La question n’avait, semble-t-il, qu’effleurée l’esprit de mon congénère, trop peu intéressé par le sujet. Alors comme ça, lui aussi était un déserteur ? Enfin, s’il a été bannis, ce n’est pas tout à fait un déserteur, ce qui me différenciait sur ce point de Vallon. Mais au moins, je pouvais me dire que je n’étais pas tout seul dans une situation compliquée. La Congrégation et la tour noire sont étroitement liés d’une certaine manière puisque la plupart des Stryge Noir présent à Lédéhi sont des assassins de la confrérie noire ou des Exécuteurs, exemple parfait de l’ex bras droit de l’Ombre.

Garràn – A bas au moins, je ne suis pas le seul sur liste noire ! J’esquissai un sourire qui se transforma petit à petit en un ricanement sinistre puis, je retrouvai mon calme en un tour de main avant de répondre à l’écailleux. Très bonne question. Je dirais de la Congrégation sans hésiter. N’ayant connue véritablement que cette maison au milieu du désert …

Mais le serpentaire avait su lire dans mes pensées, comme si un détail m’avait trahi. Ou avait-il seulement dit ça sans pour autant y penser ? Quand bien même, ce n’était pas tout à fait une promesse qui me liait à mon passé, mais plus tôt des chaînes qui m’ont été léguées. J’étais redevenu ce Stryge Noir au caractère taciturne, le regard vide, sans émotion si ce n’est un léger mépris … Il avait réussi à toucher une cible bien caché …

Equinoxe - Dis-moi, ça te gêne si je m'essaye en manipulation mentale sur toi? J'aimerais voir à quel point j'ai progressé, et disons que je pense l'avoir assez fait sur Vallon" "Avec ton petit démon flottant, ton esprit est peut-être plus difficilement manipulable.

En un instant, il avait également réussi à dissiper mes doutes. Un seul son continu sorti de ma bouche à sa question pour le moins étrange, un simple « heu … » que Vallon vont interrompre quelques instants plus tard, nous appelant à lui pour le rejoindre. Je suivis de près l’écailleux qui se déplaçait entre les dépouilles d’insectes, découpées ou tout simplement broyées, avant de rejoindre sont camarade volatile près de la jeune femme assoupie. Etrangement, les allées près du carrefour où nous  nous trouvions semblaient dégagées, les gravas avaient été déplacés pour faciliter la circulation. Ce qui signifiait que quelqu’un s’était occupé de cet endroit après les ravages de l’ancien temps. Les ruines avaient ou doivent encore être habitées, par qui ou par quoi, nous allions vite le savoir. Je pencherais plus sur l’armée d’insecte humanoïde que nous avions croisé plus tôt puisqu’il s’agissait de la seule espèce vraiment louche et hostile présente dans ces ruines. Peut-être que la petite humaine aux cheveux clairs en savait un peu plus. Je pris l’initiative de découper la soie  qui l’entravait avant de l’allonger sur le sol.

Garràn – Tu crois que les bestioles qu’on  a éliminées un peu plus tôt sont capables de tisser ce genre de filet ? Tandis que j’essuyais la soie qui s’était collée au tranchant de ma dague, je farfouillais de l’autre main dans ma besace en cuir quelques choses pour la réveiller. Cela ressemble plus à une toile d’araignée pourtant … ce qu’on a charcuté tout à l’heure ne ressemblait pas vraiment à ce qu’on connait dans les marais Hukutav …

Depuis que nous avions mis les pieds dans l’enceinte de la cité fantôme, seul le dôme attirait mon attention, le carrefour où nous nous trouvions était situé à l’Ouest du dôme, en continuant tout droit et en passant par le bourg principal, le chemin sera certainement plus court et la vue serait dégagée. Impossible de tomber dans un piège dans ces conditions, si piège il y a … Mais ce que nous avions devant nous laissait penser le contraire. Nous pourrions également reprendre les petites ruelles jusqu’à atterrir devant la grande cour entourant le château de Fata-Morgana, ou ce qu’il en reste. Le dôme semblait se trouver au milieu du château, donnant un aspect de tortue de pierre aux vestiges de l’ancienne monarchie humaine. Mais une idée me vint en regardant autour de moi. Certain bâtiment tenait encore debout et, bien que la solidité pouvait laisser à désirer, il serait tout à fait possible pour moi et Vallon de transporter Equinoxe à l’intérieur du dôme en s’appuyant sur le point culminant de la cité : Le cloché. Je refoulais cette idée après avoir calculé rapidement la distance qui nous déparait du dôme et celui du cloché. On en aurait pour un moment et on ne tiendrait pas la moitié du trajet. Mauvaise idée.

Garràn – On s’en occupe ou on s’en débarrasse ? S’il ne s’agit que d’une personne égaré sans aucun moyen de se battre et qu’on la laisse repartir, elle se fera bouffer en moins de deux …

Baël – Ou pire ! Tuer ! Cela dit, cela pourrait être marrant qu'Equinoxe utilise sa magie sur toi.

J'ignorais tout simplement la remarque du démon, il y avait plus important que de jouer avec l'esprit des gens,. J'en avais déjà bien marre avec Baël. Réveiller la jeune femme serait peut-être intéressant pour en savoir un peu plus sur ce qui se tramait ici. Je n’avais pas spécialement de préférence, juste que faire de la garderie pour une humaine était légèrement contre mes principes, mais elle n’avait rien d’énervante endormie comme ça.

Garràn – Par contre, si on la réveille, je veux pas m’en porter garant, qu’on se l’dise !

Début du combat Garràn & Equinoxe - Brötleksia, Reine de la Ruche

Après un rapide examen visuel, l’écailleux avait gardé le silence. Il savait que l’état de santé de cette femelle humaine était plus que critique, Vallon me le fit comprendre. Nous manquions d’information quant à ce qui nous attendait sur cette route sinueuse, mais ce n’était pas l’inconnu qui m’empêchera d’avancer. Autres chose semblait attirer l’attention du serpentaire, droit comme un i, face à l’horizon qui se profilait devant nous, vallon et moi-même laissions la pauvre humaine trépassé pour rejoindre Equinoxe qui cherchait des yeux notre prochain défi. Baël à ses côtés, lui aussi avait dû percevoir ce qui dérangeait l’écailleux. Devant nous s’offrait un spectacle pour le moins étrange et sinistre. Bien que nous n’ayons pu en apprendre plus sur ce qui s’est passé ici, le nombre de personne ayant subis cette même torture à base de toile ne manquait pas, la prudence était de mise dorénavant.

Garràn - C’est plutôt impressionnant. En même temps, que faisait des humains dans des ruines maudites par le temps ?

Baël – Nous sommes observés, même si je ne peux localiser cette source d’énergie. Le petit démon se retourna et continua. Sous cette forme, mon champ de vision est plutôt limité.

Garràn – On verra ça plus tard, on a encore de la vermine à écraser.

Plusieurs insectes s’invitèrent et vinrent à notre rencontre, l’un d’eux était bien plus imposants que tout ceux que nous avions rencontré jusqu’à maintenant, le restes ne devait être que des sous-fifres sans aucune importance, pourtant, c’est également sur eux que je me déchargeai de ma faux, découpant la tête de l’espèce de gros verre cornu. Cette petite excursion commençait à me plaire finalement. Bien que les combats soit relativement cours, les combats s’enchaînaient ce qui me divertissait un minimum. Et puis la compagnie d’Equinoxe et de Vallon me permettait d’en apprendre un peu plus sur eux tout en travaillant notre cohésion. J’attendais de voir qui serait le premier à s’en prendre à cette grosse larve et quelle serait sa réaction.

Combat Garràn & Equinoxe - Brötleksia, Reine de la Ruche
T2

Alors que je continuais à m’amuser avec l’autre petit insecte aux allures de coffre fort, le sol se mit à trembler puis, des gravas et débris tombèrent du plafond et des structures environnantes. La grosse bestiole, qui semblait être la mère pondeuse par son apparence rondouillarde, était en train de tout saccager sans distinction. Usant de ma dextérité et de mon agilité pour m’éviter quelques écrabouillades, je poursuivais mon ascension jusqu’à la vile créature avant de me faire renvoyé de là où je venais. N’ayant pas bien calculé mon coup, l’un des tentacules vint me lécher la joue violemment et me fis retrouver mon compagnon de l’ombre et son fidèle valet.

Garràn – A bas tiens, vous êtes là ? Je me relevai tranquillement, comme si j’avais été assis à cet endroit depuis un moment déjà. Je voulais me faire cette bestiole, mais ses gros tentacules n’avaient l’air d’accord !

Vallon – Hé j'ai lu une histoire récemment, la reine disait qu'il fallait « lui couper la tête ».

Suite à cette frasque rocambolesque agrémentée d’un sourire malsain, Equinoxe se mit à perdre la tête. Vallon chercha tant bien que mal à éclaircir nos doutes, mais la réponse de l’écailleux était sans appel, il commença à balancer tout un tas de sort, asservis par la douleur. Il y aurait un télépathe dans le coin ? Je me tournais à nouveau vers l’insecte géant qui continuait à se tordre dans tout les sens puis, vers Equinoxe qui semblait gesticuler de la même manière … Je n’étais pas spécialement doué pour résoudre les problèmes, même au contraire, j’avais plutôt tendance à empirer les situations hors contrat, mais il serait préférable de mettre au tapis notre tremblement de terre ambulant avant de résoudre les petits soucis de mon écailleux. Je pense qu’il serait même ravi de défouler sa colère et sa douleur sur ce truc.

Garràn – Si t’as besoin de te défouler, bondissant de droite à gauche entre deux sorts magiques, tu pourrais peut-être le faire sur ce machin là, non ? Comme ça par exemple !

Je profitai d’une esquive pour me retourner vers la monstruosité et lui lancer ma faux. Celle-ci vint se planter dans la roche derrière l’insecte géant, créant davantage d’éboulis qu’il n’y en avait déjà avec les tourments de l’insecte. Je me tournais vers Equinoxe qui tenait encore sa pauvre tête entre ses mains, sa crinière pourpre lui tombant sur le visage, il avait l’air bien moins effrayant ainsi. Mais ce n’est pas sans me rappeler ses sorts qu’il invoquait à tout bout de champ. Il allait finir par nous achever avec la reine insectes à ce train là ! Il fallait qu’il se ressaisisse rapidement ou cela pourrait nuire à notre mission …

Combat Garràn & Equinoxe - Brötleksia, Reine de la Ruche
T2

L’immense ver continuant sa danse grotesque au milieu des décombres, le plafond tombant continuellement sur nos têtes, la situation ne pouvait pas être plus dérangeant, au point de dire qu’elle en devenait presque incontrôlable. L’écailleux n’arrivait pas à se concentrer pour une quelconque raison, à moins que ce ne soit celle-ci justement qui s’en soit allé, Valon essayait tout comme moi d’éviter de se faire écraser par la caillasse qui nous tombait dessus ou par les grands tentacules qui sillonnais l’espace aérien. Après m’être couvert de ridicule en envoyant ma faux valdingué à l’autre bout de la grotte, j’avais tenté un assaut tout aussi ridicule avec mes dagues qui n’atteignit jamais sa cible également. Cela faisait seulement une raison de plus pour aller chercher mon équipement que j’avais jeté au loin. La situation était plus délicate encore. Plus la grosse larve se dandinait et s’agitait contre les parois de la structure et plus nous avions de chance de finir ensevelis vivant sous les décombres, avec approximativement l’équivalent d’une vingtaine d’éléphant au-dessus de nos tête qui tenait à un file, nous n’aurions pas le temps de dire ensevelis vivant, mais ensevelis après avoir été écrabouillé.

Voilà maintenant qu’Equinoxe débloque, il marmonnait dans une langue qui m’était totalement inconnu, semblant répondre à quelqu’un, la tête dans les bras, l’air grave. Je ne lui avais jamais vu cette expression et cela ne laissait prédire rien de bon. Il se tourna vers moi, me fixant de ses yeux vides, continuant de marmonner je ne sais quoi. Mais je n’avais pas le temps de m’occuper de lui pour le moment, il fallait qu’il arrive à reprendre son calme.

Garràn – Hey ! C’est vraiment pas le moment d’apprendre à parler le ver ! Le plafond continuait à craquer sous les assauts désorganisés de la créature. Si on traîne trop, tu n’auras pas le temps de le finir ton bouquin de magie !

Comme pour imager ce que je souhaitais exprimer, la créature commença à tambouriner sur le sol, cherchant à nous écraser comme un paysan cherchant à taper sur le crâne de la taupe. Cela commençait vraiment à me fatiguer tout ça. Alors que le ver semblait gagner en intensité et en puissance, mon corps arrivait sans peine à se mouvoir parmi les assauts multiples de la reine des vers : Une première esquive en-dessous d’un tentacule, une roulade pour éviter une frappe en marteau, un battement d’aile pour éviter le second et me voila reparti à courir le long du mur, guettant la moindre faille. Même depuis un point culminant et en retrait de la zone de combat, je ne pouvais entrevoir un angle mort, un point faible ou ne serai ce qu’une faille, l’association de l’éboulement et de la fureur de l’insecte géant rendait toute contre attaque difficile à mettre en place, et tant qu’Equinoxe ne serait pas sorti de sa folie, il nous serait impossible de braver la démonstration de colère que le ver nous faisait.

Combat Garràn & Equinoxe - Brötleksia, Reine de la Ruche
T3

Manifestement, la reine des vers n’en avait pas encore terminé avec nous et semblait vouloir nous prouver son autorité suprême ici-bas. L’aura noire qui l’enveloppait jusqu’à présent était de plus en plus impressionnante, à tel point que celle-ci entamait une phase de métamorphose devant nous. Je n’en revenais pas. La créature n’étant pas habitué à contenir autant de puissance s’est mise à muter pour s’adapter à sa nouvelle force, la bosse sur son dos avait doublé de volume avant de commencer à éclore pour donner vie à de petites ailes. En plus ce truc sait voler ?! Mais l’endroit était bien trop petit pour qu’elle s’en serve, d’ailleurs, elle ne pouvait désormais plus passer par la porte d’entrée … sa taille gigantesque l’en empêchait. Pourtant, je ne pouvais pas ignorer le risque que le ver s’envole et détruise le plafond, l’éboulement risquerait de nous être fatal à tous.

Garràn – Il n’y à qu’une seule race qui mérite de pouvoir voler … Alors que je continuais à marcher le long du mur, je changeais brusquement de direction, fonçant droit vers la monstruosité. Atteignant le dos et saisissant la paire d’aile … et ce n’est certainement pas un gros ver avec des tentacules !

Le tranchant de ma lame vint découper les jolies feuilles transparentes aux contours sombres sans que celle-ci ne se froisse, une découpe nette et précise. Le ver se tortilla quelques instants avant de reformer une nouvelle bosse sur son dos qui, après quelques secondes, se mit à éclore pour laisser place à une nouvelle paire d’aile. Je ne savais pas quoi dire … Visiblement, cela ne servait à rien de s’attaquer à ses ailes, celles-ci repoussent avec l’excès de magie.

Garràn – Si tu crois que je vais te laisser décoller !!

Plutôt que de découper ses ailes, cette fois-ci, je tranchais littéralement le dos du ver, laissant une magnifique entaille bien dégoulinante de sang. Quelques pas en arrière puis un salto arrière, j’esquivais simultanément les attaques répétées des tentacules qui entouraient le ver comme une garde rapproché autour de son roi. Cette fois-ci, la blessure que je lui avais portée l’empêchait de faire repousser ses ailes, il fallait donc s’attaquer directement à son épiderme … Ainsi je repris ma course éternelle autour du ver, attendant patiemment qu’Equinoxe se réveil de son cauchemar éveillé. Valon semblait atteindre ses limites lui aussi, obligé de protéger son maître qui était resté immobile depuis tout à l’heure. L’aura noire avait l’air de l’entourer également et son récital était de plus en plus incompréhensible. Je me demandais bien ce qui pouvait lui arriver. D’abord, le réveiller ! Je profitais de l’éboulement pour frapper une roche tombante, l’envoyant directement sur Equinoxe, prenant attention à éviter Valon. Si le serpent était sous l’emprise de la créature, il suffisant qu’un élément extérieur vienne perturber le processus, c’est ce qui m’avait traversé l’esprit l’espace d’un instant avant que je ne mette à agir.

Garràn – Allez, réveil toi maintenant !

J’espérais qu’il reprenne ses esprits rapidement, il valait mieux en finir le plus tôt possible avec ce ver, avant qu’il ne détruise les alentours …

Combat Garràn & Equinoxe - Brötleksia, Reine de la Ruche
T4

Le lancer de pierre fut couronné de succès ! Le naga avait retrouvé ses esprits et se redressait tant bien que mal. Il était temps, cette grosse larve commençait à prendre un peu de place ici. Alors que je continuais d’esquiver les assauts répétitifs de l’insecte géant, ce dernier s’immobilisa quelques instant avant que sa carapace ne commence à s’effriter et à se briser en mille morceaux. Dés qu’Equinoxe se réveille, de suite ce ‘est plus la même chose. J’avais l’impression ne rien faire du tout dans ce combat … Alors que l’Ecailleux avait passé la moitié de son temps sous hypnose ou je ne-sais-quoi. Le combat n’était, toutefois, pas terminé et la bête hurlait sa haine si fort que l’aura qui s’en dégageait pouvait se ressentir dans chaque partie de mon corps.

Baël – Tu rêves mon gars … ce que tu viens de te prendre, ce n’est pas le souffle de son aura, mais sa muqueuse nasal … sa morve quoi.

Vallon – On fait quoi maintenant ?

Equinoxe – On la tue ! Vous entendez ? Butez-moi cette saloperie !

Garràn - … T’es morte …

D’un seul coup, je changeai de direction, prenant appui sur la paroi rocheuse puis, d’un battement d’aile, je fendis l’air en une fraction de seconde et d’un mouvement de massue, abattis ma faux sur le crâne de l’insecte géant. La faux rencontra indiscutablement quelque chose de résistant dans le crâne de la victime. Du cartilage ? Des os ? Le choc fut si violent que la résonance secoua mes poignets. Je lâchai prise un instant, mes mains toute endoloris par le choc, L’insecte profita de cet instant pour tenter de m’atteindre avec un de ses tentacules, sans succès. Je fus contraint de laisser ma faux planter au sommet de ce dernier, mais, je n’étais pas encore totalement désarmé, il me restait encore une lame …

Garràn – C’est qu’elle a les os solides la bougre !