Weissaupt, le fort glacé du nord, avait enfin du bois de sureau en son sein et la douce chaleur du feu brûlant dans la cheminée réchauffait l'intérieur des murs glacés, et cela, pour la première fois depuis bien des années. Le stockage de bois de chauffage ayant l'inscription " bois de sureau" était remplit et Greil avait cumulé assez de stères de bois pour se chauffer cet hiver et de sureau en matière première pour sculpter ce qu'il souhaitait. Notre ancien général avait également besoin d'un autre bois : le bois de cerisier. Ce bois était d'une grande souplesse, idéal pour la sculpture et c'était également un résineux. C'est-à-dire un très bon bois à travailler, qui vieillit très bien, mais sans doute le pire bois de chauffage qui soit. Fumée abondante et odeur nauséabonde garantie pour très peu de rendement de chaleur. Cependant, notre combattant avait besoin de ce bois d'arbre fruitier pour exerçait son métier de sculpteur.

Ce fut donc une première dans ce nouvel endroit, ce nouveau bois. Les bûcherons de métiers, faisant ce travail pour en vivre, avaient indiqué au général que cet endroit était de loin le plus généreux en ce qui concerne le bois de cerisier. Elincia avait tenu à venir, voulant 'escorter' son général ou plutôt profiter de sa compagnie lors de la coupe du bois que Greil faisait en solitaire jusque-là. La vampire était, certes, une tacticienne hors pair et une espionne de renom, mais le métier de bûcheron était un vrai mystère pour elle. Aussi, ce fut avec une vampire qui appréciait cet instant de pause allongée sur l'herbe que notre homme fit son office à grand coup de hache sur un vieux cerisier qui ne devait plus fournir de fruits depuis bien des saisons, mais qui fournirait un excellent bois de sculpture. Le cerisier est un bois plus tendre et doit donc être coupé avec plus de force. Il est également un bois plus lourd, indiquant que les fagots seraient moins volumineux. Ce fut donc avec une peine plus élevée que notre homme dut fendre le bois et couper les bûches pour les mettre en fagots tandis qu'il regardait les cerisiers encore enneigés et dépouillé de toutes cerises. Tandis que notre homme chargeait les fagots sur son dos et sa monture cornue, notre homme laissa échapper une petite phrase pour lui-même, mais qui fit sourire la vampire tant elle était décalée avec la situation actuelle.

Greil : Je mangerais bien un clafoutis, moi. Ça fait des années que je n'en ai pas mangé.

Une chose à faire éventuellement si Elincia souhaite lui faire plaisir lorsque ce sera de nouveau la saison des cerises. Mais est-ce que le général survivra à la cuisine de la vampire ?

Ce fut donc la seconde fois que Greil allait au Bosquet de cerisiers. Ce magnifique bosquet d'arbres fruitiers ouvrant l'apétit faisait envie au général, cet endroit devait sans doute etre un paysage de quietude de toute beautée lorsque les cerisiers sont en fleurs. Un paysage d'automne à contempler au moins une fois. Malheureusement, au cœur de l'hiver, l'endroit semblait plus désolé avec ces troncs tortueux dépourvus de feuilles. Aujourd'hui, cependant, l'endroit semblait plus chaotique que d'habitude. Une tempête ou un orage assez violent semblait avoir frappé les lieux et les arbres avaient subi pas mal de dégâts.

Les tempêtes sont dévastatrices et, contrairement aux bûcherons, peu sélectives concernant les plantes qu'elles frappent. Greil fit donc le tour du bosquet pour évaluer les dégâts. Certains jeunes arbres pouvaient être redressés, d'autres étaient condamnées et beaucoup de branche étaient brisée ou pendaient avec pitiés du haut des arbres brisés. Aujourd'hui point d'arbres à abattre pour le général et Greil allait recueillir le bois brisé, soignant les arbres comme il peut et emportant les morts laissés par cette tempête. Après tout, il fallait soigner et libéré l'eau prisonnière de ce sous-bois après tel orage. Ce fut un travail de longue haleine et ce ne fut qu'a la tombée de la nuit que notre homme arrêta son office. Les arbres vivants étaient débarrassés de leurs branches mortes et pourraient de nouveau croître au printemps. La terre pouvait de nouveau boire l'eau de pluie sans que sa végétation n'en périsse noyée dans l'eau stagnante. Certes, une Dryade aurait fait un bien meilleur travail, mais il est du ressort de tout un chacun d'entretenir les forets quand elles ont besoin d'aide. Regardant le bois collecté, parmi les branches et débris se trouvaient plus d'une pièce digne d'être sculptée. Ce fut donc une bonne récolte et un soin pour un petit bosquet en somme.

De retour dans le bosquet de cerisiers après quelques jours, le premier réflexe de l'ancien général fut de regarder l'état de celui-ci. Après la tempête qu'il avait essuyé, ce bosquet s'en était retrouvé quelque peu meurtri et Greil avait fait ce qu'il pouvait pour aider celui-ci à repartir, soignant les arbres qu'il pouvait soigner et débarrassant la forêt de ce qui était mort et encombrait. Comme notre homme s'en doutait, la nature avait principalement repris ses droits. Les arbres blessés repartaient en pousse pour la plupart, le sous-bois se recomposait et les branches mortes ne faisaient plus barrage à l'écoulement d'eau naturel. Cependant, quelques arbres un peu trop blessés par l'orage n'avaient pas eu cette chance. L'un d'entre eux avait été frappé par la foudre et avait définitivement rendu l'âme.

Ce furent donc ces arbres que notre général décida d'abattre et de récolter pour leur bois. Morts parmi les vivants, ces arbres n'apporteraient que des parasites au bosquet et il fallait les retirer. Notre homme fit ainsi ce qu'il avait à faire. Faisant résonner sa hache sur le bois mort pendant qu'il abattait ces arbres, ne laissant qu'une souche destinée à la végétation environnante. Il arrive parfois que d'une souche d'un arbre mort, une autre plante naît, parfois le même arbre, parfois autre chose qu'un arbuste. Une fois abattus, les troncs des arbres morts furent tirés hors du bosquet puis doucement débités en pièces de bois bien épaisses. Certaines finiront en bûches pour chauffer d'autres en pièces a sculpter. Quant au branchage, il n'est pas oublié et servira d'excellent bois d'allumage ou d'ornement pour certaines sculptures une fois séché.

Une fois l'office terminé, ce fut une récolte légère mais efficace qui fut chargée sur la monture temporaire du général afin d'être transportée à Weissaupt. Beaucoup de ce bois allait servir à la sculpture dans un avenir plus ou moins proche.

Notre duo venait de quitter le bosquet de sureaux et avait déposé son chargement dans la charrette prévu à cet effet. Il lui fallait donc maintenant se mettre en route vers le bosquet de cerisier afin de continuer la récolte de celui-ci avant de s'en retourner à Weissaupt. Contrairement au sureau qui allait servir à la réparation de charpentes, de sols et d'autres parties du fort étant invisibles à ses occupants, le cerisier allait être particulièrement visible. Le recouvrement du sol, mais aussi les meubles seraient fait à partir de ce bois. Ce sera donc des troncs bien spécifiques qui seront choisis ici. Pas de tronc long et droit pour faire des planches, mais bel et bien quelque chose de large dans lequel des meubles peuvent être sculptés pour une partie de la récolte, mais aussi de quoi faire un pageau et les planches nécessaires pour faire des parquets. Il fallait donc un bois de qualité, mais aussi d'une esthétique particulière.

Le bois brut sera lasuré pour être protégé, mais celui-ci doit aussi être sans défauts ni aspérités. Ce fut donc plus un travail de recherche et d'observation qu'un travail manuel qui sera a effectuer dans ces fameux bois. Il fallait trouver l'arbre le plus parfait possible, le couper sans l'abîmer puis le travailler avec le plus grand soin. Un travail d'observation qui sera suivit par un travail de précision en somme. La recherche de ce fameux arbre fut la partie de leur travail la plus longue et ce ne fut qu'une petite heure avant le coucher du soleil que notre duo fini par trouver un cerisier qui correspondait à leur attente. Pour un tel arbre, nulle hache ne doit être utilisée, mais des cordages solides pour retenir la chute et une scie bien affûtée qui doit être maniée avec précaution et par deux personnes.

Ce fut donc après une belle séance d'encordage de l'arbre choisi que nos deux amis purent sortir la longue scie à bois pour couper proprement celui-ci. Malheureusement, cela se fit à la lumière d'une lanterne, car le soleil avait décidé de lentement fausser compagnie à nos deux compagnons d'aventure pendant leur séance d'attache. La nuit en forêt apporte son lot de calme et de quiétude, uniquement perturbée par le bruit de la scie et le craquement de certaines branches quand le poids de l'arbre fut passé de son tronc aux cordages. Nos deux hommes purent donc coucher celui-ci sans l'abîmer et le transporter jusqu'à la charrette. Ce grand cerisier sera débité plus tard, à la lumière du jour et à l'abri dans l'atelier de Weissaupt, avant d'être transformé en meubles et parquet.

Notre combattant arriva bientôt à la seconde de ses trois destinations du jour. Après avoir pris un peu de sureau au précédent bosquet, notre homme arrivait enfin au bosquet de cerisiers. Le soleil venait de passer le cap de son Zénith et la charrette n'était qu'au tiers remplie. Tout comme les travaux fait au sureau, la fabrication du mobilier avec le bois de cerisier allait bon train, mais les stocks avaient fondu au soleil. Greil devait encore récolter quelques cerisiers afin de finaliser quelques meubles non prévus et rallonger certains parquets. Une bagatelle qui ne représenterait pas grand chose sur ce qu'il allait réellement collecter.

Le plus gros de la collecte irait dans son stock d'artisanat qui se retrouvait vide avec ces travaux imprévus. L'ancien général avait compté la nécessitée de collecter pas moins de deux cents pièces de cerisier sculptables pour la création de quelques arcs, mais également quelques minerais d'argents que notre combattant savait ou trouver. Un voyage vers Wysteria allait s'annoncer et il fallait un surplus de bois de cerisier pour la finition du bateau ainsi que certaines pièces de navigations. Le reste de l'embarcation étant en chêne ou en sapin, Greil s'en chargera plus tard, une fois la partie en bois de Weissaupt restauré. A l'instant actuel, l'aventurier passa la moitié de l'après-midi à collecter le cerisier, commençant par prendre une petite heure pour marquer quelques arbres et le reste de cette demi après midi à le découper à la scie pour l'abimer le moins possible et à le débiter en fagots transportables en charette.

Greil s'essuya le front du revers de l'avant-bras dans un mouvement de réflexe pour supprimer une gène tandis qu'il regardait son travail achevé. La charrette était remplie aux deux tiers et il restait pile la place pour le sapin dont le général allait avoir besoin. Mais la quantité de bois ramassé en un passage n'allait pas être suffisant pour les stocks et Greil ne pouvait qu'en déduire qu'il allait devoir revenir ici toutes les semaines pendant encore un long moment. Ce fut donc en cette fin de milieu d'après-midi que notre homme, commençant a fatiguer après tout ce bucheronnage, se dirigeait maintenant vers le bosquet de Sapins pour une toute autre collecte.