Déployant largement ses ailes, il ralentit son avancée avant de se poser tout à fait. Dans la belle lumière de l'aube encore naissante, embellie par le décor hivernal, le jeune stryge avait tout l'air d'une étrange apparition que quelque voyageur à l'esprit refroidi aurait eue : silhouette élancée, légèrement vêtu malgré la température, une mandoline sur le dos, un sourire flottant sur les lèvres... Et si de loin, il aurait pu être pris pour une femme avec ses longs cheveux immaculés, une fois en face on ne s'y tromperait. Tout simplement car son torse était visible.
Il se tenait sur un des sommets des montagnes du Baldor, tel un faucon en proie à l'ennui. Ses ailes avaient été repliées autour de son corps ; nul besoin de manteau lorsqu'il se baladait avec autant de plumes épaisses. Un léger soupir s'échappa de sa bouche.
Il avait faim.
Faim d'affection, des bras chauds et protecteurs, d'étreintes ou deux souffles se mêleraient... ah ne trouverait-il jamais ce à quoi il aspirait depuis tant d'années ?

Et si son sourire s'était un instant mué en lassitude, il revint rapidement s'esquisser sur son visage : il avait encore du temps devant lui...

Il reprit donc la route avec bonne humeur, descendant de son perchoir vers les routes tracées par les nains. Plus sûres, Len éviterait en toute logique de mauvaises rencontres et de façon plus accessoire, de se perdre. Même si ce ne lui arrivait guère souvent, avec ses capacités de vol.
Enfin il revit son jugement lorsqu'au détour d'un chemin, il tomba nez à nez avec un loup. Un bel animal assorti à son plumage... qui dissimulait derrière lui une forme humaine.
Une femme ?
Que faisait-elle ainsi recroquevillée contre ce rocher ?
Curieux, Len s'accroupit et son regard bleu vint se fixer dans celui de l'animal : laisse moi passer, laisse moi aller lui parler, s'il te plait, joli loup...

Un jappement.
Len gémit. Maintenant, la femme semblait avoir des ennuis tandis que lui se retrouvait dans le même bourbier. Car il venait de voir ce dont elle se cachait : deux personnes venaient vers eux, une mine bien sérieuse sur le visage. Et la lame d'un poignard brilla un instant, dans la main de la belle.

" Heu... fit-il hésitant, mais toujours aussi avenant. Vous comptez les attaquer mademoiselle ? "

Les joueurs commencent en premier.

Vitesse globale : 219
---

Ellana : 105
Vitesse :  105
Dégâts : 30

Len : 145
Vitesse :  123
Dégâts : 43

Lokyem: 105
Vitesse :  96
Dégâts : 102


---
Ennemis :

Vitesse globale : 250

Brigand A : 100
Vitesse :  125
Dégâts : 40
Bonus : Vol de marchandise : si les joueurs perdent le combat, le brigand vous prend 20 pièces d'or chacun.

Brigand B : 100
Vitesse :  125
Dégâts : 40
Bonus : Vol de marchandise : si les joueurs perdent le combat, le brigand vous prend 20 pièces d'or chacun.

Spoiler:

C'est avec une satisfaction proche du morbide que Lokyem vit les sourires imbéciles des deux anachorètes s'effacer au fur et à mesure qu'il se mettait en garde. Sa bouche se tordit dans un rictus méprisant tandis que les deux brigands considéraient avec un peu plus de sérieux leur adversaire. Était-ce la perspective d'un combat proche ou bien l'air si hostile du nouveau venu qui teintait leur regard d'une lueur de peur ?

L'abyssal laissa les deux belligérants se préparer avant de lancer son assaut. Péché d’orgueil ou prudence, c'était un débat intéressant.

L'orgueil lui ordonnait bien entendu de les laisser se préparer. Gagner un combat inégal est réussite amère. A vaincre sans péril on triomphe sans gloire, diraient d'autres.
La prudence lui demandait d'attendre. Voir un adversaire se mettre en garde donne de nombreuses informations à son sujet. A-t-il le meurtre et la volonté d'en découdre dans les yeux ? Auquel cas, s'il n'est pas expérimenté, il risquera de faire des erreurs en attaquant trop précipitamment. Tient-il son arme avec expertise ? Où va en premier son regard ?

Surtout face à deux adversaires, cette phase de combat préliminaire était d'autant plus importante. Lequel dominait l'autre ? Lequel attendrait les ordres de l'autre ? Lequel se trouverait démunit si son compagnon tombait au sol, sa vie arrachée par la lame vivace de l'abyssal ?

Mais Prudence et Patience sont sœur d'Ennui. Ennui que, dans son état de colère actuel, Lokyem ne pouvait souffrir que nécessaire. Alors il s'élança vers celui dont la garde semblait la moins assurée et...

Frappa.

Le membre 'Lokyem' a effectué l'action suivante : Actions

'Attaque - Abyssal' :

Le stryge ingénu assistait à tout ce joyeux... bordel d'un air des plus confus.
Un quatrième personnage avait déboulé soudainement, tombé, glissé, roulé, avec plus de gaucherie que de maîtrise et sans que Len n'en comprenne le déroulement logique, voilà que les trois larrons devant lui avait dégainé. Et pourtant, il avait cette certitude que le nouvel arrivant n'était pas n'importe quel voyageur... Qui se mettrait ainsi en position de combat, ne craignant affronter deux adversaires ? Et avec élégance autant de sérieux, remarqua le stryge.
Enfin la joute débuta et le nouveau asséna le premier coup : Len compatit à la pauvre victime envoyée valdinguer plus loin. Devrait-il aller l'aider ? Mais... il hésitait. Cet homme avait provoqué pas mal de tumulte en fait. Peut-être était-il à l'origine de tout ce raffut.

"Oh et puis tant pis, je le soignerai après." maugréa le jeune Len.

Il déposa sa mandoline à l'abri sûr du rocher, laissant derrière lui une femme stoïque : comment pouvait-elle rester aussi impassible, de même que son compagnon animal ? Len éluda la question pour aller prêter main forte à l'inconnu.
Sa dague apparut dans sa main alors qu'il approchait les deux belligérants. Il manqua toutefois de discrétion -et de perversité- aussi son adversaire le remarqua avant qu'il n'ait pu l'attaquer. Le stryge évita de justesse une prompte estoc par un mouvement d'ailes. Cet homme était prêt à tuer un inconnu, ainsi donc ?

Aussi naif fut-il, Len n'eut plus de doutes.
Et il riposta d'un tranchant de dague.

Le membre 'Len Albhän' a effectué l'action suivante : Actions

'Attaque - Stryge B' :

Brigand B attaque à 40 sur Len.


Les joueurs commencent en premier.

Vitesse globale : 219
---

Ellana : 105
Vitesse :  105
Dégâts : 30

Len : 105
Vitesse :  123
Dégâts : 43

Lokyem: 105
Vitesse :  96
Dégâts : 102


---
Ennemis :

Vitesse globale : 250

Brigand A : MORT
Vitesse :  125
Dégâts : 40
Bonus : Vol de marchandise : si les joueurs perdent le combat, le brigand vous prend 20 pièces d'or chacun.

Brigand B : 57
Vitesse :  125
Dégâts : 40
Bonus : Vol de marchandise : si les joueurs perdent le combat, le brigand vous prend 20 pièces d'or chacun.

Lokyem se savait du genre à surestimer un adversaire, mais sans doute pas à ce point-là. Ou peut-être avait-il sous-estimé ses talents de combattant qui ne s'étaient peut-être pas autant émoussés qu'il ne le pensait ? En tout cas, tout se passa très vite. Loin de rencontrer une parade que l'abyssal aurait au moins imaginé hésitante, le Brigand sembla être pris totalement de cours et la lame abile de Lokyem fit mouche. Le tranchant s'enfonça à la base du cou de l'ennemi et tandis que le sang de la jugulaire éclaboussait la neige hélas immaculée avant cela, l'acier trempé brisa la clavicule et l'omoplate dans un craquement funeste.

La lame resta bloquée entre les mailles de la côte du brigand désormais défunt. Si bien que l'abyssal dû poser son pied sur le tronc inanimé de l'homme pour la dégager. Un geste qui n'était pas sans lui rappeler ses bucheronnages réguliers.

Débarassé de son premier adversaire. Lokyem s'étonna de n'avoir pas eu à souffrir des attaques du second. C'est alors qu'il se rendit compte de l'arrivé d'un nouveau protagoniste dans le combat. Un Stryge, à n'en pas douter de ses ailes blanches. Qui venait de se faire blesser par le deuxième brigand, qu'il avait également déjà sérieusement amoché.

L'abyssal s'étonna d'avoir été aussi absorbé par le premier mort qu'il n'avait pas remarqué tout cela plutôt. Cela aurait pu lui couter la vie en d'autre circonstances. Mais il reprit assez vite contenance et profita du dos tourné de l'ennemi pour tenter de l'embrocher avec son épée.

Le membre 'Lokyem' a effectué l'action suivante : Actions

'Attaque - Abyssal' :

Les joueurs l'emportent. Ils gagnent 25 points d'expérience chacun et 20 pièces d'or. Le Rp peut continuer !

Quoiqu'un peu surpris d'avoir fait mouche, Len n'eut le temps de se protéger d'une riposte. Il reçut un coup de poing en pleine figure et peu robuste, cela suffit à le faire tomber. Sonné, il sentait un filet de sang -à moins que ce ne fut que de la bave- couler le long de son menton tandis que le marteau d'une migraine battait l'enclume de son crâne...
A ce moment, le Stryge n'aurait pu éviter aucune attaque
Mais heureusement pour lui, l'étranger mit hors d'état de nuire son ennemi s'apprêtant à l'achever.

Len inspira.
Expira.
La tension retomba peu à peu et le battant dans sa tête se calmait. Les choses redevenaient plus claires. Ah décidément, son frêle corps n'était encore fait pour le combat, songea-t-il avant de se relever. Il essuya son visage, qui se crispa la seconde suivante : c'était bien du sang qui avait coulé, et il se demandait s'il n'avait pas quelque chose de cassé... Parce que ça lui faisait quand même plutôt mal.
Son regard alla dévisager les hommes inconscients pour s'assurer de leur condition avant de dévisager l'inconnu. Il battit doucement des ailes.

"Bonjour, fit-il en évitant de remuer brusquement sa mâchoire. Enchanté de vous faire votre connaissance ! Je m'appelle Len."

Car les bonnes manières d'un Stryge empiéteront toujours sur le reste -raison comme douleur. La perspective de faire une nouvelle rencontre lui était si plaisante qu'il en oubliait l'incongruité de sa survenue.

Lokyem pensait l'espace d'un instant - avant que sa lame ne mette Fin à la pitoyable vie de ce brigand - que ce dernier portait une armure qui aurait dévié la pointe juste assez pour que le coup n'en soit pas mortel ou bien que, ayant remarqué le sort que l'abyssal avait réservé à son collègue, il n'arrive à eviter sa mort de justesse.

Il n'en fut rien.

Tout d'abord l'adversaire était totalement absorbé par le stryge. L'ayant mis à terre - le stryge ne semblait pas pourtant souffrir de blessures sévères - le brigand se concentrait sur le coup qu'il allait porter sur son ennemi, l'espérait mortel. Si lokyem ne s'apprêtait pas à l'embrocher par derrière et par surprise, sans doute aurait-il questionné la noblesse d'un tel acte.
Et ce n'était sûrement pas l'armure de cuir écaillé et en lambeaux à faire blêmir le moindre forgeron qui allait arrêter la pointe d'acier trempé qui, libre de tout contraintes, s'enfonça profondément dans la chair de l'energumène.

Il s'écroula sous la douleur et l'abyssal replaça un coup similaire dans le coeur du supplicié pour abréger ses souffrances.

Puis Lokyem dévisagea l'être qui lui avait prêté main forte. A qui il venait de sauver la vie, cela dit en passant. Le stryge semblait... Hébété. Par le fait de saigner - très légèrement, ne put s'empêcher de remarquer l'abyssal. Mais avant que lokyem ne s'inquiète plus sur l'état du stryge, ce dernier se releva, battant des ailes pour reprendre contenance. N'avait - il donc jamais combattu avant ça ou était-ce vraiment une petite nature ?

« Bonjour, enchanté de faire votre connaissance ! Je m'appelle Len. » dit le stryge.

Lokyem ne put s'empêcher de froncer les sourcils. Quoi ? Le gars qui venait d'être complètement déstabilisé par un coup - de poing, vu les dégâts - était là, tout sourire, à se présenter, débordant d'un enthousiasme rare ? Si bien que pendant quelques secondes, il ne sut quoi répondre tant les paroles de... Len semblaient hors de propos. Il se penche pour essuyer me sang qui était resté sur sa lame sur les habits du brigand. Il en profita pour récolter une petite flopée de neige dans son gant et tendit la main vers le stryge.

« Tenez, vous devriez mettre ça sur votre mâchoire. Ça évitera que ça gonfle et abîme votre beau visage. » lâcha -t-il au bout d'un moment.

Car oui,  à n'en pas douter, Len était beau. Lokyem avait rencontré assez peu de stryge blanc mais celui-ci reflétait assez parfaitement l'image qu'il avait de cette race : un visage angélique, un corps frêle et peu prompt au combat. Et des aimants à ennuis.

Le sourire du stryge s’agrandit et il accepta avec chaleur la neige offerte.

"Vous avez ma gratitude, sieur."

La main plaquée contre son menton douloureux, Len gardait un regard curieux sur l'étranger. Malgré ses manières peu avenantes, il semblait être de bon abord au final -sinon il ne se serait pas soucié de lui... Il l'aimait bien, cet encapuchonné. Même s'il avait oublié, ou omis, de se présenter à son tour.
Enfin !
Le stryge blanc souriait de toutes ses dents de son air béat, attendant... quelque chose. Car ce peuple, aussi aimable soit-il, avait la fâcheuse manie de respecter au pied de la lettre les règles de bienséance et de politesse. Ce qui incluait dans le cas présent un retour de l'encapuchonné, afin qu'une conversation en bonne et due forme s'engage. Mais peut être son sauveur était-il taciturne ? Ou timide ? Ou...

Len se lança finalement.

"Et vous, n'êtes-vous pas blessé ?"

Il écouta sa réponse avant de reprendre.

"Vers où vous dirigez-vous ? Nous pourrions faire un bout de chemin ensemble si le coeur vous en dit..."

« Vous avez ma gratitude, sieur. » dit Len, qui continua de dévisager Lokyem après avoir posé la neige sur son menton, suivant son conseil. La chaleur de son sourire ne semblait en aucun cas être dérangé par la froidure glaciale de la neige qui devait mordre sa peau. Ou par le silence de l'abyssal. Il était bien le premier. Lokyem s'étonna à trouver cela presque vexant. Etait-ce donc là un idiot qui ne savait que sourire ?

Mais il n'empêche que le Stryge le mettait à la limite de l'inconfortable, avec son air avenant, ses manières spontanées. Tout cela lui semblait tellement naturel que Lokyem en culpabilisait presque de ne pouvoir faire de même.
Aussi, quand l'autre s'enquit de son état, c'est assez rapidement qu'il dissipa toute inquiétude en lui faisant comprendre que le combat l'avait laissé intact, tout en s'étonnant de la note sincère dans la voix du Stryge. Ce n'était pas juste une politesse sociétale, mais une réelle inquiétude. Drôle d'oiseau convint tacitement l'Abyssal.

« Vers où vous dirigez-vous ? Nous pourrions faire un bout de chemin ensemble si le coeur vous en dit... » Reprit le Stryge, avec un teinte comme rassurée dans la voix.

Lokyem s'apprêta à répondre plutôt amèrement, comme il l'aurait fait en quasiment toute autre circonstance. Mais l'idée de voir le visage de Len se décomposer quand il entendrait quelque remarque désobligeante le convint que ce n'était pas une bonne idée. C'est comme si le sourire allait si bien à cet être que toute autre expression sur son visage serait du gâchis.

« Je vais vers le Mont Tagne » dit-il après une poignée de seconde silencieuse. « On dit que la vue y est magnifique et c'est le genre de choses qu'il vaut mieux de vérifier soit même. » ajouta Lokyem comme pour se justifier.

Il prit une inspiration avant de lâcher : « Si vous voulez vous joindre à moi, ce serait... avec plaisir. »

Un vent froid vint souffler sur les deux protagonistes et les quelques corps allongés. Len entoura son frêle corps de ses ailes, tel un manteau de neige, mésange albinos perdue dans de hostiles contrées.
S'il aperçut l'hésitation de l'encapuchonné, sa nature -sans doute- l'empêcha de s'en formaliser. Car le stryge n'était pas idiot, loin de là -juste un peu trop versé dans la naïveté si bien que les deux ne soient antagonistes. Enfin, rassuré sur l'état de l'homme, il put tout à fait aborder un sourire sincère. Il ne lui en fallait guère plus pour dissiper son inquiétude : non pas qu'elle fusse jouée ! Seulement cet personne ne lui semblait pas lui mentir. Pourquoi douter alors ? Autant accorder sa confiance plutôt que de remettre sans cesse la parole d'autrui en question.

"Je vais vers le Mont Tagne... On dit que la vue y est magnifique et c'est le genre de choses qu'il vaut mieux de vérifier soit même, fit-il avant de terminer son propos une inspiration après. Si vous voulez vous joindre à moi, ce serait... avec plaisir. »

Le stryge opina vivement. L'occasion lui avait été donnée de s'y rendre et d'apprécier longuement le spectacle... Et il ne refuserait certes pas d'y retourner, en si bonne compagnie qui plus est. Il répondit d'un nouveau sourire et lança avec entrain :

"En ce cas, allons-y ! Je n'ai pas vraiment de destination, à vrai dire... Aussi le plaisir sera réciproque ! Et d'ailleurs, le chemin en vaut largement la peine, vous ne serez pas déçu par le Mont..."

Il tempéra son trop parlé en rougissant puis, alors qu'ils allaient se mettre en marche, Len alla récupérer sa mandoline laissée à l'abri du rocher de tantôt. La femme et son loup avaient disparu. Etrange couple, songea le stryge revenu vers l'encapuchonné.

Avec plaisir. Que lui avait-il pris de répondre cela ? Surtout avec un semblant de sincérité. En même temps, il fallait bien avouer qu'il ne tenait pas à ce que le stryge parte.
C'était un sentiment sur lequel l'Abyssal n'avait jamais réussit à mettre le doigt dessus. Celui qui faisait que certaines personnes - ou personnalités ? - attiraient et gardaient son attention. Il faut avouer que le phénomène ne s'était pas reproduit assez souvent pour qu'il puisse le comprendre. Il y avait eu Aris, l'elfe millénaire. Il y avait eu Alrun. Et... Personne d'autre assez marquant pour qu'il s'en souvienne sur le moment. Ce qui, en trois semi-millénaires d'existence, était un plutôt mauvais score.
Mais son impression se confirma quand il sentit comme un soulagement dans sa poitrine quand Len réagit avec enthousiasme.

Était-ce le comportement si ouvert et spontané du Stryge qui intriguait autant l'Abyssal ?

En tout cas, Len en était à lui vanter les mérites du Mont Tagne quand il se tut assez brusquement en devenant écarlate, comme craignant ennuyer l'Abyssal par son babillage. Lokyem s'en amusa légèrement et après que le Stryge soit aller cherché son instrument de musique caché derrière un rocher - depuis quand le Stryge était-il arrivé ? l'abyssal n'en avait aucune idée, il lui dit :

« Vous pouvez parler tant que vous voulez, vous savez. Je crains qu'il ne faille pas compter sur moi pour faire la conversation. » Alors que le but était plutôt de mettre son nouveau compagnon de route à l'aise, l'Abyssal se rendit compte que ses paroles auraient surement l'effet inverse.
« Et vous pouvez également m'appeler Lokyem. » Rajouta-t-il après coup.

Tous deux arpentaient d'un pas égal mais tranquille les sentiers enneigés. Le Stryge déployait tantôt les ailes, tantôt les refermait à la manière qu'une queue permettait de conserver l'équilibre - en cela, Len était plus oiseau qu'homme. Mais Lokyem ne semblait s'en formaliser. Il restait calme, peu importe ces gesticulations ou ses paroles... Un personnage des plus intrigants, surtout lorsque Len put surprendre quelques brèves émotions sur le visage de son compagnon.
Enfin ravi d'une telle compagnie, il avançait d'un pas joyeux et le sourire aux lèvres encore un peu rougies par le coup précédent. Sa mandoline tapotait doucement son dos à la cadence de sa marche, comme envahie de la même allégresse que son maître.

Le Stryge parlait de tout et de rien, partageant avec franchise ses pensées à un Lokyem attentif peut-être. Il lui contait des rumeurs villageoises, des aventures épiques, des légendes méconnues et des mythes oubliés. Les connaissait-il ? Len ne le savait mais peu lui importait, avoir une oreille à son écoute était fort appréciable : il avait que trop de récits en tête pour que trop peu d'assemblée à qui les raconter.
Il était barde, mais un barde encore inconnu.

La nuit allait venir finalement, et il aurait été fort convenu de faire halte au crépuscule.

"Lokyem, ne devrions-nous pas trouver un endroit où nous reposer ? Les forces commencent à me manquer je dois avouer."

Il peinait en effet à tenir sur ses jambes et son babillage s'était peu à peu faiblit au fil de la journée. Son regard était ainsi un brin suppliant quoique involontaire.

Lokyem comprit assez vite qu'il était face à un bavard, ce qui était pour lui un mal. Mais Len était un bavard barde.Et Lokyem avait toujours apprécié les bardes. Ils étaient tellement emplis des histoires d'autres personnes qu'ils prenaient généralement peu le temps ou la peine de parler d'eux-mêmes, et ce n'était sans déplaire à l'Abyssal. Car puisque les bardes ne parlaient pas d'eux, ils n'attendaient pas de Lokyem qu'il le fasse. Et s'il y avait bien quelque chose que l'Abyssal détestait faire, c'était bien parler de lui.

Aussi laissa-t-il le temps s'écouler avec plus de plaisir qu'il aurait pu l'espérer. Les deux nouveaux comparses avançaient à un plutôt bon rythme sur les sentiers eneigés. Lokyem remarqua que - par manque d'entrainement sans doute ? - le stryge manquait sérieusement d'équilibre sur une surface aussi peu stable qu'immaculée. A chaque fois que ce dernier devait user de ses ailes pour ne pas tromber, Lokyem ne pouvait s'empêcher de s'en amuser. Mais d'un amusement teinté d'admiration. Il n'avait vu que trop souvent des stryges trop hommes, pas assez oiseaux, n'usant de leurs ailes que comme une parure inutile, jusqu'à ce qu'elles leur soient utiles pour voler. Len, au contraire, ne semblait pas comme ça. Il était gracieux quand il usait de ses ailes. En comparaison, sa démarche terrestre semblait étrangement gauche.

Et il continuait à parler. N'attendant pas que Lokyem lui parle en retour. C'était d'un reposant... Si l'Abyssal avait dû répertorier tous les sujets que le stryge avait mentionné pendant la marche, il aurait sûrement échoué, mais il était intéressant de voir à quel point les légendes qu'on lui racontait avaient évolué depuis la dernière fois qu'on les lui avait conté, pour celles qu'il avait déjà entendues. Etait-ce le temps qui avait son office ou bien était-ce Len qui lui en présentait une version altérée ? Les deux, sans doute. Le fait est que le Stryge semblait véritablement vivre ce qu'il racontait, que ce soit la plus simple rumeur ou la plus épique histoire, il y avait à chaque fois une touche de naïveté, sa nuance de spontanéïté, cette petite joie si caractéristique...

Y avait-il donc un point où Len ne serait pas fidèle à lui-même, à cette première image si enfantine que Lokyem avait conçu de lui ?

La nuit approchait tout comme la fatigue de son compagnon. Lokyem le remarqua à ses paroles qui se faisaient plus rare, contrôlées et éparses. Aussi ne fut-il que très peu surpris quand ce dernier demanda une halte. Lokyem acquiesca aussitôt. Il aurait pu encore aligner cinq six kilomètres avec ses jambes aguerries, mais il tenait à ce que la lueur d'espoir dans les yeux de Len, tandis qu'il formulait sa demande comme une supplique, ne soit pas déçue.

« Marchons encore un peu »  dit-il. «et soyons attentifs, car si la chance nous sourit, nous trouverons bien une caverne ou quelque chose pour espérer nous couvrir du vent nocturne. »

Ils continuèrent donc leur route et l'Abyssal portait plus d'attention aux alentours, en quête d'un quelconque abris. Ils n'étaient pas si rare dans cette région des montagnes, souvent des blangos les creusaient et en faisaient leur demeure. Il suffisait de les déloger manu militari pour en profiter.

Son visage se fendit dans un sourire tandis qu'il vit au loin ce qui ressemblait à une cavité dans la roche assez grande pour les abriter tout deux l'espace de cette nuit. Il le désigna aussitôt au Stryge et ils obliquèrent dans sa direction. Lokyem espérait à part qu'ils la trouverait bien inhabitée.

« Un point, cependant, attire ma curiosité, Messire Barde. Ne connaisseriez vous pas certains mythes ou histoires en rapport avec les Abyssaux ? Je ne vous ai entendu en dire aucuns... »

Le barde avait-il déjà rencontré des gens de sa race ? L'existence des Stryges était si brève, cela n'était pas impossible.

Bien heureux d'être avec une si rassurante compagnie, le Stryge suivait sans protester les directives de Lokyem : de toute façon il n'était de nature à se plaindre. C'était trop déplacé. Cette simple réflexion avait mis bien du temps à prendre forme dans son esprit fatigué. Aussi ne put-il que se fendre d'un immense sourire aux propos de son compagnon : ils allaient enfin se reposer !

Mû par cette perspective, un regain d'énergie le parcourut et il alla à la hauteur de Lokyem d'un pas sautillant. C'était lui qui avait trouvé l'endroit propice après tout. Il était donc logique et raisonnable de lui témoigner sa reconnaissance par des mots mais aussi une certaine attitude. Cela, quelques personnes l'oubliaient volontiers. Il se faisait ainsi une tâche à y veiller.

« Un point, cependant, attire ma curiosité, Messire Barde. Ne connaisseriez vous pas certains mythes ou histoires en rapport avec les Abyssaux ? Je ne vous ai entendu en dire aucuns... »

Len s'arrêta un bref instant, mine songeuse sur le visage. Des Abyssaux, des Abyssaux...

« Hum... Elles sont rares et tristes, répondit-il finalement, ses ailes l'enlaçant. J'ai trouvé le moment inapproprié pour les conter mais je peux bien vous en rapporter quelques unes... Enfin. Les quelques que je connais.»

Ces êtres étaient si mystérieux ! On en parlait parfois dans les villages, mais qu'à demi voix, dans l'intimité d'une maison. Ils étaient craints. Parfois adulés. Souvent méconnus...
Il alla poser ses affres au pied du mur avant de s'asseoir sur un rocher. Sa mandoline se nicha naturellement sur ses jambes frêles.

« Mis à part des rumeurs de bonnes femmes de village, je puis vous rapporter une comptine. C'est un peuple dont j'ignore tant de chose que je ne souhaite faire circuler des dires que trop erronés... D'innocents murmures ont tantôt fait de créer des préjugés inavérés. Entendrez-vous quand même ce conte chanté autrefois aux enfants ? »

Le Stryge ne devait pas vraiment s'attendre à une telle question - ou un tel sujet - car il s'arrêta, un masque songeur plaqué sur son visage.

« Hum... Elles sont rares et tristes. J'ai trouvé le moment inapproprié pour les conter mais je peux bien vous en rapporter quelques unes... Enfin. Les quelques que je connais. »

Tandis que Len déposait toutes ses affaires, Lokyem se permit un léger sourire. Le conteur, en plus de son intérêt, avait désormais sa curiosité. Il avait entendu quelques fois des histoires sur son peuple, souvent fantasmagoriques et un peu mystiques. Il est vrai que les capacités du peuple des océans étaient souvent effrayantes pour le commun des mortels humains goûtant peu à la magie. Ils concevaient peu la vie sous-marine et la relation si spéciale que les abyssaux pouvaient avoir avec la nature avec leurs invocations qui pouvait la soumettre aussi facilement.

« Mis à part des rumeurs de bonnes femmes de village, je puis vous rapporter une comptine. C'est un peuple dont j'ignore tant de chose que je ne souhaite faire circuler des dires que trop erronés... D'innocents murmures ont tantôt fait de créer des préjugés inavérés. Entendrez-vous quand même ce conte chanté autrefois aux enfants ? »

Chanté aux enfants ? Aux enfants humains ou aux abyssaux ? Humains, à coup sûr. Lokyem se souvenait de la beauté des chants sous l'eau, avec des sons étranges, adaptés au milieu aqueux, des consonances sans doute incompréhensibles pour une oreille non-abyssale. Mais totalement impossible à transcrire.

« Je vous en prie, faites. Et ne vous inquiétez pas de la vraisemblance de vos histoires, je saurais sans nul doute départager. Peut-être mieux que vous. »

Lokyem se demandait aussi comment le Stryge réagirait quand il apprendrait qu'il faisait partie de ce peuple qui semblait tant l'intriguer.

[HRP : Mon retard est une pure illusion d'optique =P]

Le barde caressa sa mandoline d'un air rêveur, même s'il n'en jouerait pas, laissant le silence s'installer tranquillement. Une vieille habitude pour se faire écouter dans les tavernes.

"Au-delà de notre terre..."

Sa voix fluette correspondait à ce que l'on pouvait imaginer au vu de son apparence, mais elle empruntait des accents de solennité qui en surprenait généralement plus d'un. Il déclamait les vers doucement mais clairement dans cette grotte froide...
Soudainement, la pluie tomba.
Et avec elle, Len changea de chanson. Il ne saurait dire ce qui l'avait poussé à préférer une chanson de son peuple à la comptine humaine mais il avait ce sentiment que cette personne saurait l'écouter... De la confiance, ou son instinct ? Peut-être un peu des deux...

"Au-delà de notre terre,
Au-delà de nos frontières,
Vivent les abyssaux.

Ils sont humains !

Peau d’écaille, yeux d’opale
Ils t’observent, peuple pâle,
En souriant, sans un mot.

Ils sont poissons !

Ils se parent d’coquillages,
Portent crustacés en ramage,
Ils s’amusent, libres dans l’eau.

Ils sont nymphes !

Mais… gare, gare, gare à toi !

Car à trop t’approcher du rivage,
L’un d’eux t’attrapera par le pied
Pour t’emmener là-bas, loin au large,
Dans ces abysses délaissés…

Ils sont humains et poissons et nymphes.

Ils savent enfanter, savent rire,
Ils savent se battre et aussi tuer.
De l’homme, ou d’eux… qui est le pire ?
Car nous ne pouvons nous décider."

La chanson finie... Len rouvrit les yeux, guettant la moindre réaction de son unique auditeur. Qui sait combien s'agacerait de cette fin...

HRP: