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La bise marine s’engouffrait dans les narines de la Stellaroïse. Face à l’étendue de sable et d’eau, elle profitait des dernières lueurs du soleil et des dernières bouffées d’oxygène qu’elle allait avoir pendant quelques heures. Elle avait rejoint la côte plus tôt dans la mâtiné pour observer les tendances des participants : zone de départ pour les recherches, équipements, précautions. Hélas rien de bien phénoménal à prendre en compte pour améliorer son anxiété.

Sortant de sa réflexion, elle attrapa son baluchon, préparé la veille. Elle en sorti une miche de pain et une gourde. Elle n’aura pas l’occasion de manger ou de boire dans cette vaste étendue d’eau salée, aussi elle voulait partir désaltérée et le ventre plein. Elle en profita pour analyser le fonctionnement du respirateur aquatique qui lui avait été fourni à son inscription. Elle n’avait malheureusement pas eut l’occasion de l’essayer, c’est ce qui l’inquiétait le plus.

La jeune femme se redressa et commença à se dévêtir. Quelques pièces d’or acquis en répondant à un questionnaire du Phénix Enchaîné lui avait permis d’acheter une tenue en lin tressée. Cette matière lui permettrait de résister aux intempéries des profondeurs sans avoir l’inconvénient du cuir qui se raidit énormément dans l’eau. Cette tenue, plutôt moulante, lui couvrait quasiment entièrement le corps, ne laissant apparaître que sa tête à partir de la base du cou, ses avant-bras et ses jambes à partir des genoux. Elle rattacha son ceinturon avec le fourreau de sa dague et noua solidement ses cheveux en faisant une longue tresse très serrées.

Elle entreprit de regrouper toutes ses affaires pour les cacher quelque part sur la plage. À l’ombre d’un arbre imposant, elle creusa un trou dans le sable puis le re-boucha et posa  une pierre pour retrouver l’endroit à son retour. Ceci fait, elle se tourna vers le récif et commença à s’enfoncer dans l’eau. Sur les bords de la plage, l’eau était assez chaude, mais plus ses pas la menaient loin du rivage, plus le froid commençait à engourdir ses orteils. Le moment fatidique arrivait, la frontière avec le monde marin était au niveau de son buste et il fallait qu’elle s'équipe du respirateur. Elle installa chaque embout respectivement sur sa bouche et son nez et passa la lanière permettant de maintenir le tout derrière son crâne. La sensation était très étrange, nonobstant l’odeur très désagréable, le débit d’air inspiré était beaucoup plus faible que la normale. « Avec l’effort physique plus l'anxiété, ça ne va pas être simple de ne pas suffoquer… », cette pensée lui glaça le dos. « Maintenant que je suis là, autant essayer. », se dit-elle. Elle donna alors une impulsion sur ses deux jambes en se laissant tomber en avant, pour s'engouffrer tête la première dans les abysses de Sitlantà. Les premiers battements de bras et de jambes se déroulèrent sans encombre, l’eau était claire et la luminosité du soleil levant permettait de bien percevoir le corail qui se dressait à la limite du gouffre, creusé par la Calamité, qui menait vers les profondeurs de la mer Van Halen. 

La cité sous-marine était en vue depuis quelques minutes. Athanasia avait l'impression que ses poumons allaient imploser, mais elle approchait du but. L’affluence autour de la ville reflétait bien l'effervescence du festival annuel d’Ynatlatt. Afin de débuter ses recherches, elle préféra s’éloigner de la ville et parti vers des coins reculés. Plus vite elle en terminera, plus vite elle re-gagnera la surface. Elle arriva vers une zone intéressante, selon elle, assez éloignée de la ville, avec une trajectoire totalement dégagée vers la surface de l’eau et recouverte de plantes aquatiques. Offrant une cachette de premier choix pour les navires coulés non encore découvert. Sur un battement de pieds, la Stellaroïse pénétra dans un amas d’algues hautes. Depuis maintenant quelques heures la visibilité n’était plus aussi bonne qu’au début du périple, mais dans les algues c’était encore une autre histoire. La fatigue commençait à se faire sentir et l’eau salée lui piquait les yeux. À chaque mouvement, ses muscles lui faisaient comprendre qu’ils avaient été trop sollicités. Elle se devait de couvrir la plus grande surface possible avant de remonter, pour être sûr qu’à sa deuxième plongé elle sache déjà où chercher. Pour l’instant la faune ne l’avait pas embêtée, les êtres marins pullulaient ça et là, mais aucun ne semblait vindicatif. La sensation de pression constante et d’enfermement, qu’on pouvait ressentir à cette profondeur, était de plus en plus présente. Ce qui était étrange étant donné l’espace qui se trouvait autour d’elle, mais elle ne sut pas vraiment expliquer son mal-être à l’instant présent.

C’est alors qu’au détour d’une énorme roche, elle aperçu une petite esquif d’environ quatre ou cinq mètres de long. Cette embarcation n’avait pas dû contenir beaucoup d’hommes ni d’objets. On aurait dit une barque de sauvetage ou d’amarrage, aussi peut-être qu’un navire plus imposant se trouvait dans les parages. Pour se donner bonne conscience, Athanasia s’approcha du canot pour l’examiner. Les planches abîmées commençaient à moisir, envahi par la mousse et les coraux, laissant apparaître les varangues de la coque sous le plancher du pont. La jeune femme se faufila dans un interstice pour vérifier que rien n'était dissimulé dans la structure de la barque. Mais après une vingtaine de minutes à faire le tour de cet endroit exiguë, aucun objet de valeur à l’horizon à part quelques morceaux de parchemins fragilisés par le sel corrosif de l’eau de mer. Elle ne prit pas le temps d’observer en détail ses trouvailles et décida de sortir du vaisseau pour continuer ses recherches à l’extérieur. Elle prit la direction opposée à la côte en pensant trouver l’épave du navire principale, mais réussir à s’orienter dans ce bourbier c’était là toute la difficulté de l’épreuve.

Elle ne tarda pas à abandonner et commença à remonter en piqué à la surface, la fatigue devenant dangereuse. Cela fût rapide et les rayons du soleil se mirent à percer l’épaisseur des abysses. Sa tête transperça les vagues  et elle arracha son respirateur pour prendre une grosse bouffé d’oxygène. Elle avait l’impression de sortir à nouveau de prison, un sentiment de liberté et d’apaisement. Elle se laissa flotter sur le dos au rythme des vagues le temps de reprendre des forces dans les membres. Ceci-fait, il fallait rejoindre le bord de l’eau, ce qui n’était pas un sinécure. La houle et les courants portaient et repoussaient inexorablement la jeune femme vers le large. Mais à force de persévérance et de patience, elle réussit et s’étala sur le sable chaud pour reprendre son souffle et ses esprits.

Plus tard, elle alla rejoindre son équipe pour rendre les quelques parchemins. Ceux-ci, a priori illisibles révéleront peut-être des savoirs oubliés, après études du juge de l’épreuve… Elle prit un repos bien mérité à l’ombre de l’arbre où elle avait laissé ses affaires et se promit de faire mieux à sa prochaine plongé. Désormais elle savait où chercher.

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Le bruit des vagues, fracassant les longues plages de sable l’entourant, la sortie de sa torpeur.  Ses premières recherches n’avait pas été fructueuses, elle se devait de redorer le blason du centre de Dùralas. Sa motivation n’avait été que décuplé quand elle avait aperçu la beauté des perles qu’on lui avait données après son retour, elle en tirerait un bon prix. Si elle voulait agrandir son butin il fallait se remettre au travail mais avant cela, elle avait décidé de faire une halte à Sitlantà. Cette brève interruption lui permettrait de glaner quelques informations et de se reposer un peu en restant assez proche de sa zone de recherche. L’effort nécessaire pour rejoindre les profondeurs lui semblait surhumain cette fois-ci, elle en avait même oublié l’étrange sensation du respirateur bas de gamme qui ornait son visage. Les structures de la ville s’approchaient, et en face d’elle se dressait une paroi dont les particularités physiques échappaient à ses connaissances. Elle posa la paume de sa main contre la barrière d’oxygène et la laissa traverser, entraînant son corps avec elle. La jeune femme sentit le froid des fonds marin la quitter pour faire place à une douce chaleur.

Ces deux pieds reposèrent enfin sur la plateforme qui servait de rue à l’étrange ville sous-marine. Elle se libéra du respirateur pour prendre une grande bouffé d’air iodé et après quelques minutes de repos, pour reprendre son souffle et ses esprits, elle se releva et arpenta le dédale de la ville. Le spectacle était bluffant mais aussi effrayant. Ses phobies la tiraillaient, et l’étrange sensation de vide lui provoquait des vertiges insupportables. Elle surprit quelques conversations sans importances sur les épreuves, la ville étant en ébullition à propos de celles-ci, et des histoires sur des trésors perdus pullulaient ça et là. Rien de probant, ni de vérifiable. Après avoir emmagasiné un maximum d’informations, toutes plus inutiles les unes que les autres, elle décida qu’il était temps de replonger et se dirigea vers une des nombreuses parois d’air respirable. Elle réajusta son accoutrement et s’équipa de son respirateur avant de s’élancer dans les profondeurs obscures qui encercle cette ville pleine de surprises.

Elle essaya de retrouver les traces de sa précédente recherche, elle se souvenait vaguement de la direction qu’elle avait prise après s’être approché, sans l’atteindre, de Sitlantà. Mais après une longue nage effrénée, impossible de retrouver l’amas d’algues et de plantes aquatiques qui lui avaient permis de tomber sur la première embarcation. Perdue, loin des alentours de la ville, une forme humanoïde attira son regard. Celle-ci était encore assez loin, mais se déplaçait étrangement. Comme portée par les courants, dressée à la verticale, empreint d’une translucidité horrifiante. Cette être, semblait entièrement composé d’eau. Ne connaissant pas ce genre de personne à la surface, elle préféra s’en méfier et commença à nager dans la direction opposée. Mais au bout de quelques battements de jambes, elle sentit une étreinte autour de ses membres, l’empêchant de bouger et la contractant de plus en plus. Au bout de quelques secondes, sa claustrophobie commença à atteindre son paroxysme, essayant de crier dans son respirateur. Une force invisible la fit pivoter et elle se retrouva nez à nez avec l’humanoïde. Son visage était beau, il semblait être celui d’une femme cristallisée sous forme aqueuse. Sa bouche s’ouvrit comme pour parler, mais aucun son n’en sortit. Le visage de l’élémentaire se tordit et Athanasia se fit projeter à une centaine de mètres, comme une feuille soufflée par un vent violent.

Elle se réveilla, sans doutes quelques minutes après, encore sonnée par sa collision avec un flan de crevasse sous-marine. Ses articulations douloureuses refusaient le moindre effort, son coeur battait encore au rythme de sa précédente montée d’adrénaline. Elle regarda de droite à gauche, a priori il n’y avait plus aucune trace de son ennemie. En faisant progresser ses mains contre la roche, elle sentit une espèce de corniche sous ses doigts, une prise. Elle se dressa et força son corps à obéir aux ordres de mouvement pour l’atteindre.

 
En face d’elle, un trou d’une bonne envergure et dont la noirceur laissait présager une certaine profondeur. Encore sous le coup du traumatisme de sa terreur de l'enfermement, elle s’engouffra dedans, la peur au ventre, heureusement qu’il y avait assez d’espace dans cette cavité sinon elle aurait déjà fait demi-tour. La progression était difficile, car dans l’obscurité la plus total, mais au bout de ce qui lui semblait être une dizaine de mètres, elle aperçu une lueur. Elle arriva à ce qu’elle pensait être le fond de la grotte, la lumière provenait d’une autre cavité vers le haut. En suivant ce nouveau chemin, elle sentit sa tête émerger de l’eau.

 
Émerveillée par ce spectacle et en même temps torturée par ses démons, elle se trouvait dans un espace exigüe hors de l’eau, piégé au milieu de la roche. Une roche si particulière, qu'on aurait dit que la lumière en émanait. Le mystère de l'éclairage de cette alcôve restait entier. Des trésors, sans doutes oubliés avec le temps, jonchaient le sol. Tout n’était pas forcément de valeur, il y avait quelques pièces de métaux précieux mais surtout des parchemins et des objets de la vie commune. Il commenca à remplir son sac avec quelques pierres qui lui semblaient précieuses, elle trouva ensuite une boîte dont le bois était scellé par un métal doré. Elle se permit de l’ouvrir, en se disant que les anciens propriétaires n’en aurait sans doutes plus besoin. Il y trouva, avec une petite déception, un simple parchemin où elle pu lire ces lignes :

Elle la referma en laissant le parchemin dedans, peut-être aura-t-il de la valeur ? Le nom Ripanah lui disait quelque chose, comme si elle l’avait entendu à Sitlantà, sans en être certaine. Elle n’arrivait pas à se concentrer sur la signification du texte, tant la caverne l’oppressait. Elle n’avait qu’une hâte : partir au plus vite, aussi elle se dépêcha d’attraper encore quelques dorures.

Un sifflement assez étrange la fit se retourner, révélant juste derrière elle un énorme reptile couvert de pique : un basilic. Elle savait qu’elle n’était pas de taille, mais la bestiole lui barrait la route. Elle reposa sa respiration autant que possible, essayant de ne pas céder face à la terreur. Elle aurait aimé prier une divinité en ce moment, la lucidité étant insuffisante pour faire face. Elle patienta, mimant la sérénité. Attendre était la meilleure défense, c’est en choisissant le moment opportun pour s’enfuir qu’elle sortira de ce pétrin. Les yeux perçants du Basilic ne devait pas percevoir grand chose en ce-moment, ses rétines étant prévues pour explorer les fonds marins sans lumière, c’était sa langue qui lui permettait d’enregistrer les fluctuations thermiques.

Sur un coup de folie, elle donna un violent coup de pied dans le sol, espérant que les résidus de sable et de roche, projeté dans sa gueule, brouille sa perception des mouvements de la jeune femme. Le reptile se jeta alors sur Athanasia qui plongea de côté, sa dague à la main, pour entailler la bête. Le basilic poussa un gémissement très désagréable et s'étala sur le sol. Probablement encore vivant, la Stellaroïse enfila son respirateur aquatique le plus vite possible et déguerpi de la caverne par là d’où elle venait