”Il prend son temps, Muninn … Peut être qu’il est partit, au final.”

Voilà la demi-elfe qui faisait les cent pas dans sa chambre. Au final, pourrait-elle s’expliquer avec Melhyndil, où cela devrait attendre à leur prochaine rencontre ? Mais le corbeau finit par revenir, entrant par la fenêtre. La nordienne glissa alors la tête dehors, juste à temps pour voir l’archer entrer dans le bâtiment. ”Génial, il était encore en ville. C’est parfait.” La nordienne ramassa rapidement son foutoir, balançant son sac de voyage et son équipement de combat dans un coin, laissant aussi au passage le lit pour Mann qui venait de s’y coucher, lorsque quelques coups furent donnés sur la porte. La jeune femme invita son ami à entré puis referma derrière lui. Plus qu’à lancer la discussion maintenant.

- Muninn t’as retrouvé, c’est bien … t’as passé une bonne journée suite à notre duel ?

Les banalités n’étaient pas trop son genre, mais il fallait bien commencer quelque part, non ? Mais de nouveaux coups à la porte les interrompaient déjà. ”Sans doute le repas cette fois.” Et, comme de raison, deux nains se trouvaient dans le couloir à attendre qu’on leur ouvre. Le premier tenait un plateau repas garni de deux grands bols d’un ragoût de viande, sans doute du sanglier ou du cerf, agrémenté de légumes-racines. Il y avait également deux miches de pain frais et du fromage. L’autre transportait un petit baril sur son épaule, deux chopines dans sa main disponible. Hilda les laissa entrer le temps qu’il dépose le tout sur la table.

- Repas et baril d’hydromel, comme demander au patron, lança le nain au plateau. B’soins d’autre chose ou que j’allume votre cheminée ?

- Non, merci, vous pouvez y aller.

- Dans ce cas, bon appétit, les tourtereaux.

Tandis que les deux serveurs quittait la pièce, Hilda jeta un regard glacial et noir à celui qui avait parler … tandis que le rouge lui montait aux joues. Sur le coup, elle eut presque envie de lui claquer la porte au nez, mais se ravisa. Il était vrai qu’avoir pris une chambre pour deux, et puisque le second occupant était présent aussi, qu’il pouvait y avoir mésentente. La nordienne n’aimait juste pas qu’on le lui rappelle. Là voilà qui soupirait donc, histoire de ce calmer, avant de reporter un visage souriant vers Melhyndil.

- Aller, viens manger pendant que c’est encore chaud, c’est moi qui paye.

Et, bien entendue, la demi-elfe se servit de l’hydromel en remplissant presque à ras-bord sa première chope. Puis Hilda prit place à table et entama sa part du repas sans attendre que son ami prenne place. L’émotion ouvrait l’appétit apparemment, alors qu’elle se serait attendu à l’inverse.

Il s’approche et commence à piocher sur le plateau sans attendre. Pendant ce temps, la jeune femme en profite pour lui remplir la deuxième chopine avec l’hydromel, la posant ensuite devant l’elfe.

- Pour en revenir à ta question, j'avoue ne pas avoir compris pourquoi tu es partie si précipitamment après notre duel. Je me suis interrogé longuement, et maintenant que tu es là, tu vas pouvoir éclairer ma lanterne à ce sujet.

La nordienne ne répondit pas de suite, préférant réfléchir à sa réponse tandis qu’elle séparait le fromage en part égale, posant une moitié près de chacun. La question lui fit douter d’un truc : s'était-elle trompée sur les sentiments que pouvaient avoir son ami à son égard ? Mais Hilda ne semblait pas être la seule à se poser la question. Cependant, il lui fallait bien répondre à Melhyndil. ”Bah, si je lui demande pas une explication, j’ai l’impression qu’on va tourner longtemps autour du pot.” Là voilà donc qui prenait une grande inspiration avant de prendre parole.

- Ouais, à ce propos, je suis désolé de t’avoir laissé en plan dans l’arène. Ta … réaction, si je puis dire, m’a grandement surprise sur le coup. Disons que ce n’est pas le genre d’attention que j’ai l’habitude d’avoir. Alors, plutôt que de t’en parler là-bas, j’ai préféré prendre du recul, seule. C’est une mauvaise habitude que j’ai depuis quelques années. Va falloir je travaille là-dessus.

Elle détourna le regard, jusqu’alors poser sur son repas, vers sa chope. Visiblement, Hilda cherchait ses mots, pour une fois.

- Faut dire que la réaction de la foule à pas aidé non plus.

Cette dernière phrase avait été lancée d’un ton froid, contrairement au reste qui avait été sur un ton de neutralité. Ne sachant trop quoi dire de plus, la demi-elfe porta plutôt son verre d’hydromel et en vida une bonne partie, avant de le déposer sur la table et de poursuivre son repas. ”Yep, j’avais raison, c’est du sanglier ça.” À la voir s’empiffrer, il était clair que la jeune femme n’avait pas mangé de la journée. La völva avala une énième bouchée, avant de lancer :

- D’ailleurs, hum, pourquoi … pourquoi tu m’as embrassé dans l’arène ?

Et voilà qui était posé, LA question que la jeune femme se demandait. Rougissant à nouveau à ce simple souvenir, la nordienne préféra caler ce qu’il restait dans sa chopine et la remplir à nouveau, plutôt que d’afficher cette réaction à son ami. "C’que c’est compliqué de parler de ses émotions … quoique qu’Æstrid est comme moi sur ce point. Au final, c’est de famille."

- Alors...Heu...En fait...

"Ça y est, j’ai dit une bêtise, je le savais." Il bafouille, alors que l’elfe semble réfléchir à une réponse plus élaborée. La tête vers son verre de boisson, Melhyndil ne semble pas la regarder sur le coup … jusqu’à ce que son regard, remplie d’une grande intensité, ne se pose sur la demi-elfe, la forçant involontairement à baisser les yeux. Ce genre-là ne lui donnait que l’impression d’avoir fait une bêtise, le genre que sa jumelle avait lorsqu’elle la traitait d’idiote.

- La première réponse qui me vient à l'esprit est... Comme ça, je n'ai pas réfléchi. Mais...

La völva remonte ses yeux vers l’archer, surprise. "Attends, quoi ? Comment ça, sans réfléchir ? C’est pas le genre de chose qu’on fait sans réfléchir … non ?" Pourquoi fallait-il que ce genre de chose soit compliqué, au final ?

- Il est étonnant que nous nous soyons rencontrés aussi souvent sans chercher à le faire. Au fur et à mesure, nous avons appris à nous connaître, et je te considère comme une amie proche. J'espère qu'il en est de même pour toi ?

Hilda ne fit qu’hocher la tête à cette question. Bien sûr que Melhyndil était un ami proche, après tout ce que le duo avait vécu ensemble. Comment pourrait-il en être autrement, d’ailleurs ? Mais, d’une certaine manière, la jeune femme avait toujours été seule. Certes, il y avait Æstrid, mais sa jumelle n’avait jamais vraiment partager les mêmes idéaux que sa sœur, à commencer par leur choix de vie aux antipodes. Hilda se demandait d’ailleurs pourquoi Viðarr l’avait choisit elle plutôt qu’une autre femme du village. Pour ajouter du sang elfique à sa lignée ? Ou celui de Lagertha ? Ou bien encore par amour, tout simplement ? Ils avaient quand même eu leur fille rapidement, ça voulait bien indiquer la troisième option, non ? Mais encore là, la demi-elfe n’avait jamais été forte sur les sentiments, et ne comprenait donc pas si elle en avait ou non pour Melhyndil. Relevant la tête, la nordienne remarquait que celui-ci rougissait également … dû à l’alcool ou à sa question ? Difficile à dire.

- Je n'ai pas considéré la question de savoir si j'avais des sentiments plus profonds pour toi. Est-ce le cas ? Je ne peux pas te dire non, mais je ne sais pas jusqu'où ils vont à l'heure actuelle. Il faut que tu me laisses du temps afin de réfléchir à tout ça, et qu'on en rediscute.

Il semblait un peu hésitant, mais pas comme une personne cherchant à fuir une situation délicate. Mais il paraissait à la fois sincère. "Il est comme moi, j’ai l’impression. Mel a besoin de réfléchir à tout ça."

Et de ton côté, qu'en est il ?

Bien sûr. Évidemment. Lui aussi voulait savoir.

- Alors, euh, et bien, comment dire …

Et voilà, c’était à son tour de bafouiller et chercher ses mots. Comment lui expliquer … sans rejeter son amitié et, qui c’est, une possibilité d’aller plus loin ?

- En vérité, je ne sais pas, moi non plus. J’y ai pas mal réfléchi aujourd’hui, sans arriver à une conclusion claire et nette. Disons que penser et réfléchir à mes sentiments … et bien je sais pas le faire. Je n’ai jamais réussi à mettre des mots sur ce que je ressens, en vérité, et ce, depuis que je suis toute petite.

"C’est pas pour rien que j’ai jamais réussi l’épreuve du chien, aussi. Comment soigner quelqu’un de ses mauvais sentiments si je comprends pas les miens ?" Voilà qui était une excellente question.

- Du coup, je peux pas dire non également, sans pour autant dire oui. J’ai l’impression que seul le temps pourrait me le dire.

Et voilà qu’Hilda porta à nouveau sa chope et avala la moitié de son contenu. N’arrivant plus à rester en place, la nordienne se releva, chope en main, et marcha jusqu’à la cheminée toujours éteinte, portant son regard d’acier sur les cendres, tournant le dos à Melhyndil. Il fallait dire qu’avoir le visage aussi rouge que le sien actuellement, et ce pas que par l’alcool, là mettait mal à l’aise. Devait-elle en dire plus ou pas ? Si oui, cela ne risquait-il pas d’empirer la situation ? Mais peut-être que ce serait le contraire également ? "Oh et puis merde. Il a le droit de savoir." Sans se retourner, au début, la demi-elfe poursuivit.

- Pour être tout à fait franche, c’est la première fois qu’un homme ose m'embrasser, du coup, j’ai paniqué, je sais pas pourquoi. Et comme j’ai dit, la foule a pas aidé. J’ai passé le reste de la journée en dehors de la ville, près d’une rivière dans un vallon non-loin. C’est … le genre d’endroit où je suis bien pour réfléchir et me ressourcer. Bref, tout ça pour dire que là-bas, et bien, je repassais tout ça dans ma tête encore et encore pour tenter de comprendre toute la journée.

Restant debout devant la cheminée, la völva se retourna alors vers son ami.

- Toute la journée, j’ai eu de drôle de sensations en réfléchissant … et que j’ai encore d’ailleurs. Mais je sais pas comment interpréter tout ça. C’est parce que j’ai vu nos esprits totems ensemble que je suis rentré. J’ai pris ça pour un signe de venir en discuter avec toi maintenant, plutôt que d’attendre trop longtemps. Mais en même temps, je me dis que t’as raison, on a besoin de temps pour réfléchir à tout ça.

Et elle en resta là, debout sa chope à la main, à se demander comment poursuivre cette histoire, ne sachant trop que faire. La jeune femme espérait simplement ne pas vexé son ami, ou le forcer à poursuivre dans cette voie si ce n’était pas ce qu’il voulait finalement. Mais peut-être en avait-elle trop dit aussi. Mais voilà, s’il y avait bien un point qui était important chez la nordienne, c’était bien l’honnêteté. Voilà pourquoi elle avait tout balancé au final.

Il avait au moins pris le temps de l’écouter sans l’interrompre, c’était un bon point en sa faveur. Et lorsqu’Hilda se retourna, la nordienne remarqua bien évidemment ses yeux émeraudes posés sur sa personne … de quoi la faire rougir encore un peu. Et bien sûr, ce n’est qu’à cet instant que la jeune femme se fit intérieurement le commentaire que ses yeux-là étaient magnifiques, n’aidant pas la situation.

- Et bien, puisque nous sommes d'accord sur le fait qu'il nous faut du temps, prenons le. Et que dis-tu de voyager plus souvent ensemble, et de voir où cela va nous mener ? Qu'en penses-tu ? Nous aurons du temps ensemble pour découvrir ce que nous ressentons, que ce soit juste de l'amitié, ou plus.

À ces paroles, la demi-elfe revint prendre place à table. Après tout, elle n’avait pas terminé son repas non plus, et vu qu’il était succulent, pas question de gaspiller. La völva avala quelques bouchées tout en réfléchissant à l’idée de Melhyndil. Son idée était loin d’être bête en vérité.

- Mouais, pourquoi pas. Faudrait que je passe à l’Institut par contre, histoire de remplir mon devoir de cheffe de maison. Et j’ai quelques épreuves que je pourrais tenter avant que l'on aille dans mon village pour chercher l’objet dont je te parlais la dernière fois. Par contre, j’ai entendu dire que les oasis d’Harena étaient magnifiques, du coup, on pourrait arrêter à l’une d'elles et voir si c’est le cas, si tu veux. À moins que tu aies une autre idée de destination en tête ?

Hilda n’avait pas trop parler de cette histoire d’épreuves encore à son ami, n’en ayant glissé que quelques mots durant la soirée de sa totémisation. Sans doute était-ce le bon moment maintenant … s’il voulait en savoir plus, bien entendu. Mais elle préféra attendre qu’il lui pose la question, ne sachant pas encore trop comment lui expliquer. Mais l’elfe était curieux, ça Hilda l’avait compris depuis un moment.

La jeune femme fixa ensuite un bref instant le seul lit de la chambre. "Ah merde, on fait quoi pour ce détail ?" Que faire dans ce cas ? Une seule idée venait en tête de la völva

- Hum, par contre, je crois que j’ai pris la dernière chambre de cette auberge. Mais tu peux prendre le lit si tu veux, ça me dérange pas de dormir devant la cheminée dans mes couvertures, j’ai l’habitude.

Hilda n’avait aucune arrière pensée en disant cela, c’était avant tout pour épargner à son ami de devoir chercher un endroit où dormir malgré l’heure tardive. En plus, s’il devait partir tôt au matin, ils n’auraient pas à se chercher en ville ou se donner rendez-vous à un endroit particulier. Et bien sûr, pas question de partager un lit à deux. S’ils devaient se rendre là, c’était définitivement trop tôt.

Il sembla réfléchir un bon moment avant de répondre à ses questions et à sa proposition de destination, laissant le temps à la jeune femme de terminer son assiette.

- Je n'ai aucun souci à te suivre, que ce soit dans la forêt ou aux oasis. Si tu dis qu'elles sont magnifiques, il serait dommage de passer à côté. Par contre, peux-tu m'en dire plus concernant les épreuves dont tu as parlé ? Cela m'intrigue, pourquoi les fais tu ?

"C’est vrai que je lui en ai que vaguement glissé un mot au lac." Mais pas le temps de lui répondre qu’il enchaînait.

- Tu sais, nous pouvons partager le lit, cela ne me dérange pas, et nous sommes deux adultes, et si nous voyageons ensemble, nous allons souvent dormir de manière rapprochée

L’archer voulait dire quoi, par là ? Pas question de dormir aussi proche l’un de l’autre à moins d’y être contraint … ou d’être marié. Mais pour la seconde option n’en serait une que si les sentiments étaient vraiment présents.

- Je ne vais pas te sauter dessus, si cela te rassure, je sais me tenir. Dans le cas contraire, tu as payé la chambre, alors prends le lit, j'ai l'habitude aussi de dormir par terre, aucun souci.

Ah, donc au final, ça semble être la même mentalité pour Melhyndil, du moins de ce que la nordienne pouvait comprendre. Voilà qui était rassurant. Et de toute façon, elle se doutait que Mann irait "dormir" entre les deux afin de veiller sur sa maîtresse.

- Hum, ok alors, on peut partager le lit. Ne soit pas surprit cependant si Mann viens dormir entre nous deux, il est assez protecteur avec moi.

Son visage étant toujours rouge à l’idée, Hilda préféra changer de sujet et répondre à la question de son ami sur les épreuves. Mais avant, elle alla fouiller dans ses bagages, histoire de trouver deux trucs : sa dague cérémonielle, la même utilisée pendant la totémisation de Melhyndil, ainsi qu’une sorte de breloque. La demi-elfe sortit l’arme de sa gaine de cuir afin que l’archer puisse l’admirer en détail, ce qu’il n’avait pas vraiment pu faire la dernière fois vu son état après l’ingestion de la mixture. La lame se trouvait en fait être une défense de sanglier taillé et affûté. Un manche en bois sobrement décoré de runes permettait une prise en main sans risque.

La breloque quant à elle était plus ouvragée. Son centre consistait en une tige métallique supportant trois billes de bois, dont celle du centre était plus grosse que les autres. Celle du haut avait une teinte rougeâtre, brune pour la seconde et beige pour la dernière. La grande bille possédait également une rune peinte en noir. Aux extrémités, se trouvait d’un côté une attache simple, de l’autre une pierre orangé et une longue plume blanche parsemée de points noir. À peine le matos déposé sur la table que la nordienne relevait également sa manche gauche, montrant une nouvelle fois le tatouage sur son avant-droit avant de reprendre place à table, approchant au passage sa chaise afin de montrer ses objets plus facilement à Melhyndil. C’est avec le regard des gens passionnés par leur passe-temps ou leur but dans la vie qu’elle commença ses explications.

- Il est vrai que je ne t’en avais parlé que brièvement au lac. Pour répondre à ta question, les épreuves de mon village, c’est une façon parmi les miens de tester notre force, notre courage et notre volonté, principalement. Pas que ces qualités, mais surtout celles-ci. Elles sont séparées en trois catégories : celles pour les combattants, il y en a quatre, celles des ombres, au nombre de cinq, et celles des völva et autres utilisateurs de magie, au nombre de vingt-cinq. Et avant que tu ne le mentionne, oui, il y en a pas mal plus pour moi, je sais. Ce qu’il te faut savoir surtout, c’est que plus une personne en a réalisées, et plus son statut social est important. Ce tatouage, par exemple est, comme je t’expliquais au lac, la preuve que j’ai réussi les épreuves des guerriers. Chacune est basée sur l’un des quatre éléments. Pour la terre, elle marqua une bref pause pour glisser le couteau plus prêt de Melhyndil, je devais, par exemple, créer ma première arme à partir de rien. J’ai donc moi même chasser le sanglier, ma première prise seule d’ailleurs, et taillé le bois du manche. Cette épreuve était pour démontrer ma force et mon savoir-faire manuel. Je ne pensais pas m’en servir comme couteau de rituel, à l’époque. Mais ça, c’est une autre histoire. Y’a ensuite le feu, où il faut marcher sur cinq mètres de braises sans pousser la moindre plainte pour démontrer notre courage et notre volonté. L’eau, il faut méditer trente minutes dans l’eau glaciale pour prouver qu’on peut être patient et sage malgré notre fureur au combat. Et l’air, bah faut prouver notre endurance en courant sur deux kilomètres. J’ai fait les quatre à l’âge de onze ans, personnellement, mais il est possible de les faire plus tard. J’avais l’âge minimum pour tenter le coup.

La jeune femme marqua une pause, le temps de laisser l’archer assimiler toutes les informations. Connaissant Viðarr, Hilda se doutait qu’il voudrait sans doute tester à au moins une ou deux de ses épreuves lorsqu’ils visiteraient son village, sans aucun doute afin de s’assurer que sa belle-sœur se retrouvait avec une personne compétente.

- La principale raison du pourquoi j’ai commencé aussi tôt, c’est qu’il y a deux façons de devenir le jarl du village : par héritage, si le jarl en place juge l’un de ses enfants être son digne successeur, ou par les épreuves. Quelqu’un désirant se qualifier doit réussir au minimum deux épreuves dans chacune des trois branches que je t’ai cité. Oui, j’ai voulu avoir le titre, et non, comme tu peux voir, je n’ai pas réussi, mais aujourd’hui ce n’est plus important pour moi. Les ombres, qu’on pourrait aussi appeler les furtifs, sont basées sur les cinq sens. J’ai donc réalisé l’épreuve de la vue en veillant sur quelqu’un deux nuits sans dormir, et l’odorat en camouflant efficacement mon odeur aux animaux. Même les plus fins chiens de chasse ne m’ont pas retrouvé. Il me reste donc l’ouïe, le goût et le toucher, mais je ne sais pas si je les ferai, je n’en suis pas encore sûre, vu ce que les trois autres défis demandes.

Elle prit alors la breloque et l’avança vers son ami.

- Ne reste donc que les épreuves plus … spirituel, si on veut. L’avantage principale de celles-ci, c’est que chaque épreuve est reliée à une rune, elle-même reliée aux esprits Gardiens. Ça aussi je crois que je t’en ai glissé rapidement un mot au lac. Mais bref, reprenons du début. Comme chaque défi ici est lié à un esprit, réussir me donne un élément de l’animal qu’elle symbolise, en l'occurrence là t’as une plume de coq. Une fois qu’Ansur m’apporte le fragment d’animal, parce que oui c’est mon animal totem qui m’apporte la preuve de réussite, et bien je fabrique un trophée comme celui-là avec. J’en ai d’autres, sur un bâton que je garde précieusement dans ma chambre de l’Institut, je te montrerais quand on y sera. J’dois ensuite faire un rituel pour me lier de façon définitive avec le nouvel esprit. Les épreuves des guerriers m’ont donner accès aux élémentaires des mêmes éléments, tandis que si je termine ceux des ombres, j’aurais un esprit félin, Kǫttr. Réussir le plus d’épreuves dans cette catégorie m’offre donc plus de choix pour mes esprits de combat, avec qui je dois faire un second rituel pour les invoquer dans ce genre de situation, mais comme chacun représente un aspect différent, les avoir lié à moi plus de protection, si on veut. Par exemple, Hagal, l’esprit du moustique, symbolise la lutte, entre autres. Donc, quand je dois me battre et rester forte, il lui arrive de se montrer pour m’encourager dans cette voie. Au contraire, quand je dois me retenir d’agir, la, c’est plutôt Is qui se pointe, sans que je l'invoque pour se battre à mes côtés. Tu me suis jusqu’ici ?

Il lui fallait souffler après avoir autant parler. Et puis, Hilda avait soif. La demi-elfe s’étira, attrapa sa chope et remarqua qu’elle était vide. Elle s’étira donc à nouveau afin de la remplir avant de boire une bonne rasade, puis poursuivit.

- Si je veux t’en les faire, c’est aussi parce que justement, j’aurais ainsi une certaine puissance avec autant d'esprits pour m’épauler, mais aussi parce que très peu sont devenus maître chaman, comme je pourrais les appeler en dùralassien. Et pour ça, il faut réussir les vingt-cinq épreuves. J’en suis à onze.

Certaines sont simples à réaliser sur papier, mais complexes et longues à faire en vérité. Par exemple, le cheval, qui symbolise les voyages, et bien je dois apprendre trois langues autres que ma langue maternelle en voyageant, justement. J’ai déjà la langue commune du continent, et je suis sur la bonne voie pour les variantes de l’elfique, de ce que je pense. Mais ça reste qu’une langue, c’est un long apprentissage, tu le vois bien avec le nordien. Y’en a aussi qui sont plus complexes tout court, comme par exemple, il y en a cinq qui se font en créant différents types d’enchantements. Et y’a des toutes simples, en général, comme le moustique, justement. Je devais remporter le tournoi de glíma du village, que j’ai réussi brillamment malgré mon handicap.

Et c’est après avoir dit cette dernière phrase que la nordienne alluma n’avoir jamais parler de ce point à Melhyndil : ses genoux. Ou du moins, à ses souvenirs. Elle espéra alors qu’il ne lui pose pas la question, mais bien sûr, la jeune femme lui répondrai s’il la posait. Après tout, l’archer était en droit de savoir, surtout s’ils finissaient par être plus qu'amis. Et voilà encore ses drôles de sensations à l’estomac à cette simple idée. Donc, ce n’était pas la faim qui les causaient, puisque la jeune femme était rassasié. Plutôt que de se questionner davantage, Hilda préféra se lever à nouveau, laissant la breloque et le couteau entre les mains de son ami s’il désirait les observer en détail, s’occupant plutôt d’allumer la cheminée avant que la froideur de la montagne ne descende trop la température de la pièce. Certes, elle était habituée au froid du nord, alors un coup de vent frais dans la nuit ne lui posait aucun problème, mais quand était-il de l’elfe ? Sans doute aurait-il froid sans une source de chaleur. Autre qu’elle, bien sûr. Et juste l’idée d’imaginer l’archer se blottir dans son dos à cause du froid, voilà qui la fit à nouveau rougir. Heureusement, cette fois, son visage était plutôt tourné vers la cheminée, et donc elle était dos à son ami.

Une fois le feu bien pris, la völva revint s’asseoir à table, attendant les questions de Melhyndil, car il en aurait sûrement, connaissant sa curiosité.

Hilda avait bien sûr pris en note mentalement les questions de son ami tout le long de son discours, préférant répondre à l’ensemble à la toute fin, sans forcément y répondre dans l’ordre énoncé non plus. La demi-elfe commença par le remercier pour son compliment sur son travail. Il est vrai que la nordienne y avait mis énormément de temps, et elle était fière des résultats.

- Ouais, j’ai réussi haut la main pour mon épreuve de la terre, et j’en suis pas peu fière. Ils sont rares les gamins de l’âge que j’avais à l’époque à tenter aussi jeune les épreuves, mais moi j’avais un but et je savais où je voulais aller. C’est pas pour rien que les quatre épreuves guerrières je les ai faites en moins d’un an.

Il te faut être du clan pour y participer, hormis sous autorisation spéciale du jarl. Seule la totémisation peut être accordée par une völva sans passer par le jarl, si elle juge l’aspirant digne de confiance.

Elle marqua une brève pause, le temps de rassembler mentalement ses arguments suivants, mais aussi pour laisser à Melhyndil le temps de comprendre ce qu’elle lui avait accordé ce soir-là au lac. Ça n’avait été que leur seconde rencontre à l’époque et, déjà, la jeune femme lui offrait cette chance.

- Pour ce qui est de faire les épreuves en équipe, certaines sont possibles, d’autres non. En fait, ça dépend de ce qui est attendu de l’aspirant. L’élan, par exemple, je dois protéger le clan ou quelqu’un d’un phénomène paranormal ou d’un esprit. Dans ce cas, par exemple, t’aurais le droit de m’aider. Alors que l’aigle, qui demande de créer un type d’enchantement d’un niveau précis, je dois le créer seule. Mais rien t’empêche de m’aider à réunir les ingrédients. Du coup, c’est au cas par cas en vrai. Pour les langues, ça rentre justement dans cette catégorie, donc ton coup de main sera très apprécié, merci.

Ne restait donc que les points liés à son handicap. Il avait posé la question, et, de toute façon, il était en droit de savoir, surtout si leur relation dépassait le stade de l’amitié. La jeune femme poussa un soupir avant de continuer, histoire de s'encourager à poursuivre.

- En vérité, j’ai déjà ce qu’il faut pour être jarl par les épreuves, si je le souhaite toujours, mais c’est mon handicap qui m’en empêche. Pour tout t'expliquer en fait, j’avais treize ans, à ce moment-là. J’avais donc terminé mes épreuves guerrières, deux des ombres et accompli la première des chamans. J’ai eu la folle idée de tenter celle de l’ours, malgré mon âge, au grand dam de ma jumelle et de ma mère qui me croyaient folle. Cette épreuve-là demande de tuer un ours armé d’une simple lance, sans armure.

Son regard devint vite fuyant. Ce que Melhyndil ignorait, c’était qu’il y avait deux points importants sur elle que la demi-elfe n’aimait pas parler : sa défunte mère et son défi de l’ours. Mais voilà, si une crise se manifestait en sa présence, il devait comprendre pourquoi.

- J’ai réussi à le battre, sinon je ne serais pas là pour t’en parler, mais celui que j’ai affronté m’a tranché l’arrière de mes deux genoux avant que je ne l’abatte. J’avais une base en soin grâce à ma mère, j’ai donc pu nettoyer mes plaies et mettre des bandages, mais c’était presque impossible de marcher avec la douleur. J’ai beau avoir une tête de mule, mon corps à ses limites. Il m’a fallu plusieurs jours pour rentrer après ça, trois ou quatre, je sais plus. Quand maman à vu le résultat, elle m’a dit que je pourrais plus jamais me battre comme avant, même si j’avais réussi mon défi. Ça m’a pris plusieurs semaines de convalescence, et des mois pour réapprendre à marcher sans souffrir le martyr à chaque pas. Encore aujourd’hui, il m’arrive d'avoir des crises de douleur par moment, c’est juste pas encore arrivé en ta présence. Entretemps, le jarl de l’époque, Erik Orsbernsson, à décidé que le titre serait attribué par héritage cette fois encore, et donc c’est Viðarr qui est devenu notre chef à sa mort. Et puis, de toute façon, qui voudrait d’un chef avec un handicap ? J’ai abandonné l’idée il y a longtemps maintenant. J’ai plutôt suivi la voie qu’à prit ma mère finalement, sans le côté guérisseuse. J’ai mes bases, mais je n’ai jamais été douée pour ça. Mais devenir un puits de connaissance, là c’est ma force. Et, même si je n’ai plus ma vigueur de jeunesse, comme t’as vu si souvent, j’ai quand même réussi à avoir de nouveau une bonne mobilité en combat. Bon, il faut dire qu’avec mes invocations, ça aide pas mal aussi.

La demi-elfe se releva alors de sa chaise et vida ce qu'il restait dans sa chope, sans se rendre compte sur le coup que l’alcool commençait à faire plus qu’effet, puisque la nordienne en était à son quatrième, ou cinquième, verre. Mais peu importe. La voilà qui tourna donc en partie le dos à l’archer, redressant sa jupe juste au-dessus du genou gauche, révélant cinq profondes lacérations cicatrisées. À voir leurs positions, l’animal avait clairement sectionné ligaments ou tendons, ce qui pouvait expliquer la douleur décrite et le temps de convalescence.

- C’est pareil à l’arrière de l’autre genoux aussi. Maman à fait s’qu’elle à pu pour recoudre, mais voilà, elle avait pas de don magique de guérison, du coup, elle a pas pu faire mieux.

Hilda lui laissa quelques instants pour regarder les marques puis rebaissa sa jupe avant de s’étirer et lâcher un bâillement. Décidément, la jeune femme avait sommeil, mais n’osait pas encore y aller de suite.

- Tu en as bien bavé apparemment, ta résilience est impressionnante et force l'admiration.

Elle acquiesce. Il disait vrai, même si au final, ce n’était pas cette qualité qui lui avait permis de remporter le défi du renard, mais plutôt sa détermination. Car, malgré son handicap, la jeune femme avait poursuivit sans relâche à l’époque, du moins juusqu’à la naissance de sa première nièce et l’adoption de la seconde. Après cela, la demi-elfe avait plutôt préféré aider sa sœur et perfectionner ses aptitudes de völva avec sa mère. Mais Hilda n’avait aucun regret à avoir prit une pause pour cela, au contraire, cela lui avait permit de vivre les dernières années de sa mère avec elle afin de devenir ce que la jeune femme était aujourd’hui, sans compter avoir eu le plaisir de voir ses nièces grandir, presque comme si c’était ses filles également.

- Il se fait tard, je pense que nous devrions nous coucher pour récupérer avant le voyage qui nous attend.

- Ah bah non hein, moi aussi j’veux en savoir plus sur toi et ta culture elfique en général.

La demi-elfe regarda son ami d’un air empli de curiosité à son tour. Son visage rougi, par l’alcool ou la gêne, allez savoir à ce stade de la discussion, était également tout sourire. C’était enfin à son tour de poser des questions, alors il n’était pas question d’aller dormir maintenant.

- J’aimerais surtout en savoir plus sur les elfes en général … et sur toi en fait, j’ai pas mal parler de moi, mais j’en sais peu sur toi. Comment c’est de grandir chez les elfes ? J’imagine que ça prend plus de temps qu’un humain aussi, vu la longévité ? Et puis, c’est quel genre d’enseignement que t’as reçu ? T’avais un talent particulier gamin ?

Elle sembla réfléchir un moment, le regard dans le vide, puis repris d’une petite voix :

- Je connais même pas ton âge ou ton don magique qui t’as permis d’entrer chez les Daemociens … bien qu’en tant que cheffe des Anârciens, j’aurais bien aimé t’avoir dans ma maison.

La nordienne avait terminé sa phrase avec un petit rire, le genre qu’elle n’avait qu’en présence de personne de confiance. Et pour l’instant, il n’y avait qu’en présence de l’archer que la völva osait enfin être une personne plus chaleureuse. Elle ne comprenait pas trop pourquoi c’était ainsi, sans doute que cette histoire de sentiments incompris y était pour quelque chose. Seul le temps le lui dirait.

Melhyndil semble surprit d’autant de questions de sa part. Mais pour autant, l’archer semble d’accord de vouloir lui répondre. De toute façon, la nordienne se doutait que s’il y avait une question à laquelle l’elfe ne voudrait répondre, il le lui dirait. Son ami lui ressert également une autre chope d’hydromel. La völva se doute avoir atteint sa limite de tolérance à l’alcool … mais comme un verre ne se refuse pas dans le nord, elle le prend sans hésiter. Même lui s’en resservait un de toute façon, autant suivre le mouvement.

- Alors pour commencer, si tu souhaites parler de tout cela, voilà pour toi. J'ai trois cent soixante-dix-sept ans, enfin plus pour très longtemps, je vais bientôt fêter mon anniversaire.

Hilda hausse un sourcil de surprise. Melhyndil était aussi âgé que ça ? La demi-elfe ne l'interrompit pas cependant, préférant le laisser répondre, notant au passage la proximité de l’anniversaire de son ami. Voilà qui serait une occasion de lui offrir un cadeau. Mais quoi, là restait à voir.

- Quant à mon don, je peux guérir par le toucher. Je m'en suis rendu compte lors d'une de mes promenades dans la forêt. Je suis tombé sur un cerf blessé, et sans savoir pourquoi je me suis approché, et lorsque j'ai touché sa plaie, celle-ci s'est refermée. Quelle joie j'ai ressentie à pouvoir l'aider, et de le voir repartir comme si de rien n'était. C'est pour cela que je suis chez les Daemociens, parce que j'aime utiliser mon don pour les autres. Je suis désolé pour ta maison, bien que celle-ci aurait pu m'appeler aussi, vu que j'aime en savoir toujours plus et approfondir mes connaissances.

Voilà qui expliquait la raison de son choix. Plusieurs Daemociens avaient des dons de guérison similaires, sans oublier le caractère de son ami qui convenait à cette maison. Mais qui sait, peut-être serait-il jaloux de la grande collection de livres se trouvant dans son bureau, que la demi-elfe laissait à disposition des membres de sa maison. Un sourire en coin apparut sur son visage à cette idée, mais Hilda se garda bien de lui en parler, voulant garder ce point en surprise pour leur passage à l’Institut. L’archer prend alors une gorgée avant de poursuivre, imité par la nordienne.

- Je ne sais pas pourquoi, mais lorsque j'étais jeune, je n'avais pas le droit de sortir, ni ma fratrie. Du coup, je n'ai presque aucun ami si ce n'est cette famille qui, au final n'est pas la mienne comme tu le sais. L'on m'a appris à me battre, même si je n'étais pas très doué sauf à l'arc, et à monter à cheval. Mes parents étant nobles, j'ai reçu également toutes les leçons concernant la manière de se comporter pour notre rang, même si les soirées ont été assez rares. Littérature, histoire, géographie, tout ce qui m'a amené à vouloir voyager et découvrir le monde et les peuples qui le recouvrent. S'il y a bien un talent qui est le mien, c'est la curiosité.

Son regard fixe, dans le vague, semble lui indiquer qu’il réfléchit à tout cela. Vu son âge, ses souvenirs étaient pour sûr bien plus loin que les siens.

- Une fois adulte, il a été plus difficile de me garder au sein du domaine familial, surtout que je n'ai jamais eu d'explication sur la raison. Alors j'ai commencé à parcourir la forêt dans tous les sens. Je n'ai jamais vraiment osé m'aventurer en dehors, ou juste à la lisière, pour pouvoir revenir souvent, et rassurer sur mon état. Tout cela jusqu'à il y a peu, et tu étais là d'ailleurs, et maintenant comme tu le sais, je vais un peu partout.

Elle hoche la tête à cette affirmation. Leur première rencontre, à la fois si proche et si loin, s'était effectivement déroulée à Sylfaën. L’elfe rigole avant de poursuivre.

- Je n'ai pas de référence sur la manière de vivre des humains, outre les mentions dans mes livres, je ne sais donc pas trop si l'on prend plus de temps, mais j'imagine que c'est le cas oui. L'on m'a dit que nous étions plus perfectionniste vu que nous ne sommes pas limité par l'âge, et que nous ne mourrons pas si nous ne faisons pas n'importe quoi.

Il semble alors réfléchir, ou chercher ses mots, allez savoir.

- Je ne suis pas le meilleur pour parler de moi.

- Je n’me considère pas la plus bavarde sur moi non plus. En vérité, je ne me confie qu’aux personnes en qui j’ai une grande confiance.

La nordienne lui avait répondu du tac au tac, le sourire toujours au visage, avant de prendre une nouvelle gorgée d’hydromel. L’archer en profita pour lui retourner quelques questions.

- Mais tu ne m'as pas dit ton âge non plus. Et qu'est-ce que cela fait à être une semi dans une région humaine ? Comment as-tu vécu tout cela, en sachant que tu n'es pas entièrement de la même race qu'eux ?

Alors là, voilà qui était une excellente question. Hilda s’était toujours senti pleinement humaine dans cette communauté, grandissant au même rythme que les autres, voulant défendre les siens coûte que coûte comme tout bon nordien. Contrairement à Æstrid, qui avait toujours préféré crapahuter dans les bois.

- Déjà, pour répondre à ta première question, j’ai trente-et-un an. J’ai rien dit parce que je croyais que tu avais fait le calcul dans ta tête avec tout ce que j’ai dit sur moi, mais c’est pas grave. Et contrairement à toi, mon anniversaire est dans quelques mois, à la veille du solstice hivernal, en vérité.

À son tour de marquer une pause, afin de boire une autre gorgée et de rassembler ses idées, loin d’être claire avec autant d’alcool dans le sang. Comment lui expliquer son ressenti ?

- Pour ce qui est du reste, en vrai, jusqu’à récemment, j’ai toujours agi et vécu comme si je n’étais qu’une simple humaine. Je ne ressentais pas de connexion particulière avec la nature, sans doute dû à mon don, et je n’ai jamais eu l’impression qu’on me rejetait parce que je suis une enfant bâtarde, et demi-elfe de surcroît. J’étais juste une femme avec des oreilles pointues quoi. Mais j’ai l’impression que ça été tout le contraire pour Æstrid. Même si elle est l’épouse du jarl, depuis toute petite, elle a toujours été dans les bois, préférant de loin vivre avec les bêtes qu’avec nous. À croire que nous sommes les deux revers d’une même médaille, de part notre sang jumeau sans doute. C’est en quittant mon village dans le but d’explorer et de parfaire mes connaissances que ça à changer. Là, de parfait inconnus avaient un regard sur moi. À Sylfaën, j’ai été pas trop mal reçu, mais ici à BaldorHeim, avant que je ne sois l’une des championnes du podium de l’arène, les nains me traitaient comme une moins que rien à cause de mon hybridation. Maintenant, y’en a encore qui me rejettent, mais c’est moins pire qu’au début. Du coup, ça me fait encore bizarre quand je suis ici, mais sinon, en général j’ai pas vu de traitement de faveur ou une mauvaise situation lorsque j’étais chez moi.

La jeune femme cala se qu’il restait dans sa chope avant de la déposer sur la table. D’un pas moyennement assuré, Hilda se dirigea ensuite vers la bassine dans un coin de la pièce, histoire de retirer ses traits de maquillage pour la nuit. Mais d’abord, enlever les quelques plumes de corbeau dans sa chevelure blonde était un bon début, ce qui ne lui prit que peu de temps, puisqu’il n’y avait que cinq. Muni d’un linge qu’Hilda trempa dans l’eau de la bassine, la völva commença sa routine de nuit, bien qu’elle avait encore pas mal de questions.

- À quel âge du coup un elfe est considéré comme un adulte ? Et toi, c’est quoi ton ressenti quand tu côtoies les autres races ? T’es pas trop déboussolé en dehors de Sylfaën ?

- Trente et un an, mais tu es si jeune !

Hilda ne fait qu’hausser les épaules à ce commentaire. Elle savait, au vu de l’âge de Melhyndil, que le sien lui paraîtrait bien bas. Mais bon, ça, la jeune femme ne pouvait définitivement pas le changer.

- Les elfes sont adultes à l'âge de quatre-vingts ans. Personnellement, ce n'est pas à cet âge que j'ai commencé à arpenter la forêt, mes parents adoptifs m'ont gardé encore quelques dizaines d'années dans la demeure, en ne sortant que pour des soirées mondaines, ou des occasions rares. J'avais plus d'une centaine d'années lorsque je me suis aventuré loin dans la forêt.

Comme tu le sais, et je te l'ai déjà dit, j'ai une grande soif de découverte, je n'ai donc aucun a priori négatif sur aucune race, et bien au contraire, j'aime à les rencontrer. Et si je pouvais être encore plus intrusif, pour en savoir plus sur la manière de vivre, leur culture, et tout ce qu'il y a à savoir sur eux, j'en serais ravis.

Voilà qui était fort intéressant. Un humain étant adulte à dix-huit ans, il y avait là un bon écart entre les deux. Si la nordienne avait été une elfe de sang pur, elle aurait donc déjà facilement un siècle. Et puis, le fait d’avoir été en retrait du monde si longtemps expliquait la soif de connaissance de son ami.

- Je ne sais pas si c'est mon goût pour l'aventure, ou la découverte, mais personnellement, je ne ressens pas le mal du pays comme j'ai entendu certaines personnes le dire. Il y a encore tellement de choses à découvrir que je suis loin d'avoir terminé mes voyages. Après, même si Sylfaën ne me manque pas, je ne dis pas non plus que je n'y sentais pas bien. C'est juste que j'en ai fait le tour. Alors autant en apprendre le plus possible avant de rentrer, et si cela peut servir, grâce au savoir que j'aurais acquis, alors ce sera parfait. À moins que le destin ne m'amène à ne pas rentrer, mais c'est une autre histoire.

Hilda hocha la tête pour indiquer qu’elle suivait toujours la conversation. Mais son visage trahissait son ressenti : le Nord lui manquait. "Bientôt, je rentrerai. J’ai tant à partager avec les autres … Mais j’ai surtout envie de voir les miens, ça fait presque un an maintenant que je suis partie." Mais voilà, avec ses nouvelles obligations, et cette histoire de sentiments, ce n’était pas encore le temps de rentrer dans son village. Sans doute dans quelques semaines, ou mois, allez savoir.

- Puisque tu te sens beaucoup plus proche de ton côté nordienne, est-ce que tu te rends compte du nombre d'années qu'il te reste dans ta vie ?

Bien entendue que la jeune femme le savait, quelle question.

- Oui, je suis au courant. Mais je préfère de loin vivre dans l’instant présent et profiter au maximum de ma famille. Dans un siècle, voire moins, il sera déjà trop tard. C’est la principale raison qui me pousse à remplir mes défis le plus rapidement possible, afin de pouvoir passer du temps avec eux. Voilà presque un an que je suis partie d’ailleurs, qui sait ce qui c’est passé là-bas depuis mon départ ? Mais je préfère ne pas y penser pour l’instant. Je peux juste certifier avec conviction qu’Æstrid va bien, l’avantage d’être jumelles, c’est que nous avons une sorte de lien ensemble. Chacune ressent un peu ce que l’autre ressent, mais pas toujours. Une simple coupure par exemple, je le sens pas, mais quand elle a eu Ingrid, j’ai très bien senti les contractions. Bref, tu vois le genre.

Ayant terminé de se démaquiller, Hilda s’asseya au pied du lit et commença à délasser ses bottes, lorsque Melhyndil lui posa une nouvelle question.

- J'adore tout ce que tu me racontes de tes origines nordienne, quelles sont les meilleures légendes de là d’où tu viens ?

Sourire en coin, là voilà qui lâcha un rire franc. Il y avait des dizaines, voire des centaines de légendes toutes plus intéressantes les unes que les autres. Mais une seule était la meilleure à son avis, celle de son ancêtre Lagertha, dont la nordienne avait hérité son second prénom. Bien que d’autres pourraient lui être comptés plus tard, c’est bien évidemment sur cette histoire que le choix de la demi-elfe s’arrêta. Dégageant la première botte de son pied, elle s'attaqua à la seconde tout en répondant à l’archer.

- Alors, pour la meilleure, le choix est simple, c’est celle de Lagertha Ostensdóttir, la Vierge Skjaldmö. Laisse-moi terminer d’enlever mes bottes et je te raconte ça.

Hilda se garda bien sûr le fait qu’il s’agissait là de son ancêtre, afin de lui garder la surprise à la fin. Une fois sa seconde botte retirée, la jeune femme les balança dans un coin, non loin de ses bagages, ramassa l’édredon sur le lit, réveillant au passage Mann qui dormait dessus, et l’étendit devant le feu, avant de s’y assoir et de croiser les jambes. Le renard-esprit n’attendit pas de se faire appeler par sa maîtresse que déjà, il venait se rendormir blottit contre la nordienne, tandis que Muninn s’installait sur l’un des oreillers.

- Allez, viens t’installer près du feu, y’a pas mieux pour conter les légendes.

Finalement, l’archer aussi commença à se préparer pour la nuit. Et on y voyait une autre preuve de la différence de caractère entre les deux elfes : l’une balançait ses effets personnels, tandis que l’autre les déposait tout doucement. Mais Hilda n’avait pas besoin de cet exemple pour en savoir plus sur Melhyndil : la demi-elfe savait qu’il était plus calme et délicat qu’elle. Ce à quoi la völva ne s’attendait pas, c’était qu’il retire sa tunique avant de venir se poser à son tour sur l’édredon. Et voilà que la pudeur de la jeune femme reprenait le dessus, la forçant à détourner le regard un instant. Il fallait dire que la pause n’aidait pas non plus. Alors, se concentrer sur l’animal esprit sur ses genoux restait l’idéal à son avis. Et puis, à la rigueur, la jeune femme pouvait lever les yeux vers le visage de son ami, en oubliant le reste, histoire se s’assurer qu’il suivait toujours le récit.

À peine Melhyndil fut-il installé donc que la nordienne commença, racontant la saga de son ancêtre. Elle avait tellement entendu cette histoire encore et encore qu’Hilda la connaissait par cœur. Il fallait dire aussi que cette Lagertha était en quelque sorte son héroïne aussi, celle qui l’inspirait, malgré les déboires qu’elle avait pu vivre. Mais, bien sûr, la völva la traduisait au fur et à mesure qu’elle racontait les mots, afin que l’archer comprenne le récit. C’est là que, malgré sa connaissance, les mots sortait sans avoir de sens par moment. Certains mots nordiens n'avaient pas forcément de traduction dùralassienne, alors, la demi-elfe devait improviser. Quand quelques mots dans sa langue maternelle lui échappaient, Hilda prenait le temps de les expliquer à Melhyndil lorsqu’elle remarquait la confusion dans son regard.

Le récit en lui-même contait donc l’histoire de Lagertha Ostensdóttir, la Vierge Skjaldmö comme on la surnommait. Cette guerrière au bouclier était à la fois douce et farouche. En effet, elle savait démontrer la douceur d’une femme, mais lorsqu’un combat s’annonçait et qu’il fallait défendre les siens, alors cette combattante devenait une vraie furie afin de protéger son clan et sa famille. Sa beauté était aussi sans égale, ce qui attirait nombre de prétendants. Et, pour avoir la main de la jeune femme, il n’y avait qu’une façon : la vaincre en duel. Car c’était ainsi que les skjaldmös choisissaient le meilleur mari pour mettre au monde de puissants guerriers.

Hilda songea un instant à la situation,  marquant une pause dans le récit. Si cette histoire de sentiments avec Melhyndil se rendait jusque là, il devrait la vaincre en duel également, ce qui, pour l'instant, était loin d’être le cas. "Va falloir sérieusement que je l’entraîne si un jour il veut tenter d'avoir ma main." Cette idée la fit rougir, ce qui, au final, ramena son attention sur le récit. Et en plus, la nordienne lui avait déjà mentionné au lac être une skjaldmö également. Restait à savoir s’il avait retenu cette information.

Lagertha avait donc recalé plusieurs prétendants, tous la désirant pour son physique et son caractère. Mais un jour, un inconnu finit par attirer son attention, se joua d’elle et réussit à lui faire rompre son serment, passant une nuit avec elle. Et le lendemain, il ne fit que quitter les lieux en riant de la guerrière. La skjaldmö, honteuse, avait quitté son village avec quelques personnes qui la soutenaient, se dirigeant vers les Fjords. Là-bas, elle fonda un nouveau village et y mit au monde le fils de cet homme méprisable, Leif.

- … et c’est pour ça qu’aujourd’hui, mon village porte le nom de Leifung, c’est en l’honneur de son fils, qui a fait beaucoup de choses pour aider à la prospérité du village. C’est également Lagertha qui instaura les épreuves, afin que plus personne ne se joue des siens et que tous reconnaissent la vraie valeur des membres de son clan.

Leif instaura une autre tradition : chaque fille première née de sa lignée recevrait le prénom de sa mère comme second prénom, afin que l’esprit de la Vierge Skjalmö protège à jamais notre village. Cela pouvait bien sûr sauter une génération si une femme ne mettait au monde que des garçons. Mais de mémoire ce n'est arrivé qu’une fois ou deux.

C’est donc pour ça, oui, que mon nom complet, c’est Hilda Lagertha Alfdóttir. Je suis l’aînée des jumelles, c’est donc moi qui en ai hérité, et ma fille aînée, lorsque j’en aurai une, devra recevoir le nom également, pour suivre la tradition. Mais bon, pour qu’il reste une Lagertha au village, sans doute que moi et Æstrid modifieront un brin cette coutume et permettront à Ingrid, ma nièce, de transmettre le nom. Elle est bien plus humaine qu’elfe, et il doit rester une héritière au village.

La demi-elfe se demandait bien comment réagirait son ami suite à cette légende. N’empêche que maintenant, elle songeait énormément à rejoindre Muninn au lit, celui-ci étant toujours posé sur l’un des oreillers.

- Tu m'as donc parlé donc de ton ancêtre. Quelle histoire magnifique et tragique à la fois. J'en retiens toutefois qu'elle a aimé son fils, même si le géniteur était un malotru, ne rejetant pas la faute du père sur le fils, c'est très bien.

Hilda ne fit que hocher la tête, des étoiles plein les yeux, avant de prendre la parole.

- Ouais, Lagertha est, pour moi, la meilleure héroïne qui soit, et pas que parce que c’est mon ancêtre. C’est aussi pour ça manière de traiter son fils unique, mais aussi tout ce qu’elle a fait pour le village, malgré le tort qui lui a été fait, sa manière de défendre les siens et ses bonnes valeurs. Maman m’a conté cette histoire lorsque je n’étais qu’une petite fille, j’avais quatre ou cinq ans je crois la première fois.

Elle sembla réfléchir un bref instant.

- Mouais, me semble que c’est ça, quatre ou cinq ans. De mémoire, Geirr était né et maman portait déjà Sigurðr, mais j’en suis pas certaine, peut-être qu’il était bébé aussi, je sais plus. Mais bref, tout ça pour dire que depuis ce temps, j’ai toujours calqué mes actions sur elle, c’est mon héroïne et depuis petite, j’ai toujours voulu être comme Lagertha, d’autant plus que c’est moi qui la représente pour ma génération, alors difficile de faire autrement.

L’archer semble ensuite réfléchir un instant à son tour. Dans doute analysait-il toutes les informations fournies. Du moins, c’était ce que pensait la demi-elfe. Observant à nouveau son regard émeraude remplit d’une soif de connaissance, la nordienne ne cessait cependant de se demander pourquoi Melhyndil avait choisi les Daemociens plutôt que les Anârciens lors de son inscription à l’Institut. Sans doute son don magique y était-il pour quelque chose en vérité. Il fallait dire aussi que l’elfe avait le tempérament idéal pour la maison où la praticité de la magie primait sur le reste.

- Est-ce à dire que si nous décidions d'aller plus loin dans notre relation, je vais devoir te battre en duel ? Cette règle n'est-elle pas trop stricte, écartant des prétendants de qualité juste parce qu'ils ne sont pas à l'égal d'une guerrière qui s'est entraînée toute sa vie ?

Hilda souria alors d’un air un brin malicieux, air qu’elle n’affichait qu’en présence de son ami. Au moins, l’archer avait retenu l’information sur son statut. Mais la jeune n’a pas le temps de lui répondre qu’il enchaîne déjà la suite.

- Mais peut-être devrions nous en reparler demain, tu sembles épuisée.

Et, comme de raison, voilà que la völva lâcha un énorme bâillement en s’étirant. La demi-elfe poussa gentiment Mann, toujours sur ses cuisses, afin de le forcer à se lever avant de faire de même.

- Aller, lèves-toi Mel, que je replace l’édredon sur le lit. Mais je peux quand même répondre à ta dernière question avant de dormir.

La nordienne tirait justement sur la grosse couverture en même temps, forçant l’elfe à se bouger bien vite. Et, tout en refaisant le lit, Hilda poursuivit, bien que sa réponse était entrecoupée par d’autres bâillements.

- En vérité, si la tradition veut que le prétendant gagne le duel, c’est pour deux raisons fort simples. La première, c’est pour lui démontrer qu’il peut être aussi fort qu’elle pour protéger la famille qu’ils construiront à deux. Car l’autre raison, c’est bien parce que la skjaldmö ne combat pas durant une grossesse. Il lui faut donc quelqu’un d’assez fort pour veiller sur elle pendant qu’elle est vulnérable.

La jeune femme rougit à nouveau à la simple idée d’affronter son ami dans cet optique. Mais l’archer allait avoir besoin d’un entraînement, du moins si leur relation se rendait jusque là, car s’était pour l’instant perdu d’avance dans son cas : Hilda était simplement trop forte pour lui.

- Il y a cependant quelques règles dans ce genre de duel, comme le fait qu’il faut que le prétendant fasse une demande de duel officiel dans le but d’obtenir la main de la skjaldmö, les compagnons d’armes et la magie sont proscrit, donc pas d’esprits pour m’épauler dans mon cas. Seul l’enchantement des équipements est permis, comme mon bouclier nordien par exemple. Oh, et il doit y avoir au moins un témoin pour confirmer la victoire également.

Le lit désormais prêt pour la nuit, la demi-elfe se glissa sous les draps et, sans demander l’avis de Melhyndil, laissa son renard esprit en faire à sa tête et venir se blottir dans le dos de la jeune femme, à savoir entre lui et la völva. Il ne fallut qu’un bref instant entre le moment où Hilda souhaita bonne nuit à son ami et posa sa tête sur l’oreiller, non loin de Muninn, que, déjà, un léger ronflement s’échappait d’elle. À croire que la journée de réflexion et la soirée à boire l’avait plus qu’épuisée. Mann, loin d’avoir besoin de sommeil de par son état de créature spirituel, avait les oreilles dressées malgré sa position, preuve qu’il veillerait sur les dormeurs, comme à son habitude. Son regard cependant, tourné vers l’archer, était explicite : "Tu peux venir dormir aussi, je veillerais également sur toi, mais pas touche à Hilda." Voilà au moins qui avait le mérite d’être clair, net et précis. Mais l’animal esprit ne démontrait aucune agressivité. Après tout, il n’était qu’un simple protecteur.

Bien vite, les sons de la nuit remplirent la pièce, entre les crépitements du feu et le ronflement de la nordienne, au fur et à mesure que son sommeil se faisait de plus en plus profond. Les flammes dans l’âtre dansaient, projetant des ombres apaisantes sur les murs, et la chaleur douce enveloppait la pièce. Dans cette ambiance feutrée, tout semblait paisible, comme si l’univers lui-même veillait à ce que cette nuit de repos ne soit perturbée par rien d’autre que la sérénité.