Ces vastes plaines sous le regard attendri du soleil, chargeant chaque parcelle de terre de sa bonne humeur et de son enthousiasme, ces chemins de verdures ou les fleurs sont légions et les bosquet discret. Je n’avais encore jamais eu l’occasion de les voir de mes yeux, ces pâturages ancestraux gardienne du grand nord. Jusqu’à lors, je n’en avais entendu parler que dans les bibliothèques des grandes cités ou bien dans les récits incroyables des aventuriers du continent lors de leur halte dans les tavernes et les auberges. Je me laissais facilement prendre au jeu à les écouter et à imaginer ce dont il parle si bien qu’aujourd’hui, je pouvais me promener au milieu de ces plaines. Lou à mes côtés, nous ne serions pas trop de deux pour explorer cette région où il à l’air de faire bon vivre.

Depuis que le climat s’était adouci, je n’avais pas cessé de me pencher sur la végétation et la faune locale. La chasse y était plutôt facile et les proies ne manquaient pas, de même que je pus faire le plein de plante médicinal et curative dont je pourrai faire usage plus tard, je n’en doutais pas. Explorer et découvrir était quelque chose qui s’était ancré en moi au fil de mes propres aventures, il n’y avait rien qui me pouvait plus me satisfaire que d’apprendre de nouvelles choses et de contempler la beauté du monde avec mes propres yeux et non en imaginant ce dont à quoi cela devrait ressembler. Maintenant que je m’étais rendu sur ces terres, touchant bientôt à la fin de mon immense périple, il ne tenait qu’à moi dans découvrir les mystères et les légendes qui y sont cachés. J’avais d’ailleurs d’ors et déjà mon objectif fixé en foulant ces terres, avides de découvertes : Je souhaitais voir de mes yeux un Daim ancestral. Un animal symbolique aux yeux des Kastalinnois et des chasseurs des environs. On dit de sa viande qu’elle est si tendre qu’elle fond littéralement sur la langue et ensorcèle notre goût. On dit de ses bois qu’ils sont si solides qu’ils peuvent déraciner un arbre et fendre la roche. Il ne restait donc plus qu’à vérifier les dires et racontar de tous ces aventuriers ayant fait escales dans les mêmes enseignes que moi pour me faire rêver.

Mais pour pouvoir atteindre mon objectif, encore fallait-il que j’obtienne une piste quand à leur existence. Cela faisait maintenant plusieurs jours que j’avais quitté le désert d’Harena pour poursuivre mon aventure sur ces plaines, mais je n’avais encore croisé que de petite bourgade dans lesquels je ne m’attardais que très peu, n’ayant pas les informations désirés. Je ne désirais pas perdre plus de temps encore alors que je m’apprêtais à rentrer chez moi. Cela dit, je fus plutôt content de découvrir les céréales cultivés par les paysans ici. Mère nature veillait au grain ici, le sol y était fertile et les champs de céréales s’étalaient jusqu’à l’horizon et par delà les plaines. Un spectacle plutôt agréable à contemplé lorsque ce tableau est agrémenté d’un couché de soleil orangé. On ne pouvait rêver de meilleur endroit pour vivre et prospérer, choix qu’avaient fait les Hommes de ces plaines pour construire Kastalinn et ses champs divers.

C’est d’ailleurs en passant devant l’un de ces champs que mes yeux s’écarquillèrent. Le champ que j’avais devant moi avait été partiellement ravagé et piétiné, le pauvre paysan propriétaire du terrain ramassait les cultures battus et les chargeait dans une brouette, la mine renfrognée. Ce n’était peut-être pas le moment de lui demander ce qui s’était passé pensais-je, le bonhomme n’avait pas l’air commode et lui rappeler ce qu’il s’était passé ici n’allait pas l’aider dans la réparation de son champ. Je m’approchais donc silencieusement jusqu’à deviné, sur le sol battu, des empruntes. Les traces étaient brouillés, certainement par ce que l’endroit avait été volontairement piétiné, mais l’on pouvait deviner les contours d’un sabot. A juger par l’ampleur des dégâts, un seul animal n’avait pas pu faire autant de ravage, il devait donc s’agir d’un troupeau. Les empruntes de sabot étaient assez frêles et longiligne, rappelant celle des Cerfs d’Endorial. Par ailleurs, l’absence d’empreinte en-dessous des sabots indique qu’il ne s’agit pas d’un sanglier comme j’en ai souvent vu dans les environs. Il devait donc plutôt s’agir d’un animal proche du Cerf, car je voyais mal un cerf s’attaquer à la culture d’habitant, ils sont bien trop peureux pour oser s’aventurer hors des forêts et des plaines qui leur appartienne. Et venir ici juste pour détruire les récoltes, c’est quand même bien étrange.

Les empreintes, après avoir quitté les champs, semblaient s’harmoniser et se diriger vers les bois aux alentours. La forêt n’étant pas bien grande ici, la horde qui a déferlé ici s’est enfui par les bois pour échapper aux traqueurs qui les poursuivaient ou les poursuivraient. Faisant parti de la deuxième catégorie, j’avais déjà un certain retard, mais ma curiosité me poussais à allé de l’avant et à enquêter un peu plus sur le sujet. Le vieillard avait remarqué ma présence et me fixait du palier de sa porte d’un air mauvais. Bien qu’il ne soit pas dans mon champ de vision, je pouvais sentir son regard peser sur mes épaules. Je n’étais clairement pas le bien venu, autant poursuivre ma traque…

C’est ainsi que je pénétrais dans les bois environnants, sur la trace de la horde de cervidés qui a déferlée récemment dans les champs des environs. Qui sait quelle surprise je découvrirais en m’enfonçant un peu plus dans les bois ?

Au beau milieu des bois, un petit chemin de terre fraîchement retourné s’était dessiné. Tout autour, nombreuses branches cassées et fleurs piétinées sans scrupule par les coupables venu en nombre. Les pins et frênes de ces bois murmuraient leur colère quand à cet affront commis sous leur nez. Deux corbeaux m’espionnaient du coin de l’œil, attendant patiemment l’instant où je les quitterais des yeux pour croasser sinistrement. La forêt était devenu bien plus silencieuse que d’ordinaire elle ne devrait l’être, beaucoup moins accueillante. Loup continuait sur sa piste, flairant le sol devant un léger croisement. Plusieurs odeurs s’étaient entremêlées ici, mais celle des cervidés étouffait tous les autres. Loup, lui, s’était arrêté un instant pour revoir l’itinéraire puis, grogna quelques instants en me tirant vers le bas par la main.

Loup - Rrôôa woof

Effectivement, en me penchant sur le sol et en passant ma main de ce côté-ci du sol, je parvenais décrire la semelle d’une botte. Et en prenant un peu plus de recul, je pus décrire l’autre moitié de la paire et ainsi retracer son parcours prudent et lourd. Il était temps que je mette à profits mes talents de chasseur, nous étions dorénavant sur une piste multiple. Je pris tout d’abord un temps pour réfléchir à tout ceci avant de m’aventurer davantage dans les bois. Qui sait sur quelle surprise j’allais tomber. J’allais donc commencer par émettre mes hypothèses sur ce que j’avais en ma possession. Les cultures locales avaient étés dévastées par un mal inconnus. Je n’avais pus tirer aucune infos de ces derniers au vu de leur mauvaise humeur, mais les cultures avaient été piétinées par une horde animal. Les empruntes découverte ressemblait étrangement à celle des cerfs, cela voudrait donc dire qu’il s’agissait d’une famille s’y rapprochant beaucoup plus hostile à l’homme que les cerfs.

Plus j’y pensais et moins cela me paraissait viable. Ces derniers sont de natures peureuse et fuient l’homme et les autres humanoïdes du continent, mis à part les Elfes et certains Therians de manière naturelle. Les empruntes se sont naturellement harmonisées avant de se rendre en masse dans les bois, comme si ces animaux étaient tous parfaitement synchronisés. Ce détail m’avait fait réfléchir, mais jusqu’à maintenant je n’avais pas eu assez d’information pour expliquer ce phénomène plutôt étrange. Les empruntes de bottes retrouvées ne m’inspirait pas plus confiance et selon Loup, elles avaient suivis exactement le même itinéraire que le troupeau, cependant les empruntes semblaient plus fraîche que ceux laissés par le troupeau. Après, il était difficile d’en juger pour le moment, le sol étant plus ou moins retournés, l’herbe avait presque disparus par endroit. Je pouvais donc admettre dorénavant que le troupeau aurait pus être contrôlé par un ou plusieurs individus, ce qui expliquerait le comportement bien singulier de la horde de cerf. Ceci dit, la vitesse de progression du troupeau et celle de l'inconnu n’était pas la même, ce dernier prenait son temps et s’avançait prudemment contrairement au troupeau enragé qui n’avait pas hésité à tout détruire sur leur passage.

Je continuais à progresser prudemment, suivant les pas silencieux de loup qui me guidait dans ces bois. Et lorsque j’entrevis l’autre côté de la forêt, je pressais légèrement le dos de loup afin de le coucher légèrement et l’empêcher d’avancer encore. Bien que je n’avais pas l’odorat aussi faim que celui de Loup, je parvenais à sentir un individu non loin d’ici. Aucune hostilité ne s’en dégageait, nous n’avions pas encore été détectés, cela dit l’aura de l'individu semblait plutôt agréable et chaleureuse. Hésitant, je repensais à Cylicia et notre aventure dans la savane afin de me redonner courage pour faire face à l’adversité, si adversité il y a. Ainsi, je relâchais la fourrure de Loup et lui grogna de rester derrière moi et de rester tranquille. Il avait deviné mon inquiétude, mais il me faisait également confiance si bien qu’il pouvait avancer à l’aveuglette s’il le voulait tout en suivant mes ordres. Tout comme l’inverse m’avait déjà tiré d’affaire plus d’une fois. Les rayons du soleil entament seulement sa descente éclairaient les ombres de ces bois et finis par nous atteindre, les laissant nous guider hors de l’obscurité et nous révélé au grand jour.

Les plaines s’étendaient à pertes de vue, garnie de fleurs, de buissons et de cultures, l’on retrouvait enfin ce paysage agréable qu’était celui des plaines d’Àran. Les empruntes continuaient jusqu’en contrebas de ces dernières, disparaissant dans la légère brume qui s’y était établit. Sur l’Horizon, l’on pouvait deviner quelques cultures similaires à celle croisée tout à l’heure et, de la même façon que ces dernières, avec quelques parcelles manquantes sur le tableau que nous avions devant nous. Il y résidait une certaine logique trompeuse, une énigme attendait d’être résolu. A ma droite, allongé au pied d’un arbre, un vieil homme, dont le crin s’était éclairci avec le temps, se reposait paisiblement. Insouciant ou réfléchi, il n’afficha aucune hostilité lorsqu’il me vit sortir de la forêt. A le regarder, il ne m’avait pas vraiment l’air malintentionné, mais par prudence je préférais lui demander moi-même.

Lonann Alhazred – Heu … Je m’appelle Lonann. Vous savez quelques choses sur ces empruntes et sur ce qui est arrivé aux cultures locales ?

Sans réfléchir, je m’étais tout bonnement présenté et lui avait demandé simplement ce que je faisais ici. Mais par respect, je me suis habitué à me présenter avant de demander quelque chose à un inconnu. Les Habitudes sont tenaces et la vérité difficile à cacher … Qu’en est-il de ce visiteur ? Loup à mes côtés, peut-être qu’il réussirait à l'intimidé ne serais ce qu’un peu pour m’éclairer sur ce qui se passe ici.

Notre venue n’avait pas eu l’air de perturber l’atmosphère apaisante autour du vieil homme, ce dernier s’était tout naturellement relevé et assis contre l’arbre derrière lui afin de m’accorder un peu plus d’attention, par respect sûrement. Sans pouvoir l’expliquer, l’aura entourant ce monsieur semblait à la fois rassurante et écrasante malgré le sourire sincère de celui-ci. Equipé comme s’il allait combattre dans une bataille, je parvins à m’expliquer la raison pour laquelle j’avais pus retrouver ses traces de pas que j’avais décrites comme lourdes et prudentes. Cet homme devait posséder une certaine force et une détermination peu commune pour porter ce genre d’habit plutôt lourd, même au repos, enfin c’est ce qu’il me semblait qu’il faisait à le voir ainsi. Tout d’un coup, il se mit à pointer du doigt l’horizon, en contrebas de la vallée où l’on pouvait deviner les traits particuliers des ramures de cerf, s’agitant et claquant entre eux sous de petits éclats.

Greil – J'ai été mandaté par un de ces fermiers pour le découvrir et résoudre ce problème. D'après celui-ci, ce sont ces paisibles daims là-bas qui auraient détruit son champ pendant la nuit. Ils seraient guidés par une force supérieure avec l'obscurité, force qui les oblige à agir ainsi. Le fermier, un peu aviné, avait parlé de Dova'Örss, mais je n'y crois que très peu.

Cet homme à la chevelure soignée et grisonnante serait donc une sorte de soldat agissant sous mandat ? Il serait donc un factionnaire ? Travaillant pour la cité du Nord peut-être … A l’entendre parler aussi sérieusement, j’avais l’impression d’entendre un rapport guerrier. J’avais le sentiment de pouvoir lui faire confiance en ce qui concernait le problème des cultures et de la faune locale. Jusqu’à maintenant, son récit concordait à peu de chose près à ce dont j’avais pensé de cette histoire, outre la présence du cheval légendaire qu’il avait cité. Moi-même, je trouvais cela étrange et insensé. Le peu que je connaissais de cette légende est qu’il s’agissait d’un cheval cornu plus grand et fort que ses compères, il y avait donc peu de chance de le trouver parmi les cervidés en bas. Pourtant, une chose était sûr, il y avait bien quelque chose ou quelqu’un derrière tout ceci et ce vieil homme en était venu à la même conclusion. Ce dernier se releva lentement en s’appuyant à l’arbre puis, il vint me rejoindre d’un air souriant. Loup, toujours derrière moi, ne quittait pas la main que me tendait le vieil homme. Attendent très certainement ma réaction pour agir et lui mordre le bras.

Greil - Je manque à tous mes devoirs. Mon nom est Greil Dalen. Je suis enchanté de te rencontrer Lonann. Et toi donc, pourquoi t'intéresses-tu au sort des cultures locales ?

Lonann – Lui renvoyant son sourire avant de lâcher un petit « Enchanté également » assez bref, je tournais mon regard vers l’horizon et son couché de soleil sur sa question. Et bien … je n’ai pas de raison particulière si ce n’est ma curiosité, mais si je peux vous êtres utiles pour quoique ce soit, je serai ravi de …

Le vieil homme me coupa d’un mouvement des bras, m’incitant à me baisser et ne plus faire de bruit. Loup me grognait qu’il fallait partir d’ici au plus vite, répétant à chacune de ses phrases « Danger ». Ce jappement qu’il avait si souvent prononcé lorsque je me retrouvais dans le pétrin, signifiant une tempête toute proche. J’avais perçut un léger changement au niveau de l’atmosphère, devenu plus tendue et électrique. C’est comme si le magnifique tableau que nous avions eu jusqu’à maintenant n’était en fait qu’un leurre, dissimulant une bien plus sombre vérité. Les ombres s’élargissaient et recouvraient de plus en plus ces terres maintenant recouvertes d’une légère brume laiteuse. La brume elle-même s’intensifiait, nous faisant parvenir uniquement le claquement des bois des jeunes mâles s’énervant les uns les autres, un peu plus fort et intense à chaque claquement. Sur le ton de l’inquiétude, Greil ne quittait pas des yeux le troupeau que l’on voyait au loin avant que la brume ne recouvre les environs et se questionna sur la situation étrange dont nous étions témoins. Dorénavant, je pouvais ressentir l’hostilité grandissante du troupeau dont nous avais parlé Greil. L’ambiance s’était refroidis et les bois derrière nous n’avaient plus rien d’avenant, le brouillard s’étant levé jusqu’au cœur de ce dernier.

Lonann Alhazred – Ne traînons pas ici … chuchotais-je doucement … Nous ne sommes plus les bienvenus dans ces bois et devant nous, le troupeau semble s’agiter de plus en plus …

Même si cela pouvait paraître insensé pour certain, la petite forêt que nous avions traversés pour venir ici avait souffert du passage chaotique du troupeau, encore guidé par la rage qui l’animait. Bien que l’on y pense que très peu, ces forêts sont également l’habitat de la faune et de la flore, êtres tout aussi important que les civilisations intelligentes que nous connaissons aujourd’hui. Tous les arbres derrières nous étaient effrayés à l’idée de devoir subir à nouveau le courroux de ces sauvages. Plus aucun oiseau ne se manifestait dans les branchages de ces derniers, seules les tristes plaintes de ces bois me parvenaient.

Lonann Alhazred – il faudrait amener le troupeau vers un endroit dégagé et en hauteur si nous ne voulons pas être empalés dans la brume. Les animaux ont un instinct leur permettant de se diriger malgré la brume.

Je n’avais absolument aucune idée de comment je pouvais aider au mieux ce Greil. La situation n’était pas vraiment en notre faveur et le temps devait certainement presser. Il valait mieux agir avant que le troupeau ne se manifeste, ce dernier pouvait très bien partir ravager d’autres cultures un peu plus loin comme revenir sur leur pas pour finir leur travail, auquel cas il tomberait nez-à-nez avec nous. Plus le soleil se cachait derrière les vallées d’Àran et plus le brouillard nous empêchait de voir plus loin, comme si la brume opérait de concert avec le troupeau. Tout ceci n’avait vraiment rien de normal ! Alors que je continuais à réfléchir sur la situation dans laquelle nous étions, Loup intervint pour me sortir de ces tracas, mordant fermement ma main et en la tirant vers lui, comme s’il voulait que je le suive. Loup avait peut-être raison, l’instinct animal avait ses raisons que l’homme ne pouvait comprendre.

Lonann Alhazred – Greil, suivez moi ! Il ne faut pas rester ici !

J’avais presque oublié que Loup n’avait pas arrêté de dire qu’il y avait danger depuis tout à l’heure. L’ombre qui rôdait autour nous, le mal qui nous surplombait était peut-être bien plus proche qu’on ne le pensait … difficile à dire avec ce brouillard devenu aussi épais qu’un nuage. J’espérais, certainement tout autant que Greil, que Loup ne nous attirait pas plus d’ennuis que nous en avions déjà … qu’il nous sorte de ce mauvais pas … Nous continuâmes donc notre course à l’orée de la forêt, longeant cette dernière vers l’on ne sait quel destination à cause de ce brouillard à couper au couteau, tel les légendes le décrivait lors des manifestations de Döva’Ôrss …

Loup parvint à nous attirer, à la hâte, dans un renfoncement au bord de la forêt, nous permettant de passer inaperçu aux yeux des Daims enragés qui affluèrent avec ardeur vers les cultures non loin de là, passant près de nous dans un tonnerre de piétinement. J’en avais presque la sensation que la terre grondait tant le nombre de daim était élevé et leur galop harmonisé. De plus, la brume semblait les suivre au fur et à mesure de leur progression ce qui n’augurait rien de bon. Loup, terrifié par la dangerosité des évènements, s’était blottit contre moi en attendant que cela se passe. Je jetais un regard circonspect en contrebas de la vallée qui s’était vidé de tout les cervidés présent jusqu’à lors. Il n’y avait probablement plus rien à craindre pour le moment. Pourtant, je parvenais à deviner l’hostilité de ces animaux non loin de nous sans que je ne puisse les voir, certainement en train de s’éloigner progressivement de notre position.

Après un certain temps, le vieil homme se releva et sortit du renfoncement naturel, guettant le moindre mouvement suspect aux alentours. A le voir, il ne semblait plus y avoir de danger et je vins le rejoindre à mon tour, suivis de loup, pour faire état de la situation. La destination des Daims semblait être la même que la dernière fois, la horde avait laissée derrière elle un chemin tout tracé de terre retournée. Sous leurs sabots et leur piétinement frénétique, la nature s’était comme évaporée, laissant place à un grand vide disgracieux. Je comprenais maintenant pourquoi la forêt m’avait paru plus hostile que d’ordinaire. Non seulement, les arbres et plantes avaient souffert de leur passage précédant, mais ils devaient se douter qu’ils repasseraient par là plus tard. Et alors que nous nous apprêtions à les prendre en chasse pour en savoir plus sur leur agissement, un petit groupe de Daims Ancestral sorti des bois pour nous faire face, nous contemplant sans bouger d’un pouce. Ils devaient certainement attendre de voir ce que nous comptions faire dans les prochaines minutes avant de passer à l’acte, avant de nous charger de leur bois majestueux. Greil, sans quitter nos assaillants du regard, me demanda si j’étais à même de me défendre.

Lonann Alhazred –Je me débrouille suffisamment pour faire le tour du continent en un seul morceau … mais je n’ai rien rencontré de tel durant mes voyages.

Il est vrai que je n’avais pas pour habitude de chasser, ni même de tuer. Ma seule expérience en la matière était ce que j’avais pu vivre avec Cylicia dans la savane et je n’avais pas spécialement envi de revivre la même chose ici. Toujours sur mes gardes, je continuais de rester immobile tout comme le vieil homme, continuant la bataille de regard avec les animaux coléreux. Loup, bien plus intimidé par la situation, commençait à grogner entre ces dents, près à sauter sur le gibier à la moindre preuve d’hostilité à notre égard. Il ne fallut pas plus de quelques secondes après cet avertissement de Loup pour que le groupe de cervidé nous prennent pour cible et nous chargent tête baissé. Dans la précipitation, je sautais dans un premier temps sur mon compagnon pour le protéger des coups de sabots de ces derniers, encaissant durement la force de ces bêtes guidés par la rage. Il n’y avait rien de compréhensible. Jamais au grand jamais, je n’avais vu de Daim chasser l’Homme comme aujourd’hui. Je pu néanmoins toucher l’un d’entre eux d’un coup de pied suffisamment puissant pour le mettre en déroute quelques instants. Plongeant ma main dans ma besace, je farfouillais dans celle-ci à la recherche d’un petit flacon que j’avais gardé sous la main. Une fois celle-ci saisi, je la portais directement à la bouche et vidais goulument son contenu en quelques gorgées. Pour avoir déjà utilisé ce genre de remède, j’espérais que cela soit suffisant pour repousser ces animaux possédés.

La potion que je venais d’ingurgiter prendrait quelques temps avant d’être efficace, mais durant ce laps de temps, je pouvais très bien mettre à mal le précédant daim que j’avais presque assommé. Loup ne fut pas blessé par le premier assaut, mais je ne pouvais me permettre de le protéger tout du long de cet affrontement. C’était inévitable, nous allions devoir éliminer ces daims si nous voulions rentrer sain et sauf de cette excursion dans les plaines d’Àran. Le soldat Greil l’avait bien compris et s’était déjà préparé au pire, sa Hache dans une main et son imposant bouclier de l’autre. Il avait réussi à éliminer l’un d’eux, faisant ainsi couler son sang sur l’herbe verte de la plaine. Une bien triste soirée qui débutait et nous n’étions pas au bout de nos peines. Le temps que la meute, maintenant amoindri, ne se retourne pour charger de nouveau, je parvins fourrer Loup à la va vite dans ma besace et à l’accrocher dans mon dos.

Je ne pouvais être que révolté de voir ainsi la faune contrôlé par une force supérieur et ainsi les obliger à obéir aveuglément. Il en allait de mon devoir de les tirer de ce mauvais pas et de résoudre ce phénomène des plus étranges, et le plus tôt sera le mieux. La deuxième charge s’apprêtait déjà à arriver, les bois en avant, les daims foncèrent sur nous férocement. C’est à la force de mes bras que j’encaissais leur attaque, stoppant ainsi l’élan de deux d’entre eux. D’une main ferme, je saisissais les bois de chacun d’eux afin de les immobiliser quelques temps. Tout se faisait maintenant dans la précipitation et l’improvisation. Greil et moi échangions que de bref coup de regard afin de connaître la situation de l’autre par sécurité, mais vu la tournure que prenait les évènements, nous étions dans l’incapacité de riposter efficacement. Un combat d’endurance allait donc avoir lieu ici même.

Voyant que le vieux soldat était pris de court entre deux daims lui aussi, je profitais du fait d’avoir les bois des deux en face de moi pour les emmêler. La méthode était fourbe, mais seul le résultat importait. Je pus ainsi mettre Loup hors de danger dans les branchages des arbres derrière nous. Bien accroché la haut, j’espérais simplement que je puisse venir le récupérer après la bataille, si tout ce passait bien …

Dorénavant, je n’avais plus rien à craindre et pouvais donc y aller sans aucune retenue. D’un pas lent et assuré, je me rapprochais du troupeau qui s’était regroupé auprès de Greil. La transformation allait peut-être les effrayer suffisamment longtemps pour que le vieux soldat en profite et en élimine un sans avoir à combattre. Tout fois, je n’avais aucunement parlé de ce don au vieil homme et risquerait également d’être surpris, mais s’était un risque à prendre. Je ne pouvais plus me permettre de rester passif sans utiliser toute la force qui sommeil en moi. Je retirais, dans un premier temps, ma veste que je portais et la laissais pendre à ma ceinture puis, dans un second temps, je desserrais cette dernière pour ne pas la déchirer après la transformation. Petit à petit, ma crinière couleur neige s’étendit sur tout mon corps, recouvrant bientôt l’intégralité de mon corps. Une queue duveteuse apparue dans mon sillage, fouettant l’air nerveusement. Mes ongles s’étaient allongées dangereusement pour laisser place à de longues griffes acérées, de la même manière que mon museau s’était étiré pour laisser apparaître une mâchoire intimidante ornée de croc étonnement longues. Je surplombais maintenant le combat, me tenant droit sur mes pattes arrière et la scène s’était comme figé durant cet instant.

Lonann Alhazred – Désolé d’avoir pris autant de temps. Je suis fin prêt à me battre. Dis-je d’une voix rauque et lugubre à Greil.

Subjugué par mon entrée en scène peu commune et plutôt terrifiante, le combat s’était comme arrêté durant quelques instants. Le vieux soldat fut également surpris, bien évidement, par cette transformation inattendue, malheureusement cette stupeur n’avait pas été bénéfique comme je l’avais espéré. Alors que la surprise générale avait eu pour effet de baisser la garde de chacun, un daim déboula de l’arrière du troupeau, profitant de ce moment d’inattention pour charger le vieil Homme. Le répit avait été de courte de durée malheureusement, nous étions encerclés et en position de faiblesse. L’on pouvait sentir la rage de ces animaux à travers leurs charges désespérés. Ils n’avaient rien à perdre et n’avaient aucunement peur de la mort, pour une raison qui me paraissait comme bien sinistre. Il n’était décemment pas question de passer à côté de ces pauvres daims sans leur en venir en aide. Leur voix, triste mélodie qui émanait de leur âme.

Le combat reprit de plus belle, ne nous laissant pas le temps de récupérer. Greil, tenant sa blessure en main, n’était pas encore en garde et la horde de daim reprit du poil de la bête, chargeant tous ensemble de tout côté. La situation n’était absolument pas en notre faveur malgré les apparences. Ainsi, je me jetais aux côtés du Soldat blessé et fis barrage à un maximum de ces animaux enragé, protégeant férocement ces arrières. Avec mes grandes pattes, je saisis d’une poigne de fer les bois de l’un d’eux et l’immobiliser. Bien que l’énergie ne me manque pas, les multiples coups infligés depuis le début des évènements n’avaient fait que se multiplier, chaque mouvement devenait de plus en plus douloureux, certains de mes os avaient sans doute déjà cédés à la pression que nous infligeaient les daims ancestraux. Il ne restera bientôt plus de nous que de vulgaires tapis de chair et de sang si l’on ne faisait rien.

Lonann Alhazred – Ne t’occupe pas de moi et ne retiens pas tes coups, je vais les retenir le temps qu’il le faudra ! Dis-je avant de hurler au couché du soleil. Dans peu de temps, je devrais être en mesure de me montrer un peu plus utile que jusqu’à maintenant.