Aujourd'hui on chasse le lapin !

En chemin pour le campement fortifié des Djöllfulins, Urua et Diagoras s'étaient arrêtés pour camper en bordure d'un bosquet, profitant de l'abri au vent qu'offrait les arbres pour faire un bon feu, se reposer et manger quelque chose de chaud. Ce n'était pas du luxe dans une telle région et considérant le chemin qu'ils avaient parcouru mais aussi celui qui restait à parcourir, ils méritaient bien une petite pause. Surtout s'ils espéraient survivre à leur voyage.

C'est donc pendant cette étape bienvenue qu'ils entendirent des commotions et des bruits de course venir dans leur direction. Tous deux se tendirent et posèrent leurs pattes sur leurs armes. Si des créatures ou des brigands en avaient après eux, ils allaient être surpris par la résistance qu'ils avaient à offrir. Toutefois, ce n'était en aucun cas un troupeau mais simplement un homme encapuchonné qui courait comme un dératé vers eux et lança un coup de pied rageur dans leur feu.

Avant qu'ils n'aient eu le temps de protester, et ils en avaient bien l'intention, ils entendirent plus de bruits venant de la direction opposée au fuyard. Un groupe de lapins géants accouraient comme ils pouvaient dans leurs armures de facture étrange et armés jusqu'aux dents, qu'ils avaient proéminentes. Ainsi c'est ce groupe que fuyait l'homme quand il avait atterri sur eux.

- Eh bien, que se passe-t-il? Mes chers Rabclaws, laissez donc cet homme ! À cinq contre un, ce n'est en aucun cas un combat équitable !

Sur ces mots, il se mit entre les créatures et l'homme qui restait quelques pas en arrière, de peur de recevoir la flèche encochée par un des lapins armé d'un arc. Il fallait dire qu'ils avaient l'air remontés ces rongeurs...

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Aujourd'hui on chasse le lapin !

Un nouvel arrivé venait d'apparaître à leurs côtés. L'étranger devait être un Stryge Blanc. Urua en avait déjà rencontré dans ses voyages. Forcément, ils étaient dans les montagnes proches de ce peuple, c'était plus normal d'en croiser que de rencontrer un Löwen. L'inconnu se plaça à leurs côtés et se prépara à les seconder tout en prévoyant une stratégie d'une complexité impressionnante.

À peine avait-il fini de parler que les rongeurs se jetèrent tous sur le lion. Son plastron résonna comme une cloche de tous les coups simultanés qu'il reçut. Ses oreilles trop sensibles vibrèrent et lorsqu'il reprit ses esprits, à peine une seconde plus tard, par réflexe, il décocha un revers d'une de ses géantes pattes dans le Rabclaw le plus proche, qui s'envola et, à force de rouler dans la neige, chuta dans un précipice. D'après la flèche qui dépassait du crâne de l'archer du camp adverse, il semblait que le combat n'allait pas être aussi âpre qu'ils l'avaient d'abord cru.

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Aujourd'hui on chasse le lapin !

Interloqué, Urua n'en revenait pas du vol plané de son adversaire. Pas étonnant que ces rongeurs se déplacent en aussi grand groupe quand on voyait ce qu'ils valaient en combat. Une simple pichenette en faisait des chauve-lapins sans ailes.

Se retournant, la première chose que vit le Löwen fut qu'au moins la moitié de la "force" ennemie avait été décimée ou amochée. L'homme ailé était aux prises avec un adversaire mais semblait lutter pour trouver une ouverture, tandis que l'homme sans ailes encochait rapidement une flèche, qui alla se ficher directement dans le dos poilu d'une de ces aberrations de la Nature. Les deux humanoïdes travaillaient bien ensemble.

Ce fut à ce moment, quand l'action diminua autour de lui qu'Urua entendit les coups sourds que faisait l'acier contre l'acier mais diablement proche de lui pour des adversaires aussi distants. Baissant les yeux, il aperçut l'un des lapins qui tapait encore désespérément contre son plastron, essayant de le blesser ou de l'ouvrir comme une moule aurait-on dit. L'énorme patte poilue passa derrière les oreilles proéminentes de l'assaillant et d'un geste vif, vint écraser le museau sur la plaque de métal que son propriétaire cherchait en vain à ébrécher un instant plus tôt.

Il ne restait donc plus qu'un adversaire. Un combat rondement mené, qui se terminerait mieux qu'il n'avait eu l'air de démarrer. Il devait se souvenir de garder contact avec ses compagnons d'armes après autant d'action ensemble !

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Aujourd'hui on chasse le lapin !

Le temps qu'Urua se débarrasse de ses ennemis, le combat était fini autour du campement. D'un regard circulaire, il avisa l'être volant qui ne risquait plus de s'envoler avant un moment. Puis ils remarqua deux demi-lapins aux pieds de l'humain qui se tenait toujours sur ses pieds au moins. Il y avait eu moins de dégâts que ce qu'il craignait.

Le Löwen soupira en se détendant, nettoya ses armes avant de les rengainer comme après chaque bataille et se tourna vers l'humain quand il remarqua qu'il lui parlait. Il n'avait pas l'habitude d'autant de discours, d'autant plus en pleine nature. Diagoras et lui étaient tellement en phase à présent qu'ils n'avaient plus besoin de parler pour se comprendre.

Ça va ? Rien de cassé ... Heuu, toi ? T'es quoi au fait ? Une espèce de lion savant ou un truc du genre ? Un Gus qui s'est fait maudire par quelqu'un de la savane ? Tu sais ronronner ? heuuu... Tu ne vas pas essayer de me bouffer au moins ?

Un grondement sourd retentit dans la gorge du lion. C'était sa façon de rire. Il s'arrêta rapidement en assimilant la dernière question de son compagnon d'arme impromptu en se disant qu'il risquait de l'effrayer.

- Tout va bien, mon armure peut encaisser quelques rongeurs. Sans vouloir t'offenser Diag. Vous avez l'air de bien vous porter aussi, c'est heureux. Je suis Urua, un Löwen des monts de Spelunca, Garde sylvestre, et vous?

Se rendant compte qu'il commençait à saliver entre l'odeur de sang, de viande crue et du feu de bois qui continuait à brûler faiblement, Urua se sentit soudainement affamé. Ce n'était pas forcément bien vu dans toutes les régions de se repaître de créatures intelligentes mais il ne s'agissait ni plus ni moins que de lapins. Qui plus est, il n'avait jamais rencontré cet individu et compte tenu de la région dans laquelle ils se trouvaient, il y avait peu de chances qu'ils se rencontrent de nouveau, aussi n'eut-il pas peur de le choquer ou le vexer en lui demandant :

- Dites, je n'ai pas énormément de provisions et la chasse est compliquée dans ces montagnes, voudriez-vous partager un repas avec moi autour du feu pendant que nous deviserons ? Ce serait un tel gâchis que de laisser toute cette viande pourrir ou nourrir les charognards.

Voilà une soirée qui allait bien finir si l'inconnu acceptait. Il lui était sympathique et les humains de ces contrées lui semblaient plus proches de ses idéaux et de sa façon de vivre. Peut-être se fera-t-il un ami.

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Aujourd'hui on chasse le lapin !

Urua attendit patiemment la réponse de son interlocuteur qui tardait à venir. On pouvait aisément comprendre son hésitation. Un lion géant qui se battait comme lui, qui ronronnait dans un son semblable à un grognement et qui dominait la plupart des autres races n'inspirait pas forcément une confiance aveugle au premier regard.

Arkos : Ah bah moi, ça ne peut que aller bien. Contrairement au piaf endormis, je n'ai pas été touché une seule fois du combat. Mon nom est Arkos et je suis un Gardien, mais également un Rôdeur de la Forêt de Sapin, enchanté. Par contre, je ne sais pas ce que c'est un Löwen, moi.

- C'est bien simple. Un Löwen est un homme qui a la capacité de se transformer en lion. Comme les loups-garous qui sont une de nos espèces cousines et dont vous avez certainement entendu parler.

Ça ne le gênait pas de donner des explications. Plus ils seraient connus, plus ils seraient compris et plus ils seraient acceptés. Il fallait dire que les représentants de cette race se faisaient rares en Dùralas, on en croisait beaucoup plus à Spelunca ou sur l'île de Wystéria mais peu d'aventuriers osaient se balader dans ces contrées.

Arkos : Certes, je n'avais pas vraiment prévu de me faire chasser par mon propre gibier mais, à la base, je suis venu par ici pour chasser le lapin afin d'en garnir mon garde-mangé. Je n'aurais rien contre le fait de les préparer, mais il va falloir partager. Je n'ai pas l'intention de rentrer les mains vides.

Urua éclata d'un rire grave et profond. Effectivement, c'est une chose qui n'arrivait pas souvent, se faire chasser par notre proie mais on n'est jamais trop prudent et le continent recelait bien plus d'espèces dangereuses qu'il n'était connu.

Sans dire un mot de plus, le Löwen partit ramasser plus de bois pour le feu, des branches droites pour embrocher les morceaux de choix et des pierres plates pour faire rôtir les abats et les plus petits morceaux. Ils allaient se faire un festin de roi autour d'une bonne flambée !

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Aujourd'hui on chasse le lapin !

Alors qu'Urua s'occupait de préparer les lapins à sa façon, bien rôtis sur le feu et les abats grillés sur une plaque de pierre, il s'aperçut soudain de l'agitation de son compagnon et fut surpris de la virulence de l'interjection dont il fut la cible.

Arkos : Holà ! Attends, attends, attends... Tu fais quoi là ? Pose le bois, pose le. À moins d'aimer le lapin au bon goût de bois brûlé et aimer avoir des échardes plein les gencives. Ce n'est vraiment pas une bonne idée. Regarde, laisse-moi faire.

Le Löwen ne voyait pas le problème, ses dents et sa mâchoire pouvaient venir à bout de tous les obstacles que sa nourriture pouvait lui opposer mais il oubliait souvent, à force de ne jamais se transformer, que les humains n'avaient pas ses muscles maxillaires. Urua observa Arkos nettoyer les épées et improviser une sorte de broche rôtisseuse au dessus du feu. La technique était intéressante, on voyait qu'il avait l'habitude. Le lion allait retenir la méthode, elle pourrait lui être utile, même s'il ne trouvait pas d'épées dans la nature, il se contenterait des branches pointues et droites et lui n'était pas dérangé par des échardes, elles lui nettoyaient même les gencives.

Arkos : Voilà, avec un support en métal, ton support ne vas pas brûler et diffuser des cendres dans la chair. Il risque pas non plus de casser et de faire tomber la bouffe dans le feu de camps.

Une fois la démonstration d'une fabrication de broche à rôtir artisanale avec les armes de nos ennemis, Urua vit à nouveau son compagnon s'affairer à récupérer de nouveau de l'équipement tombé çà et là. Un gant, un casque, des dagues. Il l'observa attentivement, espérant apprendre encore plus de techniques de cuisine qui égaieraient leurs repas dans la nature lorsqu'ils devaient faire avec les moyens du bord.

Arkos : Voilà, comme ça, on ne mangera pas des abats croustillants à la poussière. Je vais aller là ou ils campaient piller leurs gamelles, il doit y avoir des légumes à récupérer pour accompagner tout ça. De plus quelques herbes poussant à la lisière pourrait nous faire des aromates pour parfumer la viande, elle ne sera pas fade. Je te laisse préparer les lapins pendant ce temps, il faut juste les dépecer et nettoyer les morceaux tombés au sol.

Urua se mit donc sans un mot à la tâche. Il utilisa de la neige pour frotter les morceaux qui avaient pris la poussière lors de sa tentative infructueuse de les cuire sur une plaque de roche et coupa en petit morceaux a viande à l'aide de ses griffes acérées. Cela se révéla plus facile que prévu, la viande étant tendre, quand l'humain revint de sa collecte, tout était prêt pour un somptueux repas au coin du feu après leur bataille éprouvante.

Le Löwen regarda la préparation d'un ragoût avec intérêt et fut étonné du goût excellent de celui-ci. Les deux aventuriers discutèrent calmement en avalant leur pitance, jetant de temps en temps des coups d’œil à l'heureux malchanceux qui restait tranquillement dans le coma à côté d'eux.

Soudain, des bruits se firent entendre dans les fourrés. Urua attrapa son fléau et huma l'air pour tenter de reconnaître la menace qui risquait de s'abattre sur eux. Malheureusement, l'odeur du feu et de la cuisson en cours troublait ses sens et il n'arrivait pas à sentir autre chose que les lapins géants. Quand le rideau de buissons s'écarta enfin, une véritable troupe armée de ces créatures se précipitèrent à découvert et hurlèrent des paroles incompréhensibles en voyant le carnage qui avait eu lieu sur le bord de cette falaise. La race des intervenants était certainement la raison pour laquelle il avait eu du mal à se rendre compte de ce qui les attendaient.

- Ne nous précipitons pas dans un conflit qui n'a pas lieu d'être ! Vos camarades nous ont attaqué alors que nous ne faisions que passer dans les environs, nous ne cherchons pas la bagarre. Si vous voulez récupérer leurs possessions, nous vous les laissons de bon cœur et nous poursuivrons notre chemin.

Ce petit discours n'eut pas l'air de les affecter outre mesure. Ils continuaient à gesticuler avec colère, brandissant leurs armes, deux archers les visaient même de leurs flèches. Urua pouvait comprendre que la vision de deux étrangers entrain de festoyer de la chair de leurs congénères au milieu de ce qui semblait avoir été une bataille plutôt féroce ne faisait pas bonne impression. Avec un soupir, il se leva donc et se prépara à faire face.

Fiche de combat:

Codage par Libella sur Graphiorum