Ese soupira, laissant reposer à l'air frais ses pieds depuis des heures compressés dans ces foutues chausses. Vivement qu'elle puisse monter en grade ! Elle aurait ainsi la possibilité de ne pas porter ce foutu uniforme, et de déambuler pieds nus si cela lui chantait...
Allongée dans l'herbe, la lycan profitait de la fin de son service pour renouer un peu avec la nature. Elle avait passé quasiment toute la journée dans le château, à faire la connaissance des hauts gradés et à mémoriser la cartographie du lieu. On lui attribuerait par la suite des rondes : elle devait alors ingérer toutes les informations rapidement.
Elle avait omis cet aspect de la Garde, en s'enrôlant.

Enfin cette faction lui permettait de rester entourée de verdure donc elle ne regrettait en rien son choix. Puis une autre raison l'avait motivée. Ese avait cherché cette personne depuis son arrivée mais il semblait être un spectre : aussitôt que l'on savait lui dire où il était, une fois sur place, il s'était déjà rendu autre part. Un vrai fantôme.

Elle se laissa tomber sur le dos, dégustant la légère humidité de l'herbe. Cette simple odeur avait sur elle un putain d'effet euphorisant. Elle se détendit donc, proche du léger sommeil... Quand un cri animal  l'extirpa de ses songes.

"SALETÉ DE CHIEN ! REND-MOI MES GODASSES !"

La lycan se releva, se lança à sa poursuite -enfin essaya puisqu'elle prit les pieds... dans l'herbe et chuta- avant de perdre l'animal de vue au bout de quelques minutes. Soupirant fortement, elle opta pour sa forme de loup. Son odorat serait plus efficace ainsi.
Elle roula ses affaires en boule avant de les coincer dans sa gueule, passant autour de son corps ses fourreaux puis alla traquer le voleur. Rapidement, elle repéra son odeur et le chemin olfactif la conduisit dans une partie plus entretenue des jardins : quelques fleurs rares y poussaient parmi d'autres, plus communes mais prisées pour leur beauté.

Puis... Une fragrance.

La louve s'arrêta, levant le museau. Elle jappa doucement avant de filer à toute allure sur l'elfe qui se tenait non loin d'elle : sans pitié, elle sauta de tout son poids sur celui qu'elle avait tant tenu à revoir.

Elle reprit sa forme humaine, ne se préoccupant nullement de sa nudité. Foutre ciel, ils avaient eu le temps de bien se connaitre en ces quelques années de formation alors ces histoires de tenue, de bienséance et compagnie, elle n'en avait que faire. Pour le moment, elle était simplement heureuse de le retrouver et de le serrer dans ses bras.

"Ah bordel... Vous m'avez tellement manqué !"

Ese, après lui avoir rend encore et encore cette étreinte, finit par se détacher de lui avec le sourire aux lèvres. Elle ne tenait pas en place. Trop de joie, trop de souvenirs. Elle ne cessait de le regarder, ce visage fin, cet air toujours ravi et presque paternel. Elle lui donna une dernière accolade avant de se résoudre à le saluer convenablement. Depuis le temps, ses mauvaises habitudes avaient pris le pas sur ses bonnes manières... Elle toussa, faussement gênée.

"Hum. Désolée, maître. Vous avez l'air de bien vous porter depuis le temps."

Ce disant elle enlevait les saletés qui s'étaient accrochées à la tenue de NéoLéo. La sauvageonne, c'était elle après tout.

"J'ai eu bien des peines pour vous retrouver au sein de la Garde, Maître. Votre discrétion à la vie dure apparemment !"

Elle oscillait du chef, ne pouvant s'empêcher de le dévisager sans perdre son sourire. Ah. Peut-être se rhabiller. Ese enfila la tunique qu'elle avait pris soin d'amener avec elle tantôt.

Ese penchait sa tête de gauche à droite, réfléchissant aux paroles de son maitre. Elle ne savait pas trop ce qu'il en était de ses connaissances vis à vis de lui, mais chose certaine, elle n'était plus la jeunette qui l'avait quitté. Elle avait fait des rencontres. Voyagé. Continué d'apprendre.
Au final, n'étaient-ils pas comme des étrangers aujourd'hui ?
Non.
Elle sourit. Non. Tant que des souvenirs étaient partagés, le temps passé loin de l'autre n'était pas un problème, un obstacle entre eux : que soient échangées leur expériences depuis lors et ils réapprendraient à se connaitre.

"Nous comparer est un peu puéril, Maitre, fit-elle avec un large sourire moqueur. Toutefois je ne suis pas restée sur mes acquis et ai fait ma part de découvertes..."

La lycan prit quelques secondes avant de poursuivre sur un autre sujet :

"Cela mis à part, je suis ravie que nous soyons de nouveau réunis ! Il faudrait que je perde cette habitude de vous nommer maitre devant les autres de la garde par contre, cela serait un peu étrange. NéoLéo ? Ah je ne m'y ferai pas !"

Elle qui n'aimait pas les grands discours ni même discuter longuement se voyait soudainement pleine d'inspiration : les questions s'enchainaient dans sa tête, et aussitôt l'une énoncée, une dizaine d'autres suivaient, ponctués de rires.
Ese prit un air contrit en voyant qu'elle monopolisait ainsi la parole. Alors elle jeta un regard sur les alentours avant de se retourner vers son maitre, le sourire toujours aux lèvres.

"Maitre ! Que diriez-vous de partager un repas ou simplement un verre pendant que l'on discute ? J'ai bien l'intention de connaitre votre vie en détail depuis mon départ !"

Elle trottait d'un pas énergique aux cotés de l'elfe : la lycan méditait ses derniers propos en sifflotant doucement - certains de ses aspects juvéniles étaient encore présents, apparemment.

"Et vous, vous n'avez pas pris une ride ! (Elle rit) J'aurai bien du mal à ainsi vous appeler mais je pense que ce sera pour le mieux, sans doute... Mais vous savez, cela ne change pas grand chose. Même si vous étiez mon mentor, je vous considérai déjà comme un ami."

Elle tourna la tête ce disant pour lui sourire.
Finalement, ils débouchèrent sur un petit coin de tranquillité, tables et chaises à l'appui : les alentours regorgeaient de baies comestibles et cela, ajoutés aux venaisons et autres plantes qu'elle avait apportées, feraient un petit repas consistant. Le jour était ensoleillé alors autant profiter du bon air que d'aller s'enfermer dans une taverne ou quelque restaurant. Quand la nuit tombera, ils aviseraient.

La lycan alla s'asseoir sur un banc. Attendant que son Maitre ne la rejoigne, elle sortit de sa petite besace plusieurs lamelles de viande séchées -pour elle principalement- et quelques bocaux remplis d'une sorte de gelée. Un pain aux céréales frais s'ajouta au repas de fortune.
Elle jeta un regard vers NéoLéo, complice, avant de découper de généreuses tranches.

"Tout est fait maison, vous m'en direz des nouvelles ! Oh et n'ayez crainte, mon niveau en cuisine s'est un peu amélioré depuis... cette époque."

Elle toussa en se remémorant son grand talent à rendre toute nourriture végétale impossible à digérer ni même avaler.

Ese se fendit d'un sourire victorieux, en gagnant l'approbation de son maitre : finalement, ces quelques années lui avaient au moins permis de se rendre... bonne à marier. Enfin en mettant son caractère de coté.

"J'avais perdu la recette quelques temps après vous avoir quitté. Donc il m'a fallu la refaire de mémoire et il semblerait que l'ajout d'un ingrédient qui n'y figurait pas la rendre comestible."

Elle croqua une grande bouchée de tartine, se gardant les venaisons pour plus tard. La texture gélatineuse fondait en bouche, libérant plusieurs notes sucrées. Et lorsqu'elle atteignait la gorge, elle devenait une sorte de miel légèrement douce-amère. Le pain sec rendait l'expérience gustative moins écœurante.
Elle se souvenait de cette amertume que trop forte ou encore de cet arrière goût rance...

"Baies de sureau, citronnelle, cannelle, sucre de diverses fleurs, ortie, millepertuis, camomille..."

Tandis qu'elle énonçait, une partie de ses pensées d'égaraient dans le passé, leur passé commun. Lui vint alors l'envie d'en connaitre plus sur son Maitre, lui qui semblait avoir changé...

"Dites-moi... Elle hésitait à aborder la question mais il lui fallait savoir. Vous semblez aller mieux vis à vis de votre... noirceur, me trompe-je ?"

Son regard ne quittait pas celui de NéoLéo, habitude que son coté loup lui avait laissé : les animaux jugeaient ainsi de la véracité de leur interlocuteur, de ses intentions... Car si jamais son maitre était encore sous le joug du Maudit, Ese devrait rester sur ses gardes.
La seule fois où elle avait relâché son attention, cela avait failli lui couter la vie...

"J'en ai appris un peu plus sur lui. Les druides m'avaient jeté un sort: je n'ai jamais été réellement moi-même et je me redécouvre depuis peu grâce à un ami qui a brisé ce maléfice. J'arrive a l'empêcher certaine choses lorsqu'il me contrôle..."

Ese l'observait toujours de ses prunelles claires, guettant la moindre émotion sur ce visage qu'elle connaissait si bien : ses sentiments étaient sincères et c'est seulement là qu'elle pouvait relâcher un peu de cette tension qui l'abritait. Il n'était pas guéri, mais au moins en avait-il un meilleur contrôle.
Les souvenirs de cette nuit où elle avait fait la encontre du Maudit étaient encore vifs. Elle se souvenait encore de sa peur, sa sourde terreur lorsque celui qui avait sa confiance l'avait chassée pour la tuer. Cela, elle n'en avait pas le moindre doute. En tant que chasseuse, elle savait comment réagissait une proie et elle en avait montré tous les signes ce soir là.

Suite aux événements, la lycan avait de nouveau fait face au Maudit. Mais la surprise prenant moins de place dans son esprit, elle avait à chaque fois su comment réagir au mieux, comment se protéger. Bien sûr, il avait été difficile de garder un lien affectif avec son maitre suite à ce gens de situations, mais l'elfe doux et sensible qu'elle connaissait si bien avait réussi à occuper une trop grande place dans son coeur pour qu'elle ne l'oublie du jour au lendemain. Les années s'étaient écoulées et elle avait appris à faire avec. Chacun avait ses faiblesses après tout.

"Si un jour je puis vous être d'une quelconque aide, Maitre, n'hésitez pas. Vous savez bien à quel point je vous suis dévouée... Mais je crains n'être d'un grand recours, la magie m'étant insondable..."

Elle le regarda avec un sourire doux, les yeux à la fois tristes et affecteux. Elle aimerait tant lui être utile, lui qui lui avait tant appris ! Sans ses connaissances, peut-être ne serait-elle là aujourd'hui. Peut-être serait-elle morte depuis longtemps. Ou peut-être serait-elle devenue une femme au foyer, partageant son quotidien avec une ribambelle de gamins bruyants. Triste perspective.

Elle le regarda un moment puis respecta sa volonté de changer de sujet. Pour ce qui était de parler de banalités, il semblerait qu'elle s'était améliorée depuis son errance sur le continent ; elle se plia donc bon gré à cet exercice.

"Eh bien... J'ai commencé à vendre mes services ci et là, au gré de mes voyages et il semblerait que les jeunes femmes sont ma principale clientèle : mes baumes font leur effet apparemment. Autrement ma liste des plantes connue c'est un peu étoffée avec mes déambulations à l'Est et quelques discussions..
Sinon... Comme vous vous en doutez, j'ai suivi une brève formation à l'escrime et ai ainsi rejoint la Garde sans me douter que vous y seriez."

Elle lui décocha un nouveau sourire, ravie que la Fortune soit de son coté pour une fois.

HRP:

Ese lui répondit d'un autre sourire mais prit le temps de réfléchir toutefois : quelles avaient été ses vraies motivations, au final ? La jeune lycan avait rejoint la Garde presque naturellement lorsque était venu le temps de songer à un avenir plus concret. En soi, que pouvait-elle faire, sinon rejoindre les elfes ? Les lycans n'avaient de faction propre à eux tant leur peuple était dispersé. De plus... Elle n'avait pas un instant envisagé de rejoindre Kastallin ou un autre corps armé. C'est ici, à Endorial, qu'elle avait passé le plus de temps et où ses souvenirs étaient les plus vifs, les plus importants.

"A vrai dire, je n'avais pas tant de choix que cela. Les elfes ont accepté qu'une jeune lycanthrope errante profite de leur hospitalité pendant plus de deux ans. C'est sans doute le seul endroit où je me suis sentie chez moi..."

Vint ensuite la question des armes. Là, la réponse lui paraissait plus claire.

"Prendre les armes est une autre façon d'aider les autres, du moins je le pense. Elles me permettent d'accomplir ce que les herbes ne peuvent, tout simplement."

Ese médita les dernières paroles de son ami et ancien maitre, soupesant les conséquences -bonnes comme plus contraignantes. En soi, cela ne faisait pas tant de changement à leur relation. Elle avait certes quelques familiarités à tempérer cependant, globalement, la lycan avait déjà le respect nécessaire qu'elle devrait dévouer en tant que garde, à son supérieur. Cela serait toutefois un peu étrange de ne plus être seule aux cotés de l'elfe... mais en compagnie de tout un corps armé. Boaf, elle finirait par s'y faire. Et quoi qu'il fusse, ou advienne, elle ne pourrait pas oublier ce qu'ils avaient vécu ensemble et partagé. Il faudra qu'elle pense à lui maintenant : surveiller ses gestes pour ne pas le mettre dans l'embarras...

"Je suis sûre que tout le monde s'accordera sur votre sens de l'éthique et de l'honneur, ou alors c'est qu'ils auront pas les yeux en face des bons trous."

Un silence s'ensuivit, bientôt interrompu par un toussotement gêné de la lycan. Elle avait pris la foutue habitude de lui dire tout ce qui lui passait par la tête ces derniers temps, sans se préoccuper que les autres en soient choqués. C'était avec cette franchise qu'elle arrivait à déterminer qui pouvait être digne de confiance et qui ne le pouvait : mais dans cette situation, sa vertu cardinale devenait une bien grosse épine au pied.
Elle glissa un regard à son maitre, cachant son embarras en mastiquant un morceau de venaison.

Elle restait la même, malgré tout ces années. La phrase qu'elle lui sorti était tellement franche qu'il ne put s'empêcher de sourire. Ese avait le don de réussir à le faire rire dans toute situation, cela serait peut-être gênant, si il obtenait le poste, dans certaine situation mais qu'importe. Il ressenti tout de même les légères inquiétudes de son ancienne élève, il la connaissait bien depuis le temps. Et lui dit :

- Rassures-toi il y a peu de choses qui changeront entre nous. Je ne suis pas du genre à avoir besoin de la moitié de la Garde pour me défendre, je compte bien garder mon individualité. Nous continuerons a nous voir en dehors de tout cela. Pour ce qui est de ta réplique pleine de gentillesse; évite de leur répéter.

Il se mit à rire simplement. La famille, c'était bon de la retrouver...

Elle lui accorda un sourire franc, avant de le ponctuer d'une réplique pleine de volonté :

"Oui mon capitaine !"

Ce faisant, la discussion s'allongea, essayant de rattraper ces quelques années d'absence, jusqu'à ce que le soleil n'entame sa descente ; alors la lycan se détacha de ce bon moment avec un peu de chagrin mais vite dissimulé. Peut-être l'elfe vit son regard -quoiqu'il en soit il interrompit la conversation.

"Je dois aller prendre ma relève, fit-elle simplement avant de se lever et de dégourdir ses jambes. J'y pensais. Que diriez-vous de croiser le fer un de ces jours, que ses retrouvailles soient faites en bonne et due forme ?"

Elle eut un air de défi, bien que le résultat était couru d'avance. Toutefois, elle avait rapidement ingéré l'esprit des soldats et surtout, leur coté belliqueux. Alors faire quelques passes d'armes devenait une façon de se saluer.

La journée passa très vite, les deux êtres partageant leurs souvenirs et prenant connaissent des nouveaux créés sans la présence de l'autre. L'Elfe ne prêta guère attention à la descente du soleil jusqu'à ce qu'il soit repris à l'ordre par Ese qui lui rappela qu'elle avait des choses a faire et que leur séparation était proche. Il était clair qu'il ne pouvait guère passer des jours entier en la compagnie de l'autre, puisque d'un coté l'une était Garde depuis peu avec les obligations qui lui incombait, tandis que l'autre tentait de prendre un poste important dans cette même Faction.

D'une manière ou d'une autre, il se retrouverait et une idée proposer par la Louve pouvait couvrir leurs retrouvailles ... un petit duel en tout amitié. Ainsi il pourrait voir l'évolution de son ancienne élève au combat. Elle qui avait tant de mal à se servir d'un arc avait préféré les armes au corps à corps et ce par raison. Au final, il lui répondit :

- Oui tu as tes obligations et moi aussi. Je serai heureux de voir comment tu t'en sors désormais au combat. Pourrais-je peut-être encore essayer de t'apprendre à utiliser un arc une fois cela fait.

Il lui sourit, posa un baiser sur son front et la laissa s'en aller...

Hrp: