Le doux voile obscur de la nuit avait recouvert Kastalinn, j’étais allongé dans un champ, contemplant les étoiles, pensif. Quand je regardais ces astres, je ne pouvais m’empêcher de revoir tout le chemin parcouru jusqu’à maintenant. Est-ce que quelqu’un lira mes écrits un jour ? Peut-être. Alors en cette nuit calme et apaisante, une des histoires les plus marquantes de ma vie me revint. Reprenons depuis le début, vous voulez bien ?
Je suis le descendant d’un clan, les Sang-de-Dragon, occupant un petit village inconnu de tous loin des villes, dans le Nord. Dès ma naissance, ma mère ne respecta pas les traditions, si elle l’avait fait, j’aurai dû quitter ma famille le jour de mes cinq ans pour suivre l’enseignement de mon clan. C’est donc, comme vous le savez, lorsque j’avais dix ans que je fus confié à un maître qui m’enseignera le combat aux poings, à la hache, à l’épée, à l’arc, à la lance, au bâton, à la fronde...
Il m’a également enseigné la chasse, la survie en milieu hostile, la traque. Il eu aussi le temps de m’apprendre à écrire, lire, à bien se comporter ainsi que la stratégie militaire. Le jour de son vingtième anniversaire, le jeune Sang-de-Dragon doit défier son maître en duel. S'il gagne, il pourra à présent jurer allégeance au clan, participer aux raids et fonder une famille.
Mais dès le début de son règne sur le clan, le Jarl Ulrik décida de créer une unité spéciale au sein de ses hommes, qui restera en place pendant des siècles. Il donna un nom à ce nouveau groupe : les Veilleurs. Ces derniers avaient la garde d’un avant-poste rudimentaire dans la forêt, afin de prévenir d’une attaque de créatures ou d’hommes. Le jour de mes vingt ans, je parvenais à battre mon oncle en duel, et ce que j’ai fait ensuite, vous le savez déjà, n’est-ce pas ?
Une fois rentré à Fimbulvetr, mon oncle me donna une lettre qui venait du Jarl Olguvej, actuel dirigeant du clan :
« Khan Sang-de-Dragon,
Les histoires racontent comment tu as retrouvé ton traître de père pour le tuer sont déjà arrivées à mes oreilles, et je dois dire que je ne peux que te respecter pour la tâche amère dont tu t’es acquitté. Ayant prouvé ton courage, je suis convaincu que tu es prêt pour avoir de vraies responsabilités.
Par la présente, je te nomme capitaine des Veilleurs et te donne une lune pour préparer ton paquetage et rejoindre la garde sur place.
Que les dieux soient avec toi,
Olguvej »
Je dois avouer que le fait d’avoir gagné la confiance des miens était agréable, mais le fait de rester dans un camp miteux à monter la garde l’était moins.
Cela faisait maintenant quelques jours que j’étais au camp, j’avais pris mes marques. La brise caressait doucement mes joues, les branches grinçaient au-dessus de moi, j'étais calme. Je m'étais assis sur la terrasse de mon bureau, il faisait nuit noire, on ne pouvait distinguer que les torches. Je trouvais un certain apaisement dans la nuit, dans ce silence, je ne saurais dire pourquoi. Je pensais un peu à mes compagnons qui n'étaient toujours pas revenus, je pensais à la mort de mon père. Toutes ces réflexions ne tardèrent pas à me fatiguer, si bien que je décidais d'aller me coucher. Le sommeil ne mit pas longtemps à m'envahir, mes journées étaient rudes et épuisantes. Cela faisait un moment que je me reposais quand soudain, quelque chose vint troubler mon sommeil. J'entendis comme un puissant bruit d'éclair étouffé. Sans plus attendre, je passais ma peau d’ours et pris ma hache en courant vers l'extérieur du camp. À peine dehors, un de mes coéquipiers, Klaus, m'interpella :
« Mon capitaine, la garde m'assure avoir vu un énorme éclair bleu se fracasser plus loin dans les montagnes. »
J'étais perplexe, étaient-ce les Dieux ? Ou simplement une catastrophe naturelle ? Je repartis me coucher, déterminer à partir demain voir ce qu'il se tramait là-bas.
Dès l'aube, après une nuit tourmentée, je m'empressais de me préparer. Bottes, gantelets, ma peau d’ours, sacoches et bandoulière, de la nourriture et ma hache à la ceinture.
Le voyage serait long, mais j'étais prêt, c’était mon devoir d’aller vérifier. Rien que traverser la forêt entière fut pénible, les monstres étaient aux aguets. Après être sortis de la forêt, je commençais à grimper en altitude. L’air se faisait rare, il faisait froid et la neige se faisait plus dense sous mes pieds.
Aux trois-quarts du chemin, je décidais de m'arrêter sur un rocher pour me manger un morceau. J’avais clairement sous-estimé le temps qu’il faudrait pour arriver à mon but, je devais pourtant me hâter, sinon on me prendra pour un déserteur. Sans perdre plus de temps, je repartais en direction de l’endroit.
Alors que j'arrivais à peu près à l’endroit que la garde m’avait décrit, je cherchais du regard quelque chose de frappant, le lieu où l'éclair avait frappé. Je balayais du regard la zone quand je remarquais comme un trou dans le flanc de la montagne, cela semblait peu probable, mais je n'avais pas fait tout ce chemin pour faire demi-tour maintenant.
Je pénétrais dans ce qui semblait être une grotte, à l’entrée étroite et lugubre. Le faisceau de lumière émanant de l'entrée mettait en avant un rocher plat, sur lequel un loup semblait endormis. Voulant vérifier son état, et ne comprenant pas ce qui se passait, je m'approchais doucement de l’animal. Par instinct, je me dépêchais de poser la main dessus, mais par je ne sais quel prodige, une force obscure me projeta quatre mettre en arrière : impossible d’approcher le loup qui restait inconscient.
Je reprenais mon souffle, j'étais comme sonné par cette onde de choc qui m'avait projeté à plusieurs mettre de l'animal. Le temps de me relever, j'essayais de reprendre mes esprits, mais impossible de poser une explication logique sur ce qu'il venait de se passer. Tous les jours, pendant plusieurs cycles lunaires, je venais passer au moins une heure à essayer de toucher le loup, qui lui ne bougeait pas. Je n'y parvenais toujours pas, mais je persévérais encore et toujours. Si bien, qu'à force de ténacité, m'approcher du loup ne me projetait plus en arrière, il se contentait de me résister par une espèce de champ de force infranchissable. C'était devenu comme une sorte de rituel. Je pense que c'était ce qu'il me fallait, un endroit pour me recentrer sur moi-même, penser aux Veilleurs, toutes ces choses, je devais être à la hauteur.
Mais mon regain d'espoir n'allait pas durer longtemps...
Je décidais de rentrer et à peine étais-je arrivé sur place que je voyais les Veilleurs attrouper au centre du camp dans un vacarme absolu. M'approchant en vitesse, j'arrivais pour voir l'horreur : le corps de Klaus en sang.
Un des Veilleurs m'expliqua que Klaus, ne me voyant pas revenir, était parti à ma recherche, et qu'un ours l'avait surpris dans son bivouac, le tuant dans son sommeil.
À ce moment-là, c'était une vraie tornade dans ma tête, j'étais déchiré par la culpabilité.
Pendant plusieurs jours, il m'était impossible de fermer l’œil ou même de penser à autre chose qu'à ce drame. Je devais me changer les idées, me morfondre n'honorait pas Klaus.
Je décidais de partir à la grotte du loup pour me recueillir, me retrouver face à moi-même. Je partais donc avec mon accoutrement habituel en direction de la grotte, coupant par la forêt. Le voyage fut long mais paisible, je pus arriver à destination sans encombres.
Mais une fois arrivé à la grotte, ce fut la stupeur : le loup n'était plus là. Je n'arrivais pas à expliquer ça, j'avais fait tout ce chemin pour rien ?
Déçu et perplexe, je quittais la grotte pour regagner le camp. Mais lorsque j’eus l'idée de lever les yeux au ciel, je pus voir une traînée bleue le trancher, rayonnante comme un arc-en-ciel.
Cette œuvre rapporte 50 points d'expérience et 60 pièces d'or à Khan Sang-de-Dragon