Désirant à la fois faire de la publicité pour sa boutique et le Cirque, mais également pour renouer avec son métier de divinatrice, Eyara avait fait placarder au marché quelques affiches annonçant des séances de divination à bas prix, soit 1 pièce d’or, pour toute la semaine qui suivrait. Elle avait par la suite aménagé un coin dans son atelier d’arrière boutique, séparé par un rideau violet du reste de la pièce, comportant une table et deux chaises. Dans l’angle du mur, un coffret fermé à clé contenait tout son matériel de divination : différents jeux de cartes, incluant le tarot, des dés, des osselets, un sac de runes ainsi qu’une boule de cristal. De la même teinte que le rideau, il y avait également une nappe couvrant la table et un coussin par chaise, offrant ainsi confort au client. Au-dessus du coffret se trouvait également une tablette fixée au mur sur laquelle était visible un encensoir et une boîte de sauge.

Ne restait plus qu’à avoir des clients. Afin de s’assurer que les filles ne manque de rien pendant la journée, l’harenienne avait engagé une jeune femme comme nourrice, tandis quee Petit Tambour l’aidait dans la gestion du petit commerce. Il encaissait les petites transactions, sur la surveillance de l’harenienne bien sûr, et aidait à replacer le stock en magasin au besoin. Le petit avait également quelques leçons de sculpture de temps à autre, le duo laissant alors la surveillance des lieux à Kalsak et Danica, respectivement l’archéoptéryx et la fée nordique de la maman. Bien entendu, les deux petites créatures appelaient la propriétaire dès que quelqu’un se manifestait.

C’est d’ailleurs dans cette vision d’ensemble que se trouvait le petit commerce ce matin-là, l’arlequine et l’enfant à l’arrière pour une leçon et les deux petites créatures dormant sur le comptoir. La voix rassurante de la propriétaire était cependant bien audible du côté commercial, en train d’expliquer à Petit Tambour comment tenir certains outils.

- Bonjour, il y a quelqu'un ?

Au son de la voix, la petite fée à la chevelure blanche s’étira avant de quitter en voletant les chaudes plumes de son compagnon de sommeil. Totalement réveillée une fois à la hauteur de la cliente, celle-ci s’exclama :

- Bonjour et bienvenue chez Masha’zahk*, boutique spécialisée en sculpture et enchantements de madame Eyara. Prenez le temps de regarder la marchandise, je vais chercher la maîtresse des lieux.

La petite fée se dirigea ensuite vers l’arrière boutique, laissant l’archéoptéryx veiller sur la cliente. Lorsque Danica arriva à la hauteur de la renarde, celle-ci était en pleine explication vers l’enfant.

- Donc, cet outil-ci, Petit Tambour, c’est une gouge droite et plate. On doit la prendre comme ça en main, dit-elle en plaçant l’objet dans la main du petit, et on s’en sert tout doucement, en suivant le sens du bois, pour creuser doucement la zone à sculpter.

Sa main toujours sur celle de l’enfant, l’harenienne creusa quelques coups avec lui.

- Eyara, nous avons une cliente.

Regardant le commerce par l’arche séparant les deux pièces, l’arlequine y vit effectivement la silhouette d’une personne. Elle traça rapidement une zone sur le bois que le gamin travaillait et lui donna ses instructions, avant de changer de pièce. La clientèle passait avant, sauf en cas d’urgence bien sûr. Battant l’air de sa queue, la renarde s’approcha de sa cliente. Mais plus elle s’avançait, et plus une odeur lui montait au nez. ”À merde, j’ai oublié d’inscrire ce détail sur mes affiche … Quoique, cette vampire vient peut-être pour une arme ou un enchantement ? La jeune femme en était la de sa réflexion quand elle se présenta.

- Trolam’skra** et bienvenue chez Masha’zahk. Vous cherchez une arme sculptée ou un enchantement ? Autre chose peut-être ?

*HRP : Se prononce : Macha’sac.
**HRP : Se prononce : Trolame’zkra

- Trolame’zkra, en réalité, j'aurais grandement besoin de votre aide.

Tiens, voilà bien la première fois que quelqu’un tentait de répondre à ses salutations dans sa langue. Son sourire prouva qu’elle appréciait l’effort. Sa cliente reste cependant nerveuse. Sans doute est-ce la tension entre leur race respective qui vient la troubler.

- Pour être direct, je suis à la recherche de ma fille, elle a disparu, il y a des années, mais je sais qu'elle est encore en vie, je le sens en moi.

Voilà bien un sentiment qu’Eyara pouvait comprendre, étant elle-même mère. Mais cela confirma que la vampiresse venait pour ses dons pour la divinations. Décidément, la renarde aurait vraiment dû spécifier son inaptitude à lire l’avenir des buveurs de sang.

- S'il vous plaît, j'ai besoin que vous me faites profiter de vos dons en divination, je comprendrais que vous me fassiez payer plus, nos deux races ayant un passé tumultueux, mais s'il vous plaît, j'ai vraiment besoin de votre aide, votre prix sera le mien.

Et voilà la confirmation de son pressentiment. Que faire dans ce cas ? En fait, il y avait peut-être une solution, suivant les astuces que sa mère lui avait enseignées. Restait à savoir si sa cliente possédait le prérequis …

- Je peux comprendre votre impression, moi-même je suis mère de deux adorables petites filles. Et n’ayez crainte, votre sang vampirique ne me dérange pas le moins du monde. En vérité, je n’ai jamais compris pourquoi nos deux peuples n’ont pas appris à faire la paix entre eux depuis. Tout serait tellement plus simple. Mais bon, tout cela pour dire qu’il n’y aura pas d’augmentation de prix pour cette seule raison. C’est le meilleur moyen de faire fuir la clientèle, ce qui ne m’intéresse pas.

Ne restait qu’à lui expliquer, délicatement, comment fonctionnait sa magie. Ce n’était pas un refus, du moins, pas totalement, mais voilà, il lui fallait le mentionner.

- Je me dois cependant de vous mentionnez un point que j’ai oublié d'indiquer sur mes affiches : ma magie ne fonctionne pas avec les vampires. Cependant, si vous possédez un objet ayant appartenu à votre fille, et si celle-ci est humaine, peut-être dans ce cas arriverais-je à voir quelque chose. Mais c’est une option que je n’ai jamais vraiment utilisé moi-même, bien que j’ai vu ma propre mère tenter l’expérience. Je me rappelle assez de sa technique pour l’essayer. Si cela ne fonctionne pas, ça ne vous coûtera rien.

C’était bien la moindre des choses de lui offrir de tenter cette magie, entre mère, il fallait s’épauler après tout.