- Hé.

Elle cligna des yeux très vite et observa son interlocuteur. La jeune nomade était perdue dans ses pensées, concentrée sur les paroles de la chanson du barde... il avait une très belle voix. Une chanson qui parlait d'une armée de thérianthropes tombée au combat, c'était très inspirant. Les tavernes étaient toujours très animées à cette heure tardive de la soirée.

- Tu joues ? C'est à ton tour.

- Elle connaît pas les règles, gamin...

Électre abattit les cartes. Les regards tantôt taquins des trois hommes autour de la table s'effaçèrent très rapidement, et telle une vampire un sourire vint illuminer son visage au même rythme qu'ils se décomposaient, comme si elle venait d'aspirer leur énergie vitale.

- Elle a bluffé ? Eh ben.

Tirant toutes les pièces contre elle, elle commença à les empiler par valeur en des petits tas de cinq par cinq, les mettant dans sa sacoche après les avoir comptés une fois et annoncé le montant d'une petite voix toute fière.

- Merci. sourit-elle.

Le plus jeune des trois, un elfe blond au beau visage, prit une longue inspiration, avant de s'étirer sur toute sa longueur. L'autre, un homme plus âgé, le fixait avec un air plus énervé.

- Elle vient de te prendre une semaine de salaire... tu le prends plutôt bien, gamin.

Il finit par dire d'une voix presque tremblante qui trahissait une grande terreur qui bientôt se traduisit par une agitation de son corps :

- Non. On va faire une revanche, j'ai ma bague de fiançailles... je peux la jouer... ma fiancée va me tuer, je peux pas rentrer sans mon argent. Comment on va manger ? On rejoue une partie.

Elle se leva alors, esquissant un rictus.

- Bonne partie, alors. Je sors de table, pour ma part. Il faut savoir s'arrêter tant qu'on gagne.

L'homme plus âgé, sous le regard mesquin du troisième type : un homme de forte corpulence, tapa du poing sur la table et hurla :

- Vous restez ! Une dernière partie !

- Non. Vous ne pouvez pas me forcer à jouer. Désolée de m'arrêter là.

Électre se ravisa ; tout à fait agacée :

- Pas désolée en fait. Grâce à moi il n'aura pas à expliquer qu'il a joué et perdu sa bague de fiançaille en rentrant ce soir. Vous devriez me remercier.

Après avoir quitté la table sous un fond de railleries de marins énervés, la jeune femme rejoignit le bar en boîtant - sa douleur à la cuisse ne la hantait pas tant que ça ce soir, mais ça lui tirait - où elle sortit une de ses pièces pour se commander un verre de rhum. Le tavernier lui fit part de son talent, ce à quoi elle répondit que il n'y avait aucun honneur à gagner aux cartes face à des marins bourrés. Celui-ci, particulièrement amusé par son histoire lui demanda si elle voulait quelque chose à manger. Électre, jetant un oeil au bel elfe fiancé, lui répondit d'une voix douce qu'elle dînerait plus tard.

La soirée s'annonçait mal, elle se sentait comme une proie en étant la seule femme cliente non employée de cette taverne, et même si elle avait eu l'intelligence de se vêtir de vêtements amples et d'un voile sur la tête pour ne pas attirer les regard lubriques des marins esseulés trop rapidement, elle sentait que la haine et l'envie des marins alentours planaient sur elles, prêtes à fondre.

Ses bijoux - la plupart de mauvaises qualité, elle ne mettrait pas ses plus beaux dans une ville pleine de pirates -, son visage d'ange, sa voix et la douceur de sa gestuelle l'avait déjà marquée. Il fallait partir d'ici assez vite... ce qui posait problème. Un de taille, qui remettait en cause toute la raison de pourquoi elle était ici :

Électre avait faim, et en sachant que son ange fiancé énervé contre elle, la vampire sentait ses chances de détruire la vie du jeune homme pour son plaisir sadique et son estomac s'amenuiser. Lorsque le vieux marin avait cessé de le réconforter, lui qui était tout livide, elle ne manqua pas de sauter sur l'occasion de prendre un verre de rhum et d'avancer jusqu'à lui, pour s'asseoir en face. Elle prit son air le plus mignon en poussant le verre contre lui et se préparait à sortir son discours-

- Ou bien vous me rendez mon fric ou bien vous vous barrez, sinon ça va mal aller.

Enfant de putain. Électre le prit mal, se leva et quitta la taverne d'un pas rapide. L'air de dehors était frais, humide, elle qui en avait eu marre de cet enfer de désert, très agréable. Son estomac gargouillait. Par la fenêtre, des regard tournés vers elle, les marins perdants se préparaient à partir avec une idée e ntête. Que faire à présent ? Trouver une victime ? A cette heure, des marins à moitié morts sur les quais, il devrait y en avoir. Mais l'elfe, il avait l'air si bon, elle aurait voulu l'avoir dans sa bouche et le sucer jusqu'à récupérer son précieux liquide... brrrr, elle tremblottait en s'enfonçant dans la ruelle étroite après avoir erré sans but quelques temps, reconnaissant au loin près d'une lanterne deux des marins qui étaient à la taverne. Elle se retourna, sentant le guet-appens, pour se retrouver nez à nez face à l'elfe. Finalement, elle allait dîner.

- L'argent, s'il te plaît. Tout, et les bijoux aussi, enfin, tout ce que t'as.

Elle sourit, reculant en direction du mur, enfonçant ses mains sous ses voiles pour saisir sa dague, tentant une expression de chien battu qui très vite se transmutait en haine profonde.

- Vous allez pas vous attaquer à une pauvre petite estropiée, si ?

C'était le soir. Même plutôt la nuit. Kaïna arpentait les rues. Elle s'ennuyait et avait décidé d'aller se remplir les poches. Vu l'heure tardive, il y avait peu de chance que ce soit réellement amusant. De toute façon, même en journée, elle ne s'amusait plus vraiment. Elle ne ressentait plus d'adrénaline lorsqu'elle commettait un larcin. Après toutes ces années d'entraînement, elle s'emparait des bourses de ses cibles avec une telle facilité que le fait que sa cible soit endormie ou réveillée, bourrée ou sobre ne changeait absolument rien. Quand est-ce que Gustav la laisserait retourner à bord? Elle s'ennuyait à Ishtar. Elle aussi voulait rejoindre les Pirates. De toute façon, elle devait attendre qu'il rentre. Il ne serait sans doute plus très long. Qu'il se dépêche un peu! Ce vieux loup de mer commençait à l'énerver. Derrière ses airs de pirate sans pitié, il était en réalité un véritable père poule avec la jeune voleuse. Bien sûr, elle savait qu'il voulait juste la protéger mais, si c'était pour qu'elle passe sa vie à se faire chier comme un rat mort, ce n'était pas la peine.

Enfin bon, il était temps de passer à l'action. Elle arpentait donc les rues à la recherche d'une cible. Très vite, elle croisa cette femme à la démarche claudicante. Une cible facile mais, elle ne semblait pas manquer d'or. Sa bourse n'était pas apparente mais, Kaïna avait plus d'un tour dans son sac. Elle décida donc de ne pas perdre sa trace et d'attendre le bon moment. Elle la suivait de loin, prenant parfois une rue différente avant de revenir par un autre chemin. Elle prenait bien garde de ne jamais trop l'approcher. Elle ne devait pas éveiller ses soupçons. C'est alors qu'elle se rendit compte qu'elle n'était pas la seule à la suivre. Il y avait également trois types. Dans un premier temps, la jeune voleuse pensa à commettre son larcin avant eux. Puis, elle observa la femme. Et si ce n'était pas après son argent qu'ils en avaient? Kaïna était une voleuse mais, elle avait un bon fond. Elle décida donc qu'au lieu de la dépouiller, elle l'aiderait. Elle devait toutefois attendre d'être sûr que les types n'étaient pas plus nombreux. Quand ils se séparèrent, elle eut confirmation. Ils voulaient la prendre en tenaille. Bon, il allait être temps d'agir apparemment. Ils l'avaient encerclée et le jeune elfe lui demanda ses objets de valeur. La femme était adossée au mur. C'était le moment d'agir ou bien il serait trop tard. Kaïna arriva derrière l'elfe et lui tapota l'épaule. Surpris mais, comme elle n'avait pas sorti d'arme, les deux hommes n'avaient pas bougé. L'elfe se retourna et vit alors la jeune femme. Il se demandait ce qu'une gamine venait faire dans le coin. Kaïna afficha alors un grand sourire et, se penchant légèrement en avant, elle agita négativement l'index.

[color=#796741]"Dis donc, un grand garçon comme toi... Tu as besoin de venir avec tes petits camarades pour t'en prendre à une éclopée? C'est vraiment pas sympa! Bon, je suis de bonne humeur alors, si tu pars sans faire d'histoire, je veux bien fermer les yeux. Qu'est-ce que tu en dis?"

Comme elle s'y attendait, le type lui rit au nez. Il semblait qu'elle allait devoir leur coller une raclée. Tant pis pour eux. Elle sortit son arme et se prépara au combat.

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'Attaque - Humain' :