Cela faisait bien longtemps que je n’avais foulé le sable inhospitalier de l’arène. Beaucoup de choses s’étaient passé au court du dernier tournoi et j’avais assisté en première loge à son dénouement. Bien étrange que d’apprécier se battre entouré de spectateur, alors que le combat ne devrait servir qu’à protéger les siens. Et pourtant, je m’étais laissé prendre au jeu et étais revenu avec envi au bureau d’inscription de l’arène pour cette nouvelle édition du tournoi de Baldorheim.

Les premiers combats avaient déjà commencé et certains s’étaient déjà terminé, j’arrivais donc après l’ouverture officielle du tournoi. Bien que le retard soit toléré pour les participants aux yeux du juge suprême et de l’arbitre du tournoi, ce dernier n’apporte aucun autre malus que celui de participer à moins de combat à ce tournoi, ce dernier étant limité dans le temps … Je ne voyais pas cela comme une barrière ou un malus, mais plutôt comme du challenge. Cela me surprenait moi-même de penser cela, mais j’y avais pris goût et cela me permettait de découvrir de nouveaux arts du combat ainsi que de nouvelles techniques et armes en tout genre. J’appréciais la diversité et la nouveauté, ma curiosité pour l’art du combat s’était aiguisée au fil des combats et j’en saisissais un peu plus l’importance chaque jour.

Aujourd’hui, mon tout premier affrontement allait se dérouler sous un ciel couvert empli de nuages peu accueillants. La vampirette qui se tenait devant moi ne me lâchait pas du regard, je pouvais sentir son regard me transpercer, ses armes à la main, elle restait calme et guettait le même moment opportun que moi, celui de prendre l’initiative. L’un face à l’autre, aucun de nous deux ne semblait vouloir détourner le regard, ni se mettre en garde, réfléchissant à notre première stratégie. L’arbitre leva la main au ciel, jonglant du regard entre les participants avant d’abattre la main vers le sol ; signe du début des hostilités.

Presque aussitôt, je fléchis les genoux et me ruai sur l’être au sang froid, débordant sur son flanc gauche pour éviter de charger en ligne. Le dos de ma cible en vue, je modifiai ma trajectoire pour me rapprocher d’elle et abattre mes premières cartes. Une fois au corps-à-corps, je me baissai promptement et lui fauchai les jambes pour la déstabiliser. Dans le même élan, je continuai à pivoter tout en levant la jambe avant de clouer la buveuse de sang d’un coup de pied marteau. Prenant instinctivement un peu de recul, mon regard toujours posé sur cette demoiselle aux allures assassines et ténébreuses, je me doutais que le combat ne faisait que commencer … Pas un seul mot n’avait été échangé entre les deux combattants, il ne s’agissait que d’un duel de regard et d’un affrontement par KO. Rien de plus.

A peine le choc encaissé que la demoiselle au sang froid se releva et entreprit sa contre-attaque. Cette première parade, bien qu’hasardeuse, n’avait pas ôté sa concentration et son sérieux à l’être de la nuit, je n’avais donc pas réussi à a déstabiliser suffisamment. Elle passa sa main sur le sol sablonneux dans un premier temps et d’un geste vif elle lança ce qu’elle avait ramassé, créant un léger nuage de sable duquel je m’esquivais naturellement. Rentrant dans son jeu sans m’en rendre compte, je ne pu anticiper son attaque prémédité, ne voyant que trop tard la dague en bois qu’elle avait jeté à la suite de sa poignée de sable. Le tout avait été subtilement calculé pour que je ne me rende pas compte de la supercherie, dissimulant son attaque derrière une brève feinte sans aucun intérêt. La dague en bois vint me cogner en pleine tête, rassuré que ce ne soit pas une vrai dague fait de minerai, je me laissais toutefois retomber en arrière sous l’effet de surprise.

J’avais en face de moi un adversaire qui savait prendre en compte son environnement et jouer avec comme s’il s’agissait d’une arme. Bien que je sache ce qu’elle valait vraiment au corps-à-corps, sa stratégie s’avéra payante à distance et je tenais cela comme un avertissement pour la suite du combat. Il n’était pas question de s’enflammer pour une telle provocation, mais si je voulais vraiment remporter ce combat, je n’aurai d’autre choix que de réfléchir un peu plus en profondeur à mes enchaînements et aux techniques que j’emploierai.

Alors que je ramassais la dague qui se trouvait à mes pieds, celle-ci ayant réussi à m’égratigner le front malgré le fait qu’elle soit en bois, c’est en posant mon regard sur la lame, maintenant bordeaux, qu’une idée me vint à l’esprit. De la même manière qu’elle l’avait faite avec moi, j’espérai pouvoir user de la même supercherie pour l’attaquer.

Dague en main, je commençais à jouer avec celle-ci avant de me mettre en garde et de me ruer sur elle. L’assaut semblait légèrement désespéré et sans aucune conviction, pourtant la démarche était sérieuse et je m’apprêtais à l’empaler avec la dague. Mon regard n’avait pas quitté le sien, focalisé sur l’arme que j’avais en main. Ce n’était pourtant pas là mon arme de combat … Une fois sûr que son intérêt était porté sur son arme en bois, je pivotais légèrement sur la pointe des pieds pour la frapper du coup de pieds opposé sur son flanc droit. Sans comprendre que mon assaut volontaire à la dague n’était qu’un artifice pour dissimuler ma véritable attaque, je la laissais sur le qui-vive et l’envoya suffisamment loin pour pouvoir souffler un peu et m’attendre à sa prochaine attaque. Elle ne m’aurait pas deux avec la même technique, mais j’espérais que cette épreuve stratégique avait su la déstabiliser ne serai-ce qu’un tout petit peu. Le combat commençais enfin à devenir intéressant …