Doebroksh regarda passer l'escadrille volante au-dessus des toits de Kastalinn, grognant d’agacement. D'abord des poules géantes qui semaient le chaos, terrorisaient les villageois et détruisaient des habitations. Ensuite... ça. Un tintamarre de cloches ailées venant troubler la tranquilité de la cité. Au moins, il n'y avait cette fois pas de destruction. Mais cela ne retirait rien au caractère agaçant de cette manifestation farfelue. Il n'en avait aucune preuve, mais cela portait la signature du vieil enchanteur.

Qu'il se terre à son académie chez les elfes, à son campement d'enfants jouant à la guerre aux portes de la perracie ou son trou sous Spelunca. Il trouverait ce vieil insouciant et lui ferait comprendre qu'avec les dons qu'il possédait, les Duralassiens attendaient davantage de lui que semer la panique et la destruction avec désinvolture.

Comme pour confirmer ses sombres pensées, un projectile vint brusquement s'écraser à ses sabots. Puis un autre, sur la toiture d'en face et encore un sur un étal proche des écuries qu'il approchait. Des projectiles à l'odeur sucrée... du chocolat. Les aberrations volantes balançaient du chocolat sur la ville. Elles faisaient pleuvoir des confiseries en forme œufs, brisant au passage des vitres et souillant les bacs de légumes comme tas de foin. Une fois encore, Pâques était synonyme de tourments.

Un cri de panique alerta le minotaure s'étant reculé à l’abri d'un auvent. Les écuries. Son attelage. Son sang ne faisant qu'un tour, il se précipita malgré l'averse sucrée. Ses lapins d'Âran paniquaient, habitués à le tirer en traineau à travers les plaines mais pas à se faire canarder depuis les cieux. Grondant en entrant dans l'établissement, il arracha leurs rênes à un palefrenier dépassé puis ramena le calme avec autorité. Rassurés par cette présence familière, les animaux retrouvèrent vite leur calme malgré les échos sur la toiture.

- Où qu'elles s'en vont ces cloches ? s'écria l'un des palefrenier depuis l'entrée, les suivant du regard comme enfin elles semblaient partir à tire d'ailes. Tu crois que, comme avec les arcs-en-ciel, elles volent vers un trésor ?
- T'en fait un beau de trésor toi, répliqua son collègue avec amertume, lorgnant la cours de son écurie jonchée de chocolat...

J'avais vu les cloches volantes et leurs projectiles cacaotesques, je tentais par tous les moyens de les rattraper sur le dos de la louve. Nous volions à tire d'aile au-dessus de Kastalinn.

"Mais c'est pas vrai ! Elles vont beaucoup trop vite ! Quel gâchis que de gaspiller ce doux chocolat !"

Mon filet à la main, nous continuâmes de les suivre.
Juste une, seulement une seule cloche et nous serions comblées ! "Venez admirer notre cloche ensorcelée ! Elle sonne toutes les heures et pond de délicieux œufs en chocolat. Venez les goûter, c'est cinquante pièces d'or chacun !" Des roses, des bleus, des verts ou encore des jaunes, ils étaient multicolores. Quelle aubaine pour le cirque.
Un bouclier de brume au-dessus de ma tête me protégeait des projectiles, je pouvais le sentir résister à chaque coup.
Notre course nous mena dans toute la ville, je pus voir en contrebas un ami que je fus heureuse d'apercevoir.

"Tout va bien ! Je gère complètement la situation, Doe !" Deux secondes plus tard un œuf faillit s'écraser sur le museau de Lune, une pirouette aérienne lui permit d'esquiver l'attaque, me désarçonnant presque. Oui, gérer, c'est le mot.

Insufflant plus de magie dans les ailes de mon âme, je lui fis prendre de la vitesse. "Là, c'est le moment !" On se rapprocha à une vitesse fulgurante d'une cloche isolé, plus petite que ses consœurs, elle volait moins vite. Je lançai mon filet et paniquée, la cloche se mit à zigzaguer dans tous les sens mais après plusieurs minutes de lutte acharnée, on réussit à se poser. Elle sonnait de consternation et ses sœurs cloches me foncèrent dessus pour la libérer. "OH... OH... C'est le moment de courir..." Elles n'avaient pas l'air très contentent. Le chocolat fusait dans tous les sens...

Lune me suivait en galopant. "Tu dois la libérer ou ces cloches vont nous réduire en poire au chocolat !
-Non ! Lui répondis-je, on doit la ramener au cirque ! J'adore le chocolaaaaAAAAAHHH" Mes mots se finir en cris alors que j'essuyais une pluie d'œuf, mon bouclier c'était brisé et me voilà recouverte de ce délicieux cacao.

-Mais tu n'as même pas le droit d'en manger !"

Je bougonnais en luttant contre les méchantes cloches, serrant la mienne fort contre ma poitrine... Puis au bout d'un moment j'entendis un "POUF" Magique, toutes les cloches disparurent d'un coup d'un seul dans des nuages de poussière colorés. A leur place apparurent de simple œufs de pâque.
Les cloches réapparurent dans le ciel, volant vers d'autres cieux.

"Je crois qu'on ne peut pas les attraper..." En ai-je conclu.