Sujet: Les liens familiaux [SOLO][Terminé] Ven 22 Déc 2023 - 12:35
Les liens familiaux
Voilà, le trac du premier numéro descendait enfin. Après avoir conduit Vroska et Shakab vers leur box, la renarde se dirigea vers la caravane qu’elle empruntait pour quelques jours. Venue sur le dos de ses montures volantes avec ses filles et PetitTembour, la maman avait emprunté une roulotte inoccupée pour les quelques jours où elle serait à Stellaraë pour le spectacle de fin d’année. Mais alors qu’Eyara allait entrer se coucher, les Mis l'interrompirent. Intriguée, l’arlequine tourna le regard vers eux. Les petites créatures s’avançaient vers elle, un être de pierre de leur taille tenant la main de l’un d’eux, tandis qu’un second semblait agiter un morceau de papier, une lettre apparemment. Comprenant que celà lui était destiné, la maman les remercia et entra dans sa roulotte d’emprunt. Kalsak, toujours sur son épaule depuis la sortie du chapiteau, descendit à cet instant pour se lover dans le panier prévu pour son sommeil. Ne restait que la bestiole pierreuse, qui n’était pas prévue au programme. Elle permit à Éléonore, à qui elle avait demandé de veiller sur le sommeil de ses filles pendant son numéro, de rentrer chez elle.
La maman vérifia ensuite que tout son petit monde dormait paisiblement. PetitTembour dormait dans un coin, tandis que Jamila et Loona dormaient dans son lit entre une pile d’oreillers. Le sourire aux lèvres, la renarde déposa un baiser sur le front de tous avant de s’installer près de la seule bougie qu’avait allumée la dresseuse de licornes. Seul son prénom figurait sur l’enveloppe, d’une écriture qu’elle reconnut aussitôt. C’était celle de Zahir, l’un de ses petits frères. Tiens, voilà longtemps que la jeune femme n’avait pas eu de nouvelle : depuis son départ en fait. Elle-même n’écrivait pas vraiment aux siens, en vérité. La seule lettre que la maman leur avait fait parvenir annonçait son mariage à son père. Personne n’était donc au courant encore pour ses filles et son pseudo-divorce. Voilà qui fit monter un sentiment de honte en elle. Que pourrait-elle bien dire à sa famille à ce sujet ? Les coutumes de son clan interdisaient le divorce, et la voilà qui se retrouvait seule pour élever deux enfants. Et elle brisait une autre coutume en ne portant plus son hijab.
Voulant tout de même savoir ce que son frère lui voulait, Eyara sortit la lettre de l’enveloppe et se mit à lire.
Eyara,
Je suis heureux d’avoir enfin de tes nouvelles, bien que nous n'ayons pu parler. J’ai assisté à ton numéro du Cirque ce soir et c’était magnifique. Pas prévu à la base, c’est lorsque j’ai entendu ton nom de scène parmi les artistes du jour que j’ai acheté mon billet. Tu as l’air de bien aller, cela me rassure. Nous nous inquiétons tous pour toi depuis ton départ. N’ayant pas eu de nouvelles, père à toujours craint le pire, heureusement, je vais pouvoir le rassurer dès que je serai de retour au campement.
Ainsi, sa lettre ne s’était pas rendue à destination. Voilà qui était un minimum problématique. Et aussi, si son frère parlait ainsi, cela voulait dire que son clan était de passage à Stellaraë. Ils avaient pris un peu de retard sur leur trajet habituel dans ce cas, selon ses souvenirs. Elle poursuivit sa lecture, curieuse de la suite.
J’aimerais pouvoir te parler, pour te donner des nouvelles de la famille et en avoir de toi. Je viendrais au Cirque demain, trois heures avant le spectacle. Cela devrait nous donner suffisamment de temps pour discuter. Mais si tu ne veux pas, je comprendrais.
Un rendez-vous avec son frère ? Voilà qui posait problème. Bien que Zahir soit le plus laxiste sur les coutumes du clan, elle ignorait comment celui-ci prendrait sa décision de ne pas rentrer auprès d’eux depuis le temps. Loona s’agita alors dans son sommeil. Tournant le regard, sa mère lui caressa doucement la tête afin de calmer ses rêves. Voilà un autre point qu’il lui faudrait bien parler à sa famille un jour. Bien que portant le nom de famille de leur père, les jumelles restaient tout de même des Kilab par le sang. Arriverait bien le jour où elle devrait les présenter à son père. Revenant à sa lettre, Eyara en termina la lecture.
J’ai cependant beaucoup à te dire, et j’aimerais vraiment que tu acceptes de me voir.
Ton frère, Zahir
P.S. Au fait, je te laisse un cadeau que j’ai acheté sur le marché pour toi. C’est un élémentaire de pierre qui, selon le vendeur, se prénomme Boris. Il n’y a pas grand chose à faire pour s’en occuper, hormis le nourrir de pierre et de terre de temps à autre.
Levant la tête du papier, l’arlequine posa les yeux sur ledit Boris. Ainsi donc, c’était son frère qui le lui offrait. Elle ne savait trop qu’en faire, mais la jeune femme finirait bien par trouver. Eyara repensa ensuite au rendez-vous fixé. Il lui fallait parler seule à seul avec son frère. S’ils pouvaient d’abord discuter rien qu’eux deux, elle pourrait se fixer une idée de l’approche à prendre avec son père pour la présentation des filles. Désormais âgées de six mois, il lui fallait bien passer cette étape. Son père commençait à se faire vieux, qui sait si elle aurait une autre occasion de le faire. Mais la maman ne voulait pas non plus avoir ce rendez-vous au milieu du chapiteau.
Elle pensa alors aux jardins de la demeure Kavannagh. Pourquoi ne pas profiter de son passage en ville afin de voir son ex belle-mère et ainsi lui donner également des nouvelles ? Voilà plusieurs mois que les deux femmes ne s'étaient vues, et disons que la dernière visite ne s’était pas bien terminée. Et puis, le trac monta. Voulait-elle vraiment revoir cette maison ? Là où son couple avait explosé ? Certes, elle avait promis à Nysali de lui donner des nouvelles de ses petites-filles, mais il restait une énorme différence entre la voir et lui rendre visite dans sa demeure. Non, finalement, ce n’était pas une bonne idée, surtout avant de passer sur scène. L’harenienne aurait bien demandé à Holy si elle connaissait un endroit propice à l’échange, mais la voyant régulièrement avec Jack, elle préféra la laisser tranquille avec son compagnon. Le plus simple restait donc un espace public, mais tranquille à la fois. Où bien discuter ici, dans sa petite roulotte d’emprunt. On lui poserait forcément des questions par la suite, mais cela ne la dérangeait pas. Au moins, au besoin, la maman aurait le soutien de sa famille du Cirque.
La jeune femme prit tout de même le temps d’écrire une missive à Nysali avant de se mettre au lit. Connaissant ses filles, elle se lèverait tôt le lendemain, alors autant dormir maintenant.
***
Le lendemain, Eyara avait changé d’avis. Préparant un baluchon pour la journée, elle fit parvenir une missive au campement des Kilab afin de rencontrer son frère à la maison des Kavannagh.
Sujet: Re: Les liens familiaux [SOLO][Terminé] Lun 15 Jan 2024 - 22:40
Les liens familiaux
Vêtue de ses vêtements civils plutôt que de sa tenue de scène, la renarde avait vêtue ses filles de leurs plus belles robes et suivi le chemin jusqu’à chez son ancienne belle-mère. Ne l’ayant ni vue, ni contacté depuis son départ pour Sylfaën, Eyara ignorait comment Nysali l’accueillerait, trois mois après sa séparation avec son fils adoptif. Mais si elle n’y allait pas, la jeune femme ne pourrait pas savoir. C’est donc empli d’incertitude que l’harenienne toqua à la porte. Ne se sentant plus incluse parmi les Kavannagh, elle n’osait entrer sans s’annoncer comme avant. Ce fut une jeune adolescente qui vint lui ouvrir. La maman la reconnut aussitôt, il s’agissait d’Amanda, la fille de la gouvernante de la maison.
- Oh, bonjour, mademoiselle Kavanagh ! Madame ne nous avait pas prévenus de votre visite.
Voilà qui lui faisait tout drôle de se faire appeler ainsi. S’il y avait bien un nom de famille que l’harenienne n’utilisait plus, c’était bien celui de son ex-mari.
- Ce n’est rien, la visite n’était pas prévue à l’origine. Nysali est bien là ?
- Oui, oui, bien sûr, je vais aller lui faire part de votre arrivée.
Il ne fallut ensuite qu’un instant avant que la maman ne soit en présence de l’humaine, une fille en moins car dans les bras de sa grand-mère d’adoption. Passé les premiers instants, la renarde souffla. Il fallait dire que la maîtresse de maison avait toujours eu un don pour calmer la maman, peu importe la situation. Alors, quand Eyara lui fit part de la visite de son frère, la stellaroise n’avait aucune plainte à formuler. Après tout, l’harenienne était toujours la bienvenue dans cette maison. Les deux femmes parlèrent également des progrès des filles, mais de la mère également, de ses cours de magie ainsi que de sa vie au Cirque. Nysali promit bien sûr à la renarde de venir voir son numéro le soir-même.
L’humaine prit alors un air plus grave.
- D’ailleurs …
La maîtresse de maison détacha une chaîne à son cou. La renarde remarqua aussitôt l’anneau qui y était accroché. Forcément qu’elle le reconnaissait, c’était son alliance, lancée aux pieds de son ex-mari quelques mois plus tôt. Pourquoi le lui remettait-elle ? Et pourquoi l’avait-elle gardée ? La grand-mère déposa le bijou sur la petite table du salon. Eyara avait la larme à l'œil, mais se retenait de la verser.
- Il … voulait que je te la laisse. Il me l’a dit avant son départ. Mon fils t’aime toujours tu sais. C’est jusque que …
- Il est obsédé par ses origines, je sais. J’espère juste qu’il trouvera.
Il lui fallut un moment avant de ramasser ce qui lui appartenait déjà et d’attacher le bijou à son cou. L’harenienne jugeait qu’il était encore trop tôt pour savoir si elle accepterait de nouveau le lycanthrope dans sa vie, mais au moins, avec son alliance, cela lui ouvrait la possibilité du choix. De plus, sa mère lui avait toujours dit que l’espoir était l’un des plus beaux sentiments du monde, après l’amour. Eyara garderait donc son alliance au cou, espérant au fond d’elle-même que sa vie irait en s’améliorant.
***
La journée avança. Après le repas et la sieste des jumelles, la maman alla attendre son frère dans le jardin. Ce paisible endroit offrait une oasis de fraîcheur dans la chaleur de la ville, nichée au milieu du désert. Divisé en quatre par un petit chemin rocailleux, une fontaine traînait au centre, permettant à tous de se désaltérer au besoin. Le reste n’était qu’arbres et verdures. Installant une couverture sur le sol, la maman y assoya ses filles, ainsi que quelques jouets. Heureusement, Jamila et Loona ne marchaient pas encore, ainsi, l’harenienne n’aurait pas à courir partout pour les rattraper. Mais vu leur âge, cela ne saurait tarder. Et pour avoir élevé les plus jeunes de sa fratrie, Eyara savait que cela pouvait être pénible par moment. Mais cela ne la dérangeait pas. C’était une première étape vers une certaine autonomie pour les jumelles lorsque le moment serait venu.
Non, ce que la maman redoutait le plus, c’était la première transformation des enfants. Généralement vers l’âge de deux ans. Mais Eyara avait eu la sienne quatre mois avant son deuxième anniversaire, ses filles pouvaient l’avoir avant également, bien que pouvant arrière après aussi. C’était toujours une étape douloureuse. La renarde se rappelait comment sa petite sœur Batul avait été grandement malade avec ses accès de fièvre et son envie de mordre tout ce qui passait près d’elle. Comment cela se passe-t-il pour les filles ? Sa seule chose dont elle était sûre, c’est d'être avec le Cirque à ce moment-là. Avoir d’autres thérians à ses côtés, dont Holy, la rassurerait certainement. La maman secoua la tête pour revenir au présent. Il n’y avait pas encore besoin de s'affoler avec ça, elle avait encore au moins un an ou presque avant cette étape fatidique.
Loona secoua alors un hochet dans sa direction, cherchant l’attention de sa mère. Eyara commença alors à lui chatouiller le ventre et les côtes. Plus le temps passait, et plus la personnalité des filles changeait. La petite blanche était clairement la plus joueuse des deux. Curieuse, elle souriait toujours aux inconnus qui lui faisaient signe, contrairement à Jamila qui préférait cacher son visage dans les vêtements de sa mère. Comme quoi, des jumeaux, ce n’était pas deux personnes identiques, bien que provenant des mêmes parents. La preuve, même physiquement ses filles étaient différentes, la rouquine lui ressemblant énormément, tandis que la blanche gardait les traits de son père.
C’est sur cette réflexion qu’une voix la fit sursauter.
- Eyara ?
Se retournant, la maman aperçut son petit frère. Vêtu d’une tenue traditionnelle du clan dans des tons naturels, il avait fière allure. Comme sa sœur, il gardait une preuve de sa thérianthropie bien visible, avec le balancement de sa queue de renard et ses oreilles dépassant de son turban. Il n’était pas venu accompagné, ce qui soulagea la jeune femme. Le jeune homme était la seule personne qui la comprenait parfaitement, elle et son désir de liberté.
Sujet: Re: Les liens familiaux [SOLO][Terminé] Dim 4 Fév 2024 - 23:55
Les liens familiaux
Les deux frangins passèrent un moment à observer l’autre. Voilà trois ans qu’ils ne s'étaient vus. T’en de chose c’était produites dans la vie de la maman, elle n’osait imaginé pour son frère. Ce fut d'ailleurs lui qui brisa la glace qui se formait peu à peu entre les deux membres de la fratrie.
- Ce sont tes enfants ?
La renarde ne fit qu’hocher la tête. Que cela plaise ou non à sa famille, les jumelles en faisaient également partie. De toute façon, la petite rousse lui ressemblait bien trop pour dire le contraire, et le mensonge n’était pas dans ses habitudes. D’un mouvement de la main, Eyara invita son frère à venir s’asseoir avec elle.
- Je te présente Jamila et Loona. Elles ont sept mois actuellement.
Les deux bébés avaient tourné la tête vers leur oncle, inconnu jusqu’alors. La rouquine, timide de nature, chercha aussitôt à aller dans les bras de sa mère. Mais la petite blanche, plus courageuse, regardait l’homme renard avec curiosité. Son frère semblait par contre surpris en entendant les noms.
- Tu … t’as donné le prénom de mère à l’une de tes filles ?
- Ouais … c’est ma façon de lui rendre hommage
- Et Loona ? Il sonne pas très harenien, je présume que c’est ton mari qui a choisit ?
L’arlequine ne lui répondit que d’un hochement de tête affirmatif. Elle sentait la question fatidique venir également. Forcément qu’il la questionnerait sur Vlad. Après tout, la jeune femme n’était pas rentrée à cause de lui. Mais Zahir garda d’abord le silence, observant ses nièces. Il fallait dire que, après que trois ans se soient écoulés, les deux frangins avaient grandement changé. Qui sait, peut-être était-elle la première de la fratrie à avoir eu des enfants aussi, d’où la réaction de son frère. Mais l’harenienne n’avait pas envie d’embarquer sur ce sujet, c’était encore trop sensible. C’était donc le moment parfait pour changer de sujet. Autant prendre des nouvelles de sa famille, après tout, son frère n’était-il pas là pour cette raison ?
- Alors, comment va la famille ?
- Hum, par où commencer ? Déjà, Batul est toujours la sybille de Magnésie, avec Rana qui veille sur elle en tant que prêtresse. Kamar n’a pas changé, bien évidemment. Daysam et Lazhar se sont finalement mariés, le premier avec une étrangère, et notre grand frère avec Aïcha, la fille du chef.
La renarde parut surprise un instant.
- Je ne m’attendais pas à ce que Daysam se marie pour tout te dire. Et que ce soit avec une étrangère, voilà qui est encore plus étonnant, sachant le peu de mâles de notre génération. J’aurais plutôt cru qu’il aurait choisit une femme parmit le clan. Mais bon, qui sommes-nous pour juger de son choix, surtout moi qui suis partie.
- Je crois bien que c’est ton départ en vrai qui a aider. Père est bien moins strict avec nous depuis, sauf avec Batul du moins. Mais vu son statut, c’est un peu normal.
L’harenienne ne fit qu’hocher la tête à l’affirmative. En t’en que sybille, sa plus jeune sœur avait également un meilleur pouvoir de visions et de prophéties, du moins, tant qu’elle restait pure. Mais bien que le dix-huitième anniversaire de la prophétesse approchait, Eyara ne s’en inquiétait pas. Être sybille était un grand honneur et, à moins d’un souci important, son mandat prendrait fin le jour de ses vingt ans. À partir de là, Batul serait libre de vivre la vie qu’elle désirerait. D’ailleurs, la petite qui prendrait sa place était probablement née, ou arriverait bientôt, au choix.Posant un regard sur ses propres filles, la maman devint songeuse. Et si c’était l’une des siennes ? Non, peu probable. Il était rare que cet honneur revienne sur deux générations à la même famille.
- Daysam a épousé une femme autrefois humaine, une stellaroise du nom d’Halima. C’est oncle Saad qui s’est occupé de la transformer, elle voulait être un fennec. Ils n’ont pas encore d’enfants, ils préfèrent attendre qu’elle maîtrise plus ses transformations, vu qu’Halima a encore du mal à les gérer. Quant à Lazhar et Aïcha, ils ont eu deux fils, prénommés Usman et Shihab. Ils attendent déjà un troisième enfant.
Et bien, son aîné était productif il fallait croire. En plus, comme il avait épousé la fille du chef des Kilab, cela lui assurerait une bonne place dans un avenir rapproché. Au final, il ne prendrait peut-être pas la place de leur père comme marchant, mais la place de dirigeant était bien mieux. Pour le reste, les autres membres de la fratrie se portaient bien. Rana avait tout de même quelques prétendants, mais rien de sérieux pour l’instant. Cependant, la thérianthrope apprit que son père était malade, principale raison de son frère pour la contacter aussi rapidement. Quelques soucis respiratoires apparemment. La jeune femme songea à son futur commerce. Peut-être pouvait-elle offrir à son père de s’y reposer quelque temps afin de se rétablir sereinement ? La Rose du Désert lança l’idée à son frère, qui approuva, bien que spécifiant que se serait Jibran qui aurait le dernier mot. Après tout, il restait leur père, et avait donc autorité sur eux.
Ils poursuivirent leur discussion sur les dernières années de la divinatrice : son voyage, sa rencontre avec le lycanthrope, son rapide mariage, la naissance des jumelles puis le départ de leur père. Tout y passa. Bien entendu, Zahir fut triste pour sa sœur, et il comprenait aisément pourquoi elle n’était pas revenue dans le clan. Mais comme la rouquine s’y attendait, il était de son côté, prêt à l’aider au besoin. Voilà au moins quelqu’un qui la supportait dans toutes ces épreuves malgré leurs origines strics.
- Dit, crois-tu venir voir père demain malgré tout ça ? Je suis sûr qu’il serait prêt à pardonner tes bévues. Et s’il le faut, je t’aiderais.
L’arlequine commença par sortir quelques pièces de sa poche.
- Écoute, amène-le voir mon numéro ce soir, je passerais lui parler ensuite.
En accord avec ce plan, l’harenien prit les pièces et quitta le domicile des Kavannagh.
Sujet: Re: Les liens familiaux [SOLO][Terminé] Mar 20 Fév 2024 - 16:23
Les liens familiaux
Le soir venu, la jeune femme s’apprêtait à entrer en scène. Moins sensible au trac que la veille, mais tout de même nerveuse, la renarde chercha son frère et son père parmi la foule, perchée sur sa plateforme dans l’ombre le temps que son amie virtuose termine sa partie. Il ne lui fallut pas grand temps pour cela car en vérité, toute sa fratrie était venue. L’arlequine déglutit. Voilà qui ne l’aiderait pas pour son numéro. Mais trop tard, le spectacle était commencé. Elle souffla quelques coups pour calmer sa peur et commença son numéro dès que ce fut son tour.
***
Après le spectacle, Eyara récupéra ses filles et PetitTembour et, comme elle s’y attendait, retrouva sa famille non loin de sa caravane d’emprunt. Toujours en tenue de scène, l’harenienne eut droit au regard désapprobateur de son père, n’ayant évidemment pas son hijab sur la tête, sans compter des enfants avec, sans homme à ses côtés. Voilà qui n’augurait rien de bon.
- Mam’zelle Eyara, qui sont tous ses gens ? lança l’enfant d’une voix endormie.
- Père, la famille, bonsoir.
C’était une façon détournée de répondre à l’enfant sans l’expliquer tout de suite à sa famille. Après tout, il n’était clairement pas son fils, au vu de son âge, et il n’était pas thérianthrope au vu de son odeur, donc c’était une preuve que la jeune femme ne l’avait pas adopté officiellement.
- Je m’attendais à ce que tu respectes nos traditions malgré la distance qui nous séparait, Eyara. Où est ton hijab ? Es-tu mariée finalement ? Et qui sont ces enfants ?
Son regard croisa celui de Zahir. Il n’avait donc rien dit, hormis pour l’invitation. Eyara n’avait pas envie de s’expliquer, fatiguée de sa journée, mais surtout parce que c’était toujours à elle de le faire, jamais ses frères. ”La joie d’être une femme …” S’il y avait bien une chose qu’elle se devait de faire depuis sa naissance, c’était bien obéir aux hommes de son clan. Baissant la tête, par habitude, la renarde lança d’une faible voix :
- Père, je vous présente PetitTembour, un protégé du Cirque, ainsi que mes filles, Jamila et Loona.
Il y eut un long silence. Sans doute son père analysait la situation, ou bien il cherchait une énième remontrance à lui faire. Ne désirant pas mentir, l’arlequine avait d’emblée dit la vérité sur les jumelles, lui donnant peu de chance de pouvoir retourner auprès des siens. De toute façon, sans Vlad, c’était perdu d’avance. Ce que la maman n’aimait pas, en revanche, c’était que toute la fratrie se trouvait avec son paternel. Voilà qui ferait d’elle un exemple à ne pas suivre pour ses jeunes sœurs, désormais âgées de vingt et dix-huit ans. Pourquoi fallait-il que les remontrances arrivent devant tout le monde ? Et pourtant, la renarde se sentait obligée de répondre aux questions de son paternel. L’habitude, ou alors simplement parce que cela avait toujours été ainsi ?
- Mam’zelle Eyara, je …
- Petit, laisse parler les grands, d’accord ? Eyara, amal or’limk karsk or’ter ? Ze or’rakan or’limk skra'jah, or’siram ?
Des larmes perlèrent à ses yeux. Son père n’avait pas le droit de lui parler ainsi, ni à PetitTembour d’ailleurs. Il était temps que cela cesse. Jibran venait de franchir un point de non retour dans le respect que lui vouait sa fille. Poursuivant la discussion dans sa langue maternelle, l’harenienne lui lança avec un aplomb qui la surprit :
Plus l’arlequine parlait, et plus une rancœur insoupçonnée se faisait ressentir dans ses paroles. Elle ne tiqua même pas lorsque Batul tenta d'apaiser le père de la fratrie. Peu à peu, tous quittait la scène pour rentrer, laissant les deux protagonistes de la discussion seul à seule. Ou presque. Zahir et Batul restaient avec Jibran, le premier voulant prendre le parti de sa sœur, la deuxième pour tenter de lui faire comprendre quelque chose d’important auquel il ne voulait rien entendre. Au final, Eyara demanda aux Mis d’escorter ses “invités” hors du terrain du Cirque. La plupart des autres artistes dormaient déjà, où alors se trouvaient ailleurs pour se détendre après le spectacle. La maman se retrouva donc seule avec ses jumelles et PetitTembour. Se dernier la regardait d’un air à la fois triste et interrogateur. Elle soupira. Il était vrai que l’enfant était en apprentissage de sa langue, il avait donc forcément compris, du moins en partie, ce qu’il s’était produit.
- Viens, allons dormir.
- Il s’est passé quoi, mam’zelle Eyara ? Vous allez bien ?
L’harenienne lui fit un sourire se voulant rassurant même si, au fond, la tristesse l’envahissait. Il s’était produit qu’elle était désormais bannie du clan t’en que son mari ne serait pas de retour. Et bien sûr, il devait s’agir du père des jumelles, et non d'un autre homme canin …
- Oui, ne t’inquiète pas. Je suis libre désormais, c’est tout ce qui compte, vul’sol. Allez viens, allons dormir. On a encore beaucoup à faire demain, et je veux que tu sois en forme.
Ce que la renarde ne lui disait pas, c’était que ce que Batul tentait de faire comprendre à son père concernait Loona, pour la plus grande crainte d’Eyara : la petite blanche était celle qui devait remplacer la sybille dans deux ans. Mais les jumelles étaient désormais les filles d’une Skra, une exilée. Jamais Jibran ne permettrait que l’enfant ne remplace Batul. Sans doute tairait-il même l'existence de la petite, ce qui finalement ne déplairait pas à la rouquine. Ce n’était pas l’avenir qu’elle souhaitait pour les petites. La maman les voulait libre de leur choix dès leur enfance, pas une fois adulte. Bien sûr, l’arlequine comprenait l’importance des sybilles pour son clan, mais la divine Magnésie avait déjà pris l’enfance de sa sœur. Pas question que sa fille subisse les mêmes tracas.
Finalement, toute cette agitation des derniers jours lui avait peut-être enlevé sa famille, mais au fond d’elle, l’harenienne se sentait en paix. C'était un chapitre de sa vie qui se concluait, mais un autre commençait, que ce soit pour le mieux ou le pire. Désormais, sa priorité était sa propre vie et celles de ses enfants, biologique ou pas, et leur propre bonheur. Ce soir-là, Eyara se coucha l’âme en paix avec sa nouvelle vie, bien que triste d’avoir rompu ses liens familiaux.