Invitez au village par le doyen, nous avions quitté le port de pêche assez brusquement, me laissant tout juste le temps de m’excuser auprès de la jeune femme et du doyen qui, visiblement, avait deviné qui était le coupable. Sans tenir rigueur à cette injustice, il avait fini par nous expliquer la triste histoire qui rongeait cette jeune femme avant de demander son rapatriement à l’hôpital du village. Dés lors, je n’avais plus osé prononcer le moindre mot devant le vieil homme de peur de le contrarié. Pourtant, c’est ce même vieil homme qui nous conduisit jusqu’au cœur de son village et nous fit même l’honneur de la présenter. Une visite rapide des environs avant de nous mener à la raison de notre venue. Je m’étais éclipsé brièvement durant la visite pour faire le plein de provision pour la suite des évènements, sachant pertinemment que nous n’étions pas au bout de nos peines. L’aventure ne faisait que commencer et il y avait peu de chance que nous nous attardions maintenant au village pour nous reposer, bien trop déterminé à mettre un terme à tout ceci. Personnellement, j’étais surtout venu ici pour explorer et apprendre de l’étranger, mais pour le côté exploration, je n'avais d’autre choix que d’accompagner Urua et les autres tant qu’ils étaient à mes côtés.

Ma petite escapade terminé, je rejoignis le groupe à l’une des sorties du village où ils s’étaient regroupés, toujours en compagnie du doyen. Ce dernier souhaita bonne chance au groupe et s’en alla à mon arrivée, signe que j’arrivais juste attends pour repartir. Silencieusement, le groupe s’avança dans les profondeurs de la jungle, suivant les indications qu’avait laissées le vieil homme. Urua et Doebroksh,  guidant notre équipe à travers la brousse, éclaircissaient petit à petit notre chemin vers le fameux temple dont on nous avait parlé un peu plus tôt. Chemin vraisemblablement peu utilisé, la végétation avait littéralement reprit ses droits sur le domaine, la nature y était farouche, sauvage et étouffantes. L’humidité faisait luire mon visage de sueur, les rayons de lumières qui nous parvenait malgré les épais feuillages nous obligeaient à nous rapatrier à l’ombre tant ceux-ci étaient brûlant et pesant. A ce rythme de progression, la fatigue vint également nous rejoindre. Inévitable. Notre marche silencieuse reflétait la pression et la fatigue que l’on supportait depuis notre entrée dans la jungle. Chacun restait sur ses gardes, mais pas un ne se prononçait quant  à notre avancée. le Minotaure et le Lowën aveint toute ma confiance du fait que j’étais encore novice en terme d’exploration et d’aventure, je n’avais pas encore parcourus le quart du périple que je m’étais fixé et ces derniers avaient l’air d’avoir bien plus roulé leur bosse.

Sans que l’on se rende compte du temps passé dans cette prison verte, nous finîmes par entrevoir les courbes d’une civilisation, plus ancienne que le village précédant. La jungle rendait toute visibilité à l’horizon impossible, mais haut de-là de la cime des arbres, l’on pouvait apercevoir le sommet d’un temple, devant certainement se trouver non loin de là. Satisfait de cette découverte, le groupe sembla accélérer le pas dans la direction du temple, zigzaguant entre les arbres massifs qui l’entouraient. C’est ainsi que Urua, Diagoras, Doebroksh, Nyssa, Azriel, les amis du vampire, Loup et moi-même atterrirent devant l’entrée du temple, dévoilant son antre en ruine datant d’un temps bien ancien.

Lonann Alhazred – IN-CROY-ABLE ! M’écriais-je devant l’immensité de la bâtisse et de la hauteur du plafond. Même un géant de cinq mètre pourrait y entrer sans se cogner la tête …

La structure avait tout de même bien souffert avec le temps. La végétation s’était propagée à l’intérieur, multipliant les fissures à travers toutes les parois. Le sol n’était déjà plus droit à cause des racines qui en sortaient par endroits, le plafond était criblé de trous plus ou moins gros les uns que les autres, laissant tomber une pluie de liane à la place, comme si l’intérieur de la bâtisse faisait partie intégrante de la jungle, idem sur les murs. La nature était en train d’engloutir l’ancienne cité, ni plus ni moins. Néanmoins, elle tenait bon et semblait encore suffisamment stable pour la visiter sans risquer un éboulement quelconque … tant qu’on ne faisait pas trop de grabuge à l’intérieur.

Excité par la situation, mes yeux ouverts en grands, je n’arrivais plus à tenir en place. Il s’agissait des premières ruines que j’avais l’occasion de visiter et il y avait de quoi être satisfait. L’immense hall qui s’offrait à nous se poursuivait sur une bonne cinquantaine de mètre, s’enfonçant encore et toujours plus vers le cœur du temple. L’itinéraire était entouré d’immense colonne de pierre faisant la jonction avec le plafond, certainement pour maintenir l’équilibre du temple, pour ceux qui étaient encore debout. Entre chacune de ces colonnes, différentes statues avaient étés fabriqués à l’image de personnalité ancienne du temple, du moins il s’agissait de l’hypothèse la plus probante, et au loin, derrière les statues de pierre et d’argile, un canal s’écoulait de l’intérieur à l’extérieur du temple, laissant le courant ruisseler et raisonner dans l’immense hall. D’ailleurs, le long du canal, une barque avait été attachée, cognant son bois à la bordure inlassablement selon les humeurs du courant. Un détail qui nous mis en garde instinctivement de la présence d’individus autres que nous.

Diagoras – On est pas tous seuls ! S’écria le petit Mouss’Queterre, tout aussi méfiant que moi.

Jamais une barque n’aurait pu survivre au temps et intempéries en ces lieux, le bois aurait tout simplement moisi et pourri, bien avant que la nature ne reprenne ses droits ici. Mais malgré cet avertissement, nous continuâmes malgré tout vers la seconde pièce du temple, ne perdant pas plus de temps que nécessaire. Notre groupe soudé ne risquait pas de ce faire avoir par un piège quelconque ou une bande de brigand. Ils n’auraient tout simplement aucune chance face à un groupe tel que le notre, c’était une évidence. Nous étions neuf avec les compagnons du Vampire et tous savaient se battre, du moins je l’imaginais.

Continuant prudemment vers la suite de notre parcours, le colosse cornu pris la tête du groupe et partit en éclaireur en amont, laissant Urua le suivre d’un peu plus loin. Loup, qui commençait à traîner de la patte, était à mes côtés ainsi qu’avec Azriel et l’un de ses compagnons, avançant à notre rythme. Rien ne servait de se presser selon moi, il y avait temps à découvrir ici. De l’autre côté du Hall, une pièce, tout aussi haute, était décoré d’une grande tapisserie recouvrant le mur en face de nous. Vieilli et abîmé par le temps, l’on pouvait toutefois y décrire certaines formes géométriques plus ou moins précises et une succession de traits aléatoire. Une œuvre d’art ou un dessin représentatif ? Je n’avais pas la moindre idée de ce que cela pouvait être, néanmoins il nous fallait retrouver le reste du groupe qui s’était déjà engouffré dans la salle suivante, à notre gauche. Ces derniers faisaient face non pas aux différents couloirs qui s’offraient à nous, mais à une petite faille dans le mur. Doebroksh, visiblement obnubilé par cette faille étrange, glissa ses doigts dans l’interstice avant de faire coulisser le mur comme si ça n’avait été qu’une vulgaire porte en bois, dévoilant l’antre d’un passage secret. Stupéfait, je portais ma main à la bouche pour y contenir ma surprise. Même les anciens savaient cacher ce qu’ils voulaient aux yeux de tous ... Notre groupe continua ainsi à progresser à travers les plusieurs portes dérobés que comptait le temple jusqu’à ce qu’on parvienne à la porte de la vérité.

Notre groupe déboucha dans une vaste pièce éclairée par les rayons du soleil. Celle-ci avait la forme d’un arc de cercle dont la place centrale était une sorte d’arène à sol terreux et dont les extrémités formaient les gradins de cette arène, là où nous avions débouchés. Le temple comptait donc une petite arène intérieure entre ses murs ? Cela paraissait invraisemblable, surtout si cette pièce était aussi bien dissimulée. Mais malgré tout, la jungle s’y était tout de même étendue et avait finie par percer ce plafond aussi, ce qui donnait cette aura lumineuse donnant sûr la place centrale. D’ailleurs, c’est au centre de cette place que deux individus se faisaient face. Nous entendions, depuis l’entrée de cette dernière porte, une succession de chocs répétitifs et d’éclats de voix entrecoupés de respiration rauque, devenant à chaque fois plus intense lorsque l’on se rapprochait. Plus nous descendions vers l’arène et plus leur échange nous parvenait aisément.

Les deux individus en question étaient en train de s’affronter dans un combat à main nue, laissant entrevoir une différence de niveau flagrante. Ils n’avaient pas l’air de vouloir s’entretuer, mais le jeune homme dans la fleur de l’âge se donnait corps et âme dans le combat, sans jamais parvenir à toucher son adversaire qui, aussi étonnement soit-il, semblait bien plus vieux. Rien ne pouvait expliquer leur présence ici, mais lorsque nous finîmes par arriver en bas des marches menant à l’arène, leur combat prit fin et après une courte pause le jeune homme vint nous rejoindre, suivit de près par son aîné. Ce dernier fit un léger aller retour de la tête de nous à la porte d’où nous venions avant que Nyssa ne prenne la parole, devinant visiblement les pensées du vieillard.

Nyssa – C’était pas verrouillé ! S’écria-t-elle pour notre défense.

Jeune combattant – C’est … normal, répondit-il, la mine embarrassée, tailler des portes dans la pierre prends du temps et nous en avons assez de …

Vieil Homme – Allons allons, Interrompit-t-il d’un ton amusé, est-ce une façon d’accueillir des visiteurs ?

Jeune combattant – Milles excuses, le jeune accompagna ses excuses d’un léger salut de la tête, je vais chercher du saké et l’eau pour le thé …

Le jeune homme s’en alla sous les yeux attendrit du vieillard. Leur relation s’apparentait à celle d’un maître à son élève. Et leur technique de combat m’était tout à fait familière. Cette manière de combattre à main nue et cette posture des mains. Il avait su attirer mon attention la plus sincère et un millier de question venait à s’agglutiner dans mon esprit. Qui étaient-ils ? Où avaient-ils appris à se battre ainsi ? Des questions qui allaient devoir attendre car nous avions l’air de parfait inconnus déboulant chez des gens. Le maître nous avait désigné comme des invités, ce qui voulait dire que ce temple … lui appartenait ?

Vieil Homme – Je suis le maître de ces lieux, se présenta-il en inclinant légèrement la tête, Je vous souhaite la bienvenue Urua, Azriel, Doebroksh, Lonann. A vous et vos différents compagnons.

Le vieil homme adopta à nouveau un sourire amusé lors qu’il découvrit notre surprise sur nos visages. Sidéré que l’inconnu sache parfaitement qui nous étions, j’en étais simplement venu à pencher la tête de côté sans comprendre la situation. Je soupçonnais le doyen du village d’avoir discuté avec ce vieil homme un peu plus tôt, ce qui pouvait expliquer que le duo serait arrivé avant nous tout en partant après nous du village, étant donné qu’il était possible de rejoindre le port de pêche avec une barque. Cela dit, je n’avais pas souvenir de m’être présenté au village et au vu de la réaction des autres, cela ne devait pas être leur cas non plus. Un silence s’installa à la suite de la surprise générale qu’avait provoqué le vieil homme, le temps que son apprenti ne revienne vers nous avec une grosse gourde de saké et contenant en terre cuite renfermant certainement l’eau chaude pour le thé, et sur son dos une petite besace en cuir dans lequel il sortit plusieurs coupoles et tasses également en terre cuite. Tout semblait être fabriqué à la main ici, cela ne m’étonnerait pas que l’eau avait été disposé au-dessus d’un feu pour la faire bouillir. Il avait tout deux l’air d’ermite reclus de la société, mais leur provenance ne faisait aucun doute, ils venaient du village de Guillaëd.

Lonann Alhazred – Vous … vous nous attendiez ? Dis-je tout en suivant le groupe jusqu’à la bordure de place centrale, s’asseyant sur les marches des prétendus gradins. Assis à même le sol à côté du jeune élève, mon regard ne quittait pas le vieillard qui avait su piquer ma curiosité. Vous saviez que nous viendrions, n’est ce pas ?

Maître – En effet, dit-il en saisissant le saké que lui avait servi son élève. Mais prenez donc le temps de vous réconforter auprès de mon hospitalité, votre voyage à du être éprouvant, je me trompe ?

L’élève donna une coupole à Loup et le lui rempli d’eau, voyant que celui-ci était à bout de force. Étrangement, Loup ne manifesta pas d’hostilité envers lui et le gratifia même d’une léchouille de remerciement avant de se laisser caresser. J’en étais presque jaloux en le regardant ainsi, mais il avait bien mérité de se reposer aussi. Le jeune homme me servit, ainsi qu’à certains autres, une tasse qu’il remplit d’eau de plantes pour le thé. Ce dernier, brûlant, avait la particularité de sentir agréablement bon. Une odeur délicate et apaisante s’en dégageait, odeur qui attira inévitablement mes lèvres au bord de la tasse avant de me brûler. L’instinct …

Nous étions tous regroupés autour du maître des lieux, reposant nos muscles et hydratant notre corps de saké ou de thé, pour les moins tenaces, mais chacun d’entre nous devait avoir plein de question à son égard. Il était au centre de l’attention. Alors plutôt que de déranger le vieil homme, je me tournais vers l’élève assis à côté de moi et lui demandais ce qu’ils faisaient ici.

Lonann Alhazred – Quand nous sommes arrivés ici, vous vous battiez au corps-à-corps … d’une manière bien singulière. Je fronçai les sourcils et désignai les accessoires de combats qu’il portait à ses mains, coudes et genoux. On aurait dit … une forme de pugilat ?

Elève – Ah ! Tu connais cet art de combat ? Je lui répondis d’un hochement de tête avant d’ajouter que je la pratiquai également. Et bien, je suis ici pour perfectionner et personnaliser mon art du combat. Le jeune homme se tourna vers son aîné et poursuivit. Mon maître est un spécialiste de l’art du combat, que ce soit en connaissance magique, stratégique ou technique. C’est un expert de la formation.

Lonann Alhazred – Un expert de la formation ? Comment ça ?

Elève – Et bien parce que d’autres aventuriers comme vous ce sont aventurés jusqu’ici.

Malgré les explications que fournissais l’élève, je ne parvenais pas à saisir ce qu’il voulait réellement dire derrière cela, continuant inlassablement à siroter mon thé tout en me brûlant. Serait-il possible que ce maître ait formé des explorateurs ayant osés s’aventurer jusqu’ici au péril de leur vie ? Il le leur aurait enseigné quelque chose en échange de leur bravoure ? Non, ça ne pouvait décemment pas être cela. Peut-être qu’il forme les jeunes combattants du village non loin de là ? Cette hypothèse semblait bien plus  rationnelle et pourtant, le fait est que ce maître connaissait parfaitement nos noms et attendait bien notre venu en ces lieux. Tant de mystère autour de ce drôle de personnage. Qu’avait-il donc à nous dire ?

Contre

Les derniers mots de l’élève avaient suscités l’intérêt des aventuriers et la gentillesse du duo maître-élève la méfiance de certain, ce que le maître des lieux ne manqua pas de relever avant de nous affirmer que d’autres explorateurs comme nous étaient déjà passés par ici. Un léger sourire en coin s’était dessiné sur le visage du vieil homme, tandis que le jeune élève jubilait silencieusement à ce qu’allait proposer son tuteur dans quelques instants. Je n’étais pas sûr de les suivre, continuant de siroter le thé que l’on m’avait offert, explorer les lieux me suffisait amplement et leur générosité prouvait qu’ils n’étaient pas de mauvaise personne.

Vieil homme – Toutefois, avant que je ne vous enseigne quoi que ce soit, vous devez me prouver que vous pourrez supporter mon entraînement. Essayez de battre ce jeune homme, vous verrez, il ne manque pas de piquant.

Sur ces mots, le jeune homme s’était déjà relevé et s’était mis en garde quelques mètres plus loin en contrebas de la place centrale, attendant le sourire aux lèvres ses prochains adversaires. Confus, j’échangeais mon regard surpris et intrigué avec Urua qui, vraisemblablement, n’avait pas l’air de comprendre plus que moi. Le lowën se leva tout de même pour faire face à l’apprenti et s’élança au corps-à-corps pour lui porter le premier coup. Alors que nous nous tenions tous ensemble, quelques instants plus tôt, autour d’un thé ou d’un saké, voilà que l’on doit se battre pour recevoir l’enseignement du maître. Je ne parvenais pas à saisir l’intérêt qu’avait le vieil homme à nous enseigner quelque chose alors que nous ne nous étions jamais vu auparavant, sans même lui offrir quelque chose en retour.

Urua parvint à passer outre la garde de l’apprenti, le repoussant de quelques mètres sans qu’il ne bronche. Jugeant certainement que son adversaire était assez puissant pour le prendre au sérieux, il commença à s’étirer d’une manière nonchalante pour nous provoquer. A son tour, Azriel se leva et rejoignit le combat armé de son deck de carte magique, puis vint le tour de Doebroksh qui apparu en un instant dans le dos de l’apprenti sans qu’il ne s’en rende compte. La carrure du minotaure aurait du le rendre bien moins discret et donc et moins prompt aux attaques surprises, pourtant, l’élève n’y avait vu que du feu et s’était retrouvé décontenancé quelques instant en découvrant l’imposante stature qui se trouvait derrière lui. Reprenant sa garde au dernier moment, il ne parvint pas à esquiver le coup de poing du droit de Doe qui le fit se retirer d’un pas léger en sécurité, suffisamment loin du corps-à-corps de l’hybride cornu. Plusieurs goutes de sang perlaient le long de son visage qui, malgré tout, respirait la bon humeur avec son sourire radieux. Il y prenait du plaisir, cela se voyait, dans sa démarche comme dons son expression. Il affrontait pourtant trois individus à la fois et pas des moindre ! Son maître ne semblait pas alarmé pour autant, même après le rude coup qu’avait encaissé son petit protégé. Pire encore, le jeune pugiliste se tourna maintenant vers moi et d’un geste de la main m’invita à rejoindre le combat.

Lonann Alhazred – Mais … vous vous battez déjà à trois contre un … ce n’est plus un duel à la loyale, mais de l’acharnement groupé … je m’étais tourné vers le vieil homme qui n’avait pas dit mot depuis sa proposition au groupe d’aventurier, sollicitant son jugement raisonnable. Vous ne trouvez pas ?

Viel Homme – Ton altruisme n’a d’égale que ton grand cœur, jeune héritier lupin. Ne te soucis point de mon élève, il saura vous surprendre en bon et due forme. Maintenant va et fait étalage de ton art du combat !

Faire étalage de mon art ? Aussi soudainement ? Je ne comprenais pas le sens de cette rencontre, tout n’y était qu’empressement et confusion. Pourtant, les mots du vieil homme avaient su tirer mon enthousiasme vers le haut. Finissant mon thé vert d’une traite, je posais bruyamment ma tasse en terre cuite sur le sol avant de rejoindre le reste du groupe d’un pas décidé. Je vins me positionner devant mon adversaire et adoptai une posture plus souple que d’ordinaire. Au vu de ses qualités de combattant, je ne pouvais me permettre d’être moins agile que lui au risque de frapper moins fort, si nous nous battions en groupe, je pouvais très bien m’appuyer sur Doe et Urua et leur puissance. Une bonne cohésion pouvait venir à bout de n’importe qui, j’en étais persuadé.

Dans un premier temps, je m’avançais à son corps-à-corps pour le provoquer en duel et l’obliger à son concentrer uniquement sur moi. Je ne devais pas lui laisser le temps de se soucier des autres ainsi, ces derniers pourront donner le meilleur d’eux même sans aucun obstacle. Je jouais en quelque sorte le rôle de l’appât robuste, mais ce rôle me convenait parfaitement étant donné que nos arts martiaux se ressemblaient énormément. Ce fut une suite d’échange et d’enchaînement de coup de poing et de coup de pied d’une intensité sans pareil qui se déroulait sous les yeux du maître et de mes compagnons d’arme. Tout deux nous nous battions le sourire aux lèvres, chacun de nos coups se faisait de plus en plus précis, comme si je faisais face à un double de moi-même sans jamais l’atteindre.

Peu à peu, je parvenais à gagner du terrain sur l’élève qui continuait à esquiver de justesse mes enchaînements. La fluidité de ma gestuelle finit par prendre de vitesse le jeune pugiliste, me créant ainsi une ouverture. Sa garde haute pour parer mes coups au visage, je feintais brièvement un coup juste au-dessus de la ceinture, l’obligeant à se baisser légèrement pour anticiper le coup. Genoux fléchis et en appui sur la pointe des pieds, je profitai du sol glissant pour pivoter rapidement, prolongeant l’élan de mon coup de poing sur un coup de pied retourné visant la tempe de mon adversaire. Malgré un combo impeccable, l’élève parvint à bloquer mon assaut en croisant ses avant bras, lui offrant une barrière résistante. Et d’un coup brusque, je poursuivis mon assaut en m’appuyant sur sa garde sans interruption, balançant mon corps comme une tornade. Avec l’appui de ma jambe, sa garde se baissa sous son poids et ma jambe droite vint fendre l’air et se fracasser sur ce qui restait de la garde de l’apprenti. Cette dernière brisée, il avait pu évaluer le niveau de chacun de nous et réajusta sa posture mon mieux nous faire face. Avec un seul échange avec chacun de nous, ou presque, il avait pu établir une stratégie plus approprié malgré le surnombre adverse. Sa confiance en lui semblait inébranlable et son sourire indétrônable, mais la suite du combat allait vite le faire déchanter. Je restais tout de même curieux de voir ce dont il était capable maintenant qu’il avait saisi l’essentiel de notre façon de combattre. Malgré l’action, il ne cessait de réfléchir à la meilleure façon de terrasser son adversaire, c’est en tout cas ce que j’avais ressenti en l’affrontant en duel durant quelques minutes.

Ainsi, il s’était positionné au milieu de nous quatre et avait fermé les yeux, se concentrant au maximum pour laisser tout ses sens aux aguets. Malgré ce que l’on pouvait penser, le surnombre n’est pas toujours un atout et dans cette situation, il y avait fort à parier que nous le découvrions bientôt …

Contre

Malgré les enchaînements proposés durant nos échanges, l’apprenti n’avait pas baissé sa garde une seule seconde vis-à-vis des autres combattants. Je ne saisissais qu’à l’instant que si mon coup lui était parvenu, ce n’était que parce qu’il devait également faire attention aux autres se trouvant par moment dans son angle mort. Ses déplacements fluides, cette gestuelle. Il n’y avait aucun mouvement inutile, pas de geste trop rapide ou trop lent, il était en parfaite harmonie avec son corps et son entourage. Il le savait et ne faisait attention qu’à ce qu’il l’entourait sur l’instant. Son attention n’était pas focalisé sur un seul d’entre nous, mais sur nous tous en général, ce qui voulait dire …

Le buveur de sang, resté éloigné de la mêlée, continuait à faire apparaître de nouveaux amis à lui à travers d’étranges portails, augmentant petit à petit notre nombre et réduisant en contre-parti la vision d’aigle dont faisait preuve l’apprenti. Sortant de nulle part, alors qu’Urua et moi-même faisions face à l’élève accompagné des Mi d’Azriel, Doe chargea celui-ci, le laissant à la rue sur une feinte subtilement bien placé avant de l’enchaîner avec un magnifique uppercut passant sous sa garde. Le choc le propulsa de nouveau dans notre direction. Son attaque surprise dans son dos lui avait été permit car il se focalisait surtout le nombre d’individus présent autour de lui, le surnombre ne lui faisait peut-être pas peur, mais il s’en souciait énormément, tant et si bien qu’il n’avait pas vu venir le minotaure qui s’était glissé dans angle mort. Malgré sa forte présence, Doebroksh savait faire preuve de discrétion plus que quiconque dans se groupe. Ses déplacements silencieux le rendaient terriblement dangereux. Toutefois, le pugiliste se réceptionna parfaitement et ne laissait entrevoir aucune défaillance, sa garde de nouveau en place.

Durant un court instant, nous nous étions tous arrêté pour suivre l’état de l’élève après ce puissant coup de poing porté par Doe. Peut-être que nous avions espéré durant ce laps de temps qu’il ne se relève pas et que ce combat cesse en un instant. Ou plutôt … peut-être que c’est ce que j’avais ressenti en le voyant prendre le coup de plein fouet. Mes jambes s’étaient engourdies ralentissant mes mouvements et ma réactivité. Cet apprenti … il avait vraiment trop …

Lonann Alhazred – La classe… chuchotais-je derrière un sourire déterminé.

Je profitai de sa proximité pour ne lui laisser aucun moment de répit et le ruer de coups pour le fatiguer un peu plus avant la prochaine salve destructrice. Je n’avais pas la force de Doe ni d’Urua, ni la magie mystérieuse d’Azriel, mais je devais au moins avoir leur ténacité pour combattre à leur côté. De nouveau, nos échanges éclaires reprirent de leur mordant, toujours plus osés et audacieux. Sa garde s’était effectivement émoussé avec le nombre grandissant d’ennemi, convaincu que chacun de nous pouvait l’attaquer à tout moment. Il ne se fiait pas qu’à ce qu’il avait en face de lui, il ne se souciait pas que de son adversaire direct, ce qui avait le don de m’énerver. Mais il avait bien raison, ce n’était pas un simple duel. Tandis que je m’efforçais de donner du rythme à notre combat, cherchant désespérément à obtenir toute l’attention de l’apprenti, j’espérais que de leur côté, mes compagnons arriveront à inverser la tendance et le prendre de nouveau au dépourvu. Attendre patiemment et guetter cette opportunité, cette opportunité de le déstabiliser et de prendre l’ascendant sur lui !

Contre