Je vais seul avec ma peine, seule va ma condamnation. Courir est mon destin pour me moquer de la loi. Perdu au cœur de la grande Isthar, on nous dit les clandestins ma sœur et moi, car je n'ai pas de papiers. Maintenant en fuite, ce fut pourtant dans une ville du nord que j'étais parti travailler. Mais ma vie, je l'ai laissé entre Baldorheim et Kastalinn, là ou tout lui est arrivé. Depuis, je suis un trait sur la mer, un fantôme dans la ville, une ombre pour les autorités qui ne doivent surtout pas me trouver, car ma vie est interdite, disent les autorités.

On m'appelle le disparu. Celui qui arrive puis s'en est déjà allé avec votre nourriture ou votre or. Aussitôt arrivé, aussitôt parti, courant vers une destination perdue, car je vais seul avec ma peine et seule va ma condamnation. Courir est mon destin pour me moquer de la loi. Perdu au cœur, de la grande Stellaraë. On nous dit les clandestins ma sœur et moi, car je n'ai toujours pas de papiers.

Quand on me cherche, je ne suis jamais là. Quand on me trouve à un endroit, je n'y suis pas. Je ne suis pas celui en face de vous, car, déjà, je suis parti en courant au loin avec tout ce que je pouvais vous dérober. On me dit le disparu, fantôme qui n'est jamais là. On me dit aussi l'ingrat, mais ce n'est pas la vérité. J'ai dans le corps une douleur qui ne me laisse pas respirer. J'ai dans le corps une peine qui m'oblige à toujours marcher. Le poids d'une immense culpabilité et d'une responsabilité qui m'oblige à vous voler.

J'ai dans le corps un moteur qui jamais ne s'arrête de tourner. Un vrombissement perpétuel causé par la peur de me faire attraper. J'ai en mon âme un chemin destiné à ne jamais finir, car je ne sais pas comment en finir avec ma condamnation. Perdu dans le siècle, perdu dans cet univers. Quand vais-je arrêter de courir ? Jamais, tant qu'elle ne sera pas soignée. L'argent que j'arrive à peine à nous trouver suffit tout juste à acheter le traitement servant à endormir ma condamnation que ma sœur endure à ma place, semaine après semaine. La nourriture que j'arrive à voler suffit à nous tenir éveillé, semaine après semaines.

Cette situation ne peut plus durer et je dois y remédier. C'est à moi qu'appartient de trouver de quoi la soigner. C'est à moi de trouver de quoi la sauver. C'est ma condamnation depuis que nos parents nous ont quittés. Mais je suis sur un gros coup, un gros dossier qui me permettrait d'avoir de quoi soigner définitivement celle qui partage mon sang plutôt que d'acheter un remède semaines après semaines. Un gros coup nous permettant d'avoir de quoi s'offrir un repas, et non simplement à manger, mais aussi un toit pour quelques jours. Un toit chauffé avec des lits confortables et propres.

Ce gros dossier est juste la, devant moi, Assis sur son siege dans la taverne avec sa bourse trop bien remplit et recevant du "Général" à tout-va avec son "recrutement". C'est sûr qu'il impressionne avec sa grosse carrure et ses griffes aux poignets Certes, il fait peur avec son air patibulaire et ses yeux irisés, mais il a déjà dépensé plus de mille pièces d'or rien que pendant cette soirée et les gros dossiers sont toujours risqués.