Les pouvoirs secrets des plantes a toujours été la plus belle des magies à mes yeux.

Voilà comment Circë résumerait sa relation avec les plantes. Enfant, elle voyait sa mère préparer des onguents et des remèdes à partir de plante, de dosage millimétré et de calcul selon le poids de la personne. Adulte, elle exerçait ce même métier d'herboriste, la seule dans les 10 villages alentour de Nitaës, son ancienne patrie. Dans sa famille, on a toujours été herboriste, une sorte de tradition familiale. Une histoire tenace voulait même lui donner de possibles origines elfiques qui seraient le point de départ de cette tradition particulière.

Mais bien au-delà des histoires de village, ce sont surtout les bons souvenirs reliés à cette activité qui font revenir Circë vers cette tâche. Avant, durant son "vivant", elle était herboriste de village. Aujourd'hui, elle est une vampire sans clan errant partout à la recherche de trace de sa fille disparu depuis six décennie. L'espoir fait peut-être vivre, mais ne donne pas d'argent. Afin de subvenir à ses besoins, Circë est revenue vers ce qu'elle sait faire de mieux, le savoir des plantes. Ce qui a le don de la plonger parfois dans une profonde nostalgie.

Et la forêt Sylfaën est le meilleur endroit au monde pour un herboriste. Plusieurs plantes aux vertus médicinales y poussent en grande quantité. Il suffit juste de savoir faire la différence entre chaque.

Penché au milieu des bois, calfeutrés sous sa cape sous le ciel nocturne. La vampire récupère en tranchant avec sa dague, des plants d'Afloe Lunaire afin de les concasser pour produire un onguent qui calme les blessures magiques. La plante luisante dans la nuit est facile à repérer sous les étoiles que sous le soleil.

Le soleil venait de s'endormir quand Ellana sortit de sa maisonnette. Bien qu'assombrit, le ciel était clair et les premières étoiles se montraient timidement. C'était le temps idéal pour commencer une sortie nocturne à la recherche des plantes lumineuses. En effet, l'expédition de ce soir consistait à trouver une Afloe Lunaire. Nécessaire à la création de remède, cet ingrédient était plutôt crucial.

    Proche de chez elle, elle ne mit pas son accoutrement de ville mais une simple robe mi-longue, légère et une sorte de châle en feuillage sur une base de cuir de daim contre la peau. Cela suffisait à la protéger de la brise sans pour autant l'empêcher de ses mouvements.
    Il ne lui fallut pas beaucoup de temps avant d'arriver aux zones les plus denses de Sylfaen. Elle se rapprochait donc de son endroit de recherches, cependant, elle découvrit autre chose avant de trouver ce qu'elle chercher. Une présence. Il lui aurait paru normal de trouver une personne dans les coins en pleine journée. Néanmoins, de nuit, il y aurait peu de monde qui chercherait quelque chose... Si ce n'est un autre connaisseur du terrain.
    Elle ne s'arrêta pas sur ses craintes, et s'amena à la situation avec curiosité.

    La présence qu'elle avait repéré était de dos, avec une cape sombre dissimulant la silhouette de celle-ci. Derrière cette entité, reflétait une lueur bleue qui laissait penser à l'une des plantes qu'elle recherchait. Les lèvres plissées par la déception d'avoir été devancé, elle ne se découragea pas. Il y en aurait sûrement d'autres et peut être qu'une cueillette accompagnée ne serait pas désagréable.
   Sans un bruit, elle resta à quelques mètres de la personne accroupie et salua d'un : "Bonsoir, alors comme ça vous recherchez des Afloe Lunaires ?" avant de rester statique en attente d'une réponse sans provoquer d'éventuelle peur.

La vampire était concentré dans sa tache, une coupe précise et bien droite et hop, la boule bleue rejoint le sac. Une fois concassé, le baume qui en résulte soigne les blessures magiques, les aventuriers et apprenti mage imprudent sont assez friand de ce baume. La mordue est tellement concentré sur sa tache qu'elle n'entend pas la femme qui se rapproche d'elle avec aisance et légèreté. Circë sursaute légèrement quand l'inconnue la salue.

Elle tourne sa tête, c'est une elfe aux cheveux blancs, habillé d'une simple robe et d'un voile léger, une apparence plus amicale que l'elfe noir qu'elle a rencontré en Perracie, quelque temps auparavant. Sur le visage de la rousse, un sourire se dessine, bouche fermée pour masquer ses canines. Elle se redresse calmement.

"- Bonsoir, oui, c'est toujours très utile."

La vampire aux mains couverte de sève, range sa dague.

"- Vous en cherchez aussi ?"

Elle tend la main vers sa droite.

"- Il me semble en voir luire par là."

La personne se dévoila face à elle, se relevant après un sursaut. Bien que pâle, elle avait un très joli minois. En effet c'était une jeune femme assez belle qui se cachait sous cet habit sombre. Sans plus tarder la nouvelle rencontre rangea son outil et demanda si Ellana cherchait aussi de ces plantes si précieuses. D'un hochement de tête lent, assuré et silencieux, Ellana lui répondit.

"Oui, ce n'est pas toujours évident d'en trouver..."

À peine eut-elle finit sa phrase d'un sourire poli, la jeune rousse pointa un autre endroit.

"Il me semble en voir par là"

Ellana se tourna vers sa gauche, suivant la direction. En effet, la même lueur bleue reflétait sur le bois des arbres, quoique celle-ci était plus lumineuse. Les deux jeunes femmes ne tardèrent pas à rejoindre celle-ci.
Ellana en profita pour donner quelques conseils comme ; le fait d'éviter de couper à la racine même, histoire de pouvoir laisser la chance à la plante de donner de nouvelles fleurs. Ou autre pour faciliter la récolte.
Sans toucher le précieux produit de la nature, brillant de plus bel et étant d'une grosseur un peu plus épaisse que la moyenne, elle s'agenouilla devant et questionna sa nouvelle rencontre.

"Je ne vois pas grand monde par-ici, comment ça se fait qu'une humaine connaisse autant les plantes pour connaître cette fleur et d'autant plus pour savoir où la trouver ?"

Seulement curieuse et aux abords bienveillants, Ellana parlait tout en commençant la cueillette de l'Afloe. Elle sortit une jolie petite dague, avec un symbole de fougère sur son manche, de sa besace cachée dans son dos, sous le châle feuillu. Elle se marmonna par la suite qu'il lui faudrait trouver d'autres plantes, autre que celle-ci, dans les environs.

L'elfe est effectivement en recherche de l'afloe, elle serait donc elle aussi une herboriste ? Ce ne serait pas si étonnant. Qui à part une herboriste en recherche d'une plante luminescente irait se perdre dans les bois à une heure pareille ? La vampire avait repéré plus tôt un coin d'afloe qu'elle comptait visité après avoir terminé. Il y en a bien trop pour elle, alors autant partagé. Surtout que Circë n'a aucune envie d'attirer l'attention en étant désagréable, surtout quand elle est sur le territoire de la Garde Zéphyr. Il ne vaut mieux pas trop les titiller ceux-là, ils ont le pieu dans le cœur facile.

Enfin mondanité mise à part, l'elfe lui donne quelques conseils pratiques en matière d'herboristerie. La bêta connait beaucoup de monde qui aurait pu mal le prendre, elle la première, mais l'esprit pragmatique de Circë lui fait reconnaitre qu'après 60 ans sans pratique, elle doit être un peu rouillée. Elle prend les conseils par un hochement de tête, accompagnée de phrase affirmative reconnaissant à l'elfe une plus grande maitrise du métier. À bien la regardé, elle est encore assez jeune, mais derrière son visage fin, sa gestuelle et son regard bleu glacial laisse présagé d'une certaine maturité. La rousse serait même tentée de dire qu'elles sont toutes deux d'un âge assez proche.

Circë s'agenouille devant une autre plante que celle convoité par l'elfe. Elle l'observe avec attention et soulève certaine feuille tout en gardant les conseils afin de visualiser où trancher, quand son homologue aux longues oreilles, lui demande ce qu'elle peut bien faire ici et comment elle détient une telle connaissance des plantes. La rousse redresse la tête, choisissant rapidement quoi dire et quelles informations omettre. Avec un sourire amical, elle répond :

"- Ma mère m'a formé, elle était herboriste de village comme sa mère avant elle. En vérité, je ne saurais même pas dire depuis combien de temps ma famille pratique ce métier. Ma mère est allée plus loin, elle est partie des connaissances de ma grand-mère, elle a économisé, puis elle est partie étudier l'herboristerie et voyager sur le continent."

La rousse marque une pause, elle ne pensait pas que parler de sa mère lui ferait si mal. Elle pose la feuille, prend sa dague et commence son oeuvre. Sa voix ce fait plus directe, moins amical, plus mélancolique.

"- Elle m'a souvent parlé de la forêt Sylfaën, le plus bel endroit du continent, je dois avouer la comprendre, c'est un bel endroit."

Elle vient de finir sa coupe, elle est certes net, mais les racines ont été épargnées. Satisfaite, elle met le produit de sa récolte dans son sac. L'ancienne humaine reprend un ton plus amical.

"- Et vous ? Vous êtes devenue herboriste par héritage ou par passion ?"

Les deux jeunes femmes s'occupaient donc simultanément de leur récoltes respectives, chacune se faisant dos. Ellana écoutait la réponse avec attention tout en terminant doucement son travail, son travail dont-elle perdait d'ailleurs l'intérêt dû au récit qu'elle entendait. Même si on ne la regardait pas, elle hochait doucement la tête avec compréhension avec une onomatopée discrète pour signaler son écoute.
    C'était de belles origines pour un tel héritage : le voyage, l'aventure qui se contait...

Dans cette légère pause, et perdue dans ses pensées, Ellana jouait avec la tige, maintenant coupée, entre ses doigts. Sans vraiment s'en rendre compte, un événement plutôt particulier se produisait là. Cela arrivait de temps en temps, mais toujours de manière involontaire. La tige qui se faisait manipuler commençait déjà à créer un germe (ce qui demandait normalement plusieurs nuit à se produire, se passait juste là.) Ellana n'en avait pas vraiment conscience.Cela ne dura que le temps de la courte pause du monologue de l'humaine.
    Lorsqu'elle reprit parole de manière un peu plus froide, Ellana se tourna vers elle, comprenant que le récit précédent avait déjà une certaine lourdeur.

"[...] Je dois avouer la comprendre, c'est un bien bel endroit."

Bien que la réflexion fut faite avec beaucoup de nostalgie, Ellana se contenta de sourire poliment au compliment que la jeune femme venait de faire à cette forêt, qu'elle considérait un peu comme la sienne.

"Sylfaën est une belle forêt oui... Mais elle peut aussi s'avérer dangereuse, il faut se méfier des apparences, autant des lieux que des plantes... ou des hommes."

Elle souriait avec une pointe de malice à sa mise en garde.
    La fleur en poche, elle abandonna le point de coupe afin de se remettre en marche, en attendant la récolte de son homologue. Dont celle-ci venait de reprendre un ton plus amical que précédemment.

"Et vous ? Vous êtes devenue herboriste par héritage ou par passion ?"

Se faisant plus discrète que la rousse à ce sujet, elle répondit.

"Ça n'a pas vraiment été une question d'héritage, j'ai plus fait ça par passion. À vrai dire, je suis aujourd'hui plus guérisseuse qu'herboriste. Je ne suis plus vraiment dans l'étude de celle-ci, mais dans son application pour la guérison. C'est similaire en un point, mais bien différent."

Dit-elle avec un air plutôt détaché et plus attardé sur le fait de changer d'endroit que de développer sur elle. Elle reprit donc la marche sans faire attention si on l'accompagnait encore avant se s'arrêter quelques pas plus loin, se retournant soudainement.

"D'ailleurs, pardon mais je ne connais pas votre nom. Vous êtes ?"

Après un court échange de présentation, elle demandera à sa camarade si cela la dérangera de l'accompagner pour chercher un autre type de plante...

Heureusement pour Circë, l'elfe ne fait aucune remarque sur ses états d'âmes. L'humanité, les faiblesses, ce sont les choses que la vampire ne peut pas laisser transparaître, même quand c'est elle qui se met en mauvaise posture. Sa réflexion sur la dangerosité du lieu et de certaines personne a au moins le mérite de changer les idées de la rousse. Ironique quand on connaît la situation de la paysanne aux longues dents pointues. Une belle apparence, c'est bien pour cela qu'elle a plus à l'alpha qui a fait d'elle une mordue au lieu de faire d'elle du bétail.

Elle se contente de hocher de la tête en silence, inutile de revenir sur ce genre de détail. Elle préfère en savoir plus sur son homologue elfique. Sa réponse est plus discrète, mais elle apprend qu'elle est là par passion, plus guérisseuse qu'herboriste, plus spécialisé dans le soin, donc. Elle a l'air de bien connaître le métier, mais au point de ne plus étudier ? La vampire suppose qu'elle doit mal comprendre. La jeune elfe s'excuse de ne pas avoir demandé le nom de l'inconnue. Circë rit avec légèreté, un sourire amusé sur le visage.

"- Erreur partagé, ma chère, je ne me suis pas présenté non plus, ni demandé votre nom. Je suis Circë Andirral et vous ?"

Elle laisse le temps à l'elfe de lui répondre, elle lui demande si cela lui dérange de l'accompagner dans sa récolte. Circë lui sourit.

"- Si vous le voulez bien, je vais vous suivre, je ne connais pas bien les coins de récolte de cette forêt, cela pourrait m'éviter par inadvertance de toucher une plante protégée ou de passé pour une récolteuse de Melpoena pour ses effets psychotropes, même si des plantes à effet aphrodisiaque me sont souvent demandé."

Elle ponctue sa phrase avec un léger rire.