui se frotte à sa jambe comme pour l'encourager et, rassénérée, elle sourit en reportant son regard sur le Lion.

« J'ai envie d'être une gardienne de la Nature. Là où je vie, il n'y en a pas... voir pas du tout. Et j'aimerais les représenter, faire de mon mieux pour protéger la nature et surtout aider les âmes... »

Elle n'avait pas totalement confiance, et ses paroles pouvaient sembler un peu bancal, mais elle était sincère.