Cela faisait maintenant plusieurs jours, que dis-je, plusieurs mois que je marchais, le plus loin possible de la tour noire. Je n'avais pas ma place là-bas, j'en étais sûr. Je décidais donc de m'aventurer dans les contrées lointaines, loin de toutes ces ailes. C'est ainsi que je me retrouvais dans les terres froides du Nord, quittant les montagnes de l'Est. Le ciel était plutôt généreux ces derniers temps, toujours aussi bleu et clair, de quoi me mettre en rogne. Je n'aimais pas ces jours-là, les jours de lumière, les jours clairs, ces jours où l'on se sent "bien". Je préférai le froid et l'obscurité, comme tout Stryge noir normalement constitué. J'errai sans but, équipé d'une simple faux, légèrement rouillé, ramassé dans une ville durant le voyage.

Cette ville justement, il s'agissait d'une petite ville de paysans que j'avais croisé pendant mon voyage vers le nord, une ville du nom de Dhijarr. Elle n'avait de pauvre que sont apparence, il y avait plus de brigand que de paysans, tous aussi faible et lamentable les uns que les autres. Des êtres sans importance qui ne méritaient pas mon attention. J'avais pu néanmoins récupérer quelques objets comme cette vieille faux toute abîmés, la seule qui était encore en un seul morceaux à mon départ de cette triste ville. J'avais récupéré quelques bijoux également. Léger paradoxe. J'aimais ce qui était de métal et qui brillait, mais je haïssais la lumière et la clarté. Aucune importance, ce n'était pas cela qui m'avait motivé à m'arrêter dans ce village, simplement la nourriture et de quoi me reposer une nuit ou deux. Je repartis donc, longeant les montagnes du Nord de Kanaan, au plus près du froid de la banquise.

Quelques jours de plus me suffirent pour atteindre enfin une grande ville, toujours plus peuplé et plus bruyante. Je ne sais pas ce qui me fit me décider, mais j'entrais dans cette ville cacophonique qu'était Kastalinn. J'avais besoin de me reposer, un peu de sommeil ne me déplairait pas. Dormir au clair de lune ne me déplaisait pas, mais le confort n'y était pas. J'avais besoin d'un sommeil récupérateur et non d'un sommeil pour simplement fermer les yeux. Le soleil était au déclin, bien que toujours haut dans le ciel, annonçant une après-midi encore chaude. Ayant que peut voyagé dans de grande ville, je ne connaissais pas encore les bons coins de celle-ci, comme les auberges, maison closes et autres infrastructures proposant des activités toutes aussi futiles les unes que les autres, mais qui savaient occuper le temps de ses clients. C'était donc pendant que je recherchais une auberge pour me rafraîchir de par cette chaleur, qu'une main inconnue se posa sur mon épaule, me tirant légèrement en arrière. Je forçais le pas comme si de rien n'était, pensant que cela était dû à la foule trop condensé, mais la pression se faisait plus forte sur mon épaule et l'on m'adressa la parole.

Saigo - Si tu cherches la Tour Noire, tu t'es vaguement trompé de route...

Je me retournais donc pour faire face à mon interlocuteur. Bien qu'étonné, je ne laissai aucun trait d'émotions paraître sur mon visage en voyant les ailes noires rangées et repliées derrière l'individu aux cheveux sombres. Un Stryge noir, ici, loin de la Tour Noir? Etrange. Il dégageait une aura plutôt sombre également, meurtrière je dirais même. On pouvait sentir son expérience dans son regard. De par sa tenu plutôt légère et les nombreuses marques qui jonchaient tout du long de son corps, je serai prêt à parier qu'il s'agissait d'un guerrier, peut être un ancien Exécuteur ou un grand guerrier. Je préférerai que ce soit le second cas, mais la première paraissait presque invraisemblable. Il est rare qu'un Exécuteur se promène aussi loin de la Tour Noir et heureusement pour moi. J'avais beau être plutôt doué pour l'assassinat, je n'arrivais pas à la cheville d'un Exécuteur, en tout cas pour le moment. Je m'adressais donc à lui ainsi qu'à l'homme qui était à ses côtés.

Garràn - La seule chose que je cherche à l'heure actuelle est une taverne qui pourrait me rafraîchir jusqu'à plus soif.

Son regard c'était endurcis, toujours aussi pesant. Je ne voyais pas pourquoi je devrais perdre mon temps avec ce Stryge Noir. J'espérais au moins qu'il me renseigne sur la taverne la plus proche, j'avais bien besoin de m'hydrater.

La foule paraissait toujours plus dense, plus bruyante encore. Les gens circulaient tout autour de nous comme nous n'étions que de simple obstacle sur leur chemin, ils ne nous portaient aucune attention. Le stryge aux ailes sombres commença à s'intéresser à moi. Il m'avait jaugé de la tête aux pieds et maintenant, il cherchait à se renseigner sur la raison pour laquelle j'étais venu ici, si loin de notre chère Tour Noire. Le simple fait d'avoir prononcé le mot "taverne" avait suffi pour faire apparaître un sourire malicieux sur son visage et à animer sa curiosité.

L'homme qu'il tenait sous son bras s'écroula lourdement au sol, inerte, une tache rouge s'élargissant tout autour de lui, sur le sol de pierre. Cela créa un mouvement de panique, la foule n'avançait plus de manière linéaire, on aurait plutôt dit qu'elle s'éparpillait un peu partout, de manière bordélique. Ce n'était donc pas un ami de ce stryge, mais plutôt une de ses cibles. Il n'avait rien d'un véritable assassin, aucune discrétion de part sa tenue vestimentaire ainsi que de la manière dont il opérait. La règle d'or des assassins veut qu'il n'y ai aucun témoin de l'assassinat. Eliminer quelqu'un dans la foule et relâcher son cadavre en plein milieu, comme si de rien n'était, allait nous attirer des ennuis. De plus, les Stryge Noir sont souvent, je dirais même presque tout le temps, accusé pour ce genre d'acte criminelle. L'autre Stryge avait l'air d'apprécier la réaction fugace des villageois, son sourire s'était élargi et son regard montrait parfaitement le sentiment de plaisir qui correspondait à son sourire machiavélique. Je comprenais ce sentiment, je ressentais le même lors de mes assassinats. Il me regarda ensuite pour m'annoncer qu'il allait m'emmener à la taverne la plus proche, cela nous éviterai bien des ennuis.

La taverne était plutôt spacieuse pour le peu de monde qu'elle accueillait, ce n'était sans doute pas encore l'heure. Une taverne bien sombre, sans aucune animation à part quelques joueurs et parieur d'argent. Mon semblable commanda deux bières et m'en tendit une après que nous nous soyons assis. Je le remerciai d'un signe de tête et commençai à me désaltérer doucement. Je sentais son regard posé sur moi, il me jaugeait encore. Il ne devait pas être sûr de lui quant à mon identité, ma faux avait dû l'alerter. Je reposais ma pinte et le regardais, sans aucune émotion, sans l'ombre d'une envie quelconque dans mon regard. Il s'était décontracté, il se sentait en sécurité. De toute manière, il n'avait aucune crainte à avoir de moi dans ce genre d'endroit et à ces heures. La plupart du temps, il s'agit d'élimination nocturne, c'est d'ailleurs logique quand in y pense. Un Stryge Noir vêtu de noir de la tête aux pieds n'est dans son élément qu'à la tombé de la nuit. Il me questionna d'ailleurs sur ce qui m'a motivé à venir ici, énumérant quelques missions que remplissent généralement un assassin de la confrérie. Il savait donc déjà à quels ordres j'appartenais? Ce Stryge piqua ma curiosité. Il avait réussi à le déterminer simplement en deux coup d'œil, on peut dire qu'il a l'œil et le bon!

Garràn - Rien de tout cela. Je suis simplement venu dans le coin pour visiter. Je n'allais tout de même pas lui dire que j'étais en exil. Mais j'aurai quand même pu sortir autre chose comme excuse, il allait forcément se douter qu'il s'agissait d'un mensonge, un mensonge enfantin qui plus est. Mais toi, tu m'as l'air de bien connaître cette ville. Pour quelle raison es-tu venu jusqu'ici? Ce n'était qu'un simple renvoi de question, histoire d'entretenir une discussion plus ou moins banal entre Stryge Noir.

Il avait été fort généreux de me guider jusqu'à cette taverne et de m'avoir offert une bière. Son apparence était celle d'un guerrier, mais il paraissait tout de même plus bavard et plus gentil qu'un simple tueur. Je me faisais peut-être de fasses idées, mais je préférais rester sur mes gardes, ne sait-on jamais.

D'un levé de coude, je terminai ma chope et d'une synchro parfaite, le Stryge noir en fit autant. le silence s'installa, une bien maigre conversation. Il était à son aise, comme si rien ne pouvait l'atteindre, je n'avais que très rarement vu une telle confiance en soi. Malheureusement, cette qualité-là me faisait défaut, bien que j'aie été par le passé un assassin, pas trop mauvais sans me vanter, j'avais bien du mal à trouver des contrats. Avoir confiance en soi est quelque chose d'important et pour cause, cela montre la détermination et l'assurance dont nous ferons preuve pour remplir le contrat. Je manque cruellement de confiance ce qui fait que je ne suis pas très crédible. Mon interlocuteur avait largement le dessus sur moi, ne serais-ce que sur ce point.

Il arbora lentement un sourire qui reflétait sa confiance en m'annonçant son métier : C'était donc un chasseur. Cela semblait logique, il ne me mentait pas, du moins cela avait l'air plausible. Nous étions dans une ville justement dédiée aux chasseurs. Il m'expliqua ensuite que la différence entre nous était trop importante pour qu'il me propose de l'accompagner. Ainsi donc il m'avait jaugé. Ce n'était pas qu'un simple bourrin de base, il savait analyser son entourage. En me révélant cela, il voulait que je me rende compte de son assurance, du fait qu'il ne me craignait pas le moins du monde. Je n'avais pas affaire avec n'importe qui. Il continua sur sa lancée qu'il aimait dépecer, que ce soit des êtres humains ou encore des animaux avec une préférence pour les humains, tout en me montrant son torse sur lequel était logé deux dagues. Je pouvais apercevoir la marque quotidienne que dessinait les Exécuteurs sur leur corps. J'avais donc vu juste à son sujet et cela ne me rassurait pas. Ces gens-là n'avaient aucune pitié, même pour les leurs. Ils n'obéissaient qu'à une seule personne, la mère de tous les Stryges noir.

Garràn - Vous m'aviez demandé pourquoi un stryge noir se trouvait aussi loin de la tour noire, mais vous ? Un Stryge de votre rang ne doit-il pas rester au plus près de la Matriarche ? Même pour votre passe-temps, rester trop longtemps loin de la maison des Stryge noir pourrait entraîner quelques problèmes, vous ne croyez pas?

Un Exécuteur aussi loin de la tour noire, c'est vrai c'était louche, même pour son métier. Ils ne quittent presque jamais la tour et quand ils sortent, ce n'est que pour chercher de nouveaux sujets pour leur cours de maton et de torture. Je connais relativement bien les Exécuteurs, peut-être pas en profondeur, mais suffisamment pour savoir que leur place est aux sous sol, près à obéir à la Matriarche.

Je me levais et lui proposais de sortir de l'auberge, nous pouvions continuer à discuter tout en marchant en ville, il pourrait ainsi me faire visiter la ville, c'est ce que je lui avais indiqué quant à la raison pour laquelle je me trouvais ici, alors autant aller jusqu'au bout.

Le Stryge à mes côtés prenait sont temps pour finir sa chope. Il regarda brièvement à droite à gauche puis ferma les yeux et se concentra sur moi de nouveau. Il avait sondé la taverne, certainement pas pour de bonne raison, ce qui me légèrement en alerte. Je n’avais pas à faire à n’importe qui, il suffisait de se remémorer l’homme qu’il avait éliminé avant de me proposer d’entrer dans la taverne.

Il m’expliqua le fonctionnement de la tour noire vis-à-vis des Exécuteurs ainsi que le rapport à la Matriarche. Je connaissais très bien le fonctionnement de cette stupide tour. J’avais parlé en gros sans évoquer la légende, ou peut-être le mythe, Onze et il a préféré me reprendre discrètement sur ce point. Je peux le comprendre, ce sens du respect envers ce son supérieur. Ce Onze dont il a parlé, je ne le connaissais, ni l’avais vu ne serait-ce qu’une seule fois. Beaucoup de légende traîne autour de lui, je ne citerai que les plus plausibles pour ne pas évoquer l’immortalité. Un Stryge dont on a arraché les plumes une à une pour qu’il les mange ensuite, il n’aura pas volé son surnom de « La mort ». J’espère sincèrement ne jamais vérifier par moi-même s’il existe belle et bien, cela ne présagerait rien de bon pour moi.

Il reprit plus doucement pour répondre plus correctement à ma question. Mais sa réponse me laissa perplexe. J’étais mal tombé finalement, je regrettais amèrement d’avoir accepté de lui avoir demandé une taverne. Ce maudit chausseur ne débusquait pas seulement le gibier, ni les cibles d’assassinat. Il traquait surtout les gens comme moi. En fait non, pas tout a fait. Je n’étais pas vraiment répertorié chez eux, ou du moins pas dans la liste des bannis. Je suis simplement parti en mission et je ne suis jamais revenu, mais personne ne le sait vraiment. Avec un peu de chance, je passais pour mort pour ceux qui s’intéressent à moi. Mais je préférai rester sur mes gardes, mon inattention pourrait me coûter la vie. Je n’avais pas quitté ma chope des yeux. Elle était presque vide, un petit fond que je faisais tournoyer avec la main. Ce même mouvement rotatif que je faisais souvent avec mon arme à couper le blé normalement. J’espérai passer inaperçu, même si, son intervention me paraissait de plus en plus fondé. Je me demandais de plus en plus que ce n’était vraiment pas un hasard qu’il soit tombé sur moi. Il jouait avec moi comme une marionnette et me faisait avancer vers l’inéluctable.

Il continua sur sa lancé. Visiblement, il n’aimait pas la tristement célèbre confrérie de l’ombre. Mais est-ce qu’il avait du mépris pour les assassins de la confrérie noire ? Je sais pertinemment que c’est quasiment la même chose puisque la confrérie de l’ombre n’est autre que la suite des aventures pour les assassins de première classe. J’ai pu faire partie de ses assassins de premier ordre, mais je n’ai jamais été mis en relation avec cette Congrégation de l’ombre, du coup je ne risque rien, enfin je l’espérais. La suite par contre, fut un peu plus déplaisante. Je le savais que trop bien que, si jamais je croisais un jour la route d’un Exécuteur, je tomberai forcément sur quelqu’un qui connaissait de près ou de loin mon père. Mais personne ne sait qu’il a un rejeton et c’est tant mieux pour moi. Enfin normalement personne ne le sait, en tout cas pas à ma connaissance. Sans tourner ma tête, je fixais du coin de l’œil mon interlocuteur, il parlait comme s’il y était, mais à voir son visage, il ne devait pas être beaucoup plus vieux que moi. Il était même fort probable que nous nous soyons croisé à mainte reprise dans la tour. Je m’étais épargné ce plaisir que d’entendre hurler mon géniteur, une perte de temps à mes yeux.

Je finissais ce qui me restait de bière, deux ou trois gouttes tout au plus, et je le suivais jusqu’au pas de la porte où il s’arrêta pour que je le rejoigne. Le sourire aux lèvres, un rire malsain s’échappa de sa bouche, comme si ce que j’avais dit ne le satisfaisait pas. Il me proposa plutôt, de manière provocante, d’aller tester mon joujou tout rouillé en me frappant le dos. S’il avait frappé avec la tranche de sa main un peu plus haut, il m’aurait tué sur le coup sans problème. Nous sortîmes de la taverne nous dirigions en contre-bas de la ville. Il avait certainement une idée en tête, mais si c’était pour voir mes maigres talents de tueur, je n’arriverai jamais à la cheville d’un Exécuteur, j’en étais bien conscient. Pas sûr qu’il le soit aussi pour le coup.

Garràn – Si cela peu combler votre curiosité …

Je haussais les épaules en fermant les yeux. Calme et serein. Voilà comment paraissait l’autre Stryge, alors j’en faisais autant. Je ne me souciais que peu de la cible qu’il me présenterait, pourvu simplement qu’il ne m’ait pas à la bonne après tout ça. Tout bon guerrier sait reconnaître la valeur de son adversaire au premier échange, mais pour un assassin, il ne lui suffit que d’un coup d’œil. Son aura était tellement sombre et froide que passer plus d’une journée à ses côtés pourrait s’avérer dangereux. Finalement, cela pourrait s’avérer avantageux après quelques minutes de réflexion. Je décidais de l’aborder pendant que nous marchions vers je ne sais quel direction.

Garràn – Vous avez cité tout à l’heure le nom de Midos qui ne m’est pas inconnu. Je ne sais pas vraiment ce qu’il a pu faire pour devenir une légende puisque je n’étais pas encore née, mais son nom était sur la bouche de tout le monde lorsqu’il s’était rendu de lui même il y a maintenant un peu plus d’une quinzaine d’années il me semble. A la vue de votre apparence et connaissant l’âge requis pour rentrer dans les rangs des gardiens de l’enfer, vous n’aviez pas dû participer à la traque, je me trompe ? J’en déduis que, même s’il s’est rebellé, même s’il est mort pour cela, il reste tout de même un modèle à suivre pour tous les Exécuteurs, non ? Je trouve cela, pour le moins, curieux.

Mes questions n’étaient pas construites au hasard, je cherchais à piquer la curiosité de mon interlocuteur. Je cherchais à avoir la même opinion que lui, ou plutôt le contraire, que lui ait la même opinion que moi sur le sujet. Cela paraît peut-être anodin comme ça, mais en réalité cela change énormément de choses. Le regard que me porte mon interlocuteur n’est pas le même que si j’avais dit quelque chose où il n’était pas d’accord. C’est instinctif, on s’entend toujours mieux avec une personne qui s’intéresse ou qui est d’accord avec ce que l’on pense. Je m’assurai une faible protection, mais au moins il réfléchirait à deux fois avant d’agir ce qui me laisserait probablement suffisamment de temps pour m’enfuir. C’est tordu, mais la manipulation, c’est mon dada.

En une fraction de seconde, je me retrouvais compressé contre un mur avec une telle violence que le coup m'avait probablement cassé une côte. Il semblerait que ce stryge soit trop simplet pour dialoguer. Mais au moins, cela m'aura servi d'avertissement, je ne dois pas faire une seconde gaffe où je risquerai de finir ma triste vie plus rapidement que prévu. Mon compère avait dégainé si rapidement que je n'ai rien pu faire. Visiblement, il n'aimait pas les traîtres, j'avais donc plutôt intérêt à me faire discret en sa présence.

Il relâcha petit à petit son emprise sur moi et redevînt aussi calme qu'il ne l'a jamais été après m'avoir foudroyé du regard. Pendant un instant, je me suis souvenu ce que signifiait la peur et tous les symptômes qu'elle apportait avec elle : léger tremblement, pupilles dilaté, excitation nerveuse, souffle coupé, etc... Il reprit plus doucement et répondit à mes questions, même plus que je ne l'attendais. Il n'était donc pas beaucoup plus âgé que moi, il savait utiliser l'ironie (peut-être involontairement) et surtout, les anciens étaient au courant de mon existence. Il y eu comme une étincelle dans mes yeux, quelque chose qui me fit oublier toute la scène précédente, quelque chose de plus grand encore que la peur. Pour le moment j'étais encore en sûreté, d'après lui, ce ne sont que de simples rumeurs, ce qui veut dire qu'ils n'ont rien de concret sur moi. Je lui claquais le dos et noircissais mon visage.

Garràn - Midos, J'aurai aimé l'écartelé puis le laisser à manger au rat tout en contemplant son visage, mais j'étais encore tout jeune à l'époque, ce privilège ne m'appartenait pas. Maintenant, si tu viens me dire qu'il a probablement un fils, il risquerait de valoir chère à la chasse! Se serait même une aubaine pour celui qui le capturerait. C'est tout ce que dise les rumeurs des anciens ? Sans nul doute que plusieurs d'entre vous sont déjà partis à sa recherche pour le traquer, dans ce cas, ce ne serait plus qu'une question de temps pour se fils de traitre !

Je lui lâchai un sourire malsain. Même après sa mort, se maudit Stryge de demi bouseux me traînait encore dans la boue. Je le hais ! Je le hais ! Je le hais ! Comment ose-t-il m'humilier ainsi encore et encore alors qu'il a déjà trépassé !! J'espère qu'il brûle au plus profond des entrailles de la terre, dévoré par sa lâcheté, sa faiblesse et sa folie!

Le tueur aux sombres ailes m'avait plaqué dans une ruelle, la première qui passait par là, à l'abri des regards, pour ne pas attirer l'attention de la Milice. Je continuais donc jusqu'au bout de la ruelle, l’autre derrière moi. Je me tournai vers lui puis lui montrai un jeune homme, probablement une dizaine d'été de plus que moi, chaussé de grandes bottes en cuir noir, d'une braie de paysan avec une jolie bourse bien rondouillarde accrochée à son ceinturon. Il portait également une vieille veste toute troué et déchiré. Son regard le trahissait, il tournait la tête de gauche à droite et de droite à gauche, s'arrêtant sur chaque femme qui passait.

Garràn - Cet homme là-bas, habillé comme un paysan, au coin de la rue en face. Il s'agit d'un vendeur d'esclave, il en a plus précisément après les jolies jeunes femmes dont le minois et les formes le satisfaisaient. Il a d'ailleurs très certainement deux autres complices: un en hauteur qui recevra le premier signal et qui le retransmettra au dernier complice qui, généralement, se trouve à la vu de tous et qui se chargera de récupérer la marchandise.

Je fis signe au Stryge noir de se rapprocher pour voir un peu mieux. Le faux paysan remarqua une femme vêtu d'une robe vert-bouteille. Toujours adosser contre le mur, il sorti de la poche de son veston, une sorte de miroir brisé qu'il agita légèrement dans sa main. Il était en train de faire signe à son premier collègue. Son complice était perché sur le toit d'une maison de notre côté de la rue. Je m'avançai au milieu de la rue, accompagné de l'autre stryge, il faudra d'ailleurs que je lui demande son nom. Plus tard peut-être. L'homme sur le toit agita lui aussi un miroir dans sa main, mais l'orientant cette fois-ci en direction de la jeune femme. Leur collègue était assis sur un vieux rocking chair, il se leva lentement, attendant que la marchandise soit au même niveau que lui, puis il enroula son bras autour d'elle, la main sur la bouche pour éviter qu'elle ne fasse trop de bruit, l'autre main, posé sur la taille de la femme, certainement armé d'un couteau.

Garràn - Aborder une femme en public peut paraître tout à fait banal, il a juste à se rapprocher d'elle rapidement et de la saisir par la taille tout en continuant de marcher et en la menaçant de la tuer si elle refusait de coopérer. C'est pas la première fois que je vois ce petit manège dans une ville. Pour le coup je vais avoir besoin de toi pour les éliminer en même temps. Comme il l'avait fait précédemment pour me menacer, je plongeai mon regard dans le sien, mais cette fois-ci pour y trouver une lueur de motivation et d'envie. Alors? Intéressé ?

Début du combat Saigo - Garràn

Je vis la haine dans ses yeux. Plus ténébreux que le diable en personne. Finalement, ce gars là n'aime pas beaucoup rigoler ... Je me doutais bien qu'il ne ferait que se mettre en travers de mon chemin. Qu'elle poisse !
Bon ... dommage ... je vais devoir le tuer pour régler le problème. De toute manière, je ne fais plus vraiment parti de la communauté Stryge. Je ne suis plus qu'un simple mercenaire.

Garràn - La première fois où je t'ai vu dans la ruelle, je savais déjà que j'allais avoir des problèmes. Je n'ai rien contre les Stryges noir, mais je n'ai jamais compris comment fonctionnaient les Exécuteurs. Une main sur le manche de ma faux, l'autre devant moi, servant de rempart imaginaire entre mon congénère et moi même, je dégainais lentement.

En le regardant, il ne cherchait même pas à se défendre. Il est fou ? Ou est-ce qu'il est si prétentieux qu'il pense parer la lame d'une faux avec son épiderme ?

Garràn - Et ce n'est pas aujourd'hui que cela va changer !

Je me lançais corps et âme sur ce mystérieux tueur. D'un battement d'aile, je me projetais sur lui tout en fendant l'air en deux de ma faux, visant du mieux que je pouvais la gorge de ce sombre imbécile.

Fin du combat