La ville de Stellaraë, improbable îlot de civilisation ancré dans le cœur même du désert, avait toujours occupé une place particulière dans le cœur de Fang. Il n'avait jamais vraiment su si c'était à cause du grand soleil qui illuminait en permanence la capitale, si loin du paysage enneigé dans lequel il avait grandit ; ou bien à cause du mélange racial. Le jeune homme n'avait que peu côtoyé d'autres membres de son espèce, et pour la grande majorité il les avait rencontré ici même. Son voyage jusqu'à la capitale depuis la Red Sun Belt avait été motivé par le besoin de plus en plus pressant de s'acheter un équipement décent.

Ayant perdu la majorité de ses possessions au jeu après une soirée particulièrement arrosée - et s'étant fait voler le reste la nuit même alors qu'il dessoûlait dans une ruelle - Fang n'avait pour ainsi dire plus grand chose. Fort heureusement, il avait facilement trouvé une boutique d'armes et d'armures qui, sans sembler posséder de quoi satisfaire un prince, possédait une devanture propre et rangée. En pénétrant à l'intérieur, le jeune loup se rendit immédiatement compte qu'il se trouvait en réalité dans une armurerie. Un homme apparut à son entrée de derrière le comptoir, le renseignant sur ses marchandises. Bien vite Fang arrêta son choix sur une armure qu'il revêtit sans attendre ainsi qu'une épée qu'il passa à son dos. Profitant de son inattention momentanée, Clochette avait décidé de sauter sur une étagère, sinuant entre les armes à l'air mortellement aiguisées.

- Dites donc, surveillez un peu vot' bestiole là !

- Ce chat n'est pas à moi,  répondit Fang sans même lever le regard des pièces d'or qu'il était en train de compter.

Une fois le compte exact en main, le jeune homme déposa l'argent sur le comptoir, ignorant royalement le regard courroucé du gérant sur la minette. Un bruit feutré attira cependant son attention et le jeune loup leva les yeux à l'instant même où Clochette disparaissait dans l'arrière boutique. Poussant un juron, il fit un pas involontaire dans sa direction avant de la siffler.

- Je croyais que cette bestiole ne vous appartenait pas, remarqua l'homme derrière le comptoir en empochant les pièces.  

Ignorant le sarcasme, le jeune homme se rua sans sommation à la suite de la minette, craignant la présence d'un chien dans l'arrière boutique.

HRP:

On pouvait dire tout ce que l'on voulait sur Stellaraë, mais il y faisait beau ! Ou en tout cas plus beau qu'à Kastalinn, la ville dont était originaire Ka-In.
Aujourd'hui était un jour spécial, c'était la première fois qu'elle pouvait sortir de l'atelier de forge depuis au moins 3 semaines. Et Ka-In en avait profité pour aller acheter des minerai de très bonne qualité qu'elle transportait maintenant das un petit sac en toile accroché à sa ceinture.
Elle avait changé, elle l'avait ressenti auparavant déjà, mais elle ne pouvait pas s'empêcher de se le rappeler intérieurement. Elle avait changé, et pour le mieux pensait-elle. Après une bonne matinée d’emplette, la jeune femme s'apprêtait à rentrer quand elle sentit une odeur familière.
Elle avait déjà senti cette odeur de nombreuses fois depuis qu'elle était arrivée dans la ville. C'était un doux parfum semblable à celui de sa Déesse, Sylissa ! Ce devait être une coïncidence ! Et si après tout, Syliss était enfin revenue dans la ville?

Ka-In avait perdu sa trace dans le désert, lorsqu'elle avait tenté de suivre la jeune rouquine il y a de cela des semaines. Elle pensait ne jamais pouvoir la revoir, ne jamais plus pouvoir revoir ses longs cheveux rouges, ni sa dense fourrure lorsqu'elle se transformait ! Et maintenant, l'apprentie forgeronne parvenait à déceler une senteur terriblement proche de celle de sa Déesse ! Cette odeur semblait filer directement vers le quartier des forgerons !

In se précipitait vers le boutique d'où émanait le parfum, avec le cœur gonflé, la respiration haletante. Elle allait enfin retrouver sa Déesse ! Il était temps, elle lui avait tellement manqué !
Un coup de pied bien placé ouvra, pratiquement en la faisant sortir de ces gongs, la porte d'un seul coup. Ka-In sauta à l'intérieur de l'armurerie, dans lequel ne se trouvait que le gérant, un type du nom de Blortz , et une autre silhouette, celle d'un jeune homme tournant le dos à la jeune femme.

"Nan mais ça va pas la tête non ! Sale peste, tu vas me casser ma porte !" s'écria Blortz en commençant à s'exciter et à rougir comme une tomate.
"C'est bon Blortzzzzzzzzzzzz, ta porte cassera pas, j'connais l'type qu'a fait les gongs d'ssus ! Bon, alors, t'aurais pas vu une b'lle rousse entrer ici aujourd'hui dis voir?
-Oh nan ! Pas toi, si tu me casses encore un objet, je te jure que ton Maitre va te tirer les oreilles, fais moi confiance !"

L'odeur était partout autour de Ka-In, Sylissa devait être très proche, mais les seules êtres vivants dans la boutique n'étaient que ce bon vieux Blortz et l'autre type de dos qui se dirigeait vers une des portes intérieur de l'endroit.
Un flash retentit dans l'esprit de la forgeronne, elle avait déjà ressenti cela ! Est-ce que ça pouvait être.....?

Quant Fang pénétra dans l'arrière boutique, Clochette n'était visible nulle part. Bien moins ordonnée que la boutique, la pièce était encombrée de différentes armes et armures plus ou moins achevées. Si la minette avait décidé qu'elle ne se montrerait pas, le jeune loup n'avait aucun doute sur le fait qu'il ne la retrouverait pas. Un juron fort peu élégant lui échappa. Du bruit retentit soudain dans son dos, accompagné de voix. Au moment où Fang se retournait pour faire face à la porte par laquelle il venait d'entrer, un jeune garçon surgit dans la pièce.  

Non, pas un garçon, une fille se reprit Fang lorsque l'odeur de l'inconnue atteignit son odorat. Ses cheveux courts d'un noir de jais tranchant avec sa peau d'un blanc laiteux lui donnaient un air presque sauvage, impression renforcée par son entrée quelque peu cavalière dans la pièce. Mais le principal dans tout cela, s'était ces grand yeux noirs qui le dévisageaient de façon éhontée. Il était difficile de lire les émotions de la jeune fille, et Fang cru discerner à la fois de l'espoir et de la surprise.

-Hem... bonjour Miss., salua maladroitement le jeune homme.

Alors que le jeune loup s’apprêtait à demander si il avait un truc sur le visage pour qu'elle le dévisage de la sorte, un grondemment sourd et continue dans son dos attira son attention. Là, bien campée sur une étagère, se trouvait Clochette, positivement affairée à se frotter contre une choppe en bois. Suspectant soudain la raison du comportement de la petite féline, Fang plissa légèrement le nez, regrettant son odorat plus développé quand il revêtait sa forme de loup. Du bois d'olivier. Evidemment, il aurait du y penser avant ! Pour une raison inconnue, la minette devenait dingue dès qu'elle sentait cette odeur. Soupirant, le jeune homme ramassa Clochette en la soulevant sous les pattes avant, la tenant à hauteur de son visage.

- Arrêtes un peu de disparaître comme ça tout le temps ! Ce ne sera pas mon problème si un chien te mange un jour.

Clochette répondit par un simple miaulement avant de sauter promptement sur l'épaule de Fang qui soupira avant de se tourner de nouveau vers la jeune fille.

- Désolé, elle n'en fait qu'à sa tête. Je peux t'aider petite ?

Un spectacle déroutant se passait devant les yeux grands ouverts de Ka-In. Le jeune homme en face de l'apprentie forgeronne se retourna et afficha un petit sourire en coin. Ka-In ne pouvait s'empêcher de le fixer dans les yeux, il possédait une aura apaisante, de bien-être.
Reniflant légèrement, la jeune fille conclût qu'elle avait bel et bien affaire à un des congénères de Sylissa. Un loup-Garou. Était-ce possible qu'il puisse connaitre sa Déesse adorée? Au moment où l'adolescente allait s'exprimer, le jeune homme s'exclama d'une voix au timbre doux :

"Hem... Bonjour Miss." puis après s'est tourné en direction de son chat "Arrête un peu de disparaître comme ça tout le temps ! Ce ne sera pas mon problème si un chien te mange un jour... Désolé, elle n'en fait qu'à sa tête. Je peux t'aider petite?

Ka-In se mit à froncer les sourcils, ce n'était pas méchant, mais le ton de condescendance qu'avait employé le canidé ne plaisait pas du tout à la jeune femme. Elle mit la main sous sa chemise pour faire glisser la dague qu'elle cachait là. Puis se secoua la tête violemment, l'apprentie forgeronne avait changé depuis ce temps où elle se considérait encore comme apprentie assassin. De l'eau avait coulé sous les ponts, et elle avait enfin réussi à se faire une place parmi des gens possédant un cœur bon. Elle n'allait sûrement pas tout foutre en l'air parce que quelqu'un n'avait pas utilisé les bons mots pou s’adresser à elle.
Ka-In lâcha prise sur le manche de sa dague et posa le sac, qui contenait les minerais de fer, à terre.

"Si tu cherches les ennuis mon p'tit gars, tu les as trouvé ! Évite de m'appeler "petite" si tu ne veux pas que je te scalpe ta fourrure, Loup. déclara In d'un ton calme. Blortz en profita pour rétorquer en se frottant la main sur la tête :
"Monsieur, ne l'écoutez pas. Ce n'est que de la racaille qui essaye de se faire passer pour forgeron ! Hey toi, dégage de ma boutique ! File tout de suite !
-Je m'casse okay, mais d'abord je dois d'mander un truc à l'autre Loup là. Hey toi, est-ce que tu connais une rousse qui s'appellerait 'Sylissa'? C'est pour ainsi dire une de tes "sœurs" si tu vois ce que je veux dire.

Un silence étrange s'abattit dans la salle, au point où même le chat s'était arrêté de miauler d'un coup. Que se passait-il? Le jeune loup se demandait-il comment Ka-In avait pu le reconnaître pour ce qu'il était ou réfléchissait-il à la réponse qu'il devait donner devant toute la situation?
La jeune femme avait dans l'espoir que ce nouvel inconnu puisse la mener jusqu'à sa Déesse pour qu'elle puisse à nouveau dormir dans ses bras.

- Si tu cherches les ennuis mon p'tit gars, tu les as trouvé ! Évite de m'appeler "petite" si tu ne veux pas que je te scalpe ta fourrure, Loup.

La réplique calme de la jeune fille surprit Fang - comment avait-elle pu deviner sa nature lupine ? Le jeune homme ouvrit légèrement la bouche pour humer de nouveau son odeur, vérifiant qu'il n'avait pas affaire à quelqu'un de son espèce. Mais non, la jeune fille à l'allure garçonne était bien une humaine. Cette conclusion atteinte, Fang sentit immédiatement sa curiosité être piquée, et il observa l'inconnue plus attentivement tendis que le marchand bredouillait une excuse qu'il ne prit pas la peine d'écouter.

Elle avait quelque chose de fier et intrépide - quelque chose du nord.  

- Je m'casse okay, déclara soudain la jeune fille, mais d'abord je dois d'mander un truc à l'autre Loup là.

Allons bon, il allait falloir qu'elle perde cette habitude de l'appeler ainsi. Tout le monde ne portait pas les changeurs de peau de leurs cœurs, et lui tenait assez à la sienne.

- Hey toi, continua la fille du nord,  est-ce que tu connais une rousse qui s'appellerait 'Sylissa'? C'est pour ainsi dire une de tes "sœurs" si tu vois ce que je veux dire.

Voilà qui était déjà plus discret. Mais une arrière boutique n'était pas l'endroit idéal pour faire la conversation. Le silence s'étira tendis que Fang regardait la jeune fille avec intérêt, une foule de questions et de réponses se bousculant dans sa tête - le nom évoqué ne lui disait rien, mais après tout il n’avait pas grandit parmi les siens. Quand il ouvrit enfin la bouche, les mots sortirent sans qu'il ne prenne le temps d'y réfléchir.

- Tu es du nord.

Hem ouais bon, ce n'était peut être pas la chose la plus importante pour le moment. Fang avait tout le temps d'être nostalgique plus tard, pour le moment il devait délocaliser cette conversion. Secouant la tête pour se remettre les idées en place, le jeune homme décida de commencer par les bases.

- Je suis Fang. Je répondrais à toutes tes questions avec joie une fois que j'aurais une bonne bière sous le nez.

Bon une taverne n'était peut être pas le mieux question discrétion, mais qu'il soit damné si il ne saisissait pas une occasion de boire un coup. En plus d'après ses souvenirs la serveuse de la taverne au coin de la rue n'était pas mal du tout. Il s'avança vers la porte, et donc la jeune inconnue - qui avait une attitude défensive. Penchant légèrement la tête sur le côté, Fang lui sourit avec calme.

- Ne t'inquiète pas, je t'invite. Il y a une taverne au coin de la rue.