Après une petite ellipse me séparant de l’écailleux à la sortie de notre apprentissage auprès du maître des compétences, je me suis redirigé vers les couloirs éclairés par le soleil pour y visualiser les motifs qui s’y trouvait. Ces derniers avait su piquer ma curiosité, me rappelant étrangement ceux rencontrés tout au long de notre expédition avec Equinoxe. Plusieurs fois, l’on pouvait retrouver ce même motif représentant un serpent volant au-dessus d’une cité d’or. Sur le pan du mûr que j’avais en face de moi, je pouvais y contempler les rites sacrificiels et offrandes faites à ce prétendu dieu serpent. Mais la seule chose qui m’intéressait en ce bas monde, ce n’était ni la gloire, ni la richesse … ce que je désirais par-dessus tout était de savoir a quel point je suis puissant. Jusqu’à maintenant, je n’avais encore jamais eu l’occasion d’étendre ma puissance jusqu’à apercevoir la mort elle-même … sans compter bien entendu ce que ce maudit Saigo m’avait fait il y a longtemps. Et puis si je terrassais ce serpent divin, je pourrai dire que j’ai vaincu un dieu non ?

Un sacrifice donc. Il me fallait quelque chose à offrir à ce dieu avant de pouvoir lui demander un vœu, celui de l’affronter et de l’éclater. Il m’avait semblé avoir croisé de bon gibier à l’orée de la forêt lorsque nous sommes tombés sur ce musicien. Peut-être que je trouverai de quoi satisfaire la faim de l’écailleux deuxième du nom là-bas.

C’est ainsi que je me dirigeais vers ce qu’appelait les Wysteriens : Les sables de Lonnes. Je savais les alentours riche en créatures et en bestiaux en tout genre, cette île pleine de mystère avait ceci de particulier. Une petite région où la faune et la flore s’est fortement développé. Je pouvais être sûr de trouver mon bonheur. Des empreintes, il y en avait a foison dans ces bois, il n’y avait pas besoin de chercher bien longtemps. Mais plus le gibier serait gros et plus j’aurai de chance d’avoir mon vœu de combat. En passant ma main sur le sol tout du long du trajet, je pouvais deviner qu’il y avait un point d’eau non loin de là, les traces était nombreuses et légèrement humides sur les bords. Elle s’harmonisait pour se diriger vers le même endroit. C’était comme un menu à la carte, j’avais le loisir de choisir quelle trace suivre. Les plus grosses prenaient les formes de coussinets incroyablement grandes. Un sourire mesquin se dessinait petit à petit sur mon visage. Quel chance …

Garrán -On dirait que j’ai touché l’gros lot !

L’immense Manticore continuait à me dévisager, me tournant autour comme si je n’avais pas l’air très appétissant. Légèrement vexé qu’il ne me trouve pas à son goût, je me précipitais sur lui puis, atterrit sur sa tête avant de me retirer. Le seul but de cette manœuvre était de le titiller suffisamment pour qu’il s’intéresse à moi, du moins plus que lorsqu’il m’a découvert. J’avais tout mon temps devant moi, je n’avais rien sur le feu, l’on pouvait donc prendre notre temps pour apprécier l’instant présent. Ce gros chaton ne faisait pas le poids, ça ne faisait pas un pli ! A voir maintenant si c’est coussinet son moelleux et pissant ou dur comme la roche …

Garràn – Allez viens pépère ! Je suis là !

Je continuais d’attirer son attention, m’agitant come un demeuré autour de lui. Heureusement que l’écailleux n’était pas dans les parages, il aurait trouvé cette situation bien ridicule. Chacun avait sa manière de s’occuper ! Lui préférait étudier et tester toutes sortes magie étrange, moi il me fallait de la castagne, que je perde ou que je gagne, qu’il soit fort ou faible. Ma danse hilarante avait eu le succès escompté et le gros félin s’était jeté sur moi les pattes en avant. Finalement, elle n’était pas si terrible cette boule de poil.

Alors que la patte du chaton parvint à m’atteindre in extremis, ces griffes lacérées arrivèrent à m’égratigner superficiellement pendant mon esquive. L’agilité de ces bestioles n’était pas à sous estimer, leurs réflexes étaient semblables à celle d’un félin ordinaire, malgré la taille disproportionnée de ces derniers. Créature dont les livres comptent leurs terribles histoires, les voir en vrai me cassèrent littéralement le mythe que j’en faisais. Mais de toute manière, il y avait bien plus mythique qu’une vulgaire bête de foire telle que celle-ci. Si je m’étais aventuré ici pour chasser quelques animaux, ce n’était que pour une seule raison, donner mon butin de chasse contre le vœu de pouvoir l’affronter ! Lui, la divinité oubliée de l’île ! Si j’avais été avec l’écailleux, il aurait pu me lire ce que les pictogrammes racontaient de ces fresques mystérieuse. J’espérais au moins que la quantité suffirait pour obtenir la faveur du soit disant dieu … Sinon, je me verrais dans l’obligation d’accomplir ce vœu moi-même, par la seule force de mes mains.

Ce petit temps de réflexion que je m’étais permis lors de l’esquive m’avait parus plus long, si bien que je pu directement riposter en envoyant le manche de ma faux de le museau de celui-ci. Le gros félin couina sur le coup et tituba sur quelques mètres à reculons avant de se coucher et d’apposer ses pattes sur sa blessure. Pourtant, un nouveau problème me vint à l’esprit. Comment je comptais emporter la bête jusqu’à cette fameuse cité d’or ? Si tant est que j’en trouve des vestiges ici bas … Peut-être qu’en la dressant un peu, je pourrai m’en faire une monture temporaire, le temps que je trouve la mystérieuse cité.

Garràn – Cela me semble une bonne idée, concluais-je en regardant la pauvre bête, je n’aurai plus à me fatiguer à marcher. Je me rapprochais du félin et frappait férocement le sol avec le manche de ma faux pour l’intimider. Bon ! Je vais t’appeler Richie !

Je grimpais sur son dos et, remarquant la désobligeance de ce dernier qui était peu enclin à m’accueillir, m’assurais de le frapper méthodiquement sur les pattes ainsi que sur la tête avant de prendre place sur mon nouveau trône. Je commençais ainsi mon exploration de l’île à la recherche de la cité mystérieuse, le tout à dos de Manticore, la rappelant à l’ordre de temps à autre à coup de bâton. Il n’y a pas de miracle ou de divination, pour se faire obéir, il suffit d’être plus fort et de le faire savoir.

Baël sera certainement jaloux de lui, mais quand il verra que ce n’est pas lui que je vais envoyer en pâture, il sera satisfait ! Et moi aussi !

Fin du combat