Depuis son affrontement avec l'ekkja, qui avait débouché sur un échange entre deux pratiquantes de la même magie, et une nette amélioration de l'état mental de la djöllfuline, Arhiann sentait un lent reflux dans la défiance des "démons nordiques" à son égard. Davantage d'inconnus la saluaient, et parfois, partageaient une petite discussion. Quelques-uns étaient même venus la trouver dans le pavillon des invités qu'elle occupait depuis son arrivée. Elle se réjouissait de ce réchauffement relationnel, et trouvait décidément que cet étrange peuple avait bien des choses à apprendre à Dùralas.

Pour l'instant, elle cheminait dans les environs du village, en suivant la ligne de pente. Elle avait exprimé l'envie de ressortir, pour retrouver un peu l'air de l'extérieur, même si elle savait que la proximité du volcan le rendait parfois bien malsain. L'ambassadeur Chanveasna l'avait d'ailleurs mise en garde à ce sujet, ainsi que sur celui des précipices dont seuls les locaux connaissaient l'existence. Cependant, lui assura-t-il, la zone entourant immédiatement le village restait globalement sûre. Il regretta que ses fonctions ne lui permettent pas de l'accompagner, mais il avait visiblement quelque chose d'urgent à terminer, et la faune s'en fut donc seule dans le paysage sombre et caillouteux.



Au bout d'un petit moment, il lui sembla entendre résonner quelque chose. Un bruit sourd, assez régulier sans l'être tout à fait. Alors qu'elle s'en approchait prudemment, elle réalisa qu'il s'agissait simplement de percussions, maniées dans cette étendue vide. Intriguée, elle continua à suivre le son, pour finalement apercevoir deux êtres qui se faisaient face : une djöllfuline à la peau si pâle qu'elle semblait presque taillée dans la glace, hormis ses yeux tels deux braises rougeoyantes, et un de ces chevaux locaux qu'elle avait croisés de loin à quelques reprises dans le village. On lui avait conseillé de rester à l'écart de ces créatures, originaires du lointain pays perdu des adeptes des trois dieux, car celles-ci n'avaient jamais côtoyé d'autre race pensante, et se montraient bien souvent peu amicaux envers les étrangers.

La relation entre ces deux êtres avait quelque chose de particulièrement fusionnel, qui tenait de la danse : à celle des mains sur la peau du tambour, qui battaient tantôt lentement, tantôt à toute allure, répondait les quatre sabots de la monture, tournant autour de la frêle jeune femme, s'en approchant puis reculant, pour mieux revenir ensuite. Dissimulée derrière un rocher, Arhiann assista à ce spectacle qui ne lui était en rien destinée, mais qui réjouissait autant ses yeux que ses oreilles. Cela dura jusqu'à ce qu'une saute de vent n'amène son odeur jusqu'à l'animal, qui se cabra en poussant un hennissement tendu. Se sachant repérée, l'hybride se releva doucement, paumes en avant pour prouver son pacifisme.

C'était sans compter sur la nervosité du duergar qui, malgré les tentatives de la djöllfuline pour le calmer, se lança dans un grand galop en direction de l'intruse. Voyant qu'elle ne pourrait se mettre à l'abri dans ce paysage désolé, celle-ci décida de prendre les devants. Elle avait vu de ces équidés cornus montés comme n'importe quel cheval ordinaire, à l'intérieur du village. Si elle parvenait à l'immobiliser, peut-être se montrerait-il docile ? Elle pourrait ainsi le rendre à celle qu'elle supposait sa propriétaire. Pour l'instant, elle avait juste le temps de détacher la cordelette qui ceignait son vêtement à la taille, et d'en faire un rudimentaire lasso. En espérant que les vêtements prêtés par les locaux soient suffisamment solides...

L'initiative revient à : Duergar

Duergar : 900
Vitesse : 1150
Dégâts : 250
Capture : Si Arhiann l'emporte, elle capture le Duergar et utilise un lien incassable.



Arhiann : 2285
Vitesse : 667
Dégâts : 1592

Duergar attaque Arhiann à 250.

L'ensorceleuse avait sous-estimé la vitesse de l'animal, qui fonçait droit vers elle, de ses quatre sabots frappant le sol à une cadence effrénée. Elle n'eut pas le temps de brandir son rudimentaire lien, que déjà, il lui fallait esquiver sous peine de se faire embrocher par les cornes du bestiau. Elle réussit à éviter le gros de la charge, mais pas à s'effacer totalement de la trajectoire, ce qui lui vaudrait sans doute un large bleu sur le flanc, et la déstabilisa assez pour la faire chuter à terre. Heureusement pour elle, le duergar était emporté par son élan : le temps qu'il fasse demi-tour pour s'élancer de nouveau vers elle, elle avait pu se remettre d'aplomb, et l'attendait de sabot ferme. Faisant fi de ses contusions, elle parvint à bondir souplement sur le côté alors qu'il arrivait sur elle et, de manière inespérée, réussit à lui glisser le lien autour de l'encolure dès le premier essai.

" Oh, oh, doucement, "
tenta-t-elle de calmer l'animal à mi-voix, alors qu'il continuait à se débattre. Mais elle tenait ferme sa longe de fortune, et ne comptait pas le laisser s'échapper de nouveau.
" Vous n'y arriverez pas comme ça, "
s'éleva une voix toute proche, mais inconnue. Arhiann réalisa que la djöllfuline au tambour s'était approchée, et qu'elle la considérait avec curiosité.
" Je suis désolée de lui avoir fait peur. Tenez, je vous le rends, "
fit la faune en tendant le morceau de lien vers l'autre cornue. Celle-ci ne fit aucun geste en sa direction, mais esquissa un timide sourire, qui vint éclairer son visage autrement glacial.
" Ce duergar ne m'appartient pas. Nous nous connaissons un peu, mais il reste à demi sauvage, il va là où cela lui plaît... Vous devez être l'étrangère adoratrice des étoiles ? "
Il n'y avait pas la moindre moquerie dans ces mots, et la faune supposa qu'en effet, elle était sûrement celle-là, aussi hocha-t-elle la tête. La djöllffuline reprit alors :
" Je suis Dara. C'est une bien belle prise que vous avez faite, mais c'est inutile, nos montures sont plutôt hargneuses envers les autres races. "

La créature était en effet de belle taille, certainement en parfaite santé si on en jugeait par ses cavalcades précédentes, et possédait une robe gris sombre, tirant vers une teinte plus claire sur les pattes et la tête, avec une crinière luisante qu'on aurait dit faite de fils d'argents, si elle n'avaient pas été aussi emmêlée. Oui, c'était une magnifique monture mais, suivant les conseils de la bipède, Arhiann s'apprêta à relâcher le lien.
" Attendez ! "
Étonnée, la faune raffermit sa prise, et questionna l'autre du regard.
" Je ne veux pas vous donner de faux espoirs, mais... il a l'air plutôt calme, avec vous. Sinon, il se serait déjà enfui, et vous n'auriez pas pu le retenir. Si vous voulez essayer de l'apprivoiser... je peux vous montrer. "
La blonde, perplexe mais intéressée, acquiesça, et la musicienne réinstalla sa percussion à proximité de l'animal.
" Il comprend le langage du tambour. C'est comme ça qu'on peut créer un lien avec lui. Il faut commencer doucement... Allez-y, essayez, je vais le tenir, le temps de voir si... s'il vous entend. "

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'Attaque - Hybride' :

Ainsi donc, la faune avait remis à la djöllfuline l'extrémité de la longe bricolée, il lui avait d'ailleurs semblé voir passer un fugitif sourire sur les lèvres de la cornue lorsqu'elle s'en était saisie. Sans doute avait-elle reconnu son origine peu orthodoxe... Arhiann, ainsi libérée, avait pu s'approcher du tambour de la nordique, pas très assurée, et ce d'autant moins que le regard de celle-ci lui semblait peser sur chacun de ses gestes alors qu'elle s'installait auprès de l'instrument, de la manière dont il lui avait semblé que l'autre l'avait fait.
" N'ayez pas peur de le tenir tout contre vous. C'est comme ça que vous comprendrez le mieux ce que ressent le duergar, "
l'incita celle-ci en constatant son léger embarras, et la blonde s'exécuta. Elle s'enhardit à tapoter la peau tendue, produisant un son assez ridicule.

" Allez-y franchement, avec le plat de la main. Gardez un rythme lent au début, mais un frappé net. Votre discours doit rester clair, et vous devez montrer que vous savez ce que vous voulez. "
De nouveau, la faune appliqua les conseils de Dara, et constata bien vite que la percussion était plus solide qu'elle n'en avait l'air : elle pouvait en effet y heurter très directement sa paume ouverte, et la réponse se faisait bien plus audible, avec une vibration qu'elle ressentait physiquement des pieds à la tête. Elle n'était pas musicienne, mais comprenait bien qu'il y avait là quelque chose qui allait au-delà d'un simple amusement des oreilles...
" C'est bien, comme ça. Gardez juste une petite succession de battements qui reste votre thème principal. Vous pouvez faire des variations, c'est même conseillé, mais revenez-y toujours régulièrement. C'est votre repère, et doit devenir celui du duergar également, s'il lui plaît. "

Arhiann commençait à mieux comprendre comment fonctionnait la percussion, mais il lui sembla que les derniers mots de la djöllfuline évoquaient quelque chose de bien trop technique pour la novice qu'elle restait. Il fallait qu'elle trouve un thème sur lequel se baser ? Sans doute vaudrait-il mieux quelque chose qu'elle ressente au plus profond d'elle-même, qui lui corresponde viscéralement. Alors, elle ferma les yeux, et s'imagina de retour dans sa chère forêt Sylfaën, entourée de sa famille au complet, et de tous ceux qu'elle avait rencontrés depuis qu'elle était partie à la découverte du monde : les membres de la garde Zéphyr, les professeurs de l'académie de magie, les rencontres plus ou moins brèves avec d'autres voyageurs. D'abord, elle fit sonner trois battements longs et profonds, qui représentaient pour elle le cœur de ces antiques bois. Puis, un roulement rapide vint évoquer son peuple, les faunes, toujours prêts à danser et à fêter la vie. Un long battement, encore, car la forêt restait omniprésente, et un autre roulement. Sa main vint ensuite frapper le bord de la peau, produisant un son plus étouffé, mais qu'elle laissa résonner. Magnésie, présence presque invisible, mais toujours là pour veiller sur ses enfants. Elle avait son thème.


Comme la djöllfuline le lui avait recommandé, l'ensorceleuse partit de ce petit enchaînement, pour explorer des variantes, et revenir de temps en temps à l'original. Elle s'immergea si bien dans cet exercice, qu'elle sursauta lorsque la voix de Dara se fit entendre juste derrière elle :
" Il faudrait juste accélérer quand il fait mine de s'approcher. L'inciter à continuer. "
Avec l'impression de sortir d'un rêve, Arhiann rouvrit les yeux, pour découvrir le duergar, libre, mais toujours présent, à quelques pas d'elle, très calme, et les oreilles tournées dans sa direction. L'autre cornue, elle, l'avait rejointe, et suivait leur échange d'un œil brillant. Reprenant sa rythmique après ce bref instant de déconcentration, elle s'abstint cette fois de trop se détacher du monde réel, et observa les mouvements de la monture nordique avec attention. Quand il tendit la tête en avant, elle précipita ses battements de main. L'animal risqua un pas en sa direction, avant de reculer tout aussi vite.
" Patience, "
souffla la musicienne en s'accroupissant auprès d'elle,
" il ne va pas venir vous manger dans la main dès le premier essai, c'est normal. Mais vous vous débrouillez bien. "

Rassurée par ces encouragements, et par la présence d'une experte à ses côtés, la fille de Magnésie reprit donc. Maintenant qu'elle le vivait, elle comprenait le curieux jeu auquel elle avait assisté, entre Dara et le duergar, lorsqu'elle était arrivée : le quadrupède avançait un peu, le tambour le poussait à continuer, mais sa nature méfiante reprenait le dessus, et il reculait. Mais la musique l'attirait invariablement de nouveau, et il refaisait quelques pas en avant, s'approchant un tout petit peu plus à chaque tentative. Cœur de la forêt Sylfaen, bonds joyeux des faunes et regard protecteur des divines étoiles. Arhiann se perdait avec bonheur dans des variations, et retrouvait son rythme fétiche en ressentant le plaisir de retrouvailles avec un vieil ami. Plus elle donnait à la musique, moins il lui semblait que l'animal reculait. Il était tout près, désormais.
" Quand il sera assez proche, vous pourrez reprendre la longe. Doucement, mais fermement. Nous y sommes presque. Continuez sans vous occuper de moi. "

C'était plus facile à dire qu'à faire, puisque la djöllfuline venait ajouter quelques touches sur la peau de son instrument, amenant de subtiles nuances qui semblèrent faire leur effet. Mais elle était si agile qu'elle ne gênait pas son apprentie du jour, et enfin, la tête cornue de l'étrange cheval s'abaissa jusqu'à presque toucher le duo de percussionnistes. Sur un signe de Dara, la blonde libéra une main, l'autre continuant sa rythmique. Elle attrapa la cordelette, tout près du crin soyeux de la bête, tout près de sa gorge où palpitait une robuste énergie de vie. La monture se figea, dans l'attente de quelque chose. Suivant son intuition, Arhiann se leva lentement et, bien campée derrière le tambour, inclina à son tour la tête, pour joindre ses propres cornes à celles du duergar, en un geste qui signifiait beaucoup parmi les siens.


Le peuple des démons nordiques n'avait certainement pas les mêmes coutumes, mais l'intention sembla comprise, et l'équidé s'enhardit à renifler cette nouvelle amie sous toutes les coutures. Interrompant cet échange avec un large sourire, la pâle cornue ramena à elle son instrument, et le chargea dans ses bras.
" Félicitations. Nous allons pourvoir ajouter à vos exploits, le domptage d'un duergar. Mais je crois qu'il est temps de rentrer, désormais. Vous devez être fatiguée. "
La tension du moment musical s'étant envolée à ces mots, la faune ressentit en effet un chape de plomb descendre sur elle, et envelopper spécialement ses bras, qui s'étaient agités sans ménagement autour de la peau de l'instrument.
" Ne vous en faites pas, il va nous suivre sans faire d'histoires. Un bien bel individu pour rejoindre le troupeau du village... "
commenta encore sa guide, l'air appréciateur. Et elle qui était sortie seule pour, seulement, prendre l'air, revint donc entre les palissades djöllfulines accompagnée d'une de leurs meilleures percussionnistes, ainsi que d'un magnifique duergar qui renâcla à peine durant le trajet jusqu'aux écuries, où elle le laissa entre de bonnes mains.