Il s'était retrouvé là presque par hasard. L'arène de BaldorHeim. Ce n'était pas vraiment sa destination, mais c'était là qu'il avait fini. On lui avait proposé d'affronter un certain DoÖoN, ce à quoi Saigo avait répondu d'un haussement d'épaule, puis d'un hochement de tête affirmatif. Il pensait pouvoir passer quelques minutes à se délecter de la souffrance qu'il allait infliger à cet inconnu. Jamais il ne s'était autant trompé.
Lorsqu'il avait pénétré dans l'arène, tous bruits avaient cessés. Un silence de mort s'était établi, et l'arrivée du second concurrent ne sauva pas les meubles. Un abyssal, armé d'une faux. Encore un qui aurait mieux fait de rester dans la flotte. Pensait le Stryge solitaire. Ils étaient séparés d'une poignée de mètres, la distance était suffisante pour que Saigo parvienne jusqu'à DoÖoN d'un seul battement d'aile. Le stryge était confiant. Fixant l'abyssal avec une lueur froide dans le regard, il lui faisait comprendre qu'il n'était pas là pour faire du tourisme. Sautillant deux secondes sur place, faisant mine de s'échauffer, Saigo bondit soudainement de toutes ses forces, déploya ses ailes tout en se saisissant de sa dague, et fonça sur l'ennemi à une vitesse fulgurante.
Zam! La lame de DoÖoN fendit l'air avec une précision parfaite. Saigo avait été complètement coupé dans son élan, et s'était écrasé au sol quelque mètres plus loin, vaincu. Une seule attaque. Il n'avait même pas résisté à une seule attaque. Il n'avait même pas eu le temps de porter une seule attaque. Il avait délaissé les trois quarts de sa bourse pour un combat humiliant, qui n'avait pas duré cinq secondes. Passant doucement la main sur sa plaie, il se rassura en pensant qu'elle n'était pas mortelle. Bien que très profond, le sillon laissé par la lame de la faux, qui balafrait son corps en diagonale, ne laisserait pas de séquelles, hormis une nouvelle cicatrice. Allongé sur le dos, le Stryge solitaire demeura une bonne minute, regardant le ciel. Un bourdonnement sourd résonnait dans ses oreilles, masquant une partie des cris de la foule. Certains acclamaient l'abyssal, d'autres riaient de sa faiblesse, et parfois, c'était les deux en même temps. Saigo serrait les dents. La douleur n'était pas si atroce que ça, en fin de compte. Et alors que plusieurs personnes accouraient avec un brancard, des bandages et autres, il se redressa, écarta vivement les médecins qui souhaitaient l'aider, et quitta les lieux, tête basse.