Le combat avait été si long que la nuit était déjà bien entamée. Loup avait prit l’initiative d’isoler l’un des derniers pillards, l’éloignant de Cylicia qui était à bout. Du coin de l’œil, je pouvais la voir combattre encore et toujours, dépassant toujours plus ses limites. Les deux pillards en face de moi n’étaient pas prêts à me laisser la rejoindre et lui venir en aide, rapière à la main et le regard noir. Nous avions ruinés leur petite soirée et leur petit commerce clandestin, il y avait donc de quoi ! Mais eux aussi commençaient à sentir la fatigue, voyant que le reste de leur petit groupe s’était fait étaler, ils étaient devenu plus hargneux. Malgré cela, nombre d’ouverture s’ouvrait à moi face à autant de colère et de peur. Usant de ma carrure plus importante que la leur, je saisis méthodiquement la garde des deux pillards et les bloquèrent dans leur attaque. Le premier eu le réflexe de lâcher son arme pour dégainer une petite dague qu’il vint planter dans ma cuisse. Le second n’eus pas le temps de réagir, paralysé par la peur et la surprise, je le fis voler jusqu’à l’auberge en l’empoignant par le col et en repoussant mes limites à l’image de la Stryge Blanche.

Je ne ressentais plus la douleur tant la fatigue s’était rependue dans mon corps. Le pillard encore accroupi à côté de moi, tenant le manche de son arme, n’eus pas le temps de voir venir l’attaque venir et s’écroula violemment sous mon coup de coude. Dans un premier temps, je le récupérai au sol et le saisi par le cou en le levant en l’air puis, en devinant que ce dernier était inconscient, je le laissais tomber avant de reprendre forme humaine. Un léger courant électrique sembla parcourir mon corps avant de l’immobiliser quelques instants, me laissant tomber sur les fesses, incapable de bouger ne serai-ce que le petit doigt. Le combat était enfin terminé. Je n’avais plus aucune force, je ne pouvais même plus me relever. Je n’en avais plus la détermination. Je pouvais entendre Loup hurler un peu plus loin, me criant qu’il fallait que je vienne aider l’oiseau géant. Il avait raison, je n’avais pas encore terminé le combat !

M’appuyant uniquement sur ma volonté, je parvins, difficilement, à me relever. La douleur venait de ressurgir et semblait imploser dans mon corps, la sensation que mon corps se déchirait de l’intérieur. Mais cette douleur me prouvait bien une chose, il y a encore de la vie en moi. La jeune femme, elle, était recouverte de blessure plus ou moins profonde par endroit. Elle était dans état plutôt critique, assis, adossée au mur de la bâtisse. Son visage fin était maculé de sang, sa chevelure avait subis quelques teinte bordeaux, tout comme la mienne, mais elle semblait encore respirer. Je regardais Loup lui ordonna de d’aller chercher mon sac en cuir dans la chambre ainsi que son ami resté caché par une succession de grondement et d’aboiement. Je ne pensais pas que Darmok pourrait faire quoique ce soit pour l’état de santé de son amie, mais sa présence lui serait bénéfique, j’en étais persuadé. Après quelques minutes, Loup revint avec le petit Chérubin et ma besace entre ses crocs. Je fouillais rapidement dans celui-ci et en sortis quelques feuilles de chêne, une sorte de mousse verte récupérée en forêt.

Lonann Alhazred – Je pense que je peux m’occuper des premiers soins. Je commençais à appliquer la mousse sur les blessures apparentes de la jeune femme. Ça devrait piquer un peu, mais après quelques minutes cela devrait apaiser la douleur. J’appliquais les feuilles de chênes que j’avais préalablement humidifiés sur les blessures, recouvrant la mousse dans le même temps. Il faudrait que vous puissiez vous reposer sans trop bouger.

Je ne voyais pas trop ce que je pouvais faire de plus pour le moment. Je me laissais aller, m’allongeant sur le dos. Moi-même, j’avais besoin de repos, mais je ne pensais pas que nous pourrions rentrer dans l’auberge après ce qui venait de se passer. Il nous fallait partir loin d’ici, à l’abri des regards indiscrets. Loup continuait à nous épier, le regard inquiet, agitant frénétiquement sa queue comme s’il avait fait une bêtise et qu’il se sentait coupable. Pourtant, il avait été vraiment héroïque cette nuit. Il s’était interposé entre nous et les pillards et nous avais prêté main forte, sans soutien, il est possible que nous ne serions pas revenu indemne, enfin … dans un état pire que celui-ci. Qu’allons-nous faire maintenant ?

Fin du combat

Cylicya – Chaque chose en son temps compagnon, dit elle d'une voix faible, pour l'heure j'ai une dernière chose à régler... Cela laissera le temps à mes blessures de se régénérer via vos soins et la bénédiction de mon Dieu...

La jeune femme farfouilla dans son sac quelques instants avant d’en sortir une plume et un parchemin. Elle se mit ainsi à écrire un court message expliquant ce qui s’était passé ici, certainement à l’attention des gens qui découvriront tout les macchabées étalés devant la taverne. Elle s’appuya sur son fourreau, se relevant non sans mal afin de s’approcher du premier pillard et de lui soutirer une lame. Elle planta ensuite la dague sur la porte de la taverne avec le mot placardé sur celle-ci. Je n’osais même pas imaginer la surprise des villageois lorsqu’ils découvriront le massacre qui a eu lieu cette nuit. J’espérais simplement que le fait qu’elle soit une Stryge blanche soit suffisant pour éviter des complications avec ce triste évènement. Même si je ne regrettais pas de m’être mêlé d’affaires qui ne me concernaient pas, je sentais tout de même le poids de la culpabilité sur mes épaules. Avoir autant de mort sur la conscience, pour moi qui ne m’en étais jamais prit à autre chose que le gibier en forêt, cette nuit resterait gravé dans ma mémoire. Encore dans le feu de l’action, j’avais préféré me tourner vers les soins de Cylicya pour ne pas penser à ce qui se trouvait derrière nous, jonchant le sol sur toute la place. Je m’étais efforcé de cacher mon regard perdu baissant naturellement le regard vers le sol malgré tout, la voix de la jeune femme me parvint et me sortit un instant de ma torpeur.

Cylicya - Allons nous en de cet endroit maudit... La jeune Stryge se tourna vers son petit compagnon volant et poursuivit. Darmok, va prendre le reste de nos affaires veux-tu bien? Il vous reste quelque chose à l'auberge?

Lonann Alhazred – Non, j’avais pris soin de tout ranger dans ma besace que Loup m’a ramené.

Et tandis que Darmok s’éclipsa pour obéir à son amie, Loup s’approcha et commença à mettre le museau dans le besace, essayant d’y rentrer pour s’y reposer. Sur l’instant, cela me fit oublier le champ de bataille qui s’était déroulé un peu plus tôt et me fit sourire. Il était évident que Loup était bien trop grand pour rentrer dans ma besace, mais il fut un temps où il s’y réfugiait dés qu’il avait un petit coup de fatigue. Loup avait énormément changé depuis la première fois que je l’avais rencontré, mais il était encore resté un louveteau à l’intérieur, il ne se rendait pas compte de son changement. J’avais de la chance de l’avoir à mes côtés et il me le rappelait régulièrement. Pour ce soi, je n’avais pas compté que sur un ami, mais également sur Cylicya qui m’avait soutenue et s’était battue corps et âmes pour une raison qui n’était probablement pas la sienne. Il me paraissait donc naturel que je m’occupe de ses blessures. Après quelques minutes, le petit chérubin revint avec l’équipement de la jeune femme qui s’occupa aussitôt avant de poursuivre plus inquiet.

Cylicya – Récupérons mon cheval et filons. Le temps que nous trouvions un endroit sûr, la nuit risque d'être longue...

Bien évidement, je partageais son avis et acquiesçais d’un hochement de tête avant de la suivre jusqu’à son destrier une fois notre petite équipe parée. Il fallait quitter cette ville au plus vite au risque d’être suivis. Nous n’étions clairement pas en état de nous défendre convenablement pour le moment, sans manger et sans sommeil, il nous fallait trouver un nouveau toit pour nous reposer en sécurité. J’espérais que la jeune Stryge ait une petite idée de notre destination ou de comment s’y prendre pour survivre dans la savane de Tzengah, car je ne m’étais encore jamais aventuré dans une zone aussi dangereuse et mystérieuse que celle-ci. Je baignais dorénavant dans l’inconnu le plus total.

Alors encore en pleine escapade à travers la savane, éclairée uniquement par l’éclat de la lune, nous cherchâmes un endroit où nous poser. Quelque chose de pas trop voyant, mais suffisant pour nous abriter et nous reposer en sécurité. Malheureusement, rien ne semblait convenir à nos attentes, du moins nul endroit n’était libre pour accueillir deux voyageurs et leur compagnon. Dans l’état actuel des choses, nous ressemblions plus à un goûter nocturne qu’autre chose. Les plaies que nous avions pensez un peu plus tôt étaient encore fraîche, l’odeur du sang parvenait sans difficulté à mes narines, alors je n’osais imaginer ce qu’il en était pour les prédateurs environnants. A part quelques fougères desséchées, des arbres flétris par le manque d’eau et un sol craquelé, il n’y avait pas grand-chose à voir au milieu de ce paysage. Le froid y était paralysant et encore ! Nous avions de la chance que le vent ne se lève pas ! Mais il était évident que la fatigue finisse par nous rattraper un jour. Le canasson s’arrêta au beau milieu de nulle part et Cylicia sembla satisfaite du lieu. Je ne l’avais pas quitté du coin de l’œil, mais je lui faisais entièrement confiance quand à notre survie. Elle dont le courage n’était plus à prouver.

Une fois le pied à terre, nous nous mîmes à rassembler n’importe quoi qui pourrait servir de combustible : herbes séchés, feuilles morte et branchage. Avec le peu que nous avions ramassés, nous ne pourrions allumer un feu que pour nous endormir et nous réchauffer avant de tomber de sommeil, il n’y avait rien autour de nous qui puisse protéger le feu durant la nuit, nous ferions donc avec. Une fois le feu allumé, je m’asseyais auprès de ce dernier et commença à fouiller dans ma besace de quoi manger avant de nous coucher. Réflexe qu’eue également Cylicia en installant sa couchette, mais au vu de regard qu’elle jeta à son contenu, je pouvais deviner que nous n’étions pas encore vraiment tiré d’affaire. Je n’avais plus grand-chose à me mettre sous la dent non plus mis à part du pain dur, je comptais essentiellement sur la nature pour me nourrir et m’abreuver lorsque le besoin s’en faisait sentir, mais à bout de force, comment trouver la volonté d’aller chasser et trouver de l’eau ? Etait-ce au moins possible de trouver de quoi nous sustenter ici ?

Cylicia Condoris – Merci pour tout ce que vous avez fait Lonann... Elle me tendit alors deux parts de viande séchés provenant de son sac, sûrement ce qu’il en restait … Sans vous, je serais morte à l'heure qu'il est. Pansez donc vos blessures également, mon don de régénération suffira à présent.

Lonann Alhazred – Vous êtes sûr … Ma voix s’éteignit d’elle-même dans la pénombre, car à nouveau, elle me venait en aide à ses dépends. Mais avais-je vraiment le choix ? Ce n’était pas le moment de faire des caprices car la faim, elle, ne pardonne pas. Je vous remercie. Reposez-vous donc, je vais faire la garde avec Loup.

Une fois le maigre repas terminé, le petit chérubin vint se blottir contre son amie avant de sombrer dans les rêves et l’imaginaire. Si je pouvais leur épargner quelque chose pour leur laisser le temps de récupérer, alors monter la garde ne me dérangerai pas. Bien que ma transformation m’ait épuisé, j’en avais l’habitude et j’en connaissais mes limites, ainsi que la durée qu’il me fallait pour en récupérer. La nuit ne suffirait probablement pas, mais je pourrais récupérer physiquement de mes blessures, ce qui serait déjà un plus pour ce qui allait nous attendre demain. A force de vivre aux côtés de Loup, j’avais finis par m’habituer à ses léchouilles durant la nuit et à ses balades nocturnes. Les loups ne dorment pas beaucoup. Ils dorment plusieurs fois dans la journée, mais très peu en soit, simplement ce qu’il faut pour profiter un maximum de leur activité. Et à force d’être réveillé au beau milieu de la nuit, j’ai finis par m’accommoder à ce mode de vie. Maîtriser son sommeil est quelque chose que Loup m’a enseigné au final, alors que moi-même je râlais après lui lorsqu’il essayait de me réveiller la nuit. Grace à lui, je pouvais veiller sur Cylicia et Darmok.

« Sans vous, je serais morte à l’heure qu’il est. » Cette phrase … Je n’en étais pas aussi sûr …

Alors que je m’adossais tranquillement à un des arbres desséchés de la savane, contemplant les alentours et le ciel étoilé, Cylicia, elle qui était allongé derrière moi afin de se reposer, n’avait vraisemblablement pas encore sommeil et avait certainement retenu dans ma voix un léger goût d’amertume. Je n’étais pas un bon menteur, il était facile de relever ce que je ressens en m’entendant parler, ce n’était pas quelque chose de nouveau … Pourtant, sa question paraissait tout à fait innocente et sans préjuger, l’on pouvait deviner la compassion qui se cachait derrière ce rideau de fer. Passé et présent s’affrontait dans mon esprit, tandis que la situation actuelle de la nature et de sa faune empirait terriblement. Je n’en avais pris conscience que cette nuit, lorsque l’on avait découvert ce terrible commerce. Devant le nombre de tracas qui bataillait dans mon esprit, je ne savais par où commencer et laissait un blanc se profiler avant de me décider avec encore quelques doute en fond de toile.

Lonann Alhazred – Et bien … Je ne sais pas si c’est une bonne chose d’en parler maintenant. Beaucoup de sang à verser cette nuit.

Sans même que je n’ai à tourner le dos pour lui faire face, je parvenais à deviner une légère pression, me conseillant ou m’obligeant, à poursuivre ce que j’avais entamé. Mon premier tracas n’était autre que la terrible nuit que nous venions de traverser. Qu’importe si c’est messieurs étaient de dangereux brigands vendant les enfants de Mère, je connaissais pertinemment la valeur de la vie. Personne ne peut justifier la mort d’autrui par leur action, seul se repentir était une option viable ou au pire l’enfermement dans les prisons des grandes et petites cités. Je n’étais pas particulièrement tourné vers la religion et sur la véracité de chacune de ces croyances, mais je croyais en la vie et sur ce quelle nous permettait de faire. Rencontre, aventure, plaisir, conviction et espoir, tout autant de mot qui n’aurait de valeur sans la vie. Alors lorsque nous nous sommes abaissés à détruire la vie d’autrui, même si leur action était injustifiable et impardonnable, je me suis dit que je valais encore moins que ces voleurs. Mais comment expliquer tout ceci à Cylicia ?

Lonann ALhazred – Ce qui nous est arrivé cette nuit … c’était terrible. Hormis la chasse pour subvenir à mes besoins …. Je n’avais encore jamais tué. Laissant à nouveau un blanc entre nous, la jeune femme s’apprêtait à répondre à ceci avant que je ne poursuive à nouveau, toujours d’une voix faible et triste. Peut-être que si je ne vous avais pas croisé dans ce village … vous n’auriez pas eu à vous salir les mains ainsi et moi de même par la même occasion. Je connais pourtant la valeur de la vie …

De nouveau, passé et présent se mélangèrent sans que je ne puisse rien faire. Cette tuerie nocturne avait étrangement ravivé une plaie qui s’était pourtant patiemment refermée. Mais avait-elle vraiment cessé d’exister ? Ce pourrait-il que je n’avais fait qu’ignorer ces souvenirs pour mieux affronter les journées de demain ? Bien que je ne gardais que peu de souvenir de Mélynn dorénavant, sa chevelure blanche, son caractère revêche et son sourire apaisant … je l’avais retrouvé en Cylicia récemment et il est vrai qu’en sa compagnie, je me trouvais d’une légèreté satisfaisante. Les Stryges sont des créatures bien étranges, présent pour la paix et la justice, ils sont également d’étonnant conseillé. J’en avais la preuve ici, je n’étais pas sûr que j’aurais eu le courage de me confier à quelqu’un d’autre. Sa présence avait allégé ce poids sur mes épaules en quelque sorte.

Le ciel était parfaitement dégagé, pas un nuage à l’horizon. Un plafond étoilé et scintillant accompagnant la pleine lune qui continuait sa descente pour laisser sa place à son Némésis. Les environs étaient bien calme, notre campement n’était pourtant pas vraiment dissimulé, mais je ne pensais que l’on viendrait nous déranger de si tôt. Nous étions groupés au pied d’un arbre dont le tronc maigrelet aboutissait à un petit nuage de feuille, nous abritant légèrement du temps et du vent. Le sol n’était pas ce qu’il y avait de plus confortable, loin était l’époque où je pouvais dormir sur un sol meuble, dorloté par les brindilles d’herbe qui me chatouillait le visage. Ici il n’y avait qu’un sol dur et craquelé par endroit, un sol froid et poussiéreux. La jeune femme pris son temps de réflexion avant de répondre d’un air bien plus sérieux.

Cylicia – Vous vous fourvoyez Lonann, répondit-elle au bout d'un moment. Si nous ne nous étions pas rencontrés, nous aurions certes les mains propres, mais ces pauvres créatures seraient toujours prisonnières et les Swen'Jah, eux, seraient toujours libre de commettre leurs exactions en tous genres. Si l'on prend en considérations les victimes que nous venons de sauvés, ainsi que celles potentielles qu'il y aurait eut dans le futur, je suis à peu près certaine que, pour ces vies là, ce que nous venons d'accomplir relève du miracle. Perdu dans ses pensées, elle prit un moment de réflexion avant de poursuivre d'un ton amère. Mais les miracles n'ont pas toujours l'apparence que l'on veut malheureusement...

C’est vrai. Il est probable que si nous ne nous étions jamais rencontrés, ces bandits auraient continués à rependre la terreur et perpétrés leurs crimes. La faune aurait été leur cible une nouvelle fois. Il est vrai que je ne peux pas fermer les yeux sur certaines choses, mais ne pas aller jusqu’au bout de ses convictions est un peu comme fuir ses responsabilités. Mais je ne me sentais pas prêt à ôter la vie à qui que ce soit, avoir les mains gorgés de sang n’était pas ce qu’il y avait de plus réjouissant. Comment pouvais-je me considérer comme un esprit Sylvestre si j’en venais à soutirer la vie à mes semblables, qu’importe leur penchant autour de la justice. Comment pourrais-je me regarder sur le reflet de l’eau après ça ? Comment faisait-elle pour être aussi forte ? Elle-même avait du vivre des atrocités sans nul comparaison, peut-être avait-elle déjà tué pour sauver sa vie ou celle de ses compagnons … C’est un choix difficile qu’il faut faire … Jurer que sa lame ou ses poings ne servent qu’à protéger ses proches ou celui de s’en servir pour faire du mal aux autres. Finalement, c’est un choix entre l’orgueilleux égoïste et l’humble altruiste qui s’offre à tout le monde.

Cylicia – Je ne sais jusqu'où vous votre voyage vous mènera mais un bon conseil, préparez vous à faire plus d'un choix difficile... Plus d'un parmi mon peuple ont eut le même problème que vous. J'imagine qu'à Sylfaën, il n'y a ni esclavage ou autres folies que peuvent faire certaines races. Ainsi, beaucoup des miens ont également du mal à s'adapter au monde extérieur à la Tour Blanche. En réalité il n'y a rien d'étonnant à cela, plus je voyage et plus je me rends compte de la corruption ambiante dans ce monde... Et dans toute cette misère s'il y a bien encore une chose qui m'échappe, c'est le plaisir que se font les uns sur les malheurs des autres. La jeune Stryge s’arrêta un instant avant de reprendre. Enfin, je m'égare, finit-elle par dire amusée. Sachez en tous cas que la confusion que vous ressentez est tout à fait justifiée, c'est un monde de fous...

Je ne pouvais qu’acquiescer et hocher de la tête pour manifester mon accord sur ce point, les horreurs sont nombreuses en ce monde et les différentes races foulant le continent ont chacun leur difficulté, leur moment de chaos. Les Lycans ne sont pas les seuls à avoir un funeste passé, les Stryges également, à ma connaissance, avaient connus, il fut un temps, des conflits intestinaux comme à Spelunca. C’est d’ailleurs pour toutes les raisons qu’elle a cité que je m’en étais allé de Sylfaën. Il me fallait voyager et découvrir les différentes cultures qui s’offraient à moi, je pouvais potentiellement en tirer des connaissances et un recul sur moi-même bien plus conséquent. Savoir où se situer dans ce monde est quelque chose de primordiale pour une meilleure connaissance de la justice. Si j’ai décidé de quitter les terres qui m’avaient accueillies il y a quelques temps, c’était dans le but de développer ma culture, de découvrir et comprendre les différentes communautés qui peuplait ce monde, de voyager à arpenter de nouveaux décor, pour vivre ma liberté loin de mon passé. Ce rappel à l’ordre fut presque aussi foudroyant que la foudre elle-même. La sérosité et la sincérité dont avait fait preuve Cylicia pour m’éclairer et me réconforter sur cette terrible nuit m’avait ouvert les yeux. D’une certaine manière, elle avait sue utiliser les bons mots pour me tirer vers le haut. Son expérience parlait pour elle …

Lonann Alhazred – J’en viendrai presque à croire qu’il faut un cœur de pierre pour surmonter ces épreuves … Instinctivement, je m’étais retourné et m’excusais de l’offense que je venais de proférer sans mesurer mes paroles. Excusez-moi. Mon regard croisa quelques secondes celui de la Stryge puis, je me tournais à nouveau face à l’immensité de la savane et m’asseyais pour méditer et continuer ma garde. Je ne dois peut-être pas avoir les épaules pour tout ça … mais vous pouvez être sûr que je resterais fidèle à mes convictions. C’est bien ce que m’aura appris toutes les horreurs que j’ai pu voir jusqu’à maintenant.

Sans m’en rendre compte, j’avais retrouvé le sourire. Mon esprit était apaisé maintenant. Je savais ce qu’il me restait à faire. Alors que les étoiles se rendaient complices de notre discussion, des traits bien plus clairs se dessinèrent petit à petit autour d’un chemin d’étoile, comme si la toile qui les maintenait dans le ciel s’était éclairée pour illuminer dans le ciel. La nuit touchait bientôt à sa fin, le ciel commençait déjà à s’éclaircir au loin faisant disparaître la toile à l’horizon. Nous n’aurions pas beaucoup dormi cette nuit, mais il restait encore un peu de temps avant que le soleil ne se lève vraiment. Il fallait se reposer si nous voulions continuer notre excursion dans la savane. Il me restait encore une dette envers Cylicia. Et je ne comptais pas me retirer sans m’en être acquitté !

Lonann Alhazred – Je vous remercie de m’avoir écouté et d’avoir pris le temps de me répondre franchement. Cela m’a fait plaisir. Dis-je d’un ton plus joyeux que précédemment. Je vais continuer à monter la garde si cela ne vous embête pas.

Dormir peu ou un jour sur deux n’était pas quelque chose d’impossible ou d’insurmontable pour un être de la nuit comme moi. Mes séances de méditations me permettaient de récupérer convenablement, mais il me faudrait remplir mon estomac un peu plus sérieusement dans la journée. Les épreuves qui nous attendaient n’allaient pas êtres simples non plus.

Cylicia - Le plaisir est pour moi, répondit-t-elle du tac au tac. Réveillez-moi avant que le soleil ne se trouve ici s'il vous plait... Bonne nuit à vous Lonann...

A l’entendre ainsi parler, on avait l’impression qu’elle lui restait encore de l’énergie. Autant de ténacité, j’en restais sidéré … Mais peu à peu, le monde des rêves vint l’emporter, Darmok blottit contre elle. Durant cet instant, je m’étais remémoré les paroles de la jeune Stryge, ferme quant aux gens malles intentionnés quitte à faire couler le sang. Une vision plutôt barbare à première vue. Au final, ne s’agirait-il pas simplement d’une question de point de vue quant à la justice de ce monde ? La véritable question que je devrais me poser … ce n’est pas celle-ci … Que suis-je prêt à faire pour protéger ce qui m’est cher ? C’est la raison pour laquelle je me suis entraîné si durement toutes ces années, c’était une promesse que je m’étais faites il y a bien longtemps. Si je ne parvenais pas à garder la tête sur les épaules à la moindre difficulté, alors tout ce temps passé à m’entraîner n’aurait servi à rien. Aujourd’hui encore, j’ai peur de blesser les gens qui m’entourent. Je me refusais de faire couler le sang, mis à part pour la chasse bien évidement. Je devais me ressaisir ! Le voyage ne faisait que commencer, pas question de courber l’échine jusqu’à ce que je termine mon voyage !

Ainsi sous le ciel étoilé disparaissant peu à peu à la venue du soleil, je restais figer sur mon promontoire de pierre à fixer l’horizon. En tailleur face à l’Est, j’attendis patiemment que les premiers rayons du soleil viennent me caresser le visage et me réchauffer. Le temps défila à toute vitesse, accompagné d’une légère brise rafraîchissante avant que le réconfort du soleil n’atteigne ma peau. Je pouvais sentir l’énergie qu’il me transmettait, apaisant définitivement mon esprit surmené. La nature commençait à se réveiller également, sortant du silence de la nuit. Quelques oiseaux assez imposants passèrent non loin de là sans qu’ils ne nous prêtent la moindre attention, d’immense vautour à la recherche de leur petit déjeuné. A mesure où le soleil se levait, l’on devinait la forme de suricates sortant de leur cachette, debout sur leur patte arrière, flairant les alentours pour s’assurer qu’il n’y ait pas de prédateur dans les parages. La vie reprenait son court naturelle et là contempler se réveiller me rappelait étrangement ces réveils en Sylfaën, accompagné de la mélodie des oiseaux chanteurs.

Je fis un rapide tour de environs du regard puis, après m’être assuré qu’il n’y avait pas âme qui vive outre les animaux matinaux, je récupérais ma besace et en sorti ma Frestel. Je n’avais pas à m’en faire, je ne devrais pas avoir besoin de garder ce fardeau du passé … après tout, ils m’ont toujours accompagnés, ou que j’aille. Mon bâton sur les genoux, je serrais d’une main le collier en œil de Lynx et portais à ma bouche mon instrument favori, celui qui me redonne le sourire. Alors que les rayons du soleil continuaient à m’inonder d’onde positive, je commençais à jouer un air mélodieux, réveillant petit à petit la Stryge endormie et son petit compagnon. Elle m’avait demandé de la tirer de son sommeil avant la levé du soleil, mais j’avais jaugé qu’elle avait besoin d’un peu de repos. Même si quelques dizaines de minutes ne changeaient pas grand-chose, elle se reposait encore à l’ombre derrière mon trône de pierre. L’air s’était déjà réchauffé et le ciel s’était presque entièrement éclairci, pas un seul nuage dans le ciel. Rien ne servait de se presser pour le moment, nous partiront chasser quand le moment sera venu.

L’air de musique avait, semble-t-il, atteint son objectif, Cylicia émergeait du sommeil profond dans lequel elle s’était engouffrée quelques heures plus tôt. Cela ne faisait que très peu de temps pour se remettre sur pied, mais au vu de ses qualités de guerrière et sa force de vivre, j’imaginais que cela soit suffisant pour reprendre la route. Loup, qui avait pour habitude de dormir régulièrement à petite dose, m’avait tenu compagnie tout du long de la nuit, se promenant à droite à gauche et jouant avec les insectes de la savane. Ce dernier m’avait rejoint sur le rocher, face au soleil, réchauffant sa fourrure sombre. Machinalement, je passais ma main le long de son dos, son pelage sali par nos péripéties était tout chaud, j’en profitais pour le dépoussiérer un peu et retirer les quelques branchages d’arbre mort qui s’était immiscé entre ses poils.

Lonann Alhazred – Bonjour. Saluais-je Cylicia de la tête. Vous vous êtes bien reposé ?

Le sourire au coin des lèvres, la mauvaise nuit passée était maintenant derrière moi et une nouvelle journée s’apprêtait à voir le jour …

Toujours en tailleur face au soleil, je pouvais entendre Cylicia se redresser derrière moi, marmonnant un bref résumé de sa nuit au saut du lit. Il était évident qu’avec aussi peu de sommeil et le maigre repas de cette nuit, la jeune Stryge ne soit pas encore rétablie. J’avais su tirer profit de ce moment paisible pour me ressourcer à ma façon, en méditant et en rentrant en symbiose avec la nature qui nous entourait, bien que différente de celle que je connaissais. Cela avait été une découverte et un apprentissage. Je me sentais donc en forme pour entamer la journée qui nous attendait. Mes diverses blessures n’étaient pas encore guéris, mais les premiers soins avaient été efficace et la douleur ne se sentait presque plus, quelques jours de repos et il n’y paraîtrait plus.

Cylicia - C'est à votre tour non?...Dit-elle tout en se relevant. Et merci encore d'avoir commencé la garde, j'en avais bien besoin...

La femme ailée commença son étirement, réveillant les muscles de son corps les uns après les autres. Son visage était encore bien pâle à cause de la fatigue et du réveil difficile, d’autant plus que les effusions de sang de cette nuit n’avaient pas été sans conséquence pour elle. Il en revenait tout de même du miracle qu’elle s’en soit sortie aussi bien. Et maintenant que nous étions tous fin prêts, il était temps que l’on parte en chasse ! Nous en profiterons pour manger à notre faim et reprendre des forces. Alors que le soleil entamait maintenant son ascension dans les cieux, illuminant petit à petit la savane qui nous entourait, je me tournais vers Cylicia et la rassurait d’un sourire chaleureux.

Lonann Alhazred – Ce ne sera pas nécessaire de prendre ma suite, j’ai pu me ressourcer tout en faisant la garde. Descendant de mon trône de pierre, les mains sur les hanches, je poursuivis énergiquement. Je me reposerais après un repas grandement mérité ! Je vous propose donc que l’on aille chercher notre déjeuner.

Les Lycans avaient ceci de particulier, ils ne subissaient pas la fatigue de la même manière que les autres races. Être de la nuit, à vivre avec Loup, j’avais finis par m’accommoder à son rythme de sommeil, me reposant régulièrement dans la journée. Même s’il m’arrivait parfois de dormir comme la plupart des gens lorsque je suis sous un toit, lorsque je me reposais à la belle étoile, la vigilance était de mise et il me paraissait prudent de faire ce genre de petite sieste à répétition. L’avantage de ceci, c’est que l’endurance dont on faisait preuve s’en trouvait renforcé, mais avec l’art que m’avait enseigné Père et mon perfectionnement à travers les années à communier avec la nature, je pouvais désormais récupérer en entrant en harmonie avec ce qui nous entoure. Il faut bien peu de chose pour se remettre d’aplomb à l’aide de la nature, il suffit d’y être attentif. Par ailleurs, la musique à ce même effet lorsque l’on parvient à saisir la mélodie que l’on entend. C’est ce don j’ai pu profiter durant le sommeil de Cylicia …

Pour autant, la nourriture venait à manquer et mon estomac semblait s’animer de vive voix. Il devenait nécessaire, si ce n’était urgent, de partir en quête de victuailles à travers la savane. Rangeant méthodiquement mes affaires dans ma besace, je gardais néanmoins ma Frestel en main afin de reprendre un air plus enivrant et énergique. Et lorsque la Stryge, fin prête, me rejoint accompagné de Darmok, Loup débarqua à son tour et ainsi reprit le court de la mélodie et celle de nos aventures prochaines …

Malgré l’entrain dont elle faisait preuve, la pâleur de sa peau et la petite mine qu’elle affichait trahissaient la fatigue qu’elle supportait à ce moment. Mais Cylicia n’était pas du genre à s’apitoyer sur elle-même et allait toujours de l’avant, preuve de sa détermination sans faille. De la même manière que ma mélodie au Frestel, de simples mots pouvaient avoir le même effet bienfaiteur sur le moral de la personne à son écoute. Un sourire benêt s’était tranquillement installé au coin de mes lèvres en regardant autant de contraste sur cette même personne. La stryge blanche s’en alla auprès de son ami équidé et lui versa quelques goulottes d’eau, préparant sa monture avant de la monter. Darmok avait, semble-t-il, mieux dormi que son amie, chahutant déjà avec Loup, qui n’était pas sans reste non plus. Tout deux formaient une sacrée paire et le louveteau affichait un sourire radieux en jouant avec son nouvel ami, ce qui avait le don de me faire sourire quand je le regardais ainsi. Il avait bien grandit depuis ce jour…

Cylicia – Voulez-vous monter avec moi ? Demanda-t-elle machinalement.

Je m’approchai à mon tour du cheval de Cylicia et tandis délicatement ma main vers l’avant, attendant que celui-ci s’approche et se frotte à elle. Ce dernier ne semblait pas apeuré de ma présence et s’avança gentiment et me donna satisfaction. Je passai ma main le long de son coup, le caressant un instant, avant de lui demander ce qu’il en pensait.

Lonann Alhazred – Tu veux bien que je monte sur ton dos ?

L’équidé inclina légèrement la tête et vint la poser sur mon épaule tout doucement, me laissant le caresser. Aussi gentil que ses deux autres compagnons, j’acceptai alors la proposition de Cylicia d’un hochement de tête satisfait. Je n’avais pas souvent l’occasion de monter une monture, préférant me servir de mes propres jambes pour avancer, le fait d’asservir un animal pour les fonctions qu’il peut remplir pour la communauté me déplaisant dans un certain sens. Mais cette monture me rappelait quelque peu Hippocampe, la monture de Zayn. Ils avaient l’air d’être heureux aux côtés de leurs amis, ce qui ne m’étonnait pas, connaissant leur cavalier. Je me tournai vers Cylicia, qui s’était installé sur le dos de sa monture et lui tendis mon bras pour qu’elle me hisse sur le dos de son compagnon. Fin prêt pour partir en chasse de nourriture, l’équidé s’élança au milieu de la savane avec la jeune Stryge à ses rênes. Loup, qui s’était réfugié dans ma besace, bientôt trop petite pour lui, avait sortit sa tête hors du sac et sa langue de sa bouche, profitant du paysage à l’arrière  du cheval.

Nous avançâmes ainsi durant quelques temps sans rien croiser sur notre chemin. La savane était immense et pourtant, à part quelques charognards volants au loin, nous n’avions croisés aucune proie pouvant satisfaire notre faim. Les gargouillis se faisaient plus récurrents pour Cylicia et moi-même. Le soleil continuait à s’élever dans le ciel, ce qui nous laissait encore du temps avant qu’il n’atteigne son zénith. Par cette chaleur, il serait préférable que l’on s’alimente rapidement pour éviter de s’écrouler de fatigue, la nuit n’avait pas suffit à l’effacer entièrement.

Lonann Alhazred – C’est étrange, dis-je d’une voix hésitante, j’ai l’impression de voir un nuage de poussière s’élever au loin. Je désignai du doigt le nuage qui semblait se rapprocher sans pour autant venir à notre rencontre. Peut-être que nous tenons quelque chose pour le repas ?

A mesure où l’on se rapprochait de ce nuage, son étendu semblait s’élargir à vu d’œil, comme si le point que j’avais aperçu s’était agrandi peu à peu. Il était évident que la masse qui se déplaçait devant nous se trouvait être en groupe, avec plusieurs des siens, et suffisamment costaud pour faire gronder la terre. Ce ne serait tout de même pas ?!

Cylicia – Accrochez-vous ! Dit-elle de vive voix pour couvrir le bruit cadencé du galop de sa monture.

La stryge blanche orientant les rênes de sa monture vers le nuage de poussière en mouvement, nous tenions enfin une piste pour notre premier repas de la journée. Troupeau animale où nomade en voyage, dans l’un comme dans l’autre, le fait de trouver de la vie sur ce territoire semi-désertique me réjouissait, mais à mesure où l’on se rapprochait de notre cible, j’étais de moins en moins convaincu par ma seconde hypothèse. C’est alors que la proximité nous permit de discerner ce à quoi nous avions affaire, d’immense créature à la carrure titanesque dont chaque pas faisait trembler la terre. Nous avions beau monter un cheval, l’un d’entre eux nous surplombait sans difficulté et ses compagnons n’étaient pas en reste non plus. Plus nous nous approchions et plus le vacarme qu’ils faisaient nous parvenait, camouflant bientôt entièrement le galop de l’équidé. Le visage de Cylicia s’illumina un cours instant avant de reprendre son teint matinale, toujours de vive voix, toujours plus fort.

Cylicia – Des rhinocéros Lonann ! Regardez ! Durant quelques instants, nous restâmes sans voix, silencieux, contemplant le troupeau de rhinocéros amorcer un virage afin de nous éviter. Fébrile, mon regard était resté figé sur les courbes meurtrières situé sur le museau de chacun de ces monstres. Ils sont exactement comme dans mes livres …

Lonann Alhazred – Terrifiant. Murmurai-je pour moi-même.

Initialement, je m’étais proposé à Cylicia pour chasser du rhinocéros à ses côtés et ainsi rembourser ma dette à l’auberge des brigands. Je comprenais maintenant pourquoi le tenancier nous avait averti sur la dangerosité de l’opération, un animal aussi puissant pouvait terrasser n’importe quel aventurier mal préparé, ne laissant derrière lui qu’une simple crêpe humanoïde difformes. Un haut-le-cœur vint me rappeler à l’ordre quant à mon imagination débordante, mon stresse était bien présent, mais il valait mieux garder son sang froid et réussir à remplir la tâche qui m’incombait maintenant. Je n’avais qu’une seule parole.

Cylicia - Vous vous sentez prêts? Me demanda-t-elle. On va en choisir un et le piéger en tenaille... Vous pensez pouvoir y arriver sans montures?

La jeune Stryge se tourna vers moi, attendant ma réponse. Elle n’eut en retour qu’un simple hochement de tête répétitif avant que je ne descende du cheval, me confrontant directement à la stature de ces bestiaux. Je me retrouvais ainsi à l’arrière du troupeau, prêt à cueillir le monstre le plus éloigné du troupeau au moment de la manœuvre. La stratégie adoptée avait toute ses chances de réussir d’un point de vue extérieur, d’autant plus que je pourrai me transformer au moindre imprévu. Pourtant, je bouillonnais de peur intérieurement à l’idée de devoir me confronter à de tels monstres, je me sentais ridiculement petit derrière eux. Tâchant de garder une certaine distance entre moi et le troupeau, je croisais le regard de Cylicia et la rassurais d’un pouce en l’air comme quoi elle pouvait passer à la suite des opérations. Ainsi, elle couperait la route du troupeau, les obligeant à ralentir ou même à les mettre à l’arrêt durant quelques instants, le temps pour moi pour prendre en filature le plus éloigné d’entre eux et de l’écarter davantage du troupeau.

Loup était déjà sorti de sa besace, m’offrant un soutien non négligeable quant à la chasse au rhinocéros que nous allions entreprendre. C’est avec lui que j’avais le plus chassé jusqu’à maintenant et je savais qu’il pourrait m’être d’une aide sans pareil à mes côtés. Déjà, le troupeau avait ralenti et commençait à entreprendre un virage dû à la présence de Cylicia sur leur trajectoire. Plutôt prudent, le troupeau ne semblait pas agressif et préférait éviter toutes confrontations en restant parfaitement groupé et ordonné. Leur formation me faisait penser à celle d’une petite armée de soldat, la prestance et la carrure en plus. Déjà, l’un d’eux s’était démarqué des autres, légèrement plus lent que le reste du troupeau, peinant à rattraper les siens sur leur course tonitruante. Chez les loups et la plupart des animaux vivant en meutes, lors des déplacements, ce sont les plus anciens ou les blessés que l’ont mettait à l’arrière, afin qu’il se sacrifie pour la pérennité du troupeau. Les rhinocéros ne semblaient pas échapper à cette règle de la loi animale, ce qui était plutôt une bonne chose pour nous. Ainsi, je me rapprochais furtivement de ma proie à la traîne et lui montait brièvement dessus avant de lui asséner un violent coup de pied en marteau sur le sommet de son crâne. Mon pied frôlant de peu les redoutables cornes de l’animale, je me retirais aussitôt de ce dernier après m’être assuré qu’il avait focalisé son attention sur moi. Pourtant, quelque chose semblait m’échapper. Le rhino que j’avais provoqué me faisait maintenant face et le sol continuait de gronder. Son regard ne m’inspirait aucunement confiance, préparant sa charge en grattant le sol avec force, la tête baissée, il ne me quittait pas du regard. Loup assurant me arrières, j’espérais simplement que Cylicia n’ait pas eu d’ennui en modifiant la trajectoire du troupeau. Il suffisait d’une tête de mule dans le troupeau pour que la formation se brise et ne retourne contre nous …

Lonann Alhazred – Loup ! ça va être à nous !

Loup – Whôo grrr

Encore et toujours, le sol grondait sans jamais s’arrêter …