35 minerais et ceux d’aujourd’hui… au prix du machin… que’ques 200 j’dirais. Plus la centaine de côté… Mmm à combien il était déjà ce casque à-la-con ?...

Depuis hier soir qu’il était arrivé à Baldorheim et avait fait le tour des forgerons, Reek était tout excité. Il avait décidé de changer de tenue lors de sa chasse avec Fabien et maintenant qu'il était à la ville, il allait en profiter ! Il avait accumulé, par la force de son travail, de quoi pouvoir bien mieux se battre et ainsi augmenter ses chances de survie en milieu sauvage. Toute la nuit il avait songé aux belles lames de fer et d’acier, aux cuirs fraîchement tannés et aux boucliers inébranlables qu’il avait vu.

La seule chose qui le tracassait, c’était que ces armes et armures n’étaient pas prévu pour suivre les mouvements de transformation du thériantrope qu’il était. Quand son tour de bras pouvait passer du simple ou double, quand son crâne s’élargissait et son nez devenait un long museau, quelle armure pourrait prétendre le protéger quoiqu’il advienne ? Il avait pensé à ses systèmes de bandes de cuir, ajustable, et cela pouvait très bien fonctionner… Avec le risque de ruiner son matos en voulant l’améliorer – ça l’aurait dégouté – et le problème que cela réclamerait un temps certain à chaque fois qu’il voudrait changer son apparence. Temps qui pourrait manquer en situation de crise. Et s’il retrouvait en chien étouffé par une tenue trop étroite, il aurait l’air bien peu malin.

Une autre solution était d’acheter ses éléments d’armure une taille ou deux au-dessus de la sienne. Ainsi, il imaginait, il pourrait grandir, faire pousser du poil, des os et des muscles sans être gêné. Car, apriori, il préférait être sous sa forme bestiale pour se battre. De meilleurs sens et de meilleurs réflexes qu’il avait. Cela entendait que ses cuirs et ferrailles soient en priorité adaptés à cet aspect de son être. Donc plus grands que ce qu’ils devraient être pour lui en tant qu’homme.

Ainsi allaient les pensées de Reek, entre deux coups de pioche. Pleines d’hésitations, de questionnements, de résolutions qui ne tenaient qu’un instant… Cela occupait l’esprit. Cela faisait passer le temps.

S’il n’était certain que d’une chose, et de plus en plus au fur et à mesure que le jour passait, c’était de la nouvelle arme qu’il allait se procurer. Adieu dagues misérables, maniables comme des genoux de grand-mère et tranchantes comme une petite cuillère. Il n’était pas assez habile pour se battre avec une telle proximité de toute façon et sa capacité à user de sa main gauche était tout relative… Une griffe. C’était d’une griffe qu’il avait besoin. Celle qu’il avait vu, si ingénieusement adaptable à l’avant-bras ou au gant du possesseur, le faisait rêver plus que tout autre élément d’armurerie. Elle symbolisait de surcroit tout ce dont il était fier : sa bestialité.

- Uria, urié ! TSWÈÈÈÈ ! Héhé…

Il avait brassé l’air devant lui une, deux, trois fois, s’imaginant les lames prolongeant son bras lacérant quelque corps. Un sourire satisfait et regard suffisant s’étalaient sur son visage. Mais l’écho de coups de pioche qui n’étaient pas les siens le ramena à la réalité et, jusqu’à la fin du jour, il s’attela à son petit travail du mineur. Petit travail grâce auquel il pouvait se réjouir aujourd’hui d’avoir de l’or à dépenser.

L'avait pas le moral ce jour, votre Reek puant et suant. A quoi bon continuer de creuser ? Il avait acheter arme et armure nouvelles. A quoi bon amasser un trésor puisque ses rêves n'étaient fait que de paysages sauvages, de viandes fraîches et de libertés naturelles ? Tout cela était gratuit, ou du moins le prix à payer ne se payait pas en or. C'était des sacrifices : ne pas manger tous les jours, risquer sa peau régulièrement et dire adieux aux longs bains chauds.

Alors pourquoi venir encore ici ? Sa pioche sur l'épaule, tout juste arrivé à son poste, Reek s'interrogeait. Avec plus d'or il pourrait acheter d'encore meilleures armes oui... Non, décidement, cela ne suffisait pas à le motiver.

Il était venu jusque là tout de même, un voyage qu'il refusait d'avoir fait pour rien. Alors il se mit au travail, faisant tomber la pointe de son outil sur la faille du gisement. Jamais il n'avait mis aussi peu de coeur à l'ouvrage...

La journée passa avec une effroyable lenteur. Les visages des autres mineurs, couverts de suie et rongés par des années à creuser, étaient tout autant de miroirs de l'avenir que cet endroit promettait à Reek. Lui, contrairement à ce qu'il imaginait d'eux, n'avait pourtant pas besoin d'argent pour se loger, se nourrir, et encore moins prendre soin de sa famille.

Hé ! mais c'est bien à ça que doit ressembler le monde des aventuriers... des passages forcés à-la-con...