Sortie de sa méditation d'une tape portée contre son dos, Nina s'élance au bon milieu de l'arène. Sa langue vient écraser la poche d'un bonnet de fou tout contre son palais. Un léger gaz s'extirpe d'entre ses lèvres. Le soleil aveuglant lui fait plisser les yeux, froncer les sourcils mais elle se sent apaisée, en paix, grâce au champignon. Ses yeux s'écarquillent de stupeur tandis que résonne la voix de son amie à ses oreilles. Elle, ici ?! S'agit-il d'une hallucination ou est-ce réellement Eyara ?! Nina profite de l'ombre des gradins pour mieux admirer son adversaire. Le destin est facétieux, farceur à son encontre et elle ne peut pas retenir un soupir de frustration pensant merde alors ! Elle qui espérait croiser mille et un visages au sein de cette arène n'espérait probablement pas croiser celui de la Rose du Désert ! Quels risques inconsidérables prend-elle alors qu'elle est désormais Mère-Veilleuse de deux adorables bébés ?...

Rétorquant aux propos de la rouquine, Nina lance pleine d'incompréhension :

"Je m'excuse d'avance pour tes deux poupons, chérie."

Probablement les propos picotent-ils son adversaire mais au sein de l'arène les sentiments sont délaissés au placard au profit du combat. Eyara le sait, Nina le sait, ici elles ne sont que deux guerrières acharnées et non deux amies au service de la foule qui peuple les gradins.

Reculant d'un pas, Nina attend le lancement du combat. Elle glisse doucement le plat de sa dextre contre la pierre qui orne son buste et laisse le sentiment de jalousie envers son amie l'envahir : elle pense au simple fait qu'Eyara est mère et qu'elle, Nina, ne le sera probablement jamais. La tension monte en son sein, la colère vient sournoisement se nicher au sein de ses veines. Sa tension ne fait qu'un tour. Il n'en faut guère plus pour activer sa magie. Ses beaux yeux vairons se ferment et l'instant d'après Yvan Duchitte fait son apparition en un nuage de fumée rosâtre. Nina rouvre ses yeux et fixe la silhouette longiligne de l'homme. Il est vêtu d'une robe aujourd'hui aux voilages épars et de toutes les couleurs. Deux perles nacrées viennent orner ses lobes. Une encre à lèvres rose criarde marque maladroitement sa bouche et sa barbe mal-rasée brille de mille feux. Ses cheveux subissant une calvitie foudroyante sont retenus par deux bandeaux en tissus divers ornant son crâne quasi chauve de deux couettes fines. Pour déconcentrer leur adversaire du jour, il effectue une danse : ses jambettes s'agitent en rythme et progressivement il s'accroupit. Il plante ses pouces au sein de ses joues et bat ses doigts au rythme de la musique qu'il fredonne. Sa langue se tire entre deux chants lunaires et ses yeux louchent. Soudainement, sans prévenir, Yvan bondit en avant tel un félin vers Eyara. L'invocation hurle à gorge déployée.

Monsieur Duchitte effectue quelques enjambées sans suivre la moindre ligne directrice, titubant, lui assénant un coup de pied dans les genoux. Aussitôt, il se recule et recommence à fanfaronner rendant l'atmosphère irritante pour quiconque se surprendrait à le regarder.

Nina profite de cette diversion pour dégainer son épée et visant son amie laisse la lame s'abattre à la dernière seconde à ses côtés. Il lui est trop difficile pour le moment d'attaquer la Mère qu'elle représente et son coeur se serre à cette simple idée : blesser l'une des rares personnes qui lui est encore chère.
Elle ramasse son arme qu'elle traîne dans le sable et se repositionnant elle hurle face au destin facétieux :
"Ah ! Maudit Destin !"

Son invocation s'efface en une fumée éparse et noire. Nina fronce les sourcils, contrariée, tandis qu'en arrière plan Eyara se soigne. Ses plaies se referment rapidement, une à une, laissant la jeune femme dubitative. Malheureusement pour elle, l'ex-cheffe de meute n'a pas le temps de réfléchir et ne peut pas mettre un plan d'attaque en place. Son amie, ennemie du jour, s'élance avec verve en sa direction. Nina brandit son bras devant elle pour faire barrage et les griffes de la thérianthrope s'enfoncent au travers de ses chairs.

Nina chancèle et s'écrase brutalement au sol sous son poids, dans un amas confus de poussière et de sang. Elle grogne, colérique à n'en point douter et se débat. Le sable se fait mouvant, donnant du fil à retordre à Nina qui tente de se relever vainement. Elle se débat davantage, agite un peu plus son bras et parvient in-extrémiste à se défaire de la violente étreinte. Le bras ensanglanté, Nina plisse les yeux et ramène son bras blessé tout contre elle. De sa main libre elle trouve suffisamment de force pour brandir une dague qu'elle niche à son tour dans le bras de son adversaire, dégagé de justesse.

Oeil pour oeil, dent pour dent au delà de tout sentiment. Nina utilise le talon de ses bottines pour pour se reculer dans le sable avant de parvenir douloureusement à se relever.

Eyara concède sa victoire à Nina

Nina l'observe retirer la dague pour se soigner une nouvelle fois. Le halo divin qui l'entoure se diffuse, épouse ses frusques et soigne Eyara qui ne semble même pas épuisée par toute cette magie qui gravite autour d'elle. "Merde" pensa Nina, contrariée face à la défaite qui semble lui tendre les bras. L'ex cheffe de meute se tient sur ses gardes, prête à encaisser les coups... Du moins en apparence ! Car en réalité les deux jeunes femmes chutent lourdement au sol, semblant de roulé-boulé, tohubohu incertain.

Nina-Lou-che (pardon) sur les griffes qui se dessinent juste sous son nez. C'est la fin pour elle, elle en est persuadée. Elle va être balafrée par Freddy Krueger en personne ! Ses yeux vairons se ferment, elle tente de repousser son ennemie à l'aide de son bras valide mais elle n'y parvient pas. Son coeur se resserre et le temps semble se suspendre entre elles: l'une, aux portes de blessures incertaines, l'autre aux portes d'une victoire certaine.

Doit-elle supplier Eyara ? L'idée effleure vaguement son esprit tandis que l'interrogation laisse place à la stupeur. Son adversaire se relève, fait disparaître ses invocations et se recule d'un pas afin de lui concéder la victoire. Incrédule, Nina se saisit de sa main pour se relever. Elle époussète ses vêtements avec méfiance tandis que la foule blâme violemment son adversaire.

"Merci" se contente t-elle de souffler, sincère, quittant à son tour le sable de l'arène pour trouver le réconfort des soins...


[Prime de risque pour Nina, abandon pour Eyara]